CAA de BORDEAUX, 4ème chambre, 11 octobre 2022, 20BX03037, Inédit au recueil Lebon

  • Impôt·
  • Cession·
  • Détention·
  • Plus-value·
  • Contribuable·
  • Manquement·
  • Administration·
  • Titre·
  • Tribunaux administratifs·
  • Moyenne entreprise

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 4e ch. (formation à 3), 11 oct. 2022, n° 20BX03037
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 20BX03037
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Pau, 9 juillet 2020, N° 1800764
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 13 octobre 2022
Identifiant Légifrance : CETATEXT000046420581

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D C a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge de la majoration pour manquement délibéré d’un montant de 45 866 euros dont a été assortie la cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l’année 2012.

Par un jugement n° 1800764 du 10 juillet 2020, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour administrative d’appel :

Par une requête, enregistrée le 8 septembre 2020, M. C, représenté par Me Lapeyre, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1800764 du tribunal administratif de Pau du 10 juillet 2020 ;

2°) de prononcer la décharge de la majoration pour manquement délibéré d’un montant de 45 866 euros dont a été assortie la cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l’année 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner aux entiers dépens.

Il soutient que :

— le service avait parfaitement connaissance du montant de la plus-value nette réalisée en 2012 ; la cession de titres a été réalisée en toute transparence, un acte de cession ayant été enregistré auprès des services des impôts alors que cette formalité n’est pas obligatoire ;

— sa situation d’associé au sein de deux structures distinctes, qui ont ensuite fusionné, explique une confusion de sa part quant à la durée de détention des titres ;

— le caractère mouvant, en fin d’année 2012, des dispositions relatives, d’une part, à l’exonération pour départ à la retraite, d’autre part, à l’application d’un abattement général pour durée de détention, explique si ce n’est la confusion, du moins l’erreur de sa part ;

— la commission des infractions fiscales a rendu un avis défavorable sur l’engagement de poursuites correctionnelles pour fraude fiscale à son encontre ;

— il remplissait l’ensemble des conditions lui ouvrant le bénéfice de l’exonération pour départ à la retraite, à l’exception du seul critère du délai de huit années de détention des titres ;

— au regard de ces circonstances, l’administration n’apporte pas la preuve du caractère délibéré du manquement ayant justifié la cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 mars 2021, le ministre de l’économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

— les conclusions relatives aux dépens sont sans objet et sont, dès lors, irrecevables ;

— les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

— la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 ;

— la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. A B,

— et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C, qui détenait 401 actions de la SAS Audit Pyrénées Pau, acquises le 2 janvier 2007, les a cédées par acte sous seing privé en date du 31 décembre 2012. Au titre des revenus de l’année 2012, l’intéressé a souscrit une déclaration mentionnant un gain net de 635 184 euros et une plus-value de cession nulle, compte tenu de l’abattement lié à la durée de détention des titres par les dirigeants des petites et moyennes entreprises à l’occasion de leur départ en retraite, prévu à l’article 150-0 D ter du code général des impôts dans sa version alors en vigueur, qu’il a estimé pouvoir appliquer. A la suite d’un contrôle sur pièces, l’administration a toutefois relevé le caractère intégralement imposable du gain réalisé au motif que la condition de durée de détention des titres n’était pas satisfaite. M. C, dont le revenu net imposable de l’année 2012 a, en conséquence, été rehaussé, a été assujetti à un complément d’impôt sur le revenu, lequel a été assorti de la majoration pour manquement délibéré de 40 % prévu au a. de l’article 1729 du code général des impôts, pour un montant de 45 866 euros. Il relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette majoration.

2. D’une part, aux termes de l’article 150-0 D bis du code général des impôts, dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 : « I.-1. Les gains nets mentionnés au 1 de l’article 150-0 D et déterminés dans les conditions du même article retirés des cessions à titre onéreux d’actions, de parts de sociétés ou de droits démembrés portant sur ces actions ou parts sont réduits d’un abattement d’un tiers pour chaque année de détention au-delà de la cinquième, lorsque les conditions prévues au II sont remplies. () ». L’article 150-0 D ter du même code, dans sa rédaction applicable à l’année d’imposition en litige, prévoit que les gains nets que les dirigeants de petites et moyennes entreprises retirent de la cession à titre onéreux des titres de leur société lors de leur départ en retraite bénéficient, sous réserve du respect d’un ensemble de conditions relatives au cédant et à la société dont les titres sont cédés, de l’abattement pour durée de détention prévu à l’article 150-0 D bis, dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

3. D’autre part, aux termes de l’article 1729 du code général des impôts : « Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt ainsi que la restitution d’une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l’Etat entraînent l’application d’une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré () ». Aux termes de l’article L. 195 A du livre des procédures fiscales : « En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d’affaires, des droits d’enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l’administration. ». Il résulte de ces dispositions que la majoration pour manquement délibéré a pour objet de sanctionner la méconnaissance délibérée par le contribuable de ses obligations déclaratives. Pour établir de tels manquements, l’administration doit apporter la preuve, d’une part, de l’insuffisance, de l’inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d’autre part, de l’intention du contribuable d’éluder l’impôt. Pour établir le caractère intentionnel du manquement du contribuable à son obligation déclarative, l’administration doit se placer au moment de la déclaration ou de la présentation de l’acte comportant l’indication des éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt.

4. Il résulte de l’instruction et notamment des termes de la proposition de rectification du 30 septembre 2015 que le rehaussement en matière d’impôt sur le revenu qui a été notifié à M. C, dont il ne conteste pas le bien-fondé, résulte de ce que le contribuable ne pouvait se prévaloir d’une exonération totale d’impôt sur le revenu, ni, au demeurant, d’une exonération partielle, du fait de l’application sur le montant de la plus-value de l’abattement pour durée de détention prévu par les dispositions de l’article 150-0 D ter du code général des impôts dès lors que les titres cédés avaient été détenus par l’intéressé durant moins de six années à la date de leur cession, le 31 décembre 2012.

5. Pour justifier l’application de la pénalité de 40 % prévue en cas de manquement délibéré, le service a notamment relevé que M. C, en sa qualité d’expert-comptable et de commissaire aux comptes, ne pouvait sérieusement ignorer qu’il n’entrait pas dans le champ légal d’application du régime de l’article 150-0 D ter du code général des impôts, mis en place à compter de l’année 2006. S’il soutient que l’administration avait parfaitement connaissance du montant du gain net réalisé à l’occasion de la cession des titres, dès lors que l’acte de cession a été enregistré auprès des services des impôts et qu’il a déposé une déclaration de cession de droits sociaux, cette circonstance est sans influence sur le bien-fondé de la majoration en litige, qui n’est pas subordonnée à l’existence d’une dissimulation ou de manœuvres destinées à égarer l’administration. Par ailleurs, ni la modification de la forme sociale de la SAS Audit Pyrénées Pau, qui, antérieurement au 26 décembre 2012, existait sous la forme d’une SARL, ni la fusion acquisition de la société Audit Pyrénées par la SARL Cabinet C, dont le requérant est également associé, intervenue en novembre 2006, ne constituent des circonstances de nature à justifier de ce que le manquement en cause relèverait d’une simple erreur ou omission. A cet égard, il résulte de l’instruction et notamment des termes de l’acte de cession et de la déclaration de cession de droits sociaux transmise à l’administration, qui mentionnent les dates d’acquisition et de cession des 401 actions détenues par M. C, qu’alors même que ce dernier avait ainsi parfaitement connaissance de la durée de détention des titres, il a rempli le formulaire n° 2074-DIR de déclaration des plus-values de cession de titres en mentionnant ces actions dans la rubrique « durée de détention de plus de 8 ans » correspondant à un « pourcentage d’abattement à appliquer » de 100 %. De plus, l’appelant n’est pas fondé à se prévaloir de la complexité des textes fiscaux applicables à la date de sa déclaration en matière de plus-values de cession de valeur mobilières des dirigeants des petites et moyennes entreprises partant à la retraite, ce régime d’imposition n’ayant pas substantiellement évolué depuis le 1er janvier 2006 et ayant simplement été prorogé par l’effet de l’article 10 la loi du 29 décembre 2012 de finances pour 2013. Enfin, la circonstance que la commission des infractions fiscales, saisie par l’administration en application de l’article L. 228 du livre des procédures fiscales, ait rendu un avis défavorable sur l’engagement de poursuites correctionnelles pour fraude fiscale à l’encontre de M. C n’implique pas que les manquements qui lui ont été reprochés ne pouvaient présenter un caractère délibéré. Dans ces conditions, quand bien même le requérant remplissait les autres conditions lui ouvrant droit à l’abattement pour durée de détention prévue à l’article 150-0 D ter, en tenant compte, en outre, de l’importance de la minoration de la plus-value déclarée, correspondant à plus du triple des revenus salariés déclarés en 2012 par le foyer fiscal de M. C, l’intention délibérée du contribuable d’éluder l’impôt doit être regardée, contrairement à ce qui est soutenu, comme établie par l’administration fiscale.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. C n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et, en tout état de cause, celles tendant à ce que les entiers dépens soient mis à la charge de l’Etat sont rejetées par voie de conséquence.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D C et au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique

Copie en sera adressée à la direction régionale du contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l’audience du 20 septembre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 octobre 2022.

Le rapporteur,

Michaël B La présidente,

Evelyne Balzamo

Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

7

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
CAA de BORDEAUX, 4ème chambre, 11 octobre 2022, 20BX03037, Inédit au recueil Lebon