CAA de BORDEAUX, 17 novembre 2022, 22BX02417, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 17 nov. 2022, n° 22BX02417
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 22BX02417
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Poitiers, 22 août 2022
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 28 août 2023
Identifiant Légifrance : CETATEXT000046577630

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A B a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Poitiers de condamner le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres à lui verser une provision de 35 726,08 euros au titre des sommes qu’elle aurait dû percevoir à la suite d’une rechute d’accident de service.

Par ordonnance n° 2102171 du 23 août 2022, la juge des référés du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 septembre 2022, et trois mémoires en production de pièces enregistrés les 9, 22 et 27 septembre 2022, Mme B, représentée par Me Renner, demande au juge d’appel des référés :

1°) d’annuler cette ordonnance du 23 août 2022 du juge des référés du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) de condamner le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres à lui verser une provision de 35 726,08 euros, dans un délai de 8 jours à compter de la notification de la décision, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres où elle était aide-soignante avait admis par décision du 16 juin 2004 le caractère professionnel de la maladie qu’elle a déclarée en novembre 2003 ; elle a été licenciée pour inaptitude le 6 décembre 2006 ;

— en décembre 2013, elle a été placée en arrêt maladie pour cause de rechute de maladie professionnelle, et la commission de réforme du département des Deux-Sèvres a donné un avis favorable à une prise en charge à ce titre ;

— la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) a refusé de la prendre en charge et le centre hospitalier saisi de demandes d’indemnités journalières n’y a pas fait droit ;

— à la suite d’une ordonnance du juge des référés du 7 mai 2015, le centre hospitalier lui a versé des indemnités journalières calculées sur la base d’un congé maladie ordinaire, alors qu’elle a droit à ces indemnités calculées sur la base d’une maladie professionnelle ; une nouvelle condamnation prononcée en référé est intervenue le 21 novembre 2017 pour la période du 23 décembre 2013 au 30 novembre 2016 ;

— rencontrant des difficultés pour obtenir le paiement des sommes dues à compter du 23 décembre 2018, elle a saisi une troisième fois le juge des référés, qui a rejeté sa demande pour incompétence de la juridiction administrative ;

— elle revendique l’application de l’article 41 de la loi du 9 janvier 1986 sur les congés d’un agent public, et c’est donc bien la juridiction administrative qui est compétente pour statuer ;

— aucune discrimination ne peut être faite à son encontre au seul motif qu’elle n’était pas titularisée à la date de déclaration de la maladie professionnelle ;

— elle aurait dû percevoir à compter du 23 décembre 2018 une indemnité correspondant au minimum à son salaire en 2005 qui était de 1 116,44 euros mensuels, soit 13 397,28 euros pour chacune des années 2019 et 2020 et 8 931,82 pour 2021, à parfaire au jour de la décision à intervenir ;

— elle a droit aux intérêts à compter de la demande préalable du 25 mars 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de la sécurité sociale ;

— la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 ;

— le décret du 12 mai 1997 fixant les dispositions communes applicables aux agents stagiaires de la fonction publique hospitalière ;

— le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B a exercé du 26 novembre 2001 au 30 septembre 2002 des fonctions d’aide-soignante contractuelle au centre hospitalier Nord Deux-Sèvres, puis y a été admise en qualité de stagiaire dans le grade d’aide-soignant à compter du 1er octobre 2002. Elle a été victime de lombo-sciatalgies et a adressé une déclaration de maladie professionnelle. Par décision du 16 juin 2004, le centre hospitalier a admis la prise en charge des arrêts de travail à compter du 24 novembre 2003 au titre de la maladie professionnelle. Déclarée inapte définitivement à ses fonctions, elle a été licenciée le 6 décembre 2006.

2. En 2013, alors qu’elle était sans emploi et bénéficiaire d’allocations de retour à l’emploi, Mme B a déclaré une rechute de sa maladie professionnelle sur la base d’un certificat de son médecin généraliste du 23 décembre 2013 évoquant une discopathie dégénérative avec hyperalgie, et prescrivant un arrêt de travail jusqu’au 13 janvier 2014, ultérieurement prolongé. La commission de réforme a donné le 15 avril 2014 un avis favorable à la prise en charge de ce premier arrêt de travail au titre de la rechute d’une maladie professionnelle. Par lettre du 11 juin 2014, Mme B a demandé au centre hospitalier Nord Deux Sèvres de lui verser « les indemnités d’arrêt de travail » qu’elle estimait lui être dues. Elle a obtenu à deux reprises la condamnation du centre hospitalier à lui verser des provisions, par des décisions du juge des référés du tribunal administratif de Poitiers des 7 mai 2015 et 21 novembre 2017. Elle relève appel de l’ordonnance du 23 août 2022 par laquelle un autre juge des référés du même tribunal a rejeté sa troisième demande de provision, portant sur la période postérieure au 23 décembre 2018, comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Sur la compétence juridictionnelle :

3. Pour estimer que la demande de Mme B relevait du contentieux de la sécurité sociale organisé par l’article L.142-1 du code de la sécurité sociale, la première juge a relevé que Mme B n’avait plus la qualité d’agent public, que les fiches de paie produites par la défense portaient la mention « Prestations Espèce » dénomination générique utilisée par le code de sécurité sociale pour désigner notamment les indemnités journalières visées à l’article L. 321-1 du code de la sécurité sociale versées à l’assuré qui se trouve dans l’incapacité physique de poursuivre son travail, et en a conclu que « les indemnités journalières sollicitées ne correspondent pas à un traitement lié à l’un des congés maladies visés à l’article 41 de la loi du 9 janvier 1986. Dans ces conditions, les conclusions de l’intéressée tendant à percevoir des indemnités journalières sont fondées sur les droits qu’elle tient de sa qualité d’assurée sociale. »

4. Toutefois, il n’appartenait pas au juge des référés de requalifier les conclusions présentées contre le centre hospitalier Nord Deux Sèvres, personne publique, qui se fondaient expressément sur les dispositions de l’article 41 de la loi du 9 janvier 1986 aux termes desquelles : " Le fonctionnaire en activité a droit : () 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l’intéressé dans l’impossibilité d’exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l’intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l’indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l’une des causes exceptionnelles prévues à l’article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d’un accident survenu dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l’intégralité de son traitement jusqu’à ce qu’il soit en état de reprendre son service ou jusqu’à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l’accident. / Dans le cas visé à l’alinéa précédent, l’imputation au service de la maladie ou de l’accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales () ". Quel que soit le bien-fondé de ces conclusions, la juridiction administrative était compétente pour se prononcer, et Mme B est fondée à soutenir que l’ordonnance attaquée est par suite irrégulière et doit être annulée. Il y a lieu pour le juge d’appel des référés d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de Mme B.

Sur le caractère non sérieusement contestable des créances alléguées :

5. Aux termes de l’article R. 541-1 du code de justice administrative : « Le juge des référés peut, même en l’absence d’une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l’a saisi lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable. Il peut, même d’office, subordonner le versement de la provision à la constitution d’une garantie ». Il résulte de ces dispositions que pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s’assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l’existence avec un degré suffisant de certitude.

6. Aux termes de l’article 31 du décret du 12 mai 1997 fixant les dispositions communes applicables aux agents stagiaires de la fonction publique hospitalière : « Sauf lorsqu’il se trouve placé dans l’une des positions de congé prévues aux articles 26 à 29 du présent décret, l’agent stagiaire a droit au congé de maladie, au congé de longue maladie et au congé de longue durée mentionnés aux 2°, 3° et 4° de l’article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, dans les conditions fixées par les dispositions législatives et réglementaires applicables aux agents titulaires de la fonction publique hospitalière, sous réserve des dispositions suivantes : 3° Dans le cas mentionné au deuxième alinéa du 2° de l’article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, la durée du congé ouvrant droit au bénéfice de cette disposition est limitée à cinq ans ».

7. Le centre hospitalier a soutenu devant le tribunal qu’il a versé des indemnités journalières à Mme B équivalentes au maintien de son traitement pendant cinq ans, jusqu’au 23 décembre 2018, et qu’il a donc cessé à bon droit ses versements en application de ces dispositions. En se bornant à soutenir que les agents stagiaires ne sauraient souffrir de discrimination par rapport aux agents titulaires, l’intéressée, qui peut soumettre cette question de droit au juge du fond, ne caractérise pas une créance non sérieusement contestable au sens des dispositions précitées de l’article R. 541-1 du code de justice administrative.

8. Il résulte de ce qui précède que la demande de provision de Mme B doit être rejetée, ensemble et en tout état de cause ses conclusions aux fins d’injonction de payer sous astreinte et celles présentées sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande présentée devant le tribunal par le centre hospitalier au titre de ces dernières dispositions.

ORDONNE :

Article 1er : L’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Poitiers en date du 23 août 2022 est annulée.

Article 2 : La demande de provision de Mme B et le surplus de ses conclusions d’appel sont rejetés.

Article 3 : La demande présentée devant le tribunal par le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres au titre des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative est rejetée.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A B et au centre hospitalier Nord Deux-Sèvres.

Fait à Bordeaux, le 17 novembre 2022.

La juge d’appel des référés,

Catherine Girault

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente ordonnance.

No 22BX02417

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