CAA de DOUAI, 4e chambre - formation à 3, 11 décembre 2018, 16DA01705, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Douai, 4e ch. - formation à 3, 11 déc. 2018, n° 16DA01705
Juridiction : Cour administrative d'appel de Douai
Numéro : 16DA01705
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Lille, 25 mai 2016, N° 1305758, 1400430 et 1502729
Identifiant Légifrance : CETATEXT000037841575

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B… C… ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer, d’une part, la réduction de la cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l’année 2010 à hauteur de la somme de 5 987 euros et la décharge des pénalités mises à leur charge au titre des années 2009 et 2010, d’autre part, la décharge de la cotisation supplémentaire de contributions sociales à laquelle ils ont été assujettis au titre de l’année 2010, enfin, la réduction des cotisations primitives d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 à 2014, de même qu’au titre des années restant à courir.

Par un jugement nos 1305758, 1400430 et 1502729 du 26 mai 2016, le tribunal administratif de Lille, après avoir constaté, par un article 1er, qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de ces demandes à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d’instance à hauteur de la somme de 238 euros en droits et pénalités, a prononcé, par un article 2, la réduction des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi que des pénalités correspondantes, auxquelles M. et Mme C… ont été assujettis au titre de l’année 2010 et, par un article 3, la réduction des cotisations primitives d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 à 2013, a mis, par un article 4, la somme de 1 500 euros à la charge de l’Etat au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté, par un article 5, le surplus des conclusions de ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 26 septembre 2016, le 27 février 2017 et le 1er février 2018, ce dernier mémoire n’ayant pas été communiqué, le ministre de l’action et des comptes publics demande à la cour :

1°) d’annuler les articles 2 et 3 de ce jugement, accordant à M. et Mme C… la réduction des impositions, contributions sociales et pénalités en litige ;

2°) de remettre à la charge de M. et Mme C… les impositions, contributions sociales et pénalités dont ils ont été déchargés par ce jugement ;

3°) d’annuler l’article 4 du même jugement, mettant la somme de 1 500 euros à la charge de l’Etat au titre de l’article L. 761-1 et de prescrire le remboursement de la somme versée en exécution de ce jugement ;

4°) de rejeter les conclusions correspondantes de la demande présentée par M. et Mme C… devant le tribunal administratif de Lille.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

 – la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

 – et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C…, qui sont domiciliés dans le département du Nord, ont acquis, le 21 avril 2009, un bien immobilier en état futur d’achèvement situé à Pontivy, dans le département du Morbihan. Souhaitant bénéficier d’un dispositif d’incitation fiscale à l’investissement immobilier, ils ont manifesté cette intention dans la déclaration de revenus fonciers qu’ils ont souscrite au titre de l’année 2009 et y ont porté, en conséquence, des sommes en déduction. Au titre de l’année 2010, qui est celle de la première mise en location du bien après achèvement des travaux, ils ont porté sur leur déclaration spéciale de revenus fonciers, les revenus de ce bien, ainsi que plusieurs déductions correspondant au bénéfice du dispositif d’incitation fiscale souscrit. A la suite d’un contrôle sur pièces, l’administration a remis en cause, par une proposition de rectification datée du 29 septembre 2012 et relative à l’imposition des revenus des années 2009 et 2010, la déduction des amortissements relatifs au dispositif « Borloo neuf ». Cette remise en cause était motivée par le fait que la locataire du logement ne satisfaisait pas aux conditions de ressources. M. et Mme C… n’ont pas contesté, dans son principe, ce chef de rectification, mais ont alors sollicité, en lieu et place du dispositif « Borloo neuf », l’application du dispositif dit « Robien recentré ». Cette demande a été écartée par l’administration dans la réponse aux observations du contribuable datée du 23 octobre 2012, au motif que la locataire ne remplissait pas la condition imposant que le logement loué constitue sa résidence principale. M. et Mme C… ont présenté une réclamation contre ces impositions et ont, en outre, demandé une réduction des cotisations primitives d’impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 à 2013. Leurs réclamations ayant été rejetées, ils ont porté les litiges correspondants devant le tribunal administratif de Lille. Par un jugement du 26 mai 2016, le tribunal, après avoir constaté, en un article 1er, qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de ces demandes à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d’instance à hauteur de la somme de 238 euros en droits et pénalités, a prononcé, par un article 2, la réduction des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi que des pénalités correspondantes, auxquelles M. et Mme C… ont été assujettis au titre de l’année 2010 et, par un article 3, la réduction des cotisations primitives d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 à 2013. Enfin, par un article 4, le tribunal administratif a mis la somme de 1 500 euros à la charge de l’Etat au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et, par un article 5, a rejeté le surplus des conclusions de ces demandes. Le ministre de l’action et des comptes publics relève appel de ce jugement et demande l’annulation de ses articles 2, 3 et 4, la remise à la charge de M. et Mme C… des impositions en litige et le reversement par les intéressés de la somme de 1 500 euros mise à la charge de l’Etat au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

2. Aux termes de l’article 31 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : « I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : / (…) / h) Pour les logements situés en France, acquis neufs ou en l’état futur d’achèvement entre le 3 avril 2003 et le 31 décembre 2009, et à la demande du contribuable, une déduction au titre de l’amortissement égale à 6 % du prix d’acquisition du logement pour les sept premières années et à 4 % de ce prix pour les deux années suivantes. La période d’amortissement a pour point de départ le premier jour du mois de l’achèvement de l’immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure. / (…) / Le bénéfice de la déduction est subordonné à une option qui doit être exercée lors du dépôt de la déclaration des revenus de l’année d’achèvement de l’immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure. Cette option est irrévocable pour le logement considéré et comporte l’engagement du propriétaire de louer le logement nu pendant au moins neuf ans à usage d’habitation principale à une personne autre qu’un membre de son foyer fiscal. Cette location doit prendre effet dans les douze mois qui suivent la date d’achèvement de l’immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure. (…) ».

3. Il appartient au juge de l’impôt de constater, au vu des éléments versés à l’instruction, qu’un contribuable remplit ou non les conditions lui permettant de se prévaloir d’un avantage fiscal tel celui institué par ces dispositions de l’article 31 du code général des impôts. La circonstance que, pour l’application de ces dispositions, un contribuable ait conclu avec un locataire un bail écrit par lequel il lui donne en location un logement à usage de résidence principale, et ait souscrit un engagement aux mêmes fins vis-à-vis de l’administration fiscale, n’est pas de nature à faire obstacle à ce que celle-ci établisse que cette location a eu, dans les faits, un autre objet, exclu des prévisions de ces dispositions.

4. Il résulte de l’instruction que, par un acte sous seing privé conclu le 21 juin 2010, M. et Mme C… ont donné à bail à Mme A…, pour une durée de trois ans, le logement leur appartenant à Pontivy. Il résulte des termes de ce bail que cette location a été consentie à usage exclusif d’habitation principale. Toutefois, comme il a été dit au point précédent ni cette mention expresse du bail ni les termes de l’option souscrite par M. et Mme C… auprès de l’administration fiscale ne font obstacle à ce que cette dernière apporte des éléments de nature à établir que la condition de location à titre exclusif de logement principal n’a, dans les faits, pas été respectée.

5. Pour prononcer une réduction des impositions et contributions sociales en litige, le tribunal administratif de Lille a estimé que l’administration, qui alléguait que la locataire de M. et Mme C… n’avait pas maintenu sa résidence principale dans leur logement de Pontivy, n’avait pu valablement invoquer l’obligation de secret professionnel posée par l’article L. 103 du livre des procédures fiscales pour refuser de verser à l’instruction les éléments d’information tirés des déclarations de revenus souscrites par la locataire de M. et Mme C… au titre des années 2009 et 2010 et ceux afférents à l’établissement de la taxe d’habitation mise à la charge de l’intéressée au titre des années 2010 et 2011. En effet, selon le tribunal, ces documents, auxquels l’administration faisait expressément référence dans ses écritures, ne relevaient pas de ce secret. Les premiers juges ont ensuite constaté que, dans ces conditions, l’administration n’apportait aucun élément au soutien de son assertion selon laquelle la condition d’affectation du logement en tant que résidence principale du locataire n’était pas satisfaite. Ils en ont conclu que l’absence de respect de cette condition, à laquelle le h) du 1° du I de l’article 31 du code général des impôts subordonne le bénéfice de l’exonération fiscale du dispositif « Robien recentré », ne résultait pas de l’instruction.

En ce qui concerne l’année 2010 :

6. Il résulte de l’instruction qu’à la suite de la conclusion du bail d’habitation par M. et Mme C…, le 21 juin 2010, avec Mme A…, cette dernière est entrée dans les lieux le 17 juillet suivant. Le seul fait, avancé par le ministre, que Mme A… aurait, au cours de l’année 2011, décidé de fixer son domicile fiscal en région Ile-de-France ne peut suffire à remettre en cause la stipulation du bail selon laquelle cette location était consentie à usage exclusif d’habitation principale, ni à établir que Mme A… n’avait pas effectivement conservé le lieu de son domicile fiscal à l’adresse du logement appartenant à M. et Mme C… à Pontivy au 31 décembre 2010. Il en résulte que c’est à tort que l’administration a remis en cause le bénéfice, au titre de l’année 2010, de l’avantage fiscal sollicité par les intéressés. Dès lors, c’est à bon droit, au contraire, que le tribunal administratif de Lille a retenu qu’il ne résultait pas de l’instruction que le logement de Pontivy n’était pas loué à titre de résidence principale pour l’application du h) du 1° du I de l’article 31 du code général des impôts.

En ce qui concerne les années 2011 à 2013 :

7. Le ministre produit, pour la première fois en appel, l’avis d’imposition sur le revenu établi au nom de Mme A…, la locataire de M. et Mme C…, au titre l’année 2011, et celui établi au nom d’une autre contribuable au titre de la même année, les copies fournies occultant les informations relevant de la vie privée de ces personnes et ne présentant pas d’utilité pour la présente instance. Il résulte de l’examen du premier de ces documents qu’à compter du 1er janvier 2011, Mme A… a été imposée à une autre adresse que celle du logement qui lui était donné en location par M. et Mme C…, plus précisément à une adresse située en Ile-de-France. L’autre document révèle, quant à lui, qu’une autre contribuable a été imposée, à compter de cette même date, à l’adresse du logement dont M. et Mme C… sont propriétaires à Pontivy.

8. L’avis d’imposition établi au nom de Mme A… au titre de l’année 2011, mentionné au point précédent, qui a été émis sur la base des éléments déclarés par la contribuable et dont les mentions ne sont pas contestées, constitue un commencement de preuve de ce que l’intéressée n’a pas maintenu sa résidence principale dans la villa qui lui était donnée en location par M. et Mme C…, mais l’a fixée, dès le 1er janvier 2011, à Emerainville, dans le département de la Seine-et-Marne. D’ailleurs, le ministre avance, sans être contredit, que Mme A… exerçait, en 2011, son activité professionnelle en région parisienne, où étaient également situées les agences bancaires détentrices de ses comptes bancaires. L’autre avis d’imposition produit devant la cour par le ministre et également mentionné au point précédent révèle qu’un autre contribuable avait fixé sa résidence principale et, par suite, son domicile fiscal dans le logement appartenant à M. et Mme C… à Pontivy, à compter du 1er janvier 2011, peu important que M. et Mme C… aient ou non consenti à cette situation de sous-location prohibée par le bail et qu’ils en aient eu connaissance ou non. En outre, il résulte de l’instruction et notamment des éléments produits par M. et Mme C… que ces derniers ont conclu avec un nouveau locataire un bail à usage exclusif d’habitation qui a pris effet le 1er août 2011, c’est-à-dire aussitôt après la résilitation, au 1er juillet 2011, à la demande de Mme A…, du précédent bail conclu avec celle-ci. Il ne résulte pas de l’instruction et n’est d’ailleurs pas allégué que tant ce nouveau locataire que ceux qui lui ont succédé après son départ le 8 mars 2013 n’auraient pas fixé dans ce logement leur résidence principale.

9. Dans ces conditions, il résulte suffisamment de l’instruction que la condition d’affectation du logement, au respect de laquelle les dispositions précitées de l’article 31 du code général des impôts subordonnent le bénéfice de l’avantage fiscal, était satisfaite en l’espèce au titre de l’année 2011 et à celui des années 2012 et 2013. Il suit de là que l’administration n’a pu davantage refuser à bon droit à M. et Mme C… le bénéfice, au titre des années 2011 à 2013, de l’avantage fiscal prévu par ces dispositions.

10. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l’action et des comptes publics n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement du 26 mai 2016, le tribunal administratif de Lille a prononcé la réduction des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi que des pénalités correspondantes, auxquelles M. et Mme C… ont été assujettis au titre de l’année 2010, à la suite de la remise en cause du bénéfice du dispositif « Robien recentré », et, par voie de conséquence, la réduction des cotisations primitives d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 à 2013. Le ministre n’est pas davantage fondé à soutenir que c’est à tort que, par ce même jugement, le tribunal administratif de Lille, après avoir estimé, dans ces conditions, que l’Etat devait être regardé comme partie perdante au sens et pour l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, a mis à sa charge la somme de 1 500 euros sur le fondement de ces dispositions. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce de mettre à la charge de l’Etat, sur le même fondement, une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés, en cause d’appel, par M. et Mme C… et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du ministre de l’action et des comptes publics est rejetée.

Article 2 : L’Etat versera à M. et Mme C… la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l’action et des comptes publics et à M. et Mme B… C….

Copie en sera transmise à l’administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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N°16DA01705

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