Cour administrative d'appel de Lyon, 20 juin 2013, n° 12LY02273

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Lyon, 20 juin 2013, n° 12LY02273
Juridiction : Cour administrative d'appel de Lyon
Numéro : 12LY02273
Décision précédente : Tribunal administratif de Grenoble, 9 juillet 2012, N° 0804943

Texte intégral

el

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL

DE LYON

N° 12LY02273


M. Z X RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

____________

M. du Besset

Président AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

____________

Mme B-C

Rapporteur La Cour administrative d’appel de Lyon

____________

(4e chambre)

Mme Vinet

Rapporteur public

____________

Audience du 30 mai 2013

Lecture du 20 juin 2013

____________

27-03-01

34-02-01-01-01-03

C

Vu la requête, enregistrée le 21 août 2012, présentée pour M. Z X, domicilié XXX ;

M. X demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0804943 du 10 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 25 juillet 2008 du préfet de la Savoie, relatif aux captages de la Sassière, du Bois de l’Ours, des Marais, de la Sache et des Chardons, portant déclaration d’utilité publique des travaux de dérivation des eaux, instauration des périmètres de protection, autorisation de l’utilisation en vue de la consommation humaine et autorisation du prélèvement d’eau au bénéfice de la commune de Tignes ;

2°) d’annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté, en totalité, ou à tout le moins en ce qui concerne le captage de la Sassière ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 2 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

— l’arrêté a été émis sur le fondement d’un avis d’hydrogéologue trop ancien ;

— il n’a pas été précédé d’une consultation ou d’une autorisation du directeur du parc national de la Vanoise, ou du comité consultatif ;

— il a été émis au regard d’un dossier incomplet et le bilan de l’opération est négatif en ce qui concerne le captage de la Sassière, en raison de l’absence d’évaluation des conséquences sur son activité agricole ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 mars 2013, par lequel le ministre de l’intérieur conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

— la date à laquelle a été émis l’avis de l’hydrogéologue est sans incidence sur la régularité de la procédure ;

— la déclaration d’utilité publique n’avait pas à être précédée d’une consultation des autorités du parc national ;

— le bilan de l’opération est positif, eu égard à la nécessité de la protection et au fait que la commune peut envisager la mise en œuvre de mesures compensatoires équilibrées pour protéger l’activité agricole de M. X ;

Vu l’ordonnance en date du 15 avril 2013 prononçant la clôture de l’instruction au 3 mai 2013 ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 mai 2013, présenté pour la commune de Tignes, représentée par son maire en exercice ; la commune de Tignes conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de M. X une somme de 5 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens ;

La commune soutient que :

— l’avis de l’hydrogéologue est régulier ;

— seuls les travaux découlant de l’institution du captage seront soumis à l’avis des autorités du parc national de la Vanoise, ou devront être précédés d’une évaluation d’incidence, et non la déclaration d’utilité publique ; le défaut de mention dans les visas est sans incidence sur la légalité de l’acte ;

— le bilan de l’opération est favorable, l’administration étant en situation de compétence liée pour régulariser le captage existant ;

— le requérant ne peut utilement se prévaloir de la circulaire du 24 juillet 1990, qui est soit illégale, soit purement interprétative ; aucune disposition du code de la santé publique ou de l’environnement ne prévoit que le dossier comporte une évaluation économique ; le dossier comportait une étude, qui ne comportait pas l’estimation du coût final des mesures compensatoires car il ne pouvait être déterminé à l’époque ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 mai 2013, présenté pour M. X, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Il fait valoir en outre que, postérieurement à l’acte attaqué, le maire de Tignes a reconnu que les atteintes portées à l’exploitation agricole étaient excessives et qu’il a été avéré que l’impact du projet sur l’activité agricole avait été mal évalué ;

Vu les lettres du 14 mai 2013 adressées aux parties en application de l’article R. 611-7 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ;

Vu le code de santé publique ;

Vu le code de l’environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 30 mai 2013 :

— le rapport de Mme B-C, premier conseiller,

— les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public,

— les observations de Me Bern, représentant M. X ;

1. Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de M. X tendant à l’annulation de l’arrêté du 25 juillet 2008 du préfet de la Savoie portant, pour plusieurs captages, déclaration d’utilité publique des travaux de dérivation des eaux, instauration des périmètres de protection, autorisation de l’utilisation en vue de la consommation humaine et autorisation du prélèvement d’eau au bénéfice de la commune de Tignes ;

Sur la recevabilité de la demande en tant qu’elle concerne les captages du Bois de l’Ours, des Marais, de la Sache et des Chardons :

2. Considérant que M. X justifie d’une qualité pour contester l’acte attaqué en tant qu’il concerne le captage de la Sassière, dès lors qu’il est propriétaire de terrains inclus dans certains périmètres de protection et y exerce une activité agricole, ce terrain et les lieux avoisinants servant d’alpage à une cinquantaine de vaches dont le lait est utilisé pour la production de fromage ; qu’en revanche, il ne se prévaut d’aucun intérêt pour contester les mesures concernant les autres captages ; que, par suite, il n’est recevable à demander l’annulation de l’arrêté préfectoral du 25 juillet 2008 qu’en tant qu’il concerne le captage de la Sassière ;

Sur la légalité de l’acte en litige :

Sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

3. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article R. 11-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique : « L’expropriant adresse au préfet pour être soumis à l’enquête un dossier qui comprend obligatoirement : I. Lorsque la déclaration d’utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d’ouvrages : (…) 5° L’appréciation sommaire des dépenses » ; que les dépenses nécessaires à l’indemnisation des propriétaires et exploitants, dont les terrains sont inclus dans les périmètres de protection institués par un arrêté déclarant d’utilité publique un captage, font partie du coût de l’opération et ont, dès lors, vocation à être intégrées dans l’appréciation sommaire des dépenses ;

4. Considérant que l’évaluation économique figurant au dossier d’enquête mentionne, pour la source de la Sassière, qui constitue une opération distincte de celles relatives aux autres sources, un montant de travaux de 75 000 euros, auquel s’ajoute une quote-part des 66 000 euros des frais communs à l’ensemble des opérations ; qu’en revanche, ce document ne mentionne aucune indemnisation pour les propriétaires privés, et en particulier pour M. X, alors que près de 35 hectares relevant de propriétés privées sont situés dans le périmètre de protection rapprochée et que les servitudes instituées dans ce secteur viennent apporter d’importantes restrictions à l’activité agricole qu’il y exerce ; que l’étude commandée par la commune de Tignes, réalisée en décembre 2008, indique que les mesures édictées, et notamment l’interdiction d’implanter la machine à traire dans le périmètre de protection rapprochée, rendent impossible le maintien d’une activité pastorale laitière à la Sassière ; qu’il n’est pas démontré ni même allégué, que les sommes nécessaires à l’indemnisation de M. X, telles qu’elles auraient dû raisonnablement pouvoir être estimées à la date de l’enquête publique, seraient tellement minimes que leur omission serait sans incidence sur l’information du public ; que, par suite, compte tenu de l’omission de ce poste de dépenses, M. X est fondé à soutenir que l’arrêté a été édicté au regard d’un dossier incomplet ; que la circonstance qu’il s’agit de protéger un captage existant, ne suffisait pas à dispenser l’expropriant du respect de cette formalité ; que ce vice, de nature à influer à la fois sur l’information du public et sur le choix opéré par l’autorité compétente, notamment, quant à la définition des périmètres de protection, entache d’illégalité l’arrêté du 25 juillet 2008, en tant qu’il porte déclaration d’utilité publique du captage de la Sassière et des travaux de dérivation et définition de périmètres de protection ; que cette illégalité emporte illégalité de l’autorisation de l’utilisation de l’eau en vue de la consommation humaine, qui n’en est pas détachable ;

5. Considérant, en second lieu, qu’il ressort des dispositions de l’article R. 214-10 du code de l’environnement, dans leur rédaction applicable à la date de l’acte en litige, que le dossier de demande d’autorisation au titre de la loi sur l’eau est communiqué pour avis au directeur de l’établissement public du parc national, si l’opération pour laquelle l’autorisation est sollicitée est située dans le périmètre d’un parc national ; que, s’il est constant que le captage de la Sassière est situé dans le périmètre du parc national de la Vanoise, il ne ressort pas des pièces du dossier, et n’est d’ailleurs par allégué, que le directeur de l’établissement public de ce parc national aurait été consulté pour avis avant l’édiction de l’autorisation donnée au titre de la loi sur l’eau ; que, par suite, M. X est fondé à soutenir que l’arrêté, en tant qu’il accorde une telle autorisation, a été délivré à l’issue d’une procédure irrégulière ;

6. Considérant qu’il résulte de ce qui précède M. X est fondé à soutenir que c’est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande, en tant qu’elle portait sur la source de la Sassière ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

7. Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie perdante du paiement par l’autre partie des frais exposés à l’occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions présentées à ce titre par la commune de Tignes doivent être rejetées ;

8. Considérant, en second lieu, qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par le requérant et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0804943 en date du 10 juillet 2012 du Tribunal administratif de Grenoble et l’arrêté du préfet de la Savoie du 25 juillet 2008 portant déclaration d’utilité publique des travaux de dérivation des eaux, instauration des périmètres de protection, autorisation de l’utilisation en vue de la consommation humaine et autorisation du prélèvement d’eau au bénéfice de la commune de Tignes, sont annulés, en tant qu’ils concernent le captage de la Sassière.

Article 2 : L’Etat versera à M. X la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du même code.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Z X, au ministre de l’intérieur et à la commune de Tignes.

Délibéré après l’audience du 30 mai 2013, où siégeaient :

— M. du Besset, président de chambre,

— M. Y et Mme B-C, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 20 juin 2013.

Le rapporteur, Le président,

A. B-C E. du Besset

La greffière,

M. T. Pillet

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

Pour expédition,

La greffière,

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