Cour administrative d'appel de Marseille, 28 juin 2012, n° 12MA01325

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 28 juin 2012, n° 12MA01325
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 12MA01325
Décision précédente : Tribunal administratif de Nîmes, 18 mars 2012, N° 1200445

Sur les parties

Texte intégral

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE MARSEILLE

N°12MA01325

________

COMMUNE DE SOMMIÈRES

________

Ordonnance du 28 juin 2012

________

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le juge des référés,

Vu la requête, enregistrée le 4 avril 2012 sous le n° 12MA01325, présentée pour la COMMUNE DE SOMMIÈRES (30252), représentée par son maire en exercice, par la SCP Charrel et associés ; la COMMUNE DE SOMMIÈRES demande au juge des référés de la cour :

1°/ d’annuler l’ordonnance n° 1200445 en date du 19 mars 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a suspendu, à la demande du préfet du Gard, l’exécution de l’arrêté du 11 août 2011 accordant à M. A un permis de construire pour la réalisation d’une maison d’habitation et la rénovation d’un mazet ;

2°/ de rejeter la demande de suspension du préfet du Gard ;

3°/ de mettre à la charge de l’Etat une somme de 4 500 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

La COMMUNE DE SOMMIÈRES soutient que l’ordonnance attaquée est entachée d’irrégularité, dès lors que le juge des référés, après avoir décidé de différer la clôture de l’instruction postérieurement à l’audience, ne pouvait rouvrir ladite instruction sans renvoyer l’affaire à une nouvelle audience ; que le principe du contradictoire n’a pas été respecté ; que le juge des référés a omis de statuer sur le moyen tiré de l’irrégularité de l’habilitation de Mme B pour signer, au nom du représentant de l’Etat, le déféré et la demande de suspension ; que c’est à tort que le juge des référés a considéré que le préfet du Gard justifiait de l’accomplissement des formalités de notification prévues par les dispositions de l’article R.600-1 du code de l’urbanisme ; que le plan de prévention des risques d’inondation du Moyen Vidourle considère la crue de 2002 comme crue de référence, alors qu’elle doit être considérée comme une crue exceptionnelle ; que la crue centennale de référence est celle d’octobre 1958 ; que ledit PPRI, en classant en zone R-NU le terrain d’assiette du projet litigieux, est entaché d’une erreur manifeste dans l’appréciation ; que ce classement est erroné en tant qu’il concerne la fraction sur lequel se repose le projet ; que le préfet a classé la parcelle concernée en zone R-NU malgré les différences altimétriques entre les terrains ; que le projet de la construction se situe au-dessus de la limite des plus hautes eaux ; que le premier juge a commis une erreur de droit en considérant que la majeure partie du projet de la construction se situait à une altitude inférieure à 28 mètres ; qu’en tout état de cause, les niveaux de planchers habitables se situent au dessus du niveau des plus hautes eaux ; qu’aucune étude hydro-morphologique n’a été menée au droit du terrain d’assiette de la construction projetée ; que le juge des référés, en considérant que la construction serait de nature à constituer un obstacle au libre écoulement des eaux dans le champ d’expansion des crues, a rajouté aux prescriptions du PPRI une condition non prévue par le règlement ;

Vu l’ordonnance attaquée ;

Vu, enregistré au greffe de la cour le 4 mai 2012, le mémoire en défense présenté par le préfet du Gard qui conclut au rejet de la requête et la confirmation de l’ordonnance attaquée ;

Il fait valoir qu’il n’était pas tenu de notifier directement sa note en délibéré aux parties adverses puisque, d’une part, la communication directe des mémoires entre les parties mentionnée à l’article R. 522-8 du code de justice administrative ne constitue pas une obligation procédurale et que, d’autre part, il ressort des pièces du dossier que le mémoire complémentaire a été bien notifié aux avocats du pétitionnaire par le tribunal administratif ; que l’erreur avec laquelle l’ordonnance attaquée mentionne comme clôture de l’instruction la date du 7 mars 2012 n’entraîne pas son irrégularité ; que l’arrêté de délégation de signature accordé par le préfet à Mme Y lui confère pleine compétence pour ester en justice ; que le recours gracieux auprès du maire à été notifié à M. A ; que les notifications du recours contentieux ont été régulièrement effectuées ; que le projet litigieux se situe dans le lit du Vidourle, en zone R-NU du PPRI, qui interdit toute nouvelle construction afin de ne pas augmenter le enjeux exposés et préserver les capacités d’écoulement et les champs d’expansion des crues ; que les crues qui affectent le bassin ont un caractère brutal ; que les allégations de la COMMUNE DE SOMMIERES relative à l’aléa qui impacte le terrain en cause ne présentent aucun caractère scientifique ; qu’il est essentiel pour la sécurité publique de préserver les champs d’expansion des crues afin de protéger les zones en amont et en aval ;

Vu, enregistré au greffe de la cour le 15 juin 2012, le mémoire en réplique présenté pour la COMMUNE DE SOMMIERES, qui conclut aux mêmes fins que sa requête initiale ;

Elle fait valoir en outre que le mémoire en défense présenté par le préfet du Gard devra être écarté des débats dès lors que le signataire de ce mémoire ne justifie pas d’une délégation pour ce faire ; que contrairement à ce qu’expose le préfet du Gard, l’échange des mémoires entre parties dans le cadre du report de la clôture de l’instruction prévu par l’article R. 522-8 du code de justice administrative est une obligation et non une simple possibilité ; que le préfet du Gard ne justifie toujours pas de l’accomplissement des formalités de notification de son recours gracieux à M. A ; que la fraction de la parcelle classée en zone R-NU du PPRI n’est pas impactée par un risque d’inondation ;

Vu les décisions, en date du 25 octobre 2011, par lesquelles le président de la cour a désigné M. Z, président, pour juger les référés et pour statuer sur les appels formés devant la cour contre les décisions rendues par les juges des référés des tribunaux du ressort, en application des articles L.511-2 et L. 551-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l’urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant régulièrement été averties du jour de l’audience

Après avoir, en séance publique le 20 juin à 14 h 00, présenté son rapport et entendu :

— les observations de Me Monflier pour la COMMUNE DE SOMMIERES ;

— et les observations de Mme X et M. C pour le préfet du Gard ;

Considérant que, par l’ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a suspendu, sur le fondement des dispositions de l’article L.554-1 du code de justice administrative, l’exécution de l’arrêté du 11 août 2011 par lequel le maire de la COMMUNE DE SOMMIÈRES a accordé un permis de construire à M. F A pour la rénovation d’un mazet et la construction d’une maison d’habitation ; que la COMMUNE DE SOMMIÈRES fait appel de cette ordonnance ;

Considérant qu’aux termes de l’article L.554-1 du code de justice administrative : «Les demandes de suspension assortissant les requêtes du représentant de l’Etat dirigées contre les actes des communes sont régies par le 3e alinéa de l’article L.2131-6 du code général des collectivités territoriales (…)» ; que cet alinéa dispose qu’il est fait droit à la demande de suspension du représentant de l’Etat «si l’un des moyens invoqués paraît, en l’état de l’instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l’acte attaqué» ;

Sur la régularité de l’ordonnance attaquée :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 5 du code de justice administrative : « L’instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l’urgence » ; qu’aux termes de l’article R. 522-8 du même code : « L’instruction est close à l’issue de l’audience, à moins que le juge des référés ne décide de différer la clôture de l’instruction à une date postérieure dont il avise les parties par tous moyens. Dans ce dernier cas, les productions complémentaires déposées après l’audience et avant la clôture de l’instruction peuvent être adressées directement aux autres parties, sous réserve, pour la partie qui y procède, d’apporter au juge la preuve de ses diligences. L’instruction est rouverte en cas de renvoi à une autre audience » ;

Considérant, en premier lieu, qu’il ressort des pièces du dossier qu’à l’issue de l’audience du 29 février 2012, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a différé la clôture de l’instruction au 7 mars 2012 à 16h00 ; que, recevant, le 7 mars 2012, un nouveau mémoire du préfet du Gard, le juge des référés a différé cette clôture au 9 mars 2012 à 12 heures ; qu’il résulte des dispositions précitées que la communication directe des mémoires entre les parties est une possibilité et non une obligation procédurale ; que si la COMMUNE DE SOMMIÈRES soutient que le principe du contradictoire n’a pas été respectée en ce qu’il n’est pas justifié que le dernier mémoire du préfet aurait été notifié à M. A, une telle circonstance n’est pas de nature à entacher d’irrégularité l’ordonnance attaquée ; qu’eu égard aux nécessités liées à l’urgence dans laquelle le juge des référés statue, le moyen tiré de ce que ce dernier aurait méconnu le principe du contradictoire est infondé ;

Considérant, en deuxième lieu, qu’il ne résulte pas des dispositions de l’article R. 522-8 du code de justice administrative que le juge des référés ne pouvait rouvrir une clôture d’instruction, une première fois différée, sans inscrire de nouveau l’affaire au rôle d’une audience ;

Considérant, en troisième lieu, que le fait que la date de clôture mentionnée est inexacte n’entache pas l’ordonnance d’irrégularité dès lors qu’il est établi que, conformément aux dispositions de l’article R.522-8 du code de justice administrative, les parties ont été informées du report de cette clôture ;

Considérant, en quatrième lieu, que la COMMUNE DE SOMMIÈRES soutient que l’ordonnance attaquée est entachée d’irrégularité, le premier juge ayant omis de statuer sur le moyen tiré de l’incompétence de Mme D Y, secrétaire générale de préfecture, aux fins de signer la requête du préfet du Gard, dès lors qu’elle ne justifie d’aucune délégation de signature l’habilitant spécialement à agir en justice ; qu’il ressort toutefois de l’ordonnance attaquée, qui vise expressément cette argumentation de la commune, que le juge des référés a considéré que Mme Y disposait d’une délégation de signature, par arrêté du 7 juillet 2010, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de juillet 2010 ; que le premier juge a pu considérer à bon droit que cette délégation l’habilitait à signer le déféré préfectoral et rejeté l’argumentation de la COMMUNE DE SOMMIERES ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant, en premier lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que le recours gracieux ainsi que le recours en annulation assorti d’une demande de suspension à l’encontre du permis de construire délivré à M. A, ont été notifiés au maire et au pétitionnaire conformément aux dispositions de l’article R.600-1 du code de l’urbanisme ; que, dès lors, la COMMUNE DE SOMMIÈRES n’est pas fondée à soutenir que le déféré préfectoral serait tardif et par suite irrecevable ;

Considérant, en second lieu, qu’il ressort de l’arrêté du 7 juillet 2010, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de juillet 2010, que la délégation de signature du préfet du Gard à Mme Y, sous-préfet, secrétaire générale de la préfecture du Gard, porte sur tous les « arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l’Etat dans le département du Gard, à l’exception des réquisitions prises en application du code de la défense et de la réquisition des comptables publics (…) » ; qu’une telle délégation, de droit, donne notamment compétence à Mme Y pour signer les recours gracieux et déférés préfectoraux présentés devant la juridiction administrative ;

Sur le bien fondé de la demande de suspension :

Considérant que, par arrêté du 11 août 2011, le maire de la COMMUNE DE SOMMIERES a délivré à M. A un permis de construire pour la construction d’une maison d’habitation d’une surface hors œuvre nette de 128 m² et la rénovation d’un mazet d’une surface hors œuvre nette de 40 m² ; que le terrain d’assiette est situé dans le lit majeur du Vidourle et classé, pour la partie supportant l’assise de la construction, en zone R-NU du plan de prévention des risques Inondation du Moyen Vidourle, approuvé le 3 juillet 2008 ; que la zone R-NU du PPRI correspond à une zone non urbanisée d’aléa résiduel, c’est-à-dire non inondée au regard des plus hautes eaux de la crue de référence, mais potentiellement inondable par une crue supérieure et dont l’interdiction de toute nouvelle construction est destinée à « préserver les zones d’expansion des crues en cas de crues supérieure à la crue de référence ou de disfonctionnement hydraulique» ;

Considérant que la COMMUNE DE SOMMIERES soutient, par la voie de l’exception, qu’un tel classement est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation, dès lors que les relevés topographiques après interpolation ainsi que la surélévation des planchers habitables de la construction projetée, posée sur pilotis, permettraient d’assurer la mise en sécurité des biens et des personnes ; que, toutefois, de telles allégations sont insuffisantes pour contester le zonage entrepris par les services de l’Etat, ; qu’elles sont en outre sans incidence sur le choix fait, lors de l’élaboration du plan de prévention, auquel la COMMUNE DE SOMMIERES a été associée et qu’elle n’a alors pas contesté, de rendre inconstructible cette zone qui ne supporte aucune construction, si ce n’est une petite au nord, pour permettre une expansion sécurisée des crues exceptionnelles, dont les hauteurs d’eau se situent au dessus des plus hautes eaux des crues de référence ; qu’ainsi, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a pu, à bon droit, sans faire une inexacte interprétation des dispositions du PPRI relatives à la zone R-NU, considérer que la préservation de la capacité des champs d’expansion des crues, permettant de limiter l’impact en aval des inondations, présente un caractère d’intérêt général et justifie que le terrain d’assiette du projet litigieux puisse être déclaré en partie inconstructible ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE SOMMIERES n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par l’ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a suspendu l’exécution de l’arrêté du 11 août 2011 par lequel le maire a délivré un permis de construire à M. A ;

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative s’opposent à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que demande la COMMUNE DE SOMMIÈRES au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens ;

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE SOMMIÈRES est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la COMMUNE DE SOMMIÈRES, à M. F A et au ministre de l’égalité des territoires et du logement.

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Fait à Marseille, le 28 juin 2012.

Le juge des référés, Le greffier,

C. Z C. BAVOIS

La République mande et ordonne au ministre de l’égalité des territoires et du logement en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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