CAA de MARSEILLE, 3ème chambre - formation à 3, 19 octobre 2017, 16MA02482, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 3e ch. - formation à 3, 19 oct. 2017, n° 16MA02482
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 16MA02482
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Toulon, 20 avril 2016, N° 1303147
Identifiant Légifrance : CETATEXT000035921507

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SNC Pharmacie du Champ de Mars a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er juillet 2007 au 28 février 2011 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1303147 du 21 avril 2016, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 juin 2016, la SNC Pharmacie du Champ de Mars, représentée par Me diB…, demande à la Cour :

1°) d’annuler ce jugement du 21 avril 2016 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) de prononcer la décharge demandée.

Elle soutient que :

 – l’administration n’a pas respecté les obligations prévues par les dispositions du II de l’article L. 47 A du livre des procédures fiscales ;

 – la reconstitution de son chiffre d’affaires est erronée ;

 – les factures de la société Gdpme rejetées par l’administration correspondent à la rémunération d’un service d’apport d’affaires ou de facilitation ;

 – l’application des pénalités pour manoeuvres frauduleuses n’est pas justifiée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 octobre 2016, le ministre chargé du budget conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SNC Pharmacie du Champ de Mars ne sont pas fondés.

Par lettre du 26 avril 2017, les parties ont été informées, en application de l’article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de la période à laquelle il est envisagé d’appeler l’affaire à l’audience et indiquant la date à partir de laquelle l’instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l’article R. 613-1 et le dernier alinéa de l’article R. 613-2 du code de justice administrative.

Un avis d’audience portant clôture immédiate de l’instruction a été émis le 15 septembre 2017.

Un mémoire a été produit le 15 septembre 2017 pour la SNC Pharmacie du Champ de Mars, postérieurement à la clôture de l’instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. Sauveplane,

 – les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public,

 – et les observations de Me A… B…, représentant la SNC Pharmacie du Champ de Mars.

1. Considérant que la SNC Pharmacie du Champ de Mars relève appel du jugement du 21 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er juillet 2007 au 28 février 2011 à la suite d’une vérification de comptabilité de son activité d’exploitation d’une officine de pharmacie ;

Sur la régularité de la procédure d’imposition :

2. Considérant qu’aux termes des dispositions du II de l’article L. 47 A du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable : " En présence d’une comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés et lorsqu’ils envisagent des traitements informatiques, les agents de l’administration fiscale indiquent par écrit au contribuable la nature des investigations souhaitées. Le contribuable formalise par écrit son choix parmi l’une des options suivantes : a) Les agents de l’administration peuvent effectuer la vérification sur le matériel utilisé par le contribuable ; b) Celui-ci peut effectuer lui-même tout ou partie des traitements informatiques nécessaires à la vérification. Dans ce cas, l’administration précise par écrit au contribuable, ou à un mandataire désigné à cet effet, les travaux à réaliser ainsi que le délai accordé pour les effectuer. Les résultats des traitements sont alors remis sous forme dématérialisée répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget ; c) Le contribuable peut également demander que le contrôle ne soit pas effectué sur le matériel de l’entreprise. Il met alors à la disposition de l’administration les copies des documents, données et traitements soumis à contrôle (…) » ;

3. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que le vérificateur qui envisage un traitement informatique sur une comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés est tenu d’indiquer au contribuable, au plus tard au moment où il décide de procéder au traitement, par écrit et de manière suffisamment précise, la nature des traitements informatiques qu’il souhaite effectuer, eu égard aux investigations envisagées, afin de permettre au contribuable de choisir en toute connaissance de cause entre les trois options offertes par ces dispositions ;

4. Considérant qu’il résulte de l’instruction que, par lettre du 8 avril 2011, l’administration a informé la SNC Pharmacie du Champ de Mars que le vérificateur envisageait de mettre en oeuvre les traitements informatiques portant sur un « contrôle de l’archivage et de la conservation des données informatiques élémentaires », un « contrôle de la saisie des données de caisse : ensemble des données relatives aux tickets de caisse », un « contrôle de la saisie des données et des opérations de validation des informations nécessaires à la gestion des tickets de caisse et/ou de la facturation », un « contrôle de la numérotation système des enregistrements et de la séquentialité de la numérotation des tickets de caisse et/ou factures clients » et un « contrôle des corrections et annulations des données saisies sur votre système et validation de la traçabilité des corrections et annulation de tout ou partie des données élémentaires saisies » ; que le vérificateur se proposait également de vérifier la « détermination du chiffre d’affaires déclaré en matière de bénéfices industriels et commerciaux ainsi que pour la taxe sur la valeur ajoutée », la « détermination d’éléments statistiques d’appréciation sur les quantités de produits vendues, offertes ou annulées ou autres ainsi que sur les prix de vente pratiqués », le « contrôle des différents taux de taxe sur la valeur ajoutée appliqués pour l’ensemble de votre activité » et la « réalisation d’une comptabilité matière pour tout ou partie des produits commercialisés par l’entreprise (contrôle des flux matière par rapprochement entre les stocks, les entrées et les sorties de produits) » ; que ce courrier doit être regardé comme comportant une information suffisante relative à la nature des traitements informatiques envisagés et permettait au contribuable d’effectuer un choix éclairé entre les trois options qui lui étaient ouvertes par ces dispositions du II de l’article L. 47 A du code général des impôts ; que, dès lors, la SNC Pharmacie du Champ de Mars n’est pas fondée à soutenir que l’administration aurait méconnu les obligations prévues à cet article ;

Sur le bien-fondé de l’imposition :

En ce qui concerne la reconstitution du chiffre d’affaires :

5. Considérant que l’article L. 192 du livre des procédures fiscales prévoit que la charge de la preuve en cas de contestation de l’imposition incombe au contribuable lorsque, comme en l’espèce, la comptabilité comporte de graves irrégularités, ce qui n’est pas contesté, et que l’imposition a été établie conformément à l’avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires rendu le 30 novembre 2012 ;

6. Considérant que, pour reconstituer le chiffre d’affaires de la SNC Pharmacie du Champ de Mars pour l’ensemble de la période vérifiée, le vérificateur a utilisé deux méthodes, l’une, par valorisation du montant des factures supprimées à partir d’un ticket moyen et l’autre, par valorisation des écarts entre les quantités facturées et les quantités déstockées ; qu’il a procédé ensuite au « lissage » de ces deux méthodes ;

7. Considérant qu’il y a lieu d’écarter la critique par les contribuables de la première méthode d’évaluation des recettes par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 10 de leur jugement ;

8. Considérant, en ce qui concerne la seconde méthode de reconstitution, que l’administration fiscale a mis en évidence des discordances portant sur quatre mille huit cent quatre-vingt-dix produits vendus sur ordonnance au cours de la période du 1er juillet 2007 au 28 février 2011 alors que la société requérante ne s’appuie que sur l’analyse de trois produits vendus sur ordonnance pour contester la pertinence de la méthode utilisée ; que les premiers juges ont retenu à bon droit que cette critique très partielle de la seconde méthode de reconstitution employée ne permettait pas de la remettre en cause, alors que les requérants supportent la charge de la preuve ;

9. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la société requérante, qui ne propose aucune autre méthode d’évaluation de ses recettes, n’est pas fondée à soutenir que les méthodes de reconstitution utilisées par le service seraient radicalement viciées ni même excessivement sommaires et n’établit pas que son chiffre d’affaires tel que reconstitué serait exagéré ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée déductible :

10. Considérant qu’aux termes de l’article 283 du code général des impôts : « (…) 4. Lorsque la facture ou le document en tenant lieu ne correspond pas à la livraison d’une marchandise ou à l’exécution d’une prestation de services, ou fait état d’un prix qui ne doit pas être acquitté effectivement par l’acheteur, la taxe est due par la personne qui l’a facturée » et qu’aux termes de l’article 272 du même code : « (…) 2. La taxe sur la valeur ajoutée facturée dans les conditions définies à l’article 283-4 ne peut faire l’objet d’aucune déduction par celui qui a reçu la facture ou le document en tenant lieu » ;

11. Considérant qu’en vertu de ces dispositions, un contribuable n’est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services ; que dans le cas où l’auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l’administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d’établir qu’il s’agissait d’une facture fictive ou d’une facture de complaisance ; que si l’administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d’apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération ;

12. Considérant que la société requérante a comptabilisé au cours de l’exercice clos en 2008 une facture d’honoraires du 27 juin 2008 établie par la société SARL Gdpme d’un montant de 14 140 euros hors-taxes, ainsi libellée : « Honoraires de transaction sur la négociation de la période du 1er janvier 2008 au 31/12/2008 des fournitures et livraisons de médicaments sur les EHPAD : – Bon Repos à Toulon – Cora à La Garde – Les Cigognes à Carnoules » et au titre de l’exercice clos en 2009, une facture du 25 novembre 2011 néanmoins relative selon elle à l’exercice au titre duquel elle a été prise en compte, produite en cours du contrôle en novembre 2011 sur demande du service, d’un montant de 12 500 euros hors taxes avec le libellé :« Redevance et transaction commerciale sur la période du 1er janvier 2009 au 31/ décembre 2009 sur les EHPAD : Bon Repos à Toulon Cora à La Garde Les Cigognes à Carnoules » ;

13. Considérant que, pour rejeter le droit de la société de déduire la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur ces factures, l’administration souligne l’absence de contrat écrit prévoyant les redevances facturées, l’absence de justificatifs du mode de détermination de la redevance et de l’existence de la transaction commerciale à laquelle se réfère la facture de 2011, l’absence de paiement de ces prestations depuis novembre 2008 et l’absence de justifications de l’existence de négociations annuelles au cours des années 2009, 2010 et 2011 ; que l’administration fiscale rappelle également que la gérant de la société a précisé que les prestations mentionnées dans la facture établie en 2008 n’avaient pas été réalisées et que le prix payé par la société en 2008 aurait en fait représenté l’acquisition d’un droit d’exclusivité pour la fourniture des médicaments aux trois établissements d’hébergement de personnes âgées et dépendantes ; que la société requérante se borne à soutenir pour sa part en appel que les factures de la société Gdpme rejetées par l’administration s’analysent comme la rémunération d’un service d’apport d’affaires ou de facilitation ; que, par les éléments de fait concordants qu’elle a réunis et compte tenu des incohérences qu’elle a relevées, l’administration fiscale apporte des éléments suffisants pour permettre de penser que les factures ne correspondent pas à des opérations réelles ; que la société n’apporte pas de justifications utiles sur la réalité des opérations facturées ; que, dès lors, c’est à bon droit que l’administration a refusé le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée portée sur les deux factures ;

Sur l’application des pénalités :

14. Considérant qu’aux termes de l’article 1729 du code général des impôts : « Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt ainsi que la restitution d’une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l’Etat entraînent l’application d’une majoration de : (…) c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses (…) » ;

15. Considérant que, comme le rappelle l’administration, le rapport de l’expertise diligentée dans le cadre de l’instruction pénale a fait apparaître que le logiciel « Alliance plus » utilisé par la SNC Pharmacie du Champ de Mars comportait un module permettant de dissimuler des recettes ; que l’administration souligne également que l’activation de ce module nécessitait l’entrée d’un mot de passe sollicité par la société requérante et que celle-ci a utilisé de façon régulière voire quotidienne au cours de la période en litige les fonctionnalités permissives de ce logiciel et effacé régulièrement le fichier qui assurait la traçabilité des manipulations opérées ; que ces agissements délibérés ont créé une situation occultant des opérations imposables tout en donnant à la comptabilité l’apparence de la sincérité ; que, dans ces conditions, l’administration apporte la preuve qui lui incombe de l’existence de manoeuvres frauduleuses justifiant l’application de la majoration de 80 % prévue à l’article 1729 du code général des impôts ;

16. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la SNC Pharmacie du Champ de Mars n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande ;

D É C I D E :


Article 1er : La requête de La SNC Pharmacie du Champ de Mars est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SNC Pharmacie du Champ de Mars et au ministre de l’action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l’audience du 5 octobre 2017, où siégeaient :

— M. Bédier, président,

 – Mme Paix, président assesseur,

 – M. Sauveplane, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 octobre 2017.

2

N° 16MA02482

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