CAA de PARIS, 3 ème chambre , 18 juin 2015, 14PA02497, Inédit au recueil Lebon

  • Sciences·
  • Autorisation de travail·
  • Service public·
  • Île-de-france·
  • Cliniques·
  • Recherche·
  • Poste·
  • Demandeur d'emploi·
  • Tribunaux administratifs·
  • Région

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 3 ème ch., 18 juin 2015, n° 14PA02497
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 14PA02497
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 31 mars 2014, N° 1317198/3-1
Identifiant Légifrance : CETATEXT000031173052

Sur les parties

Texte intégral

Vu le recours, enregistré le 6 juin 2014, présenté par le ministre de l’intérieur ; le ministre de l’intérieur demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1317198/3-1 du 1er avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de Mme B… C…, d’une part en annulant la décision du 6 août 2013 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a rejeté la demande d’autorisation de travail présentée à son profit par la société « AB Sciences », ensemble la décision du 12 novembre 2013 par laquelle le ministre de l’intérieur a rejeté le recours hiérarchique de la société « AB Science », d’autre part, en lui enjoignant de délivrer à l’intéressée l’autorisation de travail sollicitée dans un délai d’un mois ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme C… devant le Tribunal administratif de Paris ;

Le ministre de l’intérieur soutient que :

— c’est à tort que les premiers juges ont annulé sa décision comme entachée d’erreur de fait, la société « AB Science » n’ayant pas effectué auprès d’un organisme habilité des recherches pour pourvoir au poste souhaité par Mme C… ;

 – les organismes de placement concourant au service public du placement pour recruter un candidat déjà présents sur le marché du travail sont énumérés aux articles L. 5311-2 et suivants du code du travail et le « Leem », syndicat représentant l’industrie pharmaceutique, auquel la société a recouru n’en fait pas partie ;

 – la société « AB Science » a donc méconnu l’obligation prévue au 1° de l’article R. 5221-20 du code du travail et sa recherche de candidats ne peut être regardée comme régulière et suffisante, et elle n’est pas fondée à alléguer de difficultés de recrutement dès lors que ses recherches ont été incomplètes ;

 – c’est à tort que les premiers juges ont annulé sa décision comme étant entachée d’une erreur d’appréciation alors qu’il ressort des termes de l’offre d’emploi que le poste concerné requiert principalement des compétences administratives pour la négociation et la mise en place de conventions d’études cliniques, ainsi que pour l’analyse des coûts et ne nécessite pas une formation scientifique de haut niveau puisqu’il est accessible à partir d’une formation juridique de niveau Master 1 ou d’une formation de type « Mastèr achat ou juridique » tandis que Mme C…, titulaire d’un doctorat en pharmacie obtenu en Tunisie, d’un master 2 en recherche clinique et d’un master 2 en essais cliniques dispose d’une formation universitaire scientifique de très haut niveau qui a vocation à la conduire à une carrière scientifique, dans le domaine de la recherche et du développement et de la gestion de projet notamment ;

 – les premiers juges ont entaché leur jugement d’une erreur de droit dès lors que la décision litigieuse était fondée sur les dispositions du 2° de l’article R. 5221-20 du code du travail en raison de l’inadéquation du profil de l’intéressée avec le poste sollicité, et non sur celles du 5° de cet article ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 janvier 2015, présenté pour Mme C…, par Me A… qui conclut au rejet des conclusions formées par le ministre de l’intérieur, à ce que le jugement soit confirmé et à ce qu’il soit mis à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

— l’autorité compétente pour accorder ou refuser une autorisation de travail dispose d’un pouvoir d’appréciation et doit tenir compte de plusieurs éléments dont les recherches accomplies par l’employeur auprès des organismes de placement concourant au service public du placement, les recherches accomplies auprès de tels organismes constituant un élément d’appréciation parmi d’autres et en aucun cas une obligation déterminant la régularité des démarches ;

 – à supposer une telle obligation, la société « AB Science » a déposé une offre d’emploi auprès d’un organisme privé dont l’objet est la fourniture de services gratuits de placement aux demandeurs d’emploi dans le secteur de l’industrie pharmaceutique au sens de l’article L. 5311-4 du code du travail ;

 – la société « AB Science » doit donc être considérée comme ayant procédé aux recherches adaptées au poste qu’elle proposait ;

 – le poste proposé à Mme C… est en parfaite adéquation avec ses compétences ;

 – la condition selon laquelle l’étranger doit recevoir une rémunération comparable à celle des salariés occupant des fonctions similaires dans la même entreprise ou dans la même branche au sens de l’article R. 5221-11 du code du travail est bien remplie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 4 juin 2015 :

— le rapport de Mme Julliard, première conseillère,

— et les observations de Mme C… ;

1. Considérant que la société « AB Science » a sollicité le 20 mars 2013, une autorisation de travail au profit de Mme C…, ressortissante tunisienne, née le 4 janvier 1987 ; que par un arrêté du 6 août 2013, le préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France, a refusé de faire droit à cette demande ; que la société « AB Science » a exercé le 3 septembre 2013, un recours hiérarchique auprès du ministre de l’intérieur ; que par une décision du 12 novembre 2013, le ministre de l’intérieur a confirmé la décision de refus prise par le préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France ; que par un jugement du 1er avril 2014 dont le ministre de l’intérieur relève appel, le Tribunal administratif de Paris a annulé ces deux décisions comme étant entachées d’une erreur de fait et d’une erreur d’appréciation ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu’aux termes de l’article R. 5221-20 du code du travail : " Pour accorder ou refuser l’une des autorisations de travail mentionnées à l’article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d’appréciation suivants : 1° La situation de l’emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l’employeur auprès des organismes de placement concourant au service public du placement pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; 2° L’adéquation entre la qualification, l’expérience, les diplômes ou titres de l’étranger et les caractéristiques de l’emploi auquel il postule » ; qu’aux termes de l’article L. 5311-1 du même code : " Le service public de l’emploi a pour mission l’accueil, l’orientation, la formation et l’insertion ; il comprend le placement, le versement d’un revenu de remplacement, l’accompagnement des demandeurs d’emploi et l’aide à la sécurisation des parcours professionnels de tous les salariés. » ; qu’aux termes de l’article L. 5311-2 de ce code : " Le service public de l’emploi est assuré par : 1° Les services de l’Etat chargés de l’emploi et de l’égalité professionnelle ; 2° L’institution publique mentionnée à l’article L. 5312-1 ; 3° L’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes. Il est également assuré par l’organisme gestionnaire du régime d’assurance chômage mentionné à l’article L. 5427-1 dans le cadre des dispositions légales qui lui sont propres. » ; qu’aux termes de l’article L. 5311-4 dudit code : « Peuvent également participer au service public de l’emploi : 1° Les organismes publics ou privés dont l’objet consiste en la fourniture de services relatifs au placement, à l’insertion, à la formation et à l’accompagnement des demandeurs d’emploi (…) » ;

3. Considérant que le ministre de l’intérieur soutient que la société « AB Science », en déposant son offre d’emploi sur la bourse de l’emploi du « LEEM » (« les entreprises du médicament »), n’a pas régulièrement accompli les démarches lui incombant au sens de l’article R. 5221-20 précité et visant à recruter une personne déjà présente sur le marché du travail ; qu’il ressort des dispositions susvisées que seuls les organismes privés dont l’objet consiste en la fourniture de services relatifs au placement, à l’insertion, à la formation et à l’accompagnement des demandeurs d’emploi participent au service public de l’emploi ; que « Les entreprises du médicament », qui regroupe les entreprises du secteur de l’industrie pharmaceutique en France, a pour principale mission de découvrir, produire et mettre à disposition des médicaments et vaccins ainsi que des informations relatives aux aspects règlementaires et économiques des médicaments ; que si ce groupe dispose d’un site internet permettant de mettre en relation des demandeurs d’emploi et des employeurs, il n’exerce cette activité qu’à titre accessoire ; que le « LEEM » ne saurait donc être regardé comme un organisme de placement concourant au service public du placement ; que, par suite, et nonobstant la diffusion à plusieurs reprises de l’offre d’emploi pour le poste de « Site Contract Associate » ainsi que l’inadéquation alléguée entre les candidats ayant répondu à cette offre et le poste proposé, la société « AB Science » ne saurait être regardée comme ayant accompli les démarches nécessaires avant de solliciter une autorisation de travail au profit de Mme C… ; que ce motif retenu tant par le préfet de Paris que par le ministre de l’intérieur suffisait à lui seul à fonder le refus de l’autorisation de travail ; que, dès lors, le ministre de l’intérieur est fondé à soutenir que les décisions attaquées ne sont entachées ni d’erreur de fait, ni d’erreur de droit au regard des dispositions de l’article

R. 5221-20 du code du travail ;

4. Considérant, au surplus, qu’il ressort des pièces du dossier que le poste de « gestionnaire des contrats cliniques », également dénommé « Site Contract Associate » par la société « AB Science », requiert principalement des compétences administratives pour la négociation et la mise en place de conventions d’études cliniques, la gestion administrative de projets du point de vue financier, règlementaire et logistique et ne nécessite pas une formation scientifique de haut niveau ; qu’il ressort des pièces du dossier que Mme C… est titulaire d’un doctorat en pharmacie obtenu à l’Université de Monastir le 5 septembre 2012 ainsi que d’un Master en « sciences, technologies, santé » à finalité recherche « mention biologie cellulaire, physiologie et pathologie » spécialité vieillissements, obtenu avec la mention bien à l’Université Paris 7 le 2 mai 2013 ; que, dès lors, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que le préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France, a estimé que l’emploi sollicité n’était pas en adéquation avec la nature et le niveau de qualification de l’intéressée ;

5. Considérant que saisie par l’effet dévolutif de l’appel, il appartient à la Cour de statuer sur l’ensemble des moyens soulevés dans le cadre de l’appel et de la première instance ;

Sur les conclusions à fin d’annulation des décisions du 6 août 2013 et du 12 novembre 2013 :

6. Considérant, en premier lieu, que pour refuser l’autorisation de travail sollicitée, le préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France, s’est référé à la profession de « pharmacien » correspondant au code ROME J1202 alors que l’intéressée sollicitait une autorisation de travail pour le poste de « gestionnaire des contrats cliniques » ; qu’il ressort toutefois de la décision attaquée qu’il aurait pris la même décision s’il s’était fondé sur le seul motif tiré du fait que la société « AB Science » ne justifiait pas avoir accompli de recherches préalablement au dépôt de sa demande d’autorisation auprès des organismes de placement concourant au service public du placement pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ;

7. Considérant, en second lieu, que les difficultés de recrutement rencontrées par la société « AB Science » pour le poste de « gestionnaire des contrats cliniques » ainsi que les conditions financières auxquelles Mme C… aurait été recrutée sont en tout état de cause sans incidence sur la légalité des décisions attaquées ;

8. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le ministre de l’intérieur est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France du 6 août 2013 ainsi que sa décision prise sur recours hiérarchique du 12 novembre 2013 ;

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à Mme C… la somme qu’elle demande au titre des frais irrépétibles et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 1er avril 2014 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme C… devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C… et au ministre de l’intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France et à la société « AB Science ».

Délibéré après l’audience du 4 juin 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Polizzi, président assesseur,

- Mme Julliard, première conseillère,

Lu en audience publique, le 18 juin 2015.

La rapporteure,
M. JULLIARDLe président,
M. BOULEAULe greffier,
M. D…

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

''

''

''

''

5

N° 10PA03855

2

N° 14PA02497

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine

Textes cités dans la décision

  1. Code de justice administrative
  2. Code du travail
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
CAA de PARIS, 3 ème chambre , 18 juin 2015, 14PA02497, Inédit au recueil Lebon