Cour Administrative d'Appel de Versailles, 1ère Chambre, 10 février 2015, 14VE01951, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Versailles, 1re ch., 10 févr. 2015, n° 14VE01951
Juridiction : Cour administrative d'appel de Versailles
Numéro : 14VE01951
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Montreuil, 29 septembre 2013, N° 1303078
Identifiant Légifrance : CETATEXT000030255706

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée le 30 juin 2014, présentée pour M. B… A…, demeurant…, par Me Vinay, avocat ;

M. A… demande à la Cour :

1° d’annuler le jugement n° 1303078 du 30 septembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté en date du

15 janvier 2013 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l’a obligé à quitter le territoire et a fixé le pays de renvoi ;

2° d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté en litige ;

3° d’enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour de salarié dans un délai d’un mois à compter de la notification de l’arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l’attente, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail ;

Il soutient que :

Sur les conclusions aux fins d’annulation de la décision préfectorale lui refusant un titre de séjour :

— le préfet ne pouvait refuser de lui délivrer un titre de séjour pour défaut d’autorisation de travail sans statuer sur sa demande tendant à en avoir une ou, s’il s’estimait incompétent, sans transmettre cette demande à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi ;

 – le préfet n’a pas examiné sa situation au regard des lignes directrices de la circulaire du

28 novembre 2012 ;

 – le préfet a commis une erreur manifeste d’appréciation ;

Sur les conclusions aux fins d’annulation de l’obligation de quitter le territoire français :

— il n’a pas été mis en mesure de présenter ses observations préalablement à cette décision ;

……………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité sur l’Union européenne ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu la circulaire NOR INTK1229185C du ministre de l’intérieur du 28 novembre 2012 sur les conditions d’examen des demandes d’admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu l’arrêt rendu par la Cour de justice de l’Union européenne le 10 septembre 2013, dans l’affaire C 383/13 PPU ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu, au cours de l’audience publique du 26 janvier 2015, le rapport de
M. Skzryerbak, premier conseiller ;

1. Considérant que M. A…, ressortissant malien, a sollicité la délivrance d’un titre de séjour ; que par un arrêté du 15 janvier 2013 le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l’a obligé à quitter le territoire et a fixé le pays de renvoi ; que M. A… demande l’annulation du jugement du 30 septembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté ;

Sur les conclusions aux fins d’annulation :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

2. Considérant qu’il ressort des termes de la décision en litige que, si le préfet de la

Seine-Saint-Denis a mentionné que M. A… n’avait pas justifié d’un visa d’une durée supérieure à trois mois ni d’une autorisation de travail, il ne s’est pas fondé sur cette circonstance pour refuser son admission exceptionnelle au séjour mais a seulement décidé que, faute d’un tel visa, l’intéressé ne pouvait bénéficier d’un titre de séjour sur le fondement de l’article L. 313-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur de droit en opposant un tel motif à son admission exceptionnelle manque en fait ; que si le préfet ne pouvait, sur le fondement de l’article L. 313-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, refuser de délivrer un titre de séjour au motif que M. A… ne disposait pas d’une autorisation de travail alors qu’il lui appartenait de la lui accorder ou de la lui refuser, il ressort des pièces du dossier que le préfet aurait pris la même décision en se fondant uniquement sur l’absence de visa d’une durée supérieure à trois mois ;

3. Considérant qu’aux termes de l’article L. 313-14 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : " La carte de séjour temporaire mentionnées à l’article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l’article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public, à l’étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l’admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu’il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l’article

L. 311-7 » ;

4. Considérant que M. A… soutient qu’il dispose d’un contrat à durée indéterminée depuis 2008 dans une qualification recherchée et qu’il est intégré socialement et professionnellement ; que ces circonstances ne suffisent pas à établir que le préfet de la

Seine-Saint-Denis aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en estimant que son admission au séjour ne répondait pas à des considérations humanitaires et ne se justifiait pas au regard de motifs exceptionnels, au sens de l’article L. 313-14 précité du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n’aurait pas examiné la situation de M. A… à la lumière de la circulaire susvisée du ministre de l’intérieur du 28 novembre 2012 ;

En ce qui concerne l’obligation de quitter le territoire :

5. Considérant qu’aux termes du I de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : " L’autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d’un Etat membre de l’Union européenne, d’un autre Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n’est pas membre de la famille d’un tel ressortissant au sens des 4° et 5 de l’article L. 121-1, lorsqu’il se trouve dans l’un des cas suivants : / 1° Si l’étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu’il ne soit titulaire d’un titre de séjour en cours de validité ; / 2° Si l’étranger s’est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s’il n’est pas soumis à l’obligation du visa, à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d’un premier titre de séjour régulièrement délivré ; / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d’un titre de séjour a été refusé à l’étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; / 4° Si l’étranger n’a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour temporaire et s’est maintenu sur le territoire français à l’expiration de ce titre ; / 5° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l’autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l’étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé. / La décision énonçant l’obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n’a pas à faire l’objet d’une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l’indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. / L’obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l’étranger est renvoyé en cas d’exécution d’office » ; que le II de l’article L. 511-1 prévoit que l’étranger dispose en principe d’un délai de trente jours pour satisfaire à l’obligation qui lui est faite de quitter le territoire français, ce délai pouvant toutefois être supprimé par décision de l’autorité administrative dans des cas limitativement énumérés ou être exceptionnellement prorogé eu égard à la situation personnelle de l’étranger ; qu’aux termes du deuxième alinéa de l’article L. 512-3 du même code : « L’obligation de quitter le territoire français ne peut faire l’objet d’une exécution d’office ni avant l’expiration du délai de départ volontaire ou, si aucun délai n’a été accordé, avant l’expiration d’un délai de quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, ni avant que le tribunal administratif n’ait statué s’il a été saisi (…) » ;

6. Considérant qu’aux termes du paragraphe 1 de l’article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne : « Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l’Union » ; qu’aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : /

 – le droit de toute personne d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (…) » ; qu’aux termes du paragraphe 1 de l’article 51 de la Charte : « Les dispositions de la présente Charte s’adressent aux institutions, organes et organismes de l’Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu’aux Etats membres uniquement lorsqu’ils mettent en oeuvre le droit de l’Union. (…) » ;

7. Considérant que les dispositions de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, applicables au présent litige, sont issues de dispositions de la loi du

16 juin 2011 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité qui ont procédé à la transposition, dans l’ordre juridique interne, des objectifs de la directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

8. Considérant, ainsi que la Cour de justice de l’Union européenne l’a jugé dans les motifs de son arrêt du 10 septembre 2013 visé ci-dessus, que les auteurs de la directive du

16 décembre 2008, s’ils ont encadré de manière détaillée les garanties accordées aux ressortissants des Etats tiers concernés par les décisions d’éloignement ou de rétention, n’ ont pas précisé si et dans quelles conditions devait être assuré le respect du droit de ces ressortissants d’être entendus, qui relève des droits de la défense figurant au nombre des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l’ordre juridique de l’Union européenne et consacrés par la Charte des droits fondamentaux ; que si l’obligation de respecter les droits de la défense pèse en principe sur les administrations des Etats membres lorsqu’elles prennent des mesures entrant dans le champ d’application du droit de l’Union, il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles doit être assuré, pour les ressortissants des Etats tiers en situation irrégulière, le respect du droit d’être entendu ;

9. Considérant que le droit d’être entendu implique que l’autorité préfectorale, avant de prendre à l’ encontre d’un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l’intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu’il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu’elle n’intervienne ; que, toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d’un titre de séjour, l’obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour ; que le droit d’être entendu n’implique alors pas que

l’ administration ait l’obligation de mettre l’intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l’obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu’il a pu être entendu avant que n’intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

10. Considérant que lorsqu’il sollicite la délivrance ou le renouvellement d’un titre de séjour, l’étranger, en raison même de l’accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu’en cas de refus, il pourra faire l’objet d’une mesure d’éloignement ; qu’à l’occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l’administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu’il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l’objet d’une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d’apporter à l’administration toutes les précisions qu’il juge utiles ; qu’il lui est loisible, au cours de l’instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l’administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d’éléments nouveaux ; que le droit de l’intéressé d’être entendu, ainsi satisfait avant que n’intervienne le refus de titre de séjour, n’impose pas à l’autorité administrative de mettre l’intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l’obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ;

11. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le préfet de Seine-Saint-Denis n’était pas tenu, préalablement à l’édiction de la mesure d’éloignement, d’informer expressément
M. A…, de sa propre initiative, qu’en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il serait susceptible d’être contraint de quitter le territoire français et de l’inviter à formuler ses observations sur cette éventualité ; que, par suite, M. A… n’est pas fondé à soutenir qu’il aurait été privé de son droit à être entendu, notamment énoncé au paragraphe 2 de l’article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ;

12. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les conclusions aux fins d’annulation doivent être rejetées ;

Sur les conclusions aux fins d’injonction :

13. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l’annulation de la décision attaquée, n’implique aucune mesure particulière d’exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A… demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;


DÉCIDE :


Article 1er : La requête de M. A… est rejetée.

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N° 14VE01951

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