Cour de cassation, Chambre commerciale, 3 mai 2016, 14-28.962, Publié au bulletin

  • Appel de garantie manifestement abusif ou frauduleux·
  • Caractère manifestement abusif·
  • Garantie à première demande·
  • Caractère autonome·
  • Contre-garantie·
  • Nécessité·
  • Sociétés·
  • Bénéficiaire·
  • Abu dhabi·
  • Égypte

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Le caractère manifestement abusif de l’appel d’une contre-garantie autonome ne peut résulter du seul caractère manifestement abusif de l’appel de la garantie de premier rang, mais suppose de démontrer l’existence, au moment de l’appel de la contre-garantie, d’une collusion entre le garant de premier rang, bénéficiaire de la contre-garantie, et le bénéficiaire de la garantie de premier rang

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Sur la décision

Référence :
Cass. com., 3 mai 2016, n° 14-28.962, Bull. d'information 2016, n° 850, IV, 1274
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 14-28962
Importance : Publié au bulletin
Publication : Bulletin d'information 2016, n° 850, IV, 1274
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 24 novembre 2014, N° 13/15819
Précédents jurisprudentiels : A rapprocher :
Com., 12 décembre 1995, pourvoi n° 93-14.756, Bull. 1995, IV, n° 289 (cassation) Sur la nécessité de démontrer l'existence d'une collusion entre le garant de premier rang et le bénéficiaire pour s'opposer à la mise en oeuvre de la contre-garantie,
Com., 9 octobre 2001, pourvoi n° 99-10.485, Bull. 2001, IV, n° 158 (rejet) Sur la nécessité pour les juges du fond de rechercher le caractère manifestement abusif ou frauduleux de l'appel de garantie,
Com., 26 novembre 2003, pourvoi n° 01-10.062, Bull. 2003, IV, n° 175 (cassation)
Com., 12 décembre 1995, pourvoi n° 93-14.756, Bull. 1995, IV, n° 289 (cassation) Sur la nécessité de démontrer l'existence d'une collusion entre le garant de premier rang et le bénéficiaire pour s'opposer à la mise en oeuvre de la contre-garantie,
Com., 26 novembre 2003, pourvoi n° 01-10.062, Bull. 2003, IV, n° 175 (cassation)
Com., 9 octobre 2001, pourvoi n° 99-10.485, Bull. 2001, IV, n° 158 (rejet) Sur la nécessité pour les juges du fond de rechercher le caractère manifestement abusif ou frauduleux de l'appel de garantie,
Textes appliqués :
article 2321, alinéa 2, du code civil
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 20 avril 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000032501486
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2016:CO00408
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

COMM.

IK

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 3 mai 2016

Cassation

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 408 FS-P+B

Pourvoi n° V 14-28.962

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société National Bank of Abu Dhabi, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 2] (Émirats arabes unis), en sa succursale française, dont le siège est [Adresse 1],

contre l’arrêt rendu le 25 novembre 2014 par la cour d’appel de Paris (pôle 2, chambre 5), dans le litige l’opposant à la société Atradius Credit Insurance NV, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 4] (Pays-Bas), en sa succursale française, dont le siège est [Adresse 3],

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 15 mars 2016, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Robert-Nicoud, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, MM. Zanoto, Guérin, Mme Vallansan, MM. Marcus, Remenieras, Mmes Vaissette, Bélaval, conseillers, M. Lecaroz, Mmes Schmidt, Jollec, Barbot, conseillers référendaires, M. Le Mesle, premier avocat général, M. Graveline, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Robert-Nicoud, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société National Bank of Abu Dhabi, de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix et de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocats de la société Atradius Credit Insurance NV, l’avis de M. Le Mesle, premier avocat général, à la suite duquel le président a demandé aux avocats s’ils souhaitaient présenter des observations complémentaires, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches :

Vu l’article 2321, alinéa 2, du code civil ;

Attendu que le caractère manifestement abusif de l’appel de la contre-garantie ne peut résulter du seul caractère manifestement abusif de l’appel de la garantie de premier rang, mais suppose de démontrer l’existence, au moment de l’appel de la contre-garantie, d’une collusion entre le garant de premier rang, bénéficiaire de la contre-garantie, et le bénéficiaire de la garantie de premier rang ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par un marché de travaux du 12 janvier 2011, la société française Litwin s’est engagée à fournir à la société égyptienne N-Fert une usine « clé en mains » ; que la société National Bank of Abu Dhabi (la société NBAD) a émis en faveur de la société N-Fert une garantie de restitution d’avance et une garantie d’exécution ; que le 15 septembre 2011, la société Atradius Credit Insurance N.V (la société Atradius) a contre-garanti ces deux garanties autonomes en faveur de la société NBAD ; que le 26 janvier 2012, la société N-Fert a prononcé la résiliation du contrat et appelé la garantie de premier rang ; que par lettre du 27 janvier 2012, la société NBAD a appelé la garantie de la société Atradius, qui a refusé d’exécuter son engagement ; que la société Atradius a assigné la société NBAD afin que son appel de la contre-garantie soit jugé manifestement abusif ; que la société NBAD a demandé, à titre reconventionnel, sa condamnation à exécuter son engagement de contre-garantie ;

Attendu que pour rejeter la demande de la société NBAD tendant à la condamnation de la société Atradius à exécuter son engagement de contre-garantie, l’arrêt énonce que l’appel d’une contre- garantie est abusif si l’appel en garantie l’est également, puis retient que l’appel de la garantie de premier rang par la société N-Fert était manifestement abusif, de sorte que la demande d’appel de la contre-garantie l’est également ;

Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 25 novembre 2014, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Atradius Credit Insurance N.V. aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société National Bank of Abu Dhabi la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois mai deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société National Bank of Abu Dhabi

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR débouté NBAD Paris, émettrice d’une garantie à première demande et bénéficiaire d’une contre-garantie à première demande délivrée par la société Atradius, de sa prétention à voir condamner cette dernière à exécuter son engagement de contre-garantie ;

AUX MOTIFS QUE : « aux termes de l’article 2321 alinéa 2 du code civil, « le garant n’est pas tenu en cas d’abus ou de fraude manifestes du bénéficiaire ou de collusion de celui-ci avec le donneur d’ordre » ; l’appel d’une contre-garantie est abusif si l’appel en garantie l’est également et ce caractère s’apprécie au moment où ce premier appel est fait, peu important que, postérieurement, une transaction soit intervenue entre le donneur d’ordre et le bénéficiaire ; en l’espèce, N-FERT, après avoir résilié le contrat avec Litwin le 26 janvier 2012, a appelé en garantie le même jour NBAD, qui a exécuté, via sa succursale égyptienne, sa garantie le 8 février 2012 alors qu’avait été notifié à NBAD France le 30 janvier 2012 une ordonnance du président du tribunal de commerce de Paris lui interdisant de se dessaisir de quelque somme que ce soit au profit de NBAD Égypte ; N-FERT, en agissant avec célérité alors qu’elle avait été informée le 25 janvier par LITWIN de ses difficultés financières et lui avait fait savoir le lendemain qu’ « elle espérait trouver une solution appropriée pour sécuriser la poursuite du projet », a commis un abus manifeste puisque l’exécution du contrat en Égypte, objet de la garantie, n’avait nullement commencé (¿) ; la demande d’appel en garantie étant déclarée manifestement abusive, il convient de débouter la banque de l’ensemble de ses demandes » ;

ALORS 1°) QUE l’appel d’une contre-garantie autonome ne peut être tenu en échec qu’en cas d’abus ou de fraude manifeste du garant de premier rang et non par l’appel frauduleux ou manifestement abusif de la garantie de premier rang par son bénéficiaire ; qu’en l’espèce, pour considérer que l’appel par NBAD Paris de la contre-garantie délivrée par Atradius était manifestement abusif, la cour d’appel a retenu que la société N-FERT, bénéficiaire de la garantie de premier rang, avait abusivement appelé cette dernière ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article 2321, alinéa 2, du code civil ;

ALORS 2°) QUE c’est au jour de l’appel de la contre garantie que doit s’apprécier son éventuel caractère frauduleux ou manifestement abusif ; qu’en l’espèce, pour considérer que l’appel de la contre-garantie par l’exposante était manifestement abusif, la cour d’appel a retenu que la société NBAD (i.e l’établissement de crédit pris en son ensemble) avait exécuté sa garantie, via sa succursale égyptienne (NBAD Egypt) le 8 février 2012, bien qu’à cette date, NBAD Paris eût déjà reçu notification de la décision de justice (ordonnance du président du tribunal de commerce du 30 janvier 2012) lui interdisant de se dessaisir de toute somme d’argent au profit de NBAD Egypt ; qu’en se déterminant ainsi, par des considérations postérieures au 27 janvier 2012, date de l’appel de la contre-garantie, pour apprécier le caractère abusif de cet appel, la cour d’appel a violé l’article 2321, alinéa 2, du code civil ;

ALORS 3°) QUE l’ordonnance du 27 janvier 2012 notifiée à NBAD Paris le 30 janvier suivant faisait interdiction à cette dernière d’exécuter la contre-garantie qu’elle avait émise au profit de NBAD Egypt ; que cette ordonnance n’interdisait nullement l’exécution de la garantie de premier rang émise au bénéfice de la société N-FERT, de sorte que son émetteur, NBAD Egypt, restait tenu de l’exécuter ; que l’exécution de cette garantie de premier rang intervenue le 8 février 2012, à laquelle rien ne permettait d’échapper, ne constituait pas une faute susceptible de rendre abusif l’appel par NBAD Paris de la contre-garantie de la société Atradius et ce, nonobstant la connaissance que NBAD pouvait avoir de l’ordonnance du 27 janvier 2012, étrangère aux rapports entre NBAD Egypt et la société N-FERT ; qu’en décidant le contraire, la cour d’appel a violé l’article 2321, alinéa 2, du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR débouté NBAD Paris, émettrice d’une garantie à première demande et bénéficiaire d’une contre-garantie à première demande délivrée par la société Atradius, de sa prétention à voir condamner cette dernière à exécuter son engagement de contre-garantie ;

AUX MOTIFS QUE : « aux termes de l’article 2321 alinéa 2 du code civil, « le garant n’est pas tenu en cas d’abus ou de fraude manifestes du bénéficiaire ou de collusion de celui-ci avec le donneur d’ordre » ; l’appel d’une contre-garantie est abusif si l’appel en garantie l’est également et que ce caractère s’apprécie au moment où ce premier appel est fait, peu important que, postérieurement, une transaction soit intervenue entre le donneur d’ordre et le bénéficiaire ; en l’espèce, N-FERT, après avoir résilié le contrat avec Litwin le 26 janvier 2012, a appelé en garantie le même jour NBAD, qui a exécuté, via sa succursale égyptienne, sa garantie le 8 février 2012 alors qu’avait été notifiée à NBAD France le 30 janvier 2012 une ordonnance du président du tribunal de commerce de Paris lui interdisant de se dessaisir de quelque somme que ce soit au profit de NBAD Égypte ; N-FERT, en agissant avec célérité alors qu’elle avait été informée le 25 janvier par LITWIN de ses difficultés financières et lui avait fait savoir le lendemain qu’ « elle espérait trouver une solution appropriée pour sécuriser la poursuite du projet », a commis un abus manifeste puisque l’exécution du contrat en Égypte, objet de la garantie, n’avait nullement commencé ; (¿) la demande d’appel en garantie étant déclarée manifestement abusive, il convient de débouter la banque de l’ensemble de ses demandes » ;

ALORS QUE pour décider que l’appel de la garantie de premier rang était manifestement abusif et en déduire que l’appel de la contre-garantie l’était aussi, la cour d’appel a retenu que le bénéficiaire avait agi avec célérité, bien qu’informé des difficultés financières du donneur d’ordre et bien que l’exécution du contrat de base n’ait pas encore commencé ; qu’en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir le caractère abusif de l’appel, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 2321 alinéa 2 du code civil.

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