Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 mai 2018, 16-28.728, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. com., 16 mai 2018, n° 16-28.728
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 16-28.728
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Montpellier, 24 octobre 2016
Textes appliqués :
Article 627 du code de procédure civile, dont l’application est proposée par la partie en demande.

Article L. 623-31 du code de la propriété intellectuelle dans sa rédaction applicable en la cause.

Article D. 211-5 du même code.

Dispositif : Cassation sans renvoi
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000036980351
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2018:CO00424
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Sur les parties

Texte intégral

COMM.

LG

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 16 mai 2018

Cassation sans renvoi

Mme Y…, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 424 F-D

Pourvoi n° H 16-28.728

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Agro sélections fruits, société par actions simplifiée, dont le siège est […] ,

contre l’arrêt rendu le 25 octobre 2016 par la cour d’appel de Montpellier (2e chambre), dans le litige l’opposant à la société Pépinières X… père & fils, exploitation agricole à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 20 mars 2018, où étaient présentes : Mme Y…, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme A… , conseiller référendaire rapporteur, Mme Orsini, conseiller, Mme Labat, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme A… , conseiller référendaire, les observations de la SCP Bénabent, avocat de la société Agro sélections fruits, de la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat de la société Pépinières X… père & fils, l’avis de M. Richard de la Tour, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société Agro sélections fruits (la société ASF), titulaire de certificats d’obtentions végétales, a conclu le 25 janvier 2005 un contrat de production, d’élevage et de vente de plants semi-finis de variétés fruitières avec la société Pépinières X… père & fils (la société X…), pépiniériste, à laquelle des arboriculteurs agréés achètent des arbres pour la culture et la production de fruits, moyennant le paiement de droits d’exploitation en contrepartie des licences concédées par la société ASF ; que, par un avenant au contrat, cette dernière a accepté que la société X… commercialise des plants en Algérie pour la campagne 2008/2009 ; qu’après avoir vainement réclamé à la société X… l’état récapitulatif des ventes et des stocks stipulé au contrat, la société ASF, soutenant que la société X… avait dissimulé les ventes réalisées en Algérie, l’a assignée devant le tribunal de commerce de Montpellier, lequel a rejeté l’exception d’incompétence soulevée par la société X… au profit du tribunal de grande instance de Toulouse ; que la société X… a formé un contredit ;

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu l’article L. 623-31 du code de la propriété intellectuelle dans sa rédaction applicable en la cause, ensemble l’article D. 211-5 du même code ;

Attendu que pour dire que le tribunal de commerce de Montpellier est incompétent pour connaître de l’action de la société ASF qui relève de la compétence exclusive du tribunal de grande instance de Toulouse, l’arrêt retient que la société ASF reproche à la société X… d’avoir vendu en Algérie des variétés végétales protégées sans son consentement, ce qui implique l’examen de la méconnaissance ou non du droit attaché à la protection résultant du certificat d’obtention végétale ;

Qu’en statuant ainsi, alors que la société ASF ne fondait sa demande que sur le manquement de la société X… à ses obligations contractuelles et que l’appréciation du bien-fondé de cette demande n’impliquait aucun examen de l’existence ou de la méconnaissance d’un droit attaché à un certificat d’obtention végétale, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l’obligation pour le juge de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis ;

Attendu que pour statuer comme il fait, l’arrêt retient que la société ASF a reconnu dans son assignation devant le tribunal de commerce que les faits reprochés à la société X… n’étaient pas distincts de la contrefaçon ;

Qu’en statuant ainsi, alors que que dans son assignation, la société ASF distinguait d’une part la dissimulation par la société X… de la vente de plants en Abkhasie, laquelle n’avait pas été autorisée, fait pour lequel elle avait engagé une action en contrefaçon devant le tribunal de grande instance de Toulouse et, d’autre part, la dissimulation de la vente de plants en Algérie, laquelle avait été autorisée, fait constitutif d’un manquement aux stipulations du contrat d’élevage et de livraison dont elle avait saisi le tribunal de commerce de Montpellier, la cour d’appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé ;

Et vu l’article 627 du code de procédure civile, dont l’application est proposée par la partie en demande ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 25 octobre 2016, entre les parties, par la cour d’appel de Montpellier ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

DIT le contredit mal fondé et le rejette ;

DIT que les dépens, incluant ceux exposés devant la cour d’appel, seront supportés par la société Pépinières X… père & fils ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Bénabent, avocat aux Conseils, pour la société Agro sélections fruits

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir dit que le tribunal de commerce de Montpellier était incompétent pour connaître de l’action de la société Agro Sélections Fruits à l’encontre de la société Pépinières X… Père & Fils, qui relevait de la compétence du tribunal de grande instance de Toulouse ;

AUX MOTIFS QU’ « aux termes de l’article L. 623-4 du Code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction applicable en la cause, toute obtention végétale peut faire l’objet d’un titre appelé « certificat d’obtention végétale », qui confère à son titulaire un droit exclusif à produire, à introduire sur le territoire où le présent chapitre est applicable, à vendre ou à offrir en vente, tout ou partie de la plante ou tous éléments de reproduction ou de multiplication végétale de la variété considérée et des variétés qui en sont issues par hybridation lorsque leur reproduction exige l’emploi répété de la variété initiale ; que l’article L. 623-25 du même code, dispose que toute atteinte aux droits du titulaire d’un certificat d’obtention végétale tels que définis à l’article L. 623-4, constitue une contrefaçon, engageant la responsabilité civile de son auteur ; qu’il est constant que le fait de vendre une variété végétale protégée par un certificat d’obtention sans l’autorisation du titulaire caractérise une contrefaçon ; que l’article L. 623-31 du même code, dans sa rédaction issue de la loi du 13 décembre 2011, stipule que les actions civiles et les demandes relatives aux obtentions végétales, y compris lorsqu’elles portent également sur une question connexe de concurrence déloyale, sont exclusivement portées devant des tribunaux de grande instance (

) ; que l’article D. 631-1 rappelle que conformément à l’article D. 211-5 du code de l’organisation judiciaire (COJ), le siège et le ressort des tribunaux de grande instance appelés à connaître des actions en matière d’obtentions végétales en application de l’article L. 623-31 du code de la propriété intellectuelle, sont fixés au tableau V annexé au COJ ; que le tribunal de grande instance de Toulouse est exclusivement compétent pour connaître de ces actions dans le ressort des cours d’appel de Montpellier, Pau et Toulouse ; que la société ASF reproche à la société X… d’avoir vendu en Algérie des variétés végétales protégées sans son consentement, ce qui implique l’examen de la méconnaissance ou non du droit attaché à la protection résultant du certificat d’obtention végétale ; qu’en page 10 de l’assignation, la société ASF a précisé "encore victime de ventes dissimulées par les sociétés de M. X…, cette fois en Abkhazie, elle a assigné l’EARL X… (

) en contrefaçon des protections communautaires de variétés végétales qu’elle détient (

). Les faits ici reprochés ne peuvent plus faire l’objet d’une action en contrefaçon en raison de la prescription extinctive qui les atteint pour cette qualification. Ils n’en demeurent pas moins des contraventions au contrat, non prescrits en cette qualité" ; qu’ainsi, la société X… reconnaît expressément dans son assignation que les faits visés ne sont pas distincts de la contrefaçon mais qu’en raison de la prescription encourue pour une telle action, elle agit sur le fondement de la responsabilité contractuelle ; que l’indemnité qu’elle sollicite en application de l’article 14 du contrat est d’ailleurs la même que celle qu’elle aurait réclamée sur le fondement de la contrefaçon ; que son action relève donc de la compétence exclusive du tribunal de grande instance de Toulouse, désigné comme juridiction spécialisée ; que le jugement sera infirmé en ce qu’il a rejeté l’exception d’incompétence ; qu’il y a lieu de renvoyer l’instance opposant la société ASF à la société X… devant le tribunal de grande instance de Toulouse » ;

1°/ ALORS QUE les juges du fond sont tenus de respecter les limites du litige telles qu’elles sont fixées par les conclusions respectives des parties ; qu’en l’espèce, l’exposante reprochait à la société X…, qui avait été autorisée, par avenant du 1er mai 2008, à vendre 35 905 plants issus de 9 variétés ASF en Algérie, de lui avoir dissimulé la vente de 12 810 plants sur ce territoire en méconnaissance des stipulations du contrat d’élevage qui obligeaient, notamment, le pépiniériste à remettre après chaque campagne au concédant un état récapitulatif des ventes réalisées ; qu’en retenant cependant que la société ASF s’était limitée à reprocher à la société X… d’avoir vendu en Algérie des variétés végétales protégées « sans son consentement », soit sans autorisation, la cour d’appel a méconnu les termes du litige en violation de l’article 4 du code de procédure civile ;

2°/ ALORS QUE les actions et les demandes relatives aux obtentions végétales qui relèvent de la compétence exclusive des tribunaux de grande instance déterminés par voie réglementaire sont celles dont l’appréciation du bien-fondé implique l’examen préalable de l’existence ou de la validité des obtentions végétales en cause ; qu’en l’espèce, l’exposante reprochait à la société X…, qui avait été autorisée, par avenant du 1er mai 2008, à vendre 35 905 plants issus de 9 variétés ASF en Algérie, de lui avoir dissimulé la vente de 12 810 plants sur ce territoire en méconnaissance des stipulations du contrat d’élevage et de livraison qui obligeaient, notamment, le pépiniériste à remettre, après chaque campagne au concédant un état récapitulatif des ventes réalisées ; que l’appréciation du bien-fondé de cette demande n’impliquait nullement l’examen de la méconnaissance ou non du droit attaché à la protection résultant du certificat d’obtentions végétales des plants commercialisés, mais uniquement du point de savoir si la société Grad avait bien respecté son obligation contractuelle de remettre, au concédant, l’état récapitulatif des ventes réalisées en Algérie ; qu’en retenant le contraire, la cour d’appel a violé, par fausse application, l’article L. 623-31 du code de la propriété intellectuelle, ensemble l’article D. 211-5 du code de l’organisation judiciaire ;

3°/ ALORS QU’il est interdit au juge de dénaturer les écrits qui lui sont soumis ; que dans son assignation, la société ASF avait indiqué, d’une part, que la société X… lui avait dissimulé des ventes réalisées en Abkhazie, territoire sur lequel la vente de plants n’avait pas été autorisée par le contrat d’élevage et de livraison, fait constitutif d’acte de contrefaçon pour lesquels une action avait été engagée devant le tribunal de grande instance de Toulouse et d’autre part, que la société X… avait également dissimulé des ventes réalisées en Algérie, territoire sur lequel la vente de plants avait, au contraire, été autorisée par un avenant du 1er mai 2008, fait constitutif d’un manquement aux stipulations du contrat d’élevage et de livraison dont le tribunal de commerce de Montpellier avait été saisi dans le cadre du présent procès ; qu’en affirmant que la société ASF avait reconnu, dans son assignation devant le tribunal de commerce de Montpellier, que les faits reprochés à la société X… n’étaient pas distincts de la contrefaçon, la cour d’appel a dénaturé ladite assignation en méconnaissance du principe suivant lequel il est interdit au juge de dénaturer les écrits qui lui sont soumis ;

4°/ ALORS QU’en toute hypothèse, la déclaration d’une partie ne peut être retenue contre elle comme constituant un aveu que si elle porte sur des points de fait et non sur des points de droit ; qu’en affirmant, pour retenir la compétence exclusive du tribunal de grande instance de Toulouse, que la société ASF avait reconnu expressément dans son assignation que les faits soumis au tribunal de commerce de Montpellier n’étaient pas distincts de la contrefaçon, cependant que la qualification des faits en cause constituait un point de droit, la cour d’appel a violé l’article 1354 du code civil, en sa version applicable à la cause ;

5°/ ALORS QUE le paiement, par l’éleveur, de la pénalité stipulée à l’article 14 du contrat d’élevage et de livraison était prévu en cas « d’infractions graves ou contrefaçon » ; qu’ainsi la cour d’appel ne pouvait déduire que les faits reprochés, en l’espèce, à la société X… étaient des actes de contrefaçon de la seule circonstance que l’indemnité réclamée par l’exposante en application de l’article 14 du contrat correspondait à celle venant sanctionner des actes de contrefaçon ; qu’en statuant néanmoins de la sorte, la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil, en sa version applicable à la cause.

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Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 mai 2018, 16-28.728, Inédit