Cour de cassation, Chambre civile 3, 9 juillet 2020, 19-16.600, Inédit

  • Instance·
  • Péremption·
  • Recours gracieux·
  • Lien·
  • Annulation·
  • Juridiction·
  • Tribunaux administratifs·
  • Sursis à statuer·
  • Bretagne·
  • Sociétés

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
Cass. 3e civ., 9 juill. 2020, n° 19-16.600
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 19-16.600
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Rennes, 22 octobre 2018
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000042128265
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2020:C300457
Lire la décision sur le site de la juridiction

Texte intégral

CIV. 3

FB

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 9 juillet 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 457 F-D

Pourvoi n° M 19-16.600

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2020

Mme Q… M…, domiciliée […] , a formé le pourvoi n° M 19-16.600 contre l’arrêt rendu le 23 octobre 2018 par la cour d’appel de Rennes (1re chambre), dans le litige l’opposant :

1°/ à la société HLM Bâtiments et style de Bretagne, société anonyme, dont le siège est […] ,

2°/ à M. U… D… , domicilié […] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Nivôse, conseiller, les observations de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de Mme M…, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. D… , après débats en l’audience publique du 26 mai 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Nivôse, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Rennes, 23 octobre 2018), par acte sous seing privé du 23 août 2003, la société HLM Bâtiments et styles de Bretagne (la société BSB) a donné à bail à Mme M… une maison d’habitation et s’est engagée à la lui vendre au terme de quatre années au prix de un euro sous réserve du paiement des loyers et des charges.

2. La valeur du bien ayant été fixée à une certaine somme afin de respecter les dispositions de l’article L. 443-12 du code de la construction et de l’habitation, la société BSB a demandé une dérogation à la préfecture des Côtes-d’Armor. Par lettre du 30 septembre 2008, la société BSB a informé M. D… (le notaire) de son impossibilité de signer l’acte de vente, faute d’autorisation de la préfecture de procéder à une cession au prix de un euro.

3. Par acte du 29 juillet 2009, Mme M… a assigné la société BSB et le notaire en vente forcée et en dommages-intérêts. Un jugement avant dire droit du 5 avril 2011 a sursis à statuer et a invité la société BSB à solliciter du représentant de l’Etat l’autorisation d’exécuter son obligation de vendre l’immeuble litigieux. Par lettre du 19 septembre 2011, le préfet a refusé de donner l’autorisation de vendre le bien objet de la promesse de vente. A la suite du dépôt de conclusions par la société BSB devant le tribunal le 27 mai 2013, une ordonnance de radiation a été prononcée par le juge de la mise en état.

4. Parallèlement, par acte du 7 février 2013, le préfet a rejeté le recours gracieux de Mme M… qui a saisi le tribunal administratif aux fins d’annulation de la décision préfectorale. Un jugement du 4 février 2016 a rejeté cette requête.

5. Le 8 mars 2017, Mme M… a sollicité la réinscription de l’affaire. Le 13 mars 2017, la société BSB a conclu au fond et le notaire à la péremption de l’instance.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. Mme M… fait grief à l’arrêt de constater la péremption d’instance et de la condamner aux frais et dépens, alors :

« 1°/ que d’une part un acte interruptif de péremption peut résulter d’une diligence accomplie dans une autre instance si les deux procédures se rattachent entre elles par un lien de dépendance direct et nécessaire ; qu’en l’espèce, comme l’avait constaté le juge de la mise en état et comme le faisait valoir Mme Q… M… dans ses conclusions d’appel, les actes accomplis dans l’instance administrative opposant notamment Mme M…, le préfet des Côtes d’Armor et la société BSB ont eu pour effet d’interrompre les délais de péremption courus dans l’instance civile en raison du lien de dépendance directe et nécessaire entre les deux instances ; qu’en effet, l’objet principal de l’instance introduite par Mme M… devant le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc consistait en la reconnaissance de sa qualité de propriétaire de cette même maison et, au cas de rejet de cette première demande, en une demande d’indemnisation de son préjudice ; que le préfet des Côtes d’Armor n’ayant pas donné à la société BSB l’autorisation de vendre l’immeuble litigieux à Mme Q…, cette dernière a saisi le tribunal administratif d’une requête en annulation de la décision du préfet de rejeter son recours gracieux, la société BSB étant partie à ladite instance ; qu’il s’en évinçait que l’instance civile n’aurait pu, en aucun cas, donner lieu à jugement tant que n’était pas connue la décision définitive de la juridiction administrative déterminante de la réalisation ou non de la vente promise et avait donc nécessairement un lien de dépendance direct et certain ; qu’en décidant cependant que s’il était exact que l’instance introduite le 10 avril 2013 par Madame M… devant la juridiction administrative avait pour objet l’annulation de la décision du 7 février 2013, par laquelle le préfet des Côtes-d’Armor avait rejeté, sur recours gracieux, son opposition à la vente du bien litigieux à Mme M…, et que l’issue de cette instance était susceptible d’avoir une incidence sur l’issue de la procédure introduite devant le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc, le lien de dépendance direct et nécessaire entre les instances des deux juridictions n’est pas établi de ce seul fait, la cour d’appel a violé l’article 386 du code de procédure civile ;

2°/ que d’autre part après avoir relevé que le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc ne pouvait statuer sur le fond du litige tant que l’issue de l’instance introduite par Mme M… devant le tribunal administratif ayant pour objet l’annulation de la décision du 7 février 2013 par laquelle le préfet des Côtes d’Armor avait rejeté, sur recours gracieux, son opposition à la vente du bien litigieux à Mme M… et que l’issue de cette instance était susceptible d’avoir une incidence sur l’issue de la procédure introduite devant le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc, la cour a estimé que ce seul fait ne suffisait pas à caractériser « le lien de dépendance directe et nécessaire entre les instances des deux juridictions aux motifs inopérants que les parties pouvaient poursuivre la procédure pendante devant la juridiction judiciaire en présentant leur argumentation ou le cas échéant en sollicitant le sursis à statuer ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article 386 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

7. Il résulte de l’article 386 du code de procédure civile que l’instance est périmée si aucune des parties n’accomplit de diligences pendant deux ans.

8. La cour d’appel a exactement retenu que le sursis à statuer, ordonné par le jugement avant dire droit du 5 avril 2011, devait s’entendre comme suspendant le cours de la procédure jusqu’à la réponse du préfet, de sorte que la suspension de l’instance avait cessé à compter des conclusions du 27 mai 2013.

9. Elle a souverainement retenu que, si l’instance introduite par Mme M… devant le tribunal administratif le 10 avril 2013 avait pour objet l’annulation de la décision du 7 février 2013 et si l’issue de cette instance était susceptible d’avoir une incidence sur l’issue de la procédure introduite devant le juge judiciaire, le lien de dépendance directe et nécessaire entre les instances des deux juridictions n’était pas établi de ce seul fait, alors que les parties pouvaient poursuivre l’instance pendante devant la juridiction judiciaire et demander sa réinscription au rôle en présentant leur argumentation ou le cas échéant en sollicitant le sursis à statuer, de sorte qu’il n’existait pas, du seul fait d’un recours en annulation de la décision administrative, de lien de dépendance nécessaire entre les procédures.

10. Ayant constaté que le délai de péremption s’était trouvé écoulé le 27 mai 2015, sans que les parties, qui n’en étaient pas dispensées par l’ordonnance de radiation, n’aient accompli de diligences de nature à faire progresser l’affaire, la cour d’appel en a déduit à bon droit que l’instance était périmée.

11. Le moyen n’est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme M… aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour Mme M….

IL EST FAIT GRIEF A l’arrêt attaqué informé l’ordonnance du juge de la mise en état du 19 décembre 2017 en toutes ses dispositions, d’avoir constaté la péremption de l’instance enregistrée au tribunal de grande instance de Saint Brieuc sous le n° 09/00827 dans l’affaire opposant Madame Q… M…, la SA HLM Bâtiments et Styles de Bretagne et Me D… et d’avoir condamné Madame Q… M… aux dépens de première instance et d’appel avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

— AU MOTIF QUE Aux termes de l’article 386 du code de procédure civile : « L’instance est périmée lorsqu’ aucune des parties n’accomplit de diligence pendant deux ans ». En cas de lien de dépendance direct et nécessaire entre les deux instances, les diligences accomplies par une partie interrompent la péremption de l’autre instance.

Il ressort de la succession des faits que :

Par jugement du 5 avril 2011, dans l’instance pendante entre Madame M…, la SA D’HLM Bâtiments et Styles de Bretagne et Me D… , le tribunal de grande instance, statuant avant dire droit a :

— invité la société B S B à solliciter du représentant de l’Etat l’autorisation d’exécuter son obligation de vendre à Q… M…,

— ordonné la communication du jugement au Préfet des Côtes d’Armor,

— sursis à statuer sur l’ensemble des demandes.

Le représentant de l’Etat a donné sa réponse le 19 septembre 2011.

Par conclusions du 27 mai 2013, la société BSB a fait valoir cette réponse et présenté ses conclusions après jugement avant dire droit.

Par ordonnance du 28 mai 2013, le juge de la mise en état a ordonné la radiation de l’affaire au motif « qu’en application de l’article 381 du code de procédure civile, le maintien d’une affaire au rôle ne se justifie pas lorsqu’aucune diligence ne peut être attendue des parties ».

Il ressort de ces éléments qu’en l’absence d’autre précision dans le jugement avant dire droit, le sursis devait s’entendre comme suspendant le cours de la procédure jusqu’à la réponse du représentant de l’Etat. Dès lors, l’instance avait cessé d’être suspendue à compter des conclusions du 27 mai 2013. S’il est exact que l’instance introduite le 10 avril 2013 par Madame M… devant la juridiction administrative avait pour objet l’annulation de la décision du 7 février 2013, par laquelle le préfet des Côtes-d’Armor avait rejeté, sur recours gracieux, son opposition à la vente du bien litigieux à Madame M…, et que l’issue de cette instance était susceptible d’avoir une incidence sur l’issue de la procédure introduite devant le tribunal de grande instance de Saint Brieuc, le lien de dépendance direct et nécessaire entre les instances des deux juridictions n’est pas établi de ce seul fait. En l’espèce, les parties pouvaient poursuivre l’instance pendante devant la juridiction judiciaire et demander sa réinscription au rôle, en présentant leur argumentation ou le cas échéant en sollicitant le sursis à statuer. Dès lors, il n’existe pas, du seul fait d’un recours en annulation de la décision administrative, de lien de dépendance nécessaire entre les procédures. Il en résulte que le délai de péremption a commencé de courir à compter des dernières conclusions du 27 mai 2013, et s’est trouvé écoulé le 27 mai 2015, sans que les parties, qui n’en étaient pas dispensées par l’ordonnance de radiation, aient accompli aucune diligence de nature à faire progresser l’affaire. L’ordonnance entreprise sera infirmée en toutes ses dispositions et la péremption de l’instance sera constatée pour l’affaire enregistrée au tribunal de grande instance de Saint Brieuc sous le n° 09/00827 dans l’affaire opposant Madame Q… M…, la SA HLM Bâtiments et Styles de Bretagne et Me U… D…

1°)- ALORS QUE D’UNE PART un acte interruptif de péremption peut résulter d’une diligence accomplie dans une autre instance si les deux procédures se rattachent entre elles par un lien de dépendance direct et nécessaire ; qu’en l’espèce, comme l’avait constaté le juge de la mise en état (cf ordonnance p 3 et 4) et comme le faisait valoir Mme Q… M… dans ses conclusions d’appel (notamment p 12, 13 et 14), les actes accomplis dans l’instance administrative opposant notamment Mme M…, le Préfet des Côtes d’Armor et la société BSB ont eu pour effet d’interrompre les délais de péremption courus dans l’instance civile en raison du lien de dépendance directe et nécessaire entre les deux instances ; qu’en effet, l’objet principal de l’instance introduite par madame M… devant le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc consistait en la reconnaissance de sa qualité de propriétaire de cette même maison et, au cas de rejet de cette première demande, en une demande d’indemnisation de son préjudice ; que lr préfet des Côtes d’Armor n’ayant pas donné à la société BSB l’autorisation de vendre l’immeuble litigieux à Mme Q…, cette dernière a saisi le tribunal administratif d’une requête en annulation de la décision du Préfet de rejeter son recours gracieux, la société BSB étant partie à ladite instance ; qu’il s’en évinçait que l’instance civile n’aurait pu, en aucun cas, donner lieu à jugement tant que n’était pas connue la décision définitive de la juridiction administrative déterminante de la réalisation ou non de la vente promise et avait donc nécessairement un lien de dépendance direct et certain ; qu’en décidant cependant que s’il était exact que l’instance introduite le 10 avril 2013 par Madame M… devant la juridiction administrative avait pour objet l’annulation de la décision du 7 février 2013, par laquelle le préfet des Côtes-d’Armor avait rejeté, sur recours gracieux, son opposition à la vente du bien litigieux à Madame M…, et que l’issue de cette instance était susceptible d’avoir une incidence sur l’issue de la procédure introduite devant le tribunal de grande instance de Saint Brieuc, le lien de dépendance direct et nécessaire entre les instances des deux juridictions n’est pas établi de ce seul fait, la cour d’appel a violé l’article 386 du code de procédure civile ;

2°)- ALORS QUE D’AUTRE PART après avoir relevé que le tribunal de grande instance de Saint Brieuc ne pouvait statuer sur le fond du litige tant que l’issue de l’instance introduite par Mme Q… M… devant le tribunal administratif ayant pour objet l’annulation de la décision du 7 février 2013 par laquelle le préfet des Côtes d’Armor avait rejeté, sur recours gracieux, son opposition à la vente du bien litigieux à Mme M… et que l’issue de cette instance était susceptible d’avoir une incidence sur l’issue de la procédure introduite devant le tribunal de grande instance de Saint Brieuc, la cour a estimé que ce seul fait ne suffisait pas à caractériser « le lien de dépendance directe et nécessaire entre les instances des deux juridictions aux motifs inopérants que les parties pouvaient poursuivre la procédure pendante devant la juridiction judiciaire en présentant leur argumentation ou le cas échéant en sollicitant le sursis à statuer ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article 386 du code de procédure civile ;

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour de cassation, Chambre civile 3, 9 juillet 2020, 19-16.600, Inédit