Cour de cassation, Chambre sociale, 16 décembre 2020, 19-18.339, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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www.ellipse-avocats.com · 3 février 2021

Nouveau 03 février 2021 Les problématiques soulevées par les expertises santé / sécurité, initiées auparavant par le Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (ex-CHSCT) et dorénavant par le Comité économique et social (CSE), sont récurrentes. Leurs procédures de contestation impliquent une pluralité d'acteurs (Direction, CSE, experts) parfois simultanément, parfois séparément. Il s'agit en outre de procédures particulières, aux délais raccourcis et aux fondements variés (opportunité de l'expertise, son étendue, son coût prévisionnel et final…). Face à ces enjeux, la …

 
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Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 16 déc. 2020, n° 19-18.339
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 19-18.339
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Bobigny, 12 juin 2019
Textes appliqués :
Article L. 4614-12, 1°, du code du travail, alors applicable.
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 6 mars 2024
Identifiant Légifrance : JURITEXT000042746715
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2020:SO01237
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Sur les parties

Texte intégral

SOC.

CH.B

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 16 décembre 2020

Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 1237 F-D

Pourvoi n° B 19-18.339

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 16 DÉCEMBRE 2020

Le comité social et économique (CSE) de Transdev TRA, dont le siège est […] , venant aux droits du CHSCT de la société Transports rapides automobiles (TRA), a formé le pourvoi n° B 19-18.339 contre l’ordonnance rendue en la forme des référés le 13 juin 2019 par le président du tribunal de grande instance de Bobigny (chambre 9, section 3), dans le litige l’opposant :

1°/ à la société Transports rapides automobiles (TRA), société par actions simplifiée, dont le siège est […] ,

2°/ à la société Expert consulting, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,

défenderesses à la cassation.

La société Transports rapides automobiles a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l’appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l’appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Joly, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du comité social et économique de Transdev TRA, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Transports rapides automobiles, après débats en l’audience publique du 4 novembre 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Joly, conseiller référendaire rapporteur, Mme Sommé, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Reprise d’instance

1. Il est donné acte au comité social et économique de la société Transdev TRA, venant aux droits du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la société Transports rapides automobiles, de sa reprise d’instance.

Faits et procédure

2. Selon l’ordonnance attaquée (président du tribunal de grande instance de Bobigny, 13 juin 2019), statuant en la forme des référés, le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de la société Transports rapides automobiles (la société) a décidé le 14 décembre 2018 le recours à une expertise sur le fondement d’un risque grave.

3. Par assignation des 27 et 28 décembre suivants, la société a demandé au président du tribunal de grande instance d’annuler cette décision.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi incident, ci-après annexé

4. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

5. Le CHSCT fait grief à l’ordonnance d’annuler sa délibération du 14 décembre 2018, alors « que le CHSCT peut faire appel à un expert agréé lorsqu’un risque grave, identifié et actuel est constaté dans l’établissement ; qu’il appartient donc au juge saisi d’un recours tendant à l’annulation d’une délibération décidant de recourir à un expert de rechercher si le CHSCT justifie de l’existence d’un tel risque ; qu’en retenant que les conditions de recours à l’expertise n’étaient pas réunies sans rechercher si, ainsi qu’il était soutenu devant lui, le nombre d’accidents du travail au sein de l’entreprise, les alertes du CHSCT sur les conditions matérielles de travail des conducteurs, les agressions commises à l’encontre de ces derniers ou les incidents opposant les salariés de l’entreprise ne permettaient pas de caractériser l’existence d’un risque grave, identifié et actuel, le président du tribunal de grande instance a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 4614-12 1° du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l’article L. 4614-12, 1°, du code du travail, alors applicable :

6. Pour annuler la délibération du CHSCT du 14 décembre 2018, le président du tribunal de grande instance a retenu qu’aucun élément circonstancié, tangible, précis et objectif ne vient soutenir la notion de risque grave.

7. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme cela lui était demandé par le CHSCT, si le nombre d’accidents du travail au sein de l’entreprise, les alertes du CHSCT sur les conditions matérielles de travail des conducteurs, les agressions commises à l’encontre de ces derniers et les incidents opposant les salariés de l’entreprise ne permettaient pas de caractériser l’existence d’un risque grave, le président du tribunal de grande instance n’a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen du pourvoi principal, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’elle annule la délibération du 14 décembre 2018 du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la société Transports rapides automobiles qui a désigné le cabinet d’expertise Expert consulting en qualité d’expert, l’ordonnance rendue en la forme des référés le 13 juin 2019, entre les parties, par le président du tribunal de grande instance de Bobigny ;

Remet, sur ce point, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cette ordonnance et les renvoie devant le président du tribunal judiciaire de Bobigny, statuant en la forme des référés, autrement composé ;

Condamne la société Transports rapides automobiles aux dépens ;

En application de l’article L. 4614-13 du code du travail, condamne la société Transports rapides automobiles à payer à la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy la somme de 3 600 euros TTC ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’ordonnance partiellement cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour le comité social et économique (CSE) de Transdev TRA, venant aux droits du CHSCT de la société Transports rapides automobiles (TRA).

Le moyen fait grief à l’ordonnance attaquée d’AVOIR annulé la délibération du 14 décembre 2018 du CHSCT de la société TRA.

AUX MOTIFS QU’ il ressort des termes versés aux débats de la délibération ayant donné lieu le vendredi 14 décembre 2018 au vote d’une expertise externe pour risque grave, qu’aucun élément circonstancié, tangible, précis et objectif ne vient soutenir cette notion de risque grave, suite à la survenance d’un ou plusieurs événements précis qui serait dûs à l’existence de ce risque ; qu’il en est notamment ainsi des affirmations imprécises de « situations loin de s’améliorer qui perdurent ou tendent à se dégrader continuellement », « de problèmes concernant toutes les catégories et métiers », les chauffeurs aujourd’hui très impactés par ces conditions dégradées", sans constat identifiable et constatable par des éléments objectifs patents ; que de même, « les impacts du stress et de la fatigue cumulés aux conditions de sécurité et matérielles dégradées », « un sentiment de mal-être », « une détresse et une colère », « une forte dégradation du sentiment de sécurité », un stress dangereux généré par la peur« , »la dégradation du climat et des relations", sont autant d’appréciations subjectives qualifiant une seule et même considération générale, et non un risque grave, objectivement identifié et actuel au jour de la décision ; que de plus, les motifs généraux évoqués, l’inquiétude ou les craintes exprimées, les griefs accumulés au titre d’allégations non étayées et dès lors nécessairement invérifiables, les divers reproches internes et externes à l’entreprise, ne sauraient également à eux-seuls, justifier d’un risque identifié, réel et actuel ; qu’il en est de même de faits postérieurs à ladite délibération produits notamment en pièces 11 à 14 des défendeurs, faisant au surplus état d’incidents ordinaires dans la vie d’une entreprise, tels qu’un« craquement dans le dos en se levant de son poste de conduite » ou encore une « douleur à la jambe », ou « au poignet, » à son poste de conduite,

ou d’incivilités fréquentes et extérieures à l’entreprise, commises quotidiennement et en tous lieux à l’encontre de tous prestataires de service public, et n’étant pas de nature à justifier en l’espèce d’un risque grave tel qu’allégué.

1° ALORS QUE le CHSCT peut faire appel à un expert agréé lorsqu’un risque grave, identifié et actuel est constaté dans l’établissement ; que le risque grave étant la probabilité de la survenance d’une atteinte à l’intégrité physique ou psychique des salariés, l’existence d’un tel risque ne saurait être écartée au motif que celui-ci ne s’est pas réalisé ; qu’en se fondant, pour considérer que le risque grave invoqué au soutien de la délibération du CHSCT de la société TRA décidant de recourir à un expert n’était pas avéré, sur la circonstance qu’aucun événement dû à ce risque n’était survenu, le président du tribunal de grande instance a violé l’article L. 4614-12 1° du code du travail.

2° ALORS QUE le CHSCT peut faire appel à un expert agréé lorsqu’un risque grave, identifié et actuel est constaté dans l’établissement ; qu’il appartient donc au juge saisi d’un recours tendant à l’annulation d’une délibération décidant de recourir à un expert de rechercher si le CHSCT justifie de l’existence d’un tel risque ; qu’en retenant que les conditions de recours à l’expertise n’étaient pas réunies sans rechercher si, ainsi qu’il était soutenu devant lui, le nombre d’accidents du travail au sein de l’entreprise, les alertes du CHSCT sur les conditions matérielles de travail des conducteurs, les agressions commises à l’encontre de ces derniers ou les incidents opposant les salariés de l’entreprise ne permettaient pas de caractériser l’existence d’un risque grave, identifié et actuel, le président du tribunal de grande instance a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 4614-12 1° du code du travail. Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Transports rapides automobiles.

Il est fait grief à l’ordonnance attaquée d’AVOIR condamné la SAS Transports rapides Automobiles (TRA) à verser au CHSCT de la société TRA la somme de 5.880 euros au titre des frais afférents à la présente procédure et à prendre en charge les dépens de l’instance, et de l’AVOIR déboutée de sa demande visant à voir condamner le CHSCT à lui verser 2.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

AUX MOTIFS QU’ à défaut d’abus de droit caractérisé du CHSCT de la société TRA, il convient de faire droit à sa demande de faire prendre en charge par l’employeur les frais afférents à la procédure judiciaire ; qu’il convient de condamner la SAS TRANSPORTS RAPIDES AUTOMOBILES (TRA) à payer au CHSCT de la société TRA, la somme de 5.880 euros au titre de ses frais ; qu’il n’y saurait pas plus y avoir lieu à condamnation du CHSCT de la société TRA à dommages et intérêts au sens de l’article 32-1 du Code de procédure civile pour procédure abusive, laquelle n’est nullement démontrée ; qu’il convient en conséquence de débouter la SAS TRA et le Cabinet d’Expertise EXPERT CONSULTING de leur demande visant à voir condamner le CHSCT de la société TRA à 2000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

ALORS QUE l’abus de droit est caractérisé dès que la personne qui en est titulaire en outrepasse l’exercice sans motif légitime ; que le président du tribunal de grande instance ne pouvait pas écarter l’abus de droit du CHSCT sans rechercher, comme l’y invitaient les conclusions de la société TRA, si les représentants du personnel n’avaient pas agi avec une intention malicieuse en réponse aux sanctions disciplinaires prises contre deux d’entre eux, en reprenant les termes d’une résolution déjà adoptée plusieurs années auparavant et en pleine conscience de l’absence de tout fondement de la nouvelle mesure d’expertise ainsi décidée ; qu’en s’abstenant d’effectuer cette recherche, le président du tribunal de grande instance a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l’article 1240 (ancien article 1382) du code civil et de l’article 4614-13 du code du travail.

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