Conseil d'État, 4ème chambre, 19 juin 2013, 354399, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Conclusions du rapporteur public · 19 juin 2013

N° 354399 SAS COUCOU 4ème sous-section jugeant seule Séance du 16 mai 2013 Lecture du 19 juin 2013 CONCLUSIONS Mme Gaëlle DUMORTIER, rapporteur public La société Prochimat, appartenant au groupe CGR, a obtenu l'autorisation de créer à Clermont-Ferrand au ensemble cinématographique de douze salles et 2 605 fauteuils à l'enseigne « Mega-CGR ». Cette autorisation a été confirmée sur recours préalable obligatoire par la Commission nationale d'aménagement commercial en matière cinématographique. La société concurrente Coucou, appartenant au groupe Ciné-Alpes, en a demandé …

 
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Sur la décision

Référence :
CE, 4e ch., 19 juin 2013, n° 354399
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 354399
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Clermont-Ferrand, 3 octobre 2011, N° 1000819
Identifiant Légifrance : CETATEXT000033862149
Identifiant européen : ECLI:FR:CECHS:2013:354399.20130619

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée le 28 novembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par la SAS Coucou, dont le siège est 150 avenue de Haute Tarentaise, à Bourg-Saint-Maurice (73700), représentée par son président directeur général en exercice ; la SAS Coucou demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler le jugement n° 1000819 du 4 octobre 2011 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision du 12 février 2010 par laquelle la Commission nationale d’aménagement commercial statuant en matière cinématographique a accordé à la SARL Prochimat l’autorisation préalable requise en vue de la création d’un cinéma de 12 salles représentant 2 605 places à l’enseigne Mega CGR à Clermont-Ferrand ;

2°) d’annuler cette décision ;

3°) de mettre à la charge de la SARL Prochimat la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code du cinéma et de l’image animée ;

Vu la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 ;

Vu le décret n° 2008-1212 du 24 novembre 2008 ;

Vu le décret n° 2009-1393 du 11 novembre 2009 ;

Vu le décret n° 2011-921 du 1er août 2011 ;

Vu l’arrêté du 5 décembre 2008 pris pour l’application du III de l’article R. 752-7 du code de commerce et relatif à la demande portant sur les projets d’aménagement cinématographique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Benjamin de Maillard, Auditeur,

— les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Bénabent, Jehannin, avocat de la SARL Prochimat ;

1. Considérant que, par une décision du 12 février 2010, la Commission nationale d’aménagement commercial statuant en matière cinématographique a accordé à la SARL Prochimat l’autorisation de créer un complexe cinématographique « MEGA CGR » de douze salles et 2 605 places à Clermont-Ferrand, s’insérant dans le projet d’extension d’un centre commercial ; que la société requérante, exploitant des cinémas à Clermont-Ferrand, interjette appel du jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand qui a rejeté son recours tendant à l’annulation de cette décision ;

Sur la légalité externe de la décision de la commission nationale :

2. Considérant qu’aucune disposition législative ou réglementaire ne fait obligation à la commission nationale de communiquer à chacun de ses membres un dossier complet de demande d’autorisation produit par le pétitionnaire ; que si la société requérante soutient que les membres de la commission nationale n’ont reçu qu’en séance certaines des pièces complétées par la société pétitionnaire le 10 février 2010, cette circonstance a été sans influence sur la régularité de l’examen de la demande d’autorisation dont ils étaient saisis ;

En ce qui concerne l’avis des ministres intéressés :

3. Considérant qu’aux termes du quatrième alinéa de l’article R. 752-51 du code de commerce : « Le commissaire du gouvernement recueille les avis des ministres intéressés, qu’il présente à la commission nationale » ; que ces avis sont au nombre des actes dont la validité est subordonnée à la signature par une personne habilitée à engager le ministre concerné ;

4. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d’une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n’est de nature à entacher d’illégalité la décision prise que s’il ressort des pièces du dossier qu’il a été susceptible d’exercer, en l’espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu’il a privé les intéressés d’une garantie ;

5. Considérant que si la société requérante soutient que le directeur du cabinet du ministre de la culture n’était pas compétent pour signer, au nom du ministre, l’avis transmis à la Commission nationale d’aménagement commercial par lequel le ministre s’appropriait, comme il pouvait le faire, l’analyse de la directrice du Centre national du cinéma et de l’image animée, il ressort des pièces du dossier que, en l’espèce, cette irrégularité, à la supposer établie, est en tout état de cause restée sans influence sur la légalité de la décision attaquée et n’a pas privé l’intéressée d’une garantie ; qu’ainsi le moyen tiré de ce que l’avis du ministre chargé de la culture aurait été irrégulièrement émis doit être écarté ;

6. Considérant que le moyen tiré de ce que l’adjointe au chef de bureau de la planification urbaine et rurale et du cadre de vie à la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages n’avait pas compétence pour signer l’avis du ministre chargé de l’environnement manque en fait ;

Sur la légalité interne de la décision de la commission nationale :

En ce qui concerne la composition du dossier de la demande d’autorisation :

7. Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article R. 752-6 du code de commerce : « La demande d’autorisation prévue à l’article L. 752-1 et à l’article 30-2 du code de l’industrie cinématographique est présentée (…) par une personne justifiant d’un titre l’habilitant à construire sur le terrain ou à exploiter commercialement l’immeuble. » ; qu’il ressort des pièces du dossier que, par une lettre du 26 janvier 2010, la société Immochan, dont il n’est pas contesté qu’elle est la société propriétaire des parcelles concernées par l’implantation du projet, a confirmé devant la commission nationale l’autorisation qu’elle avait initialement délivrée le 13 juillet 2009 à la SARL Prochimat pour présenter une demande d’autorisation devant la commission départementale ; qu’ainsi, contrairement à ce que soutient la société requérante, la société pétitionnaire justifiait d’un titre l’habilitant à présenter sa demande ;

8. Considérant, d’autre part, qu’aux termes du III de l’article R. 752-7 du même : « La demande portant sur les projets d’aménagement cinématographique est accompagnée de renseignements et documents dont la liste est fixée par un arrêté du ministre chargé de la culture » ; que le 11° de l’article 1er de l’arrêté du 5 décembre 2008 pris en application de ces dispositions prévoit que la demande est accompagnée d'" une étude destinée à permettre d’apprécier les effets prévisibles du projet au regard des critères prévus par l’article 30-3 du code de l’industrie cinématographique et justifiant du respect des principes posés par l’article 30-1 du même code. Cette étude comporte : / a) Les éléments permettant d’apprécier l’effet potentiel du projet sur la diversité cinématographique offerte aux spectateurs en indiquant : / – le projet de programmation envisagé pour l’établissement de spectacles cinématographiques en évaluant son apport à la diversité de l’offre cinématographique dans la zone d’influence cinématographique au regard de la fréquentation cinématographique globale escomptée ; / – le type de programmation observé dans les établissements de spectacles cinématographiques implantés dans la zone d’influence cinématographique, au regard de la fréquentation cinématographique globale constatée dans cette zone ; /- le cas échéant, les difficultés rencontrées par le demandeur pour l’accès aux oeuvres cinématographiques » ; qu’il ressort des pièces du dossier que la demande sur laquelle la commission nationale a statué était accompagnée d’une étude, complétée en cours d’instruction en janvier 2010, permettant d’apprécier avec suffisamment de précision les effets prévisibles du projet au regard des critères prévus par la loi ; que cette étude comportait, en particulier, une description suffisante du projet de programmation cinématographique et des engagements de programmation de 250 films par an envisagés pour l’établissement projeté ; qu’elle comportait également les informations requises relatives aux « caractéristiques architecturales du projet au regard de son environnement » exigées par le 11° de l’article 1er de l’arrêté du 5 décembre 2008 pris en application des dispositions du III de l’article R. 752-7 précité ;

En ce qui concerne l’appréciation de la Commission nationale d’aménagement commercial :

9. Considérant qu’aux termes de l’article 30-1 du code de l’industrie cinématographique, résultant de l’article 105 de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, dans la rédaction applicable à la date de la décision attaquée, depuis lors codifié à l’article L. 212-6 du code du cinéma et de l’image animée : « Les créations, extensions et réouvertures au public d’établissements de spectacles cinématographiques doivent répondre aux exigences de diversité de l’offre cinématographique, d’aménagement culturel du territoire, de protection de l’environnement et de qualité de l’urbanisme, en tenant compte de la nature spécifique des oeuvres cinématographiques. Elles doivent contribuer à la modernisation des établissements de spectacles cinématographiques et à la satisfaction des intérêts du spectateur tant en ce qui concerne la programmation d’une offre diversifiée que la qualité des services offerts » ; qu’aux termes de l’article 30-3 du même code, désormais codifié à l’article L. 212-9 du code du cinéma et de l’image animée : " Dans le cadre des principes définis à l’article 30-1, la commission d’aménagement commercial statuant en matière cinématographique se prononce sur les deux critères suivants : / 1° L’effet potentiel sur la diversité cinématographique offerte aux spectateurs dans la zone d’influence cinématographique concernée, évalué au moyen des indicateurs suivants : / a) Le projet de programmation envisagé pour l’établissement de spectacles cinématographiques objet de la demande d’autorisation et, le cas échéant, le respect des engagements de programmation éventuellement contractés en application de l’article 90 de la loi n° 82-52 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle ; / b) La nature et la diversité culturelle de l’offre cinématographique proposée dans la zone concernée, compte tenu de la fréquentation cinématographique ; / c) La situation de l’accès des oeuvres cinématographiques aux salles et des salles aux oeuvres cinématographiques pour les établissements de spectacles cinématographiques existants ; / 2° L’effet du projet sur l’aménagement culturel du territoire, la protection de l’environnement et la qualité de l’urbanisme, évalué au moyen des indicateurs suivants : / a) L’implantation géographique des établissements de spectacles cinématographiques dans la zone d’influence cinématographique et la qualité de leurs équipements ; / b) La préservation d’une animation culturelle et le respect de l’équilibre des agglomérations ; / c) La qualité environnementale appréciée en tenant compte des différents modes de transports publics, de la qualité de la desserte routière, des parcs de stationnement ; / d) L’insertion du projet dans son environnement ; / e) La localisation du projet . » ;

10. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que l’autorisation d’aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet d’équipement cinématographique contesté compromet la réalisation des objectifs et principes énoncés par la loi ; qu’il appartient aux commissions d’aménagement commercial statuant en matière cinématographique, lorsqu’elles se prononcent sur les dossiers de demande d’autorisation, d’apprécier la conformité du projet à ces objectifs et principes, au vu des critères d’évaluation et indicateurs mentionnés à l’article 30-3 du code de l’industrie cinématographique, codifié ainsi qu’il a été dit ci-dessus à l’article L. 212-9 du code du cinéma et de l’image animée, parmi lesquels ne figure plus la densité d’équipements en salles de spectacles cinématographiques dans la zone d’attraction du projet ;

11. Considérant, en premier lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que la SARL Prochimat envisage d’aménager un complexe cinématographique de douze salles s’insérant dans un projet d’extension d’un centre commercial situé dans la zone commerciale « Croix Neyrat » au nord de l’agglomération de Clermont-Ferrand, au sein d’une zone de chalandise de trente minutes ; que les établissements cinématographiques existants sont implantés soit en centre-ville soit à Aubière, au sud de l’agglomération ; qu’ainsi le projet envisagé aura pour effet de rééquilibrer l’offre cinématographique caractérisée par un fort déséquilibre au détriment du nord de l’agglomération de Clermont-Ferrand et de diversifier et augmenter l’offre cinématographique existante ; que la société pétitionnaire a conclu avec la SARL Le Paris, exploitant en centre-ville un cinéma d’art et d’essai, un accord de partenariat en vue du renforcement de la programmation de films art et essai, dont la commission nationale pouvait tenir compte dans son appréciation des effets du projet sans pour autant porter son appréciation sur un projet d’ensemble incluant ce cinéma ; qu’ainsi, en estimant que le projet autorisé permettrait une diversification et un rééquilibrage géographique de l’offre cinématographique dans l’agglomération, sans porter une atteinte excessive aux cinémas localisés en centre-ville, la commission nationale n’a pas méconnu les objectifs fixés par le législateur ; que, par suite, le moyen tiré de l’atteinte à la diversité de l’offre cinématographique et à l’objectif d’aménagement culturel du territoire doit être écarté ;

12. Considérant, en second lieu, qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet, situé sur une friche, dans un secteur en rénovation éligible aux « zones franches urbaines », à proximité de dessertes collectives par bus et tramway et d’accès cyclables et routiers de qualité, n’offrirait pas des conditions d’accès suffisantes ; que, par suite, le moyen tiré de l’atteinte à l’environnement doit être écarté ;

13. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la SAS Coucou n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions de la SAS Coucou présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de l’Etat qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu’il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la SAS Coucou la somme de 4 000 euros verser à la SARL Prochimat, au titre des mêmes dispositions du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de la SAS Coucou est rejetée.

Article 2 : La SAS Coucou versera à la SARL Prochimat une somme de 4 000 euros au titre de

l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SAS Coucou, à la SARL Prochimat et à la Commission nationale d’aménagement commercial statuant en matière cinématographique.

Copie en sera adressée au médiateur du cinéma, au centre national du cinéma et de l’image animée et à la ministre de la culture et de la communication.

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