Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 27 mars 2019, 415817

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Impossibilité, en méconnaissance du principe de liberté d’établissement garanti par le droit de l’Union européenne, pour des sociétés françaises cousines de constituer entre elles un groupe fiscalement intégré. Société demandant la restitution des cotisations d’impôt sur les sociétés résultant de l’impossibilité d’imputer les déficits fiscaux de ses deux sociétés cousines sur ses propres bénéfices imposables, ces trois sociétés étant par ailleurs chacune à la tête d’un groupe fiscal intégré au sens de l’article 223 A du code général des impôts (CGI)…. ,,1) Une cour ne commet pas d’erreur de droit en jugeant que la société qui sollicite rétrospectivement le bénéfice de la formation d’un groupe d’intégration fiscale horizontale entre de telles sociétés françaises doit produire, à la demande de l’administration et au plus tard devant le juge de l’impôt, dans le respect des conditions de fond auxquelles est subordonné le bénéfice de l’intégration fiscale, rappelées par les articles 46 quater-0 ZD et 46 quater-0 ZE de l’annexe III au CGI, l’accord des sociétés membres du groupe d’intégration fiscale ainsi formé, sans que les conditions de délai prévues par ces articles trouvent à s’appliquer et sans qu’il soit exigé de faire usage à cette fin de documents conformes aux modèles établis par l’administration fiscale.,,,2) Une cour ne commet pas d’erreur de droit en recherchant si, non seulement les sociétés cousines, mais également chacune des filiales détenues à plus de 95 % par ces dernières ainsi que par la société requérante avaient fait connaître leur accord pour que ses résultats soient pris en compte pour la détermination du résultat d’ensemble du groupe ainsi constitué. A cet égard, compte tenu des effets attachés à l’adhésion à un groupe fiscal intégré, lesquels ne se limitent pas à la renonciation par les sociétés membres du groupe au report des déficits non imputés, mais impliquent également, en particulier, une répartition entre ces sociétés de la charge fiscale découlant du résultat d’ensemble déterminé à partir des résultats de chacune d’elle, la circonstance que les filiales de la société requérante et celles des deux autres sociétés étaient précédemment membres d’un groupe fiscal intégré vertical n’est pas de nature à permettre de présumer leur accord pour constituer un groupe fiscal intégré différent de celui pour lequel elles avaient opté.

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Deloitte Société d'Avocats · 21 janvier 2021

Le CE confirme que pour pouvoir revendiquer le bénéfice d'une intégration fiscale horizontale pour une période antérieure à la date de son instauration en France par la 2e LFR 2014, la société qui se déclare société mère doit produire la totalité des accords des sociétés qu'elle entend comprendre dans le périmètre d'intégration. On sait que la 2e LFR 2014 a instauré un régime d'intégration fiscale horizontale (L. n°2014-1655, 29 décembre 2014, art. 63), en réaction à la décision de la CJUE qui avait jugé que l'impossibilité de constituer une « entité fiscale unique » entre des sociétés …

 

Conclusions du rapporteur public · 29 décembre 2020

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Sur la décision

Référence :
CE, 8e - 3e ch. réunies, 27 mars 2019, n° 415817, Lebon T.
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 415817
Importance : Mentionné aux tables du recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Cour administrative d'appel de Versailles, 18 septembre 2017, N° 15VE01607
Précédents jurisprudentiels : [RJ1] Rappr., s'agissant de sociétés soeurs, CE, 25 octobre 2017, Ministre des finances et des comptes publics c/ SAS Sodisac, n° 394413, T. p. 577.
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000038327803
Identifiant européen : ECLI:FR:CECHR:2019:415817.20190327

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

La société en nom collectif (SNC) BPD France a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution, à concurrence de 6 996 949 euros, d’une fraction des cotisations d’impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011, assortie du versement des intérêts moratoires correspondants. Par un jugement n° 1304207 du 30 mars 2015, ce tribunal a fait droit à cette demande de restitution et rejeté le surplus de cette demande relatif aux intérêts moratoires.

Par un arrêt n° 15VE01607 du 19 septembre 2017, la cour administrative d’appel de Versailles a, sur appel du ministre des finances et des comptes publics, annulé les articles 1er et 2 de ce jugement et remis la totalité des impositions litigieuses à la charge de la société BPD France.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés le 20 novembre 2017 et les 20 février et 27 novembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la société BPD France demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;

2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter l’appel du ministre des finances et des comptes publics ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

 – le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, notamment ses articles 49 et 54 ;

 – le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

 – le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Vincent Uher, maître des requêtes en service extraordinaire,

— les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Soltner, Texidor, Perier, avocat de la société BPD France ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 mars 2019, présentée par la société BPD France ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l’article 223 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années en litige : « Une société peut se constituer seule redevable de l’impôt sur les sociétés dû sur l’ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95% au moins du capital, de manière continue au cours de l’exercice, directement ou indirectement par l’intermédiaire de sociétés (…) membres du groupe (…). / Seules peuvent être membres du groupe les sociétés (…) qui ont donné leur accord et dont les résultats sont soumis à l’impôt sur les sociétés (…). / (…) Les options et les accords sont renouvelés par tacite reconduction (…) ». En vertu de l’article 46 quater-0 ZD de l’annexe III à ce code, dans sa rédaction applicable aux années en litige, la société mère ayant opté pour le régime de l’intégration fiscale prévu par l’article 223 A doit notifier cette option au service des impôts auprès duquel est souscrite la déclaration du résultat d’ensemble et lui adresser notamment la liste des sociétés filiales qui seront membres du groupe ainsi que les attestations par lesquelles ces sociétés font connaître leur accord pour que la société mère retienne leurs résultats pour la détermination du résultat d’ensemble.

2. Il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que les sociétés de droit français BPD France, MAB Development France et Bouwfonds Financiering Participates Holding France (BFPHF), chacune à la tête d’un groupe fiscal intégré au sens de l’article 223 A du code général des impôts, sont elles-mêmes indirectement détenues à plus de 95 % par les sociétés de droit néerlandais Rabobank et Rabo Vastgoedgroep Holding NV, par l’intermédiaire de leurs filiales de droit néerlandais BPD Frankrijk BV pour la première et MAB Development Group BV pour les deux suivantes. La société BPD France a vainement réclamé à l’administration fiscale la restitution d’une fraction des cotisations d’impôt sur les sociétés et de contribution sociale assise sur cet impôt dont elle s’était acquittée au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011 au motif que le régime d’intégration fiscale prévu à l’article 223 A, en tant qu’il ne lui permettait pas de constituer un groupe d’intégration fiscale avec les sociétés des groupes ayant pour tête les sociétés MAB Development France et BFPHF et, par suite, d’imputer sur ses bénéfices imposables les déficits fiscaux de ces sociétés, était incompatible avec la liberté d’établissement garantie par l’article 49 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. La société BPD France se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 19 septembre 2017 par lequel la cour administrative d’appel de Versailles, sur recours du ministre, a annulé les articles 1er et 2 du jugement du 30 mars 2015 du tribunal administratif de Montreuil, qui avait partiellement fait droit à sa demande de décharge à concurrence d’une somme totale de 6 996 949 euros, et remis à sa charge les impositions litigieuses.

3. En premier lieu, après avoir jugé, par des motifs non contestés en cassation, que l’impossibilité de constituer un groupe fiscalement intégré entre des sociétés françaises détenues indirectement par une même société mère située dans un autre Etat membre constituait une entrave à la liberté d’établissement, la cour a jugé, sans erreur de droit, que la société qui sollicite rétrospectivement le bénéfice de la formation d’un groupe d’intégration fiscale « horizontale » entre de telles sociétés françaises doit produire, à la demande de l’administration et au plus tard devant le juge de l’impôt, dans le respect des conditions de fond auxquelles est subordonné le bénéfice de l’intégration fiscale, rappelées par les articles 46 quater-0 ZD et 46 quater-0 ZE de l’annexe III au code général des impôts, l’accord des sociétés membres du groupe d’intégration fiscale ainsi formé, sans que les conditions de délai prévues par ces articles ne trouvent à s’appliquer et sans qu’il ne soit exigé de faire usage à cette fin de documents conformes aux modèles établis par l’administration fiscale.

4. En deuxième lieu, c’est également sans erreur de droit que la cour a recherché si, non seulement les sociétés MAB Development France et BFPHF, mais également chacune des filiales détenues à plus de 95 % par ces dernières ainsi que par la société requérante avait fait connaître son accord pour que ses résultats soient pris en compte pour la détermination du résultat d’ensemble du groupe ainsi constitué. A cet égard, compte tenu des effets attachés à l’adhésion à un groupe fiscal intégré, lesquels ne se limitent pas à la renonciation par les sociétés membres du groupe au report des déficits non imputés, mais impliquent également, en particulier, une répartition entre ces sociétés de la charge fiscale découlant du résultat d’ensemble déterminé à partir des résultats de chacune d’elle, la circonstance que les filiales de la société requérante et celles des sociétés MAB Development France et BFPHF étaient précédemment membres d’un groupe fiscal intégré « vertical » n’était, contrairement à ce qui est soutenu, pas de nature à permettre de présumer leur accord pour constituer, à compter de l’exercice clos en 2009, un groupe fiscal intégré différent de celui pour lequel elles avaient opté.

5. En troisième lieu, en rejetant dans sa totalité la demande de la société BPD France, qui avait la nature d’un litige d’assiette de l’impôt et non d’une action en responsabilité pour faute de l’administration fiscale, au motif qu’elle n’avait pas justifié de l’accord de l’ensemble des sociétés incluses dans le périmètre du groupe fiscal intégré dont elle sollicitait le bénéfice sans soutenir que la production de ces accords aurait été impossible ou excessivement difficile, la cour, qui ne s’est pas méprise sur la portée des écritures de la requérante, n’a ni méconnu son office de juge de l’impôt ni commis d’erreur de droit.

6. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la société BPD France doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la société BPD France est rejeté.


Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société en nom collectif BPD France et au ministre de l’action et des comptes publics.

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