CEDH, Cour (première section), AFFAIRE DE JORIO c. ITALIE, 3 juin 2004, 73936/01

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Chronologie de l’affaire

Commentaire1

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Sur la décision

Référence :
CEDH, Cour (Première Section), 3 juin 2004, n° 73936/01
Numéro(s) : 73936/01
Type de document : Arrêt
Jurisprudence de Strasbourg : A. c. Royaume-Uni, no 35373/97, §§ 75-77, 86, 17 décembre 2002
Golder c. Royaume-Uni, arrêt du 21 février 1975, série A no 18, pp. 17-18, §§ 35-36
James et autres c. Royaume-Uni, arrêt du 21 février 1986, série A no 98, pp. 46-47, § 81
Powell et Rayner c. Royaume-Uni, arrêt du 21 février 1990, série A no 172, p. 16, § 36
Fayed c. Royaume-Uni, arrêt du 21 septembre 1994, série A no 294-B, pp. 49-50, § 65
Tomasi c. France, arrêt du 27 août 1992, série A no 241-A, p. 43, § 121
Osman c. Royaume-Uni, arrêt du 28 octobre 1998, Recueil 1998-VIII, p. 3166, § 136
Bellet c. France, arrêt du 4 décembre 1995, série A no 333-B, p. 42, § 36
Cordova c. Italie (no 1), no 40877/98, §§ 22-27, 49, 52, 57-61, 63, 30 janvier 2003
Cordova c. Italie (no 2), no 45649/99, §§ 26-31, 50, 53, 58-64, 30 janvier 2003
Khalfaoui c. France, no 34791/97, §§ 35-36, CEDH 1999-IX
Papon c. France, no 54210/00, § 90, 25 juillet 2002
Perote Pellon c. Espagne, no 45238/99, § 57, 25 juillet 2002
Rojas Morales c. Italie, no 39676/98, § 42, 16 novembre 2000
Sakkopoulos c. Grèce, no 61828/00, § 59, 15 janvier 2004
Waite et Kennedy c. Allemagne [GC], no 26083/94, §§ 58, 68-70, CEDH 1999-I
Niveau d’importance : Importance moyenne
Opinion(s) séparée(s) : Oui
Conclusions : Violation de l'art. 6-1 ; Dommage matériel - demande rejetée ; Préjudice moral - constat de violation suffisant ; Remboursement partiel frais et dépens - procédure nationale ; Remboursement partiel frais et dépens - procédure de la Convention
Identifiant HUDOC : 001-66365
Identifiant européen : ECLI:CE:ECHR:2004:0603JUD007393601
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Sur les parties

Texte intégral

PREMIÈRE SECTION

AFFAIRE DE JORIO c. ITALIE

(Requête no 73936/01)

ARRÊT

STRASBOURG

3 juin 2004

DÉFINITIF

10/11/2004 

Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.


En l’affaire de Jorio c. Italie,

La Cour européenne des Droits de l’Homme (première section), siégeant en une chambre composée de :

M.P. Lorenzen, président,
MmesF. Tulkens,
N. Vajić,
S. Botoucharova,
MM.A. Kovler,
V. Zagrebelsky,
MmeE. Steiner, juges,
et de M. S. Nielsen, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil les 6 mars 2003 et 13 mai 2004,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette dernière date :

PROCÉDURE

1.  A l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 73936/01) dirigée contre la République italienne et dont un ressortissant de cet Etat, M. Filippo de Jorio (« le requérant »), a saisi la Cour le 17 janvier 2001 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention »).

2.  Le gouvernement italien (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, M. I.M. Braguglia, et par son co-agent, M. F. Crisafulli.

3.  Le requérant alléguait en particulier que l’immunité reconnue à un sénateur avait violé son droit d’accès à un tribunal.

4.  La requête a été attribuée à la deuxième section de la Cour (article 52 § 1 du règlement). Au sein de celle-ci, la chambre chargée d’examiner l’affaire (article 27 § 1 de la Convention) a été constituée conformément à l’article 26 § 1 du règlement.

5.  Le 1er novembre 2001, la Cour a modifié la composition de ses sections (article 25 § 1 du règlement). La présente requête a été attribuée à la première section ainsi remaniée (article 52 § 1).

6.  Par une décision du 6 mars 2003, la chambre a déclaré la requête partiellement recevable.

7.  Tant le requérant que le Gouvernement ont déposé des observations écrites sur le fond de l’affaire (article 59 § 1 du règlement).

EN FAIT

I.  LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

8.  Le requérant est né en 1933 et réside à Rome.

A.  La plainte pénale du requérant

9.  Le requérant était candidat pour le Sénat aux élections législatives de 1996. Le 13 avril 1996, le journal « Il Messaggero » publia une interview avec X, adversaire politique du requérant et sénateur, dans laquelle était contenu le passage suivant :

« De Jorio n’est rien d’autre qu’un ex. Il a fait partie de la démocratie chrétienne, du parti social démocratique, de la Lega, des bruits couraient sur lui à l’époque de la P2 [une organisation secrète des francs-maçons], il a été expulsé [du parti] des retraités. Qu’il se présente comme quelqu’un de nouveau, cela me fait rire. Quant à l’impudence, personne n’est mieux que lui ».

10.  Estimant que les affirmations de X étaient fausses et déloyales, le requérant porta plainte pour diffamation. Il souligna notamment avoir toujours défendu les intérêts des retraités, n’avoir jamais été expulsé de leur parti et n’avoir jamais été « accusé » dans le cadre de l’enquête portant sur les activités de l’organisation secrète P2, où il avait été simplement témoin et avocat de trois inculpés.

11.  Le 2 octobre 1997, le juge des investigations préliminaires de Rome renvoya X en jugement devant le tribunal de cette même ville et fixa la date de l’audience au 4 décembre 1997.

12.  Le jour venu, le requérant se constitua partie civile dans la procédure pénale contre X.

13.  Par un courrier du 18 mars 1998, le Président du Sénat informa le tribunal que le 11 mars 1998, le Sénat, confirmant une proposition formulée par la Commission pour les immunités parlementaires (Giunta delle elezioni e delle immunità parlamentari), après en avoir délibéré, avait estimé que les affirmations incriminées constituaient des opinions exprimées par un parlementaire dans le cadre de ses fonctions. Par conséquent, X bénéficiait à cet égard de l’immunité prévue à l’article 68 § 1 de la Constitution.

14.  A l’audience du 9 juin 1998, les parties présentèrent leurs plaidoiries devant le tribunal de Rome.

15.  Par un jugement du 9 juin 1998, le tribunal de Rome prononça un non-lieu. Il observa notamment qu’à l’époque des faits X était sénateur et qu’aux termes de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle (arrêt no 129 du 24 avril 1996), il appartenait aux chambres législatives de décider si les faits reprochés à un parlementaire étaient couverts par l’article 68 précité. Les juridictions judiciaires devaient accepter une telle évaluation, ne pouvant soulever un conflit entre pouvoirs de l’Etat que s’il ressortait que les chambres législatives avaient commis des erreurs de procédure ou avaient interprété de manière manifestement erronée les notions d’« opinion » ou d’« exercice des fonctions ». En l’espèce, aucune faute de procédure ne pouvait être décelée. Par ailleurs, X avait agi dans le cadre d’un contentieux électoral et ses affirmations n’étaient pas manifestement injurieuses. Elles s’analysaient donc en un exercice du droit à la liberté d’expression du parlementaire, et l’article 68 § 1 de la Constitution trouvait à s’appliquer.

16.  Le requérant interjeta appel de ce jugement, demandant à la cour d’appel de soulever un conflit entre pouvoirs de l’Etat devant la Cour constitutionnelle. Il allégua notamment que les affirmations de X n’étaient pas liées à ses fonctions de parlementaire, s’inscrivant, au contraire, dans une querelle électorale.

17.  Par une ordonnance du 23 novembre 1999, la cour d’appel de Rome observa qu’aux termes des dispositions internes pertinentes, l’appel du requérant devait être considéré comme un pourvoi en cassation et ordonna la transmission du dossier à la Cour de cassation.

18.  Par un arrêt du 19 juin 2000, dont le texte fut déposé au greffe le 27 juillet 2000, la Cour de cassation, estimant que le tribunal de Rome avait motivé de façon logique et correcte tous les points controversés, déclara le pourvoi du requérant irrecevable car manifestement dépourvu de fondement.

B.  La procédure civile entamée par le requérant

19.  Entre-temps, le 27 mai 1999, le requérant avait assigné X devant le tribunal civil de Rome afin d’obtenir la réparation des dommages subis à la suite des affirmations contenues dans l’interview publiée le 13 avril 1996. Il allégua que l’immunité reconnue par le Sénat à X ne trouvait pas à s’appliquer à une procédure civile en réparation des dommages. Le requérant ne demanda pas au juge civil de soulever un conflit entre pouvoirs de l’Etat devant la Cour constitutionnelle.

20.  La première audience eut lieu le 23 février 2000. Après deux audiences, le 12 décembre 2001 les parties présentèrent leurs conclusions et le juge rapporteur mit l’affaire en délibéré.

21.  Par un jugement du 3 avril 2002, dont le texte fut déposé au greffe le 8 mai 2002, le tribunal de Rome rejeta la demande du requérant. Ayant examiné les faits et le contexte dans lequel ils s’étaient produits, le tribunal estima qu’il y avait lieu de confirmer la délibération du Sénat du 11 mars 1998 selon laquelle les déclarations de X avaient été faites dans le cadre des fonctions parlementaires de leur auteur. Le jugement continua comme suit :

« A supposer même que le tribunal puisse ne pas tenir compte de cette délibération, on devrait de toute manière considérer applicable la cause de justification (scriminante) du droit de critique politique, qui se manifeste dans l’expression d’un jugement ou d’une opinion, qui en tant que telle ne peut pas [être] rigoureusement objective, étant fondée sur une interprétation (...) de faits et de comportements, et dont le caractère blessant (graffiante) est lié à son efficacité polémique. A cet égard, (...) on peut estimer que l’« attaque » de X à M. De Jorio ne porte pas sur la personne [du requérant], étant au contraire [lié] au cadre politique de référence du sujet critiqué.

Ayant estimé, partant, que X a exercé un droit garanti par la Constitution ; ayant exclu que X a commis l’infraction de diffamation ; ne disposant pas d’éléments permettant d’établir un préjudice patrimonial provoqué par un acte illicite (...), la demande [du requérant] doit être rejetée ».    

22.  A une date non précisée, le requérant interjeta appel de ce jugement. X allégua devant la cour d’appel que ses affirmations étaient couvertes par l’immunité parlementaire. Selon les informations fournies par le requérant le 1er mars 2004, la procédure devant la cour d’appel était, à cette date, encore pendante. 

II.  LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS

A.  L’immunité parlementaire  

23.  L’article 68 § 1 de la Constitution et la jurisprudence de la Cour constitutionnelle en matière d’immunité parlementaire sont décrits dans les arrêts Cordova c. Italie (voir Cordova c. Italie (no 1), no 40877/98, §§ 22-27, 30 janvier 2003 ; Cordova c. Italie (no 2), no 45649/99, §§ 26-31, 30 janvier 2003).

B.  La « prorogation » des pouvoirs des chambres législatives

24.  Aux termes de l’article 61 § 2 de la Constitution, jusqu’à la première réunion des chambres législatives nouvellement constituées, les pouvoirs des chambres précédentes sont prorogés.

EN DROIT

I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION

25.  Le requérant considère que la procédure pénale contre X n’a pas été équitable. Il critique notamment la décision de rejeter son pourvoi et considère que la Cour de cassation a omis tout examen visant à établir si l’article 68 de la Constitution trouvait à s’appliquer en l’espèce. Le requérant invoque l’article 6 § 1 de la Convention, qui, dans ses parties pertinentes, se lit comme suit :

 « 1.  Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) par un tribunal (...) qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) ».

A.  Les arguments des parties

1.  Le requérant

26.  Le requérant rappelle qu’aux termes de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle et de la Cour de cassation la « fonction parlementaire » ne peut pas couvrir toute l’activité politique d’un député ou d’un sénateur, en particulier quand ceux-ci s’expriment en dehors du Parlement et avec l’intention de mépriser l’un de leurs adversaires. De plus, les affirmations de X n’ont pas été faites au cours d’une réunion électorale, mais lors d’une interview à un journal à large diffusion. Par ailleurs, selon le requérant, X n’était plus sénateur au moment de la publication de l’article incriminé, étant au contraire engagé dans une campagne électorale visant à obtenir sa réélection.

27.  Le requérant souligne que son grief porte sur le procès pénal et non sur l’action civile en réparation des dommages introduite devant le tribunal de Rome, que la Cour avait, dans sa décision sur la recevabilité de la requête, qualifié de démarche dépourvue de chances de succès. En outre, le jugement du 3 avril 2002 n’est pas définitif, ayant fait l’objet d’un appel (voir le paragraphe 22 ci-dessus).  

2.  Le Gouvernement

28.  Le Gouvernement rappelle que l’immunité reconnue aux membres du Parlement pour leurs votes et opinions poursuit le but d’assurer aux représentants du peuple, dans l’exercice de leurs fonctions, la liberté d’expression la plus complète, en marge des limites imposées aux autres citoyens. Toute interférence avec cette liberté devrait être exclue.

29.  Ce principe serait d’ailleurs reconnu par toutes les démocraties parlementaires et devrait être considéré comme l’une des règles caractérisant les systèmes démocratiques, où règnent la séparation des pouvoirs et la prééminence du droit. Comme il ne serait pas raisonnable de croire qu’en signant la Convention les Hautes Parties contractantes ont souhaité y renoncer, sa compatibilité avec les droits fondamentaux de l’individu ne saurait être mise en question. Le Gouvernement se réfère, sur ce point, à la jurisprudence développée par la Commission dans les affaires X c. Autriche, Young c. Irlande et Ó’Faolain c. Irlande (voir, respectivement, les requêtes nos 3374/67, 25646/94 et 29099/95, décisions de la Commission des 4 février 1969 et 17 janvier 1996) et par la Cour dans l’affaire Fayed c. Royaume-Uni (voir l’arrêt du 21 septembre 1994, série A no 294-B).

30.  Le Gouvernement considère que, justifiée par son rattachement à une fonction prévue par la Constitution, l’immunité en question ne se heurte ni au principe de l’égalité des citoyens devant la loi ni à l’interdiction de la discrimination. Elle ne viserait ni à créer une catégorie « privilégiée » ni à permettre aux parlementaires de faire un usage arbitraire de leurs prérogatives. Elle poursuivrait au contraire le but légitime de permettre au Parlement de débattre librement et ouvertement sur toute question concernant la vie publique, sans que ses membres aient à craindre des persécutions ou de possibles conséquences sur le plan judiciaire.

31.  De plus, en cas de doute quant à l’applicabilité ou à l’étendue de l’immunité, les délibérations des chambres législatives adoptées en la matière pourraient être contestées par le pouvoir judiciaire devant la Cour constitutionnelle, compétente pour vérifier, dans chaque cas d’espèce, si les opinions incriminées ont été exprimées dans l’exercice de fonctions parlementaires. Pour décider de l’opportunité de saisir la Cour constitutionnelle, les juridictions judiciaires se prononceraient, au moins implicitement, sur le caractère correct et légitime de la délibération litigieuse. En tout état de cause, cette dernière ne pourrait à elle seules priver le juge du fond du pouvoir d’examiner le différend.

32.  A la lumière de ce qui précède, le Gouvernement estime qu’aucune restriction du droit du requérant à un tribunal ne saurait être décelée en l’espèce. Garantissant la possibilité de saisir une autorité judiciaire pour faire statuer sur une contestation relative à un droit de caractère civil, ledit droit à un tribunal n’impliquerait pas l’obligation, pour le juge, de conduire le procès dans le sens souhaité par le demandeur ou d’écarter les questions préliminaires susceptibles d’empêcher une décision sur le fond. De plus, on ne saurait déduire de l’article 6 § 1 de la Convention le droit à ce qu’une procédure pénale aboutisse à une condamnation, mais seulement le droit à obtenir, dans le cadre d’un procès pénal ou civil, une décision sur la demande de réparation introduite par la victime d’un acte prétendument illégal. 

33.  En l’espèce, le requérant a pu s’adresser à un tribunal et se constituer partie civile dans la procédure ouverte contre X. L’affaire a ensuite été tranchée par les tribunaux pénal et civil de Rome qui, examinant les faits, se sont penchés, de manière concise mais avec soin, sur la question de savoir si les conditions de forme et de fond pour l’application de l’immunité étaient remplies. Ainsi faisant, ils auraient agi avec autonomie, indépendance et impartialité, refusant d’accepter passivement la délibération parlementaire, émanant d’un organe politique.

34.  De plus, le tribunal pénal de Rome a indiqué que les affirmations de X n’étaient pas manifestement injurieuses et constituaient une manifestation légitime de la pensée du sénateur en question. Il y a donc eu une évaluation, bien que sommaire, de la nature, de la forme et du contenu des déclarations mises en cause par le requérant, ce qui constituerait un examen du fond de l’affaire, portant sur les éléments essentiels de l’accusation.

35.  Une démarche similaire a ensuite été adoptée par le juge civil, qui a examiné si les déclarations de X étaient susceptibles de constituer une atteinte au droit du requérant à l’honneur et à la réputation, concluant par la négative à la lumière des circonstances particulières du cas d’espèce.

36.  Le Gouvernement soutient par ailleurs qu’à supposer même que le requérant ait subi une atteinte à son droit d’accès à un tribunal, celle-ci a de toute façon été proportionnée au but légitime poursuivi, à savoir la liberté et la spontanéité des débats parlementaires. A cet égard, il observe que la jurisprudence plus récente de la Cour constitutionnelle montrerait que l’étendue de l’immunité parlementaire est maintenant soigneusement ajustée au but poursuivi, la haute juridiction italienne tenant compte de l’importance de garantir une protection judiciaire des droits fondamentaux à l’honneur et à la réputation de ceux qui s’estiment offensés par les déclarations d’un parlementaire. Dans ces conditions, on ne saurait conclure que le droit des particuliers à un tribunal peut se trouver atteint dans sa substance même, s’agissant, tout au plus, d’une réglementation du droit en question dont la marge d’appréciation doit, en la matière, être reconnue aux Etats contractants.  

37.  Le Gouvernement relève qu’il est vrai qu’un particulier ne peut ni saisir directement la Cour constitutionnelle ni obliger le juge du fond à le faire, mais seulement solliciter une décision en ce sens. Il estime toutefois que ce système ne peut passer pour contraire à la Convention, puisque le conflit entre pouvoirs de l’Etat vise à protéger la fonction de sauvegarde de la prééminence du droit dont le pouvoir judiciaire est investi. Par ailleurs, les parties privées peuvent intervenir dans la procédure devant la haute juridiction italienne.

38.  Selon le Gouvernement, la présente affaire se distinguerait des affaires Cordova (nos 40877/98 et 45649/99) où la Cour a conclu, par deux arrêts du 30 janvier 2003, à la violation de l’article 6 § 1 de la Convention en raison de l’immunité reconnue à un sénateur et à un député. Des importantes différences concerneraient les qualités des requérants, la nature des expressions incriminées et le contexte dans lequel celles-ci furent utilisées. De plus, l’affirmation du requérant, selon laquelle X n’était plus sénateur au moment des déclarations, serait dépourvue de fondement, car en droit italien un membre du Parlement continue à bénéficier de ses droits et de ses prérogatives jusqu’à l’élection des nouvelles chambres législatives.    

39.  Le Gouvernement allègue enfin qu’à supposer même qu’une violation puisse s’être produite dans la présente affaire, elle ne peut être attribuée qu’à un dysfonctionnement ponctuel du système italien, qui offre normalement des garanties suffisantes et doit être réputé conforme à la Convention. En effet, si le conflit entre pouvoirs avait été soulevé, il est probable que la Cour constitutionnelle, au vu de sa jurisprudence, aurait annulé la délibération du Sénat du 11 mars 1998.

B.  L’appréciation de la Cour

40.  Dans sa décision sur la recevabilité de la requête, la Cour a estimé que le grief tiré de l’article 6 de la Convention posait avant tout la question de savoir si le requérant avait pu exercer son droit d’accès à un tribunal (voir Golder c. Royaume-Uni, arrêt du 21 février 1975, série A no 18, pp. 17-18, §§ 35-36).

1.  Sur l’existence d’une ingérence dans l’exercice par le requérant de son droit d’accès à un tribunal

41.  La Cour rappelle que, d’après sa jurisprudence, l’article 6 § 1 consacre le « droit à un tribunal », dont le droit d’accès, à savoir le droit de saisir le tribunal en matière civile, ne constitue qu’un aspect (Osman c. Royaume-Uni, arrêt du 28 octobre 1998, Recueil des arrêts et décisions 1998-VIII, p. 3166, § 136). Ce droit ne vaut que pour les « contestations » relatives à des « droits et obligations de caractère civil » que l’on peut dire, au moins de manière défendable, reconnus en droit interne (voir, entre autres, James et autres c. Royaume-Uni, arrêt du 21 février 1986, série A no 98, pp. 46-47, § 81, et Powell et Rayner c. Royaume-Uni, arrêt du 21 février 1990, série A no 172, p. 16, § 36).

42.  En l’espèce, la Cour relève que, s’estimant diffamé par les affirmations de X, le requérant avait porté plainte à l’encontre du parlementaire en question et s’était constitué partie civile dans la procédure pénale qui avait par la suite été entamée. Dès lors, celle-ci portait sur un droit de caractère civil – à savoir le droit à la protection de sa réputation – dont le requérant pouvait, d’une manière défendable, se prétendre titulaire (voir Tomasi c. France, arrêt du 27 août 1992, série A no 241-A, p. 43, § 121 ; Cordova c. Italie (nos 1 et 2), précités, respectivement § 49 et § 50).

43.  La Cour note ensuite que, par sa délibération du 11 mars 1998, le Sénat a déclaré que les affirmations de X étaient couvertes par l’immunité consacrée par l’article 68 § 1 de la Constitution (voir le paragraphe 13 ci-dessus), ce qui empêchait de continuer toute procédure pénale ou civile visant à établir la responsabilité du parlementaire en question et à obtenir la réparation des dommages subis (voir le paragraphe 23 ci-dessus).

44.  Il est vrai que, comme l’affirme le Gouvernement, la légitimité de ladite délibération a fait l’objet d’un examen du tribunal pénal de Rome, qui, dans son jugement du 9 juin 1998, a estimé qu’elle n’était entachée d’aucun vice de procédure et que le Sénat n’avait pas interprété de manière manifestement erronée les notions d’« opinion » ou d’« exercice de fonctions » (voir le paragraphe 15 ci-dessus). Une évaluation analogue a été faite par le tribunal civil de Rome dans son jugement du 3 avril 2002. Cette juridiction s’est aussi penchée, à titre subsidiaire, sur la légalité des affirmations de X, considérant que ces dernières constituaient une manifestation légitime du droit de critique politique (voir le paragraphe 21 ci-dessus).

45.  On ne saurait toutefois comparer de telles appréciations à une décision sur le droit du requérant à la protection de sa réputation, ni considérer qu’un degré d’accès au juge limité à la faculté de poser une question préliminaire suffisait pour assurer au requérant le « droit à un tribunal », eu égard au principe de la prééminence du droit dans une société démocratique (voir Cordova c. Italie (nos 1 et 2), précités, respectivement § 52 et § 53, et, mutatis mutandis, Waite et Kennedy c. Allemagne [GC], no 26083/94, § 58, CEDH 1999-I). A ce sujet, il convient de rappeler que l’effectivité du droit en question demande qu’un individu jouisse d’une possibilité claire et concrète de contester un acte portant atteinte à ses droits (voir Bellet c. France, arrêt du 4 décembre 1995, série A no 333-B, p. 42, § 36). Dans la présente affaire, à la suite de la délibération du 11 mars 1998, doublée du refus de la Cour de cassation de soulever un conflit entre pouvoirs de l’Etat devant la Cour constitutionnelle, les poursuites entamées contre X ont été classées, et le requérant s’est vu priver de la possibilité d’obtenir quelque forme de réparation que ce soit pour son préjudice allégué.

46.  Il en va de même en ce qui concerne le jugement du tribunal civil de Rome du 3 avril 2002, d’où il ressort que la raison principale pour rejeter les prétentions du requérant était la délibération du Sénat du 11 mars 1998, toute autre considération quant à la nature des déclarations de X s’analysant dans un obiter dictum (voir le paragraphe 21 ci-dessus). Au demeurant, la Cour rappelle que dans sa décision sur la recevabilité de la requête, elle a écarté une exception de non-épuisement du Gouvernement observant que l’action civile du requérant, destinée à se heurter à la délibération du Sénat, était dépourvue de chances raisonnables de succès. Aux yeux de la Cour, rien ne permet de revenir sur cette conclusion.     

47.  Dans ces conditions, la Cour considère que le requérant a subi une atteinte à son droit d’accès à un tribunal.

48.  Elle rappelle de surcroît que ce droit n’est pas absolu, mais peut donner lieu à des limitations implicitement admises. Néanmoins, ces limitations ne sauraient restreindre l’accès ouvert à l’individu d’une manière ou à un point tels que le droit s’en trouve atteint dans sa substance même. En outre, elles ne se concilient avec l’article 6 § 1 que si elles poursuivent un but légitime et s’il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé (voir, parmi beaucoup d’autres, Khalfaoui c. France, no 34791/97, §§ 35-36, CEDH 1999-IX, et Papon c. France, no 54210/00, § 90, 25 juillet 2002, non publié ; voir également le rappel des principes pertinents dans Fayed c. Royaume-Uni, arrêt du 21 septembre 1994, série A no 294-B, pp. 49-50, § 65).

2.  But de l’ingérence

49.  La Cour relève que le fait pour les Etats d’accorder généralement une immunité plus au moins étendue aux parlementaires constitue une pratique de longue date, qui vise à permettre la libre expression des représentants du peuple et à empêcher que des poursuites partisanes puissent porter atteinte à la fonction parlementaire. Dans ces conditions, la Cour estime que l’ingérence en question, qui était prévue par l’article 68 § 1 de la Constitution, poursuivait des buts légitimes, à savoir la protection du libre débat parlementaire et le maintien de la séparation des pouvoirs législatif et judiciaire (voir A. c. Royaume-Uni, no 35373/97, §§ 75-77, 17 décembre 2002, et Cordova c. Italie (nos 1 et 2), précités, respectivement § 55 et § 56).

50.  Par ailleurs, la Cour ne saurait accepter la thèse du requérant selon laquelle X n’aurait pas dû bénéficier de l’immunité car, au moment des déclarations litigieuses, son mandat parlementaire avait expiré (voir le paragraphe 26 ci-dessus). En effet, comme le Gouvernement l’a à juste titre souligné (voir le paragraphe 38 ci-dessus), aux termes de l’article 61 § 2 de la Constitution, les membres du Parlement continuent à bénéficier de leurs droits et prérogatives jusqu’à la première réunion des chambres législatives nouvellement constituées (voir le paragraphe 24 ci-dessus). 

51.  Il reste à vérifier si les conséquences subies par le requérant étaient proportionnées aux buts légitimes visés.

3.  Proportionnalité de l’ingérence

52.  S’agissant des principes généraux concernant la proportionnalité des ingérences en matière d’immunité parlementaire, la Cour renvoie tout d’abord à la jurisprudence qu’elle a dégagée dans les affaires Cordova c. Italie (voir Cordova c. Italie (nos 1 et 2), précités, respectivement §§ 57-61 et §§ 58-62).

53.  En l’espèce, la Cour relève que, prononcées dans le cadre d’une interview avec un journaliste, et donc en dehors d’une chambre législative, les déclarations litigieuses de X n’étaient pas liées à l’exercice de fonctions parlementaires stricto sensu, paraissant plutôt s’inscrire dans le cadre d’une querelle entre particuliers. Or, dans un tel cas, on ne saurait justifier un déni d’accès à la justice par le seul motif que la querelle pourrait être de nature politique ou liée à une activité politique (voir, mutatis mutandis, Cordova c. Italie (no 2), précité, § 63).

54.  De l’avis de la Cour, l’absence d’un lien évident avec une activité parlementaire appelle une interprétation étroite de la notion de proportionnalité entre le but visé et les moyens employés. Il en est particulièrement ainsi lorsque les restrictions au droit d’accès découlent d’une délibération d’un organe politique. Conclure autrement équivaudrait à restreindre d’une manière incompatible avec l’article 6 § 1 de la Convention le droit d’accès à un tribunal des particuliers chaque fois que les propos attaqués en justice ont été émis par un membre du Parlement (voir Cordova c. Italie (nos 1 et 2), précités, respectivement § 63 et § 64).

55.  La Cour estime qu’en l’espèce le non-lieu rendu en faveur de X et le rejet, en première instance, de l’action civile du requérant tendant à assurer la protection de sa réputation n’ont pas respecté le juste équilibre qui doit exister en la matière entre les exigences de l’intérêt général de la communauté et les impératifs de la sauvegarde des droits fondamentaux de l’individu.

56.  La Cour attache également de l’importance au fait qu’après la délibération du Sénat du 11 mars 1998 le requérant ne disposait pas d’autres voies raisonnables pour protéger efficacement ses droits garantis par la Convention (voir, a contrario, Waite et Kennedy c. Allemagne, précité, §§ 68-70, et A. c. Royaume-Uni, précité, § 86). En effet, le refus par la Cour de cassation de soulever un conflit entre pouvoirs de l’Etat (voir les paragraphes 16 et 18 ci-dessus) a empêché la Cour constitutionnelle de se prononcer sur la compatibilité entre la délibération litigieuse et les attributions du pouvoir judiciaire. A cet égard, il convient de noter que la jurisprudence de la Cour constitutionnelle a connu sur ce point une certaine évolution et, qu’à présent, la haute juridiction italienne estime illégitime que l’immunité soit étendue à des propos n’ayant pas de rapport substantiel avec des actes parlementaires préalables dont le représentant concerné pourrait passer pour s’être fait l’écho (voir les paragraphes 23 et 36 ci-dessus).

57.  Au vu de ce qui précède, la Cour conclut qu’il y a eu violation du droit d’accès à un tribunal garanti au requérant par l’article 6 § 1 de la Convention.

II.  SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

58.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A.  Dommage

59.  Le requérant soutient que la situation dénoncée a influencé sa vie professionnelle et politique et sollicite l’octroi de 75 000 euros (EUR) à titre de préjudice moral. Pour ce qui est du dommage matériel, le requérant allègue ne pas avoir été élu sénateur à cause des diffamations de X et demande la somme de 150 000 EUR.

60.  Le Gouvernement observe que le requérant n’a pas prouvé le préjudice qu’il allègue et que, de toute manière, rien ne démontre que les affirmations de X ont influé sur l’activité professionnelle du requérant ou provoqué sa non-élection au Sénat. En tout état de cause, cette dernière serait le résultat de l’interview incriminée, et non de la violation du droit d’accès au tribunal.   

61.  La Cour rappelle qu’elle est en mesure d’octroyer une réparation pécuniaire au titre de la satisfaction équitable prévue par l’article 41 lorsque la perte ou les dommages réclamés ont été causés par la violation constatée, l’Etat n’étant par contre pas censé verser de l’argent pour les dommages qui ne lui sont pas imputables (voir Perote Pellon c. Espagne, no 45238/99, § 57, 25 juillet 2002).

62.  En l’espèce, la Cour a constaté une violation de l’article 6 § 1 de la Convention, dans la mesure où le requérant n’a pas pu avoir accès à un tribunal pour obtenir une décision sur l’atteinte alléguée à sa réputation. Cette constatation n’implique pas nécessairement que la procédure interne aurait abouti à la condamnation de X au pénal ou au paiement des dommages-intérêts.

63.  La Cour ne considère pas approprié d’octroyer une compensation au requérant pour les pertes alléguées. Aucun lien de causalité ne se trouve en effet établi entre la violation constatée et la non-élection du requérant au Sénat ou les répercussions négatives sur la vie professionnelle et politique de l’intéressé.

64.  Quant au préjudice moral, la Cour estime que, dans les circonstances de l’espèce, le constat de violation constitue en soi une satisfaction équitable suffisante. 

B.  Frais et dépens

65.  Le requérant sollicite l’octroi de 18 300 EUR pour frais et dépenses encourus pour remédier à la violation de la Convention, tant au niveau national qu’auprès des instances de Strasbourg.

66.  Le Gouvernement relève que le requérant a présenté personnellement sa cause, et observe que les notes d’honoraires qu’il a produites sont dépourvues de toute valeur légale, étant impossible d’en établir la provenance. Le Gouvernement estime partant que le requérant n’a droit à aucun remboursement de frais et, tout en s’en remettant à la sagesse de la Cour, considère que la somme sollicitée est excessive. 

67.  La Cour relève que le requérant, avant de s’adresser aux organes de la Convention, s’est constitué partie civile dans la procédure pénale entamée contre X et a soulevé la question de la légitimité de l’immunité parlementaire devant les juridictions internes compétentes, épuisant les voies de recours qui lui étaient offertes au pénal et introduisant également une action civile en dédommagement. La Cour accepte par conséquent que l’intéressé a encouru des dépenses pour faire corriger la violation de la Convention tant dans l’ordre juridique interne qu’au niveau européen (voir Rojas Morales c. Italie, no 39676/98, § 42, 16 novembre 2000). Elle trouve cependant excessifs les frais totaux revendiqués à ce titre. Elle note d’ailleurs qu’au stade de la recevabilité elle a rejeté une partie des allégations du requérant. De plus, ce dernier étant avocat, il a personnellement introduit et défendu son recours à Strasbourg. La Cour considère dès lors qu’il n’y a lieu de rembourser qu’en partie les frais exposés par le requérant devant elle et devant les juridictions nationales (voir, mutatis mutandis, Sakkopoulos c. Grèce, no 61828/00, § 59, 15 janvier 2004). Compte tenu des éléments en sa possession et de sa pratique en la matière, et statuant en équité, elle considère raisonnable de lui accorder la somme globale de 3 000 EUR.

C.  Intérêts moratoires

68.  La Cour juge approprié de baser le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À l’UNANIMITÉ,

1.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;

2.  Dit que le constat d’une violation fournit en soi une satisfaction équitable suffisante pour le dommage moral subi par le requérant ;

3.  Dit

a)  que l’Etat défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, 3 000 EUR (trois mille euros) pour frais et dépens, plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt ;

b)  qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ce montant sera à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

4.  Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 3 juin 2004 en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Søren NielsenPeer Lorenzen
GreffierPrésident

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Textes cités dans la décision

  1. Constitution du 4 octobre 1958
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CEDH, Cour (première section), AFFAIRE DE JORIO c. ITALIE, 3 juin 2004, 73936/01