CJCE, n° C-39/86, Arrêt de la Cour, Sylvie Lair contre Universität Hannover, 21 juin 1988

  • Interdiction de discrimination en raison de la nationalité·
  • Inapplicabilite des dispositions du traité limites·
  • Conditions 4 . libre circulation des personnes·
  • Inclusion 3 . libre circulation des personnes·
  • Principes, objectifs et missions des traités·
  • Maintien de la qualité de travailleur·
  • Libre circulation des travailleurs·
  • Champ d' application matériel·
  • Communauté européenne·
  • Égalité de traitement

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 21 juin 1988, Lair, C-39/86
Numéro(s) : C-39/86
Arrêt de la Cour du 21 juin 1988. # Sylvie Lair contre Universität Hannover. # Demande de décision préjudicielle: Verwaltungsgericht Hannover - Allemagne. # Non-discrimination - Accès à l'enseignement universitaire - Aide à la formation. # Affaire 39/86.
Date de dépôt : 12 février 1986
Solution : Renvoi préjudiciel
Identifiant CELEX : 61986CJ0039
Identifiant européen : ECLI:EU:C:1988:322
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Sur les parties

Note : Cet arrêt était rédigé entièrement en majuscules. Pour plus de lisibilité, nous l’avons converti en minuscules. Néanmoins, ce processus est imparfait et explique l’absence d’accents et de majuscules sur les noms propres.

Texte intégral

Avis juridique important

|

61986j0039

Arrêt de la cour du 21 juin 1988. – sylvie lair contre universität hannover. – demande de décision préjudicielle: verwaltungsgericht hannover – allemagne. – non-discrimination – accès à l’enseignement universitaire – aide à la formation. – affaire 39/86.


Recueil de jurisprudence 1988 page 03161
Édition spéciale suédoise page 00475
Édition spéciale finnoise page 00481


Sommaire

Parties

Motifs de l’arrêt

Décisions sur les dépenses

Dispositif

Mots clés


++++

1 . traite cee – champ d’ application materiel – aide accordee aux etudiants pour l’ entretien et la formation – inapplicabilite des dispositions du traite limites – frais d’ acces a l’ enseignement

( traite cee, art . 7 et 128 )

2 . libre circulation des personnes – travailleurs – egalite de traitement – avantages sociaux – notion – aide accordee pour l’ entretien et la formation en vue de la poursuite d’ etudes universitaires a finalite professionnelle – inclusion

( reglement du conseil n* 1612/68, art . 7, par 2 )

3 . libre circulation des personnes – travailleur – notion – personne entreprenant des etudes apres avoir accompli une activite professionnelle – maintien de la qualite de travailleur – conditions

( reglement du conseil n* 1612/68, art . 7, par 2 )

4 . libre circulation des personnes – travailleurs – egalite de traitement – avantages sociaux – octroi subordonne a une condition de duree de l’ activite professionnelle – inadmissibilite

( reglement du conseil n* 1612/68, art . 7, par 2 )

Sommaire


1 . s’ il est vrai que les conditions d’ acces a la formation professionnelle, y compris les etudes universitaires dans leur generalite, relevent du domaine d’ application du traite au sens de son article 7, une aide accordee par un etat membre a ses nationaux lorsqu’ ils entreprennent de telles etudes y echappe cependant, au stade actuel de l’ evolution du droit communautaire, sauf dans la mesure ou une telle aide aurait pour objet de couvrir les frais d’ inscription ou d’ autres frais, notamment de scolarite, exiges pour l’ acces a l’ enseignement .

2 . constitue un avantage social au sens de l’ article 7, par 2, du reglement n* 1612/68 une aide accordee pour l’ entretien et pour la formation en vue de la poursuite d’ etudes universitaires sanctionnees par une qualification professionnelle .

3 . un ressortissant d’ un autre etat membre ayant entrepris, dans l’ etat d’ accueil, apres y avoir accompli des activites professionnelles, des etudes universitaires sanctionnees par un diplome professionnel doit etre considere comme ayant garde sa qualite de travailleur susceptible en tant que tel de beneficier de l’ article 7, par 2, du reglement n* 1612/68, a condition, toutefois, qu’ il existe une relation entre l’ activite professionnelle prealable et les etudes en question .

4 . le droit aux avantages sociaux au sens de l’ article 7, par 2, du reglement n* 1612/68 ne saurait dependre d’ une condition, fixee par l’ etat membre d’ accueil, exigeant une duree minimale d’ activite professionnelle prealable sur le territoire de cet etat .

Parties


Dans l’ affaire 39/86,

Ayant pour objet une demande adressee a la cour, en application de l’ article 177 du traite cee, par le verwaltungsgericht hannover et tendant a obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Sylvie lair, etudiante de nationalite francaise, domiciliee a hanovre, d’ une part,

Et

Universitaet hannover, d’ autre part,

Une decision a titre prejudiciel notamment sur l’ interpretation de l’ article 7 du traite cee et de l’ article 7 du reglement n* 1612/68 du conseil, du 15 octobre 1968, relatif a la libre circulation des travailleurs a l’ interieur de la communaute ( jo l 57, p . 2 ),

La cour,

Composee de : mm . mackenzie stuart, president, mm . j . c . moitinho de almeida et g . c . rodriguez iglesias, presidents de chambre, t . koopmans, u . everling, k . bahlmann, y . galmot, c . kakouris, r . joliet, t . f . o’ higgins et f . schockweiler, juges,

Avocat general : sir gordon slynn

Greffier : mme b . pastor, administrateur

Considerant les observations presentee:s

— pour mme sylvie lair, par me h . vogt,

— pour la republique federale d’ allemagne, par m . m . zuleeg, agent,

— pour le royaume de danemark, par m . l . mikaelsen, agent,

— pour le royaume-uni, par mm . r . n . ricks, h . r . l . purse et d . donaldson, qc, agents,

— pour la commission, par mm . j . pipkorn et j . r . currall, agents,

Vu le rapport d’ audience et a la suite de la procedure orale du 21 mai 1987,

Ayant entendu les conclusions de l’ avocat general presentees a l’ audience du 17 septembre 1987,

Rend le present

Arret

Motifs de l’arrêt


1 par ordonnance du 19 novembre 1985, parvenue a la cour le 12 fevrier 1986, le verwaltungsgericht hannover a pose, en vertu de l’ article 177 du traite cee, deux questions prejudicielles portant notamment sur l’ interpretation de l’ article 7 du traite cee et de l’ article 7 du reglement n* 1612/68 du conseil, du 15 octobre 1968, relatif a la libre circulation des travailleurs a l’ interieur de la communaute ( jo l 257, p . 2 ).

2 ces questions ont ete soulevees dans le cadre d’ un recours forme par mme lair, demanderesse au principal ( ci-apres « demanderesse »), contre le refus de l’ universite de hanovre, defenderesse au principal ( ci-apres « universite »), de lui accorder une aide pour l’ entretien et pour la formation en vue de la poursuite de ses etudes universitaires .

3 il ressort du dossier que la demanderesse est une ressortissante francaise qui reside depuis le 1er janvier 1979 en republique federale d’ allemagne ou elle a travaille comme employee de banque jusqu’ au 30 juin 1981 avant de connaitre, entre le 1er juillet 1981 et le 30 septembre 1984, une alternance de periodes de chomage et de reconversion, entrecoupees de breves periodes d’ emploi dont la derniere a pris fin le 21 juillet 1983 . depuis le 1er octobre 1984, elle poursuit a l’ universite des etudes de langues et litteratures romanes et germaniques . dans l’ affaire au principal, il n’ est pas conteste que ces etudes sont sanctionnees par une qualification professionnelle .

4 en vertu de l’ article 8 de la loi federale allemande portant sur l’ aide a la formation ( bundesausbildungsfoerderungsgesetz – ci-apres « bafoeg ») dans la version publiee le 6 juin 1983 ( bgbl . i, p . 645, corrigee, p . 1680 ) et ulterieurement modifiee, une aide a la formation, y compris pour les etudes universitaires, est accordee, outre aux allemands, a certaines categories d’ etrangers, notamment a ceux qui ont, pendant cinq ans au total avant le debut de la partie du cycle de formation susceptible d’ aide, sejourne sur le territoire federal et y ont exerce une activite professionnelle reguliere; les allemands, quant a eux, ne doivent justifier d’ aucune periode d’ activite professionnelle prealable .

5 selon l’ article 1er du bafoeg, le droit a une telle aide est ouvert lorsque le candidat ne dispose pas d’ autres moyens pour assurer sa subsistance et financer sa formation . l’ aide est octroyee, entre autres, pour une formation « visant a l’ acquisition d’ une qualification professionnelle » jusqu’ a sa conclusion par un diplome professionnel ( voir article 7 du bafoeg ). elle est accordee « pour l’ entretien et pour la formation » et fixee forfaitairement, pour differentes categories de beneficiaires, dans les articles 12 a 14 bis, sans distinction entre les besoins de l’ entretien et ceux de la formation . conformement a l’ article 17 du bafoeg, lorsque les etudes sont accomplies dans des universites, l’ aide est accordee sous la forme d’ un pret sans interets qui doit etre rembourse par versements echelonnes a partir de la cinquieme annee suivant la fin de la duree maximale de la formation pour laquelle il a ete octroye . aux termes de l’ article 10, paragraphe 3, du bafoeg, aucune aide n’ est accordee, en principe, si le candidat a atteint, au debut de la partie du cycle de formation susceptible d’ aide, sa trentieme annee .

6 l’ aide sollicitee par la demanderesse lui a ete refusee par l’ universite au motif qu’ elle ne remplissait pas la condition posee a l’ octroi d’ une telle aide aux etrangers, a savoir avoir exerce une activite professionnelle en republique federale d’ allemagne pendant au moins cinq ans . en effet, selon l’ universite, seules sont susceptibles d’ etre prises en consideration comme periodes d’ activite professionnelle au sens de l’ article 8 du bafoeg les periodes pendant lesquelles l’ etranger se consacre a une activite professionnelle et s’ acquitte a cette occasion d’ impots et de charges sociales permettant, en derniere analyse, a la republique federale d’ allemagne d’ effectuer des investissements sociaux tels que l’ aide accordee pour l’ entretien et pour la formation .

7 saisie du recours de la demanderesse contre cette decision, la juridiction nationale se pose la question de savoir si la demanderesse peut pretendre a une aide en vertu des dispositions combinees de l’ article 8 du bafoeg, d’ une part, et des articles 48 et 49 du traite cee et de l’ article 7 du reglement n* 1612/68, d’ autre part, ou, dans la negative, si le refus de ladite aide constitue une violation du principe de non-discrimination consacre a l’ article 7, alinea 1, du traite cee .

8 c’ est dans ces circonstances que la juridiction nationale a pose a la cour les questions suivantes :

«  1 ) faut-il partir du principe, en application du droit communautaire, que les ressortissants des etats membres de la communaute europeenne qui se sont rendus en qualite de travailleurs sur le territoire d’ un autre etat membre et qui y entreprennent, en renoncant a leur activite professionnelle, des etudes universitaires sanctionnees par une qualification professionnelle ( en l’ espece : des etudes universitaires de langues et litteratures romanes et germaniques ) peuvent pretendre a cette fin a l’ octroi d’ une aide a la formation telle qu’ elle est accordee a titre d’ avantage social a tous les ressortissants de l’ autre etat membre en fonction de leurs capacites et de leurs besoins?

2 ) le fait pour un etat membre d’ octroyer a ses nationaux, en fonction de leurs capacites et de leurs besoins, une telle aide en vue de la poursuite d’ etudes universitaires sanctionnees par une qualification professionnelle, mais de subordonner l’ octroi de ladite aide pour de pareilles etudes universitaires a des ressortissants d’ un autre etat membre a la condition supplementaire que ceux-ci se soient consacres sur son territoire national, avant le debut de la formation, a une activite professionnelle pendant au moins cinq ans, constitue-t-il une discrimination contraire a l’ article 7 du traite cee?"

9 pour un plus ample expose du cadre juridique et des faits de l’ affaire au principal ainsi que des observations presentees a la cour, il est renvoye au rapport d’ audience . ces elements du dossier ne sont repris ci-dessous que dans la mesure necessaire au raisonnement de la cour .

10 il convient de traiter d’ abord la deuxieme question de la juridiction nationale qui pose le probleme general de savoir si un etudiant a, dans sa seule qualite de ressortissant d’ un autre etat membre, droit a l’ aide en question .

Sur l’ interpretation de l’ article 7 du traite cee ( deuxieme question )

11 cette question vise, en substance, a savoir si l’ article 7, alinea 1, du traite cee s’ applique a une aide pour l’ entretien et pour la formation qui est accordee par un etat membre aux ressortissants nationaux en vue de la poursuite d’ etudes universitaires .

12 il y a lieu, a titre liminaire, de rappeler que, dans l’ arret du 13 fevrier 1985 ( gravier, 293/83, rec . p . 606 ), la cour a juge, d’ une part, qu’ un traitement inegal fonde sur la nationalite doit etre considere comme une discrimination prohibee par l’ article 7 du traite cee lorsqu’ il se situe dans le domaine d’ application dudit traite et, d’ autre part, que les conditions d’ acces a la formation professionnelle relevent dudit domaine . dans l’ arret du 2 fevrier 1988 ( blaizot, 24/86, rec . p . 379 ), la cour a precise que les etudes universitaires repondent, dans leur generalite, aux conditions requises pour etre considerees comme faisant partie de la formation professionnelle au sens du traite cee .

13 en revanche, la cour n’ a pas eu a se prononcer dans les arrets precites sur la question de savoir si un ressortissant d’ un autre etat membre a droit, lorsqu’ il entreprend de telles etudes, a une aide etatique qui est accordee aux ressortissants nationaux .

14 ce n’ est que dans la mesure ou une telle aide aurait pour objet de couvrir les frais d’ inscription ou d’ autres frais, notamment de scolarite, exiges pour l’ acces a l’ enseignement, qu’ il resulte de l’ arret du 13 fevrier 1985, precite, qu’ elle releve, au titre des conditions d’ acces a la formation professionnelle, du domaine d’ application du traite cee et que, par consequent, le principe de non-discrimination en raison de la nationalite consacre par l’ article 7 du traite cee trouve a s’ appliquer .

15 sous cette reserve, il convient de constater que, au stade actuel de l’ evolution du droit communautaire, une aide accordee aux etudiants pour l’ entretien et pour la formation echappe en principe au domaine d’ application du traite cee au sens de son article 7 . en effet, elle releve, d’ une part, de la politique de l’ enseignement, laquelle n’ a pas ete soumise en tant que telle a la competence des institutions communautaires ( voir arret du 13 fevrier 1985, precite ), et, d’ autre part, de la politique sociale, qui appartient au domaine de la competence des etats membres dans la mesure ou elle ne fait pas l’ objet de dispositions particulieres du traite cee ( voir arret du 9 juillet 1987, allemagne et autres/commission, 281, 283 a 285 et 287/85 – politique migratoire – rec . p . 3203 ).

16 il convient donc de repondre a la deuxieme question que, au stade actuel de l’ evolution du droit communautaire, l’ article 7, alinea 1, du traite cee ne s’ applique a une aide pour l’ entretien et pour la formation, qui est accordee, par un etat membre, aux ressortissants nationaux en vue de la poursuite d’ etudes universitaires, que dans la mesure ou une telle aide aurait pour objet de couvrir les frais d’ inscription ou d’ autres frais, notamment de scolarite, exiges pour l’ acces a l’ enseignement .

Sur l’ interpretation de l’ article 7 du reglement n* 1612/68 ( premiere question )

17 la premiere question relative a l’ interpretation de l’ article 7 du reglement n* 1612/68 presente trois branches distinctes qui concernent, respectivement, les points de savoir :

— si une aide accordee pour l’ entretien et pour la formation en vue de la poursuite d’ etudes universitaires sanctionnees par une qualification professionnelle constitue ou non un « avantage social » au sens de l’ article 7, paragraphe 2, du reglement n* 1612/68;

— si le ressortissant d’ un autre etat membre qui entreprend, dans l’ etat d’ accueil, apres y avoir accompli des activites professionnelles, des etudes universitaires, doit etre considere comme ayant garde sa qualite de « travailleur » et peut, des lors, beneficier, en cette qualite, de l’ article 7, paragraphe 2, du reglement n* 1612/68;

— si un etat membre d’ accueil peut subordonner le droit aux « memes avantages sociaux » au sens de l’ article 7, paragraphe 2, du reglement n* 1612/68 a une condition exigeant une duree minimale d’ activite professionnelle prealable sur son territoire .

Quant a la notion d’ avantage social

18 en vue de la determination de la notion d’ avantage social au sens de l’ article 7, paragraphe 2, du reglement n* 1612/68, il y a lieu de rappeler, tout d’ abord, que ce reglement doit permettre d’ atteindre les objectifs fixes par les articles 48 et 49 du traite cee dans le domaine de la libre circulation des travailleurs . ce domaine fait partie de la libre circulation des personnes visees par l’ article 3,sous c ), du traite cee, et des libertes fondamentales assurees par ledit traite .

19 un travailleur ressortissant d’ un etat membre ayant fait usage de cette liberte fondamentale beneficie dans l’ etat membre d’ accueil, selon l’ article 7, paragraphe 2, du reglement n* 1612/68, « des memes avantages sociaux … que les travailleurs nationaux ».

20 fait partie des « avantages sociaux » en plus du droit specifique mentionne dans l’ article 7, paragraphe 1, dudit reglement, a savoir le droit de ne pas etre traite differemment des travailleurs nationaux pour toute condition d’ emploi et de travail, notamment en matiere de reintegration professionnelle ou de reemploi, tout autre avantage garantissant au travailleur migrant, aux termes du troisieme considerant dudit reglement, la possibilite d’ ameliorer ses conditions de vie et de travail et de faciliter sa promotion sociale .

21 dans cette perspective, la cour a juge qu’ il resulte de l’ ensemble des dispositions du reglement n* 1612/68 ainsi que de l’ objectif poursuivi que les avantages qu’ il etend aux travailleurs ressortissants d’ autres etats membres sont tous ceux qui, lies ou non a un contrat d’ emploi, sont generalement reconnus aux travailleurs nationaux, en raison, principalement, de leur qualite de travailleur ou du simple fait de leur residence sur le territoire national, et dont l’ extension aux travailleurs ressortissants d’ autres etats membres apparait, des lors, de nature a faciliter leur mobilite a l’ interieur de la communaute ( arrets du 27 mars 1985, hoeckx, 249/83, rec . p . 973, et scrivner, 122/84, rec . p . 1027 ).

22 il s’ ensuit qu’ un travailleur ressortissant d’ un autre etat membre ayant fait usage de son droit a circuler librement en tant que tel a le meme droit que les travailleurs nationaux a tous les avantages facilitant a ces derniers la qualification professionnelle et la promotion sociale .

23 il convient maintenant d’ examiner si une aide comme celle de l’ espece est ou non couverte par la notion d’ avantage social telle qu’ interpretee ci-dessus . a cet egard, il faut relever qu’ une telle aide, accordee pour l’ entretien de l’ etudiant et pour sa formation, est, notamment du point de vue du travailleur, particulierement appropriee a contribuer a sa qualification professionnelle et a faciliter sa promotion sociale . en outre, l’ aide ainsi que le remboursement des prestations recues sont lies, dans le droit national, aux ressources dont dispose l’ interesse et dependent donc de criteres sociaux .

24 il s’ ensuit qu’ une telle aide constitue un avantage social au sens de l’ article 7, paragraphe 2, du reglement n* 1612/68 .

25 il a ete soutenu devant la cour que l’ application dudit paragraphe 2 est exclue par l’ article 7, paragraphe 3, du reglement n* 1612/68, eu egard au contenu specifique de cette derniere disposition, qui prevoit que le travailleur ressortissant d’ un etat membre « beneficie egalement, au meme titre et dans les memes conditions que les travailleurs nationaux, de l’ enseignement des ecoles professionnelles et des centres de readaptation ou de reeducation ».

26 a cet egard, il convient de constater que, pour qu’ une institution d’ enseignement puisse etre consideree comme une ecole professionnelle au sens de cette disposition, il ne suffit pas qu’ une certaine formation professionnelle y soit dispensee . la notion d’ ecole professionnelle est plus restreinte et se refere exclusivement a des institutions qui ne dispensent qu’ un enseignement soit intercale dans une activite professionnelle, soit etroitement lie a celle-ci, notamment pendant l’ apprentissage . tel n’ est pas le cas des universites .

27 toutefois, s’ il est vrai que l’ article 7, paragraphe 3, dudit reglement prevoit un avantage social specifique, il ne s’ ensuit pas pour autant qu’ une aide accordee pour l’ entretien et pour la formation en vue de la poursuite des etudes dans une institution qui ne releve pas de la notion d’ ecole professionnelle au sens de cette disposition ne puisse pas etre consideree comme un avantage social au sens de son article 7, paragraphe 2 .

28 il y a donc lieu de repondre a la premiere branche de la premiere question qu’ une aide accordee pour l’ entretien et pour la formation en vue de la poursuite d’ etudes universitaires sanctionnees par une qualification professionnelle constitue un avantage social au sens de l’ article 7, paragraphe 2, du reglement n* 1612/68 .

Quant a la notion de travailleur

29 a cet egard, les trois etats membres qui ont depose des observations soutiennent qu’ une personne perd la qualite de travailleur a laquelle sont subordonnes les avantages sociaux lorsqu’ elle renonce, dans l’ etat d’ accueil, soit a son activite professionnelle prealable, soit, si elle se trouve au chomage, a la recherche d’ un emploi afin d’ y suivre un enseignement a plein temps . la commission conteste ce point de vue .

30 il convient, tout d’ abord, de constater que ni les termes de l’ article 7, paragraphe 2, du reglement n* 1612/68 ni ceux des articles 48 ou 49 du traite cee ne donnent une reponse expresse a la question de savoir si un travailleur migrant ayant interrompu son activite professionnelle dans l’ etat d’ accueil pour y entreprendre des etudes universitaires sanctionnees par une qualification professionnelle doit etre considere comme ayant garde sa qualite de travailleur migrant au sens dudit article 7 .

31 si le libelle des textes precites ne fournit pas une reponse explicite a cette question, il existe neanmoins, dans le droit communautaire, des elements de nature a indiquer que les droits garantis aux travailleurs migrants ne dependent pas necessairement de l’ existence ou de la continuation d’ un rapport de travail .

32 en ce qui concerne les ressortissants d’ un autre etat membre qui n’ ont pas encore etabli un rapport de travail dans l’ etat d’ accueil, il faut relever d’ abord que l’ article 48, paragraphe 3, sous a ) et b ), du traite cee leur garantit le droit de repondre a des emplois effectivement offerts et de se deplacer a cet effet librement sur le territoire des etats membres . ces dispositions ont ete mises en oeuvre par le titre i de la premiere partie du reglement n* 1612/68 .

33 quant aux personnes qui ont exerce prealablement, dans l’ etat membre d’ accueil, une activite salariee reelle et effective au sens de la jurisprudence de la cour ( arrets du 23 mars 1982, levin, 53/81, rec . p . 1035, et du 3 juin 1986, kempf, 139/85, rec . p . 1746 ), mais qui ne se trouvent plus dans un rapport de travail, elles sont neanmoins, aux termes de certaines dispositions communautaires, considerees comme des travailleurs .

34 ainsi, en premier lieu, a l’ article 48, paragraphe 3, sous d ), du traite cee, sont considerees comme travailleurs des personnes qui demeurent sur le territoire d’ un etat membre apres y avoir occupe un emploi . le reglement n* 1251/70 de la commission, du 29 juin 1970, relatif aux droits des travailleurs de demeurer sur le territoire d’ un etat membre apres y avoir occupe un emploi ( jo l 142, p . 24 ), et qui a mis en oeuvre cette disposition du traite, assure au travailleur ayant cesse son activite professionnelle et aux membres de sa famille le droit, dans certaines conditions, de demeurer a titre permanent sur le territoire d’ un etat membre . en second lieu, la directive 68/360 du conseil, du 15 octobre 1968, relative a la suppression des restrictions aux deplacements et aux sejours des travailleurs des etats membres et de leur famille a l’ interieur de la communaute ( jo l 257, p . 13 ), interdit aux etats membres, dans certaines conditions de retirer aux travailleurs migrants la carte de sejour du seul fait qu’ ils n’ occupent plus d’ emploi . enfin, en troisieme lieu, selon l’ article 7, paragraphe 1, du reglement n* 1612/68, un travailleur migrant tombe en chomage ne peut etre traite differemment, en ce qui concerne sa reintegration professionnelle ou son reemploi, des travailleurs nationaux se trouvant dans la meme situation .

35 il convient de relever encore que l’ article 7, paragraphe 3, du reglement n* 1612/68 garantit aux travailleurs migrants le droit de beneficier, au meme titre et dans les memes conditions que les travailleurs nationaux, de l’ enseignement des ecoles professionnelles et des centres de readaptation ou de reeducation . or, ce droit a un enseignement specifique garanti par la legislation communautaire ne depend pas de l’ existence continue d’ un rapport de travail .

36 il y a donc lieu de constater que certains droits lies a la qualite de travailleur sont garantis aux travailleurs migrants meme si ceux-ci ne se trouvent plus engages dans un rapport de travail .

37 dans le domaine de l’ aide a l’ enseignement universitaire, un tel lien entre la qualite de travailleur et une aide accordee pour l’ entretien et pour la formation en vue de la poursuite des etudes universitaires presuppose, toutefois, une continuite entre l’ activite professionnelle precedemment exercee et les etudes poursuivies, en ce sens qu’ il doit exister une relation entre l’ objet des etudes et l’ activite professionnelle prealable . cette condition de continuite ne saurait cependant etre exigee dans le cas d’ un travailleur migrant, tombe en chomage involontaire, que la situation du marche de l’ emploi contraint d’ operer une reconversion professionnelle dans un autre secteur d’ activite .

38 cette conception de la libre circulation des travailleurs migrants correspond d’ ailleurs a une evolution actuelle des carrieres professionnelles . en effet, les carrieres continues sont moins frequentes qu’ autrefois . il arrive donc que des activites professionnelles soient interrompues par des periodes de formation, de conversion ou de recyclage .

39 des lors, il convient de repondre a la deuxieme branche de la premiere question qu’ un ressortissant d’ un autre etat membre ayant entrepris, dans l’ etat d’ accueil, apres y avoir accompli des activites professionnelles, des etudes universitaires sanctionnees par un diplome professionnel doit etre considere comme ayant garde sa qualite de travailleur susceptible en tant que tel de beneficier de l’ article 7, paragraphe 2, du reglement n* 1612/68, a condition, toutefois, qu’ il existe une relation entre l’ activite professionnelle prealable et les etudes en question .

Quant a la fixation d’ une duree minimale d’ activite professionnelle prealable comme condition pour l’ octroi des memes avantages sociaux

40 a cet egard, les trois etats membres qui ont depose des observations soutiennent que tout etat membre a la possibilite d’ exiger du ressortissant d’ un autre etat membre, qui demande l’ octroi d’ une aide pour l’ entretien et pour la formation en vue de la poursuite d’ etudes universitaires, d’ avoir exerce au prealable sur son territoire, pendant une duree minimale, une activite professionnelle . la commission conteste ce point de vue .

41 a cet egard, il convient de souligner que l’ etudiant ressortissant d’ un autre etat membre ne peut pretendre a l’ octroi d’ une telle aide a la formation universitaire qu’ en sa qualite de travailleur au sens de l’ article 48 du traite cee et du reglement n* 1612/68 . il resulte de la jurisprudence de la cour ( voir arrets du 19 mars 1964, unger, 75/63, rec . p . 347, et du 23 mars 1982, levin, 53/81, rec . p . 1035 ) que cette notion de travailleur revet un caractere communautaire et que sa determination ne saurait etre fonction des criteres definis par les legislations nationales .

42 par consequent, les etats membres ne peuvent subordonner unilateralement l’ octroi des avantages sociaux prevus par l’ article 7, paragraphe 2, dudit reglement a une certaine periode d’ activite professionnelle ( voir arret du 6 juin 1985, frascogna, 157/84, rec . p . 1744 ).

43 dans la mesure ou l’ argumentation des trois etats membres en question est animee par la preoccupation de prevenir certains abus, qui pourraient par exemple se presenter lorsque des elements objectifs permettent d’ etablir qu’ un travailleur entre dans un etat membre dans le seul but d’ y beneficier, apres une tres courte periode d’ activites professionnelles, du systeme d’ aide aux etudiants, il y a lieu d’ observer que de tels abus ne sont pas couverts par les dispositions communautaires en cause .

44 il convient donc de repondre a la troisieme branche de la premiere question que le droit aux memes avantages sociaux au sens de l’ article 7, paragraphe 2, du reglement n* 1612/68 ne saurait dependre d’ une condition, fixee par l’ etat membre d’ accueil, exigeant une duree minimale d’ activite professionnelle prealable sur le territoire de cet etat .

Décisions sur les dépenses


Sur les depens

45 les frais exposes par la republique federale d’ allemagne, le royaume de danemark, le royaume-uni et par la commission des communautes europeennes, qui ont soumis des observations a la cour, ne peuvent faire l’ objet d’ un remboursement . la procedure revetant, a l’ egard des parties au principal, le caractere d’ un incident souleve devant la juridiction nationale, il appartient a celle-ci de statuer sur les depens .

Dispositif


Par ces motifs,

La cour,

Statuant sur les questions a elle soumises par le verwaltungsgericht hannover, par ordonnance du 19 novembre 1985, dit pour droit :

1 ) au stade actuel de l’ evolution du droit communautaire, l’ article 7, alinea 1, du traite cee ne s’ applique a une aide pour l’ entretien et pour la formation, qui est accordee par un etat membre aux ressortissants nationaux en vue de la poursuite d’ etudes universitaires, que dans la mesure ou une telle aide aurait pour objet de couvrir les frais d’ inscription ou d’ autres frais, notamment de scolarite, exiges pour l’ acces a l’ enseignement .

2 ) une aide accordee pour l’ entretien et pour la formation en vue de la poursuite d’ etudes universitaires sanctionnees par une qualification professionnelle constitue un avantage social au sens de l’ article 7, paragraphe 2, du reglement n* 1612/68 du conseil, du 15 octobre 1968, relatif a la libre circulation des travailleurs a l’ interieur de la communaute .

3 ) un ressortissant d’ un autre etat membre ayant entrepris, dans l’ etat d’ accueil, apres y avoir accompli des activites professionnelles, des etudes universitaires sanctionnees par un diplome professionnel doit etre considere comme ayant garde sa qualite de travailleur susceptible en tant que tel de beneficier de l’ article 7, paragraphe 2, du reglement n* 1612/68, a condition, toutefois, qu’ il existe une relation entre l’ activite professionnelle prealable et les etudes en question .

4 ) le droit aux memes avantages sociaux au sens de l’ article 7, paragraphe 2, du reglement n* 1612/68 ne saurait dependre d’ une condition, fixee par l’ etat membre d’ accueil, exigeant une duree minimale d’ activite professionnelle prealable sur le territoire de cet etat .

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CJCE, n° C-39/86, Arrêt de la Cour, Sylvie Lair contre Universität Hannover, 21 juin 1988