CJCE, n° C-573/07, Arrêt de la Cour, Sea Srl contre Comune di Ponte Nossa, 10 septembre 2009

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 10 sept. 2009, C-573/07
Numéro(s) : C-573/07
Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 10 septembre 2009.#Sea Srl contre Comune di Ponte Nossa.#Demande de décision préjudicielle: Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia - Italie.#Marchés publics - Procédures de passation - Marché relatif au service de collecte, de transport et d'élimination des déchets urbains - Attribution sans appel d'offres - Attribution à une société par actions dont le capital social est entièrement détenu par des collectivités publiques mais dont les statuts prévoient la possibilité d'une participation de capital privé.#Affaire C-573/07.
Date de dépôt : 28 décembre 2007
Précédents jurisprudentiels : ANAV, C-410/04
Asemfo, C-295/05
CE, 43 CE, 45 CE, 46 CE, 49 CE et 86 CE
CE, 45 CE, 46 CE, 49 CE et 86 CE ?
Coditel Brabant, C-324/07
Commission/Allemagne, C-480/06
Commission/Autriche, C-29/04
Coname ( C-231/03, Rec. p. I-7287
Consorzio Alisei, C-340/04
Parking Brixen, C-458/03
Teckal, C-107/98
Solution : Renvoi préjudiciel
Identifiant CELEX : 62007CJ0573
Identifiant européen : ECLI:EU:C:2009:532
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Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

10 septembre 2009 ( *1 )

«Marchés publics — Procédures de passation — Marché relatif au service de collecte, de transport et d’élimination des déchets urbains — Attribution sans appel d’offres — Attribution à une société par actions dont le capital social est entièrement détenu par des collectivités publiques mais dont les statuts prévoient la possibilité d’une participation de capital privé»

Dans l’affaire C-573/07,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia (Italie), par décision du 11 octobre 2007 , parvenue à la Cour le 28 décembre 2007 , dans la procédure

Sea Srl

contre

Comune di Ponte Nossa,

en présence de:

Servizi Tecnologici Comuni — Se.T.Co. SpA,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. A. Rosas, président de chambre, MM. A. Ó Caoimh, J. N. Cunha Rodrigues (rapporteur), J. Klučka et A. Arabadjiev, juges,

avocat général: M. J. Mazák,

greffier: M me L. Hewlett, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 1 er avril 2009 ,

considérant les observations présentées:

pour Sea Srl, par M e L. Nola, avvocatessa,

pour le Comune di Ponte Nossa, par M es A. Di Lascio et S. Monzani, avvocati,

pour Servizi Tecnologici Comuni — Se.T.Co. SpA, par M es M. Mazzarelli et S. Sonzogni, avvocati,

pour le gouvernement italien, par M. R. Adam puis par M me I. Bruni, en qualité d’agents, assistés de M. G. Fiengo, avvocato dello Stato,

pour le gouvernement tchèque, par M. M. Smolek, en qualité d’agent,

pour le gouvernement néerlandais, par M mes C. Wissels et C. ten Dam, en qualité d’agents,

pour le gouvernement autrichien, par M. M. Fruhmann, en qualité d’agent,

pour le gouvernement polonais, par M. A. Ratajczak, en qualité d’agent,

pour la Commission des Communautés européennes, par MM. M. Konstantinidis et C. Zadra, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 12 CE, 43 CE, 45 CE, 46 CE, 49 CE et 86 CE.

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Sea Srl (ci-après « Sea » ) au Comune di Ponte Nossa (commune de Ponte Nossa) au sujet de l’attribution par ce dernier d’un marché relatif au service de collecte, de transport et d’élimination des déchets urbains à Servizi Tecnologici Comuni — Se.T.Co. SpA (ci-après « Setco » ).

Le cadre juridique

La réglementation communautaire

3

L’article 1 er de la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004 , relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services ( JO L 134, p. 114 ), prévoit:

« […]

a)

Les ‘ marchés publics ’ sont des contrats à titre onéreux conclus par écrit entre un ou plusieurs opérateurs économiques et un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs et ayant pour objet l’exécution de travaux, la fourniture de produits ou la prestation de services au sens de la présente directive.

[…]

d)

Les ‘ marchés publics de services ’ sont des marchés publics autres que les marchés publics de travaux ou de fournitures portant sur la prestation de services visés à l’annexe II.

[…]

4. La ‘ concession de services ’ est un contrat présentant les mêmes caractéristiques qu’un marché public de services, à l’exception du fait que la contrepartie de la prestation des services consiste soit uniquement dans le droit d’exploiter le service, soit dans ce droit assorti d’un prix. »

4

Aux termes de l’article 20 de cette directive:

« Les marchés qui ont pour objet des services figurant à l’annexe II A sont passés conformément aux articles 23 à 55. »

5

L’article 28 de ladite directive dispose que les marchés sont, sauf exception, passés en recourant à la procédure ouverte ou à la procédure restreinte.

6

Selon l’article 80 de la directive 2004/18, les États membres devaient mettre en vigueur au plus tard le 31 janvier 2006 les dispositions nécessaires pour se conformer à celle-ci.

7

L’annexe II A de cette directive comprend une catégorie 16, visant les « Services de voirie et d’enlèvement des ordures: services d’assainissement et services analogues » .

La réglementation nationale et le cadre statutaire

8

L’article 2341 bis du code civil italien prévoit:

« Les pactes, quelle que soit leur forme, qui, dans le but de rendre plus stable la situation patrimoniale ou la direction de la société:

a)

ont pour objet l’exercice du droit de vote dans les sociétés par actions ou dans leurs sociétés mères;

b)

limitent le transfert d’actions ou de participations dans les sociétés mères;

c)

ont pour objet ou pour effet l’exercice, même conjoint, d’une influence dominante sur ces sociétés, ne peuvent avoir une durée supérieure à cinq ans et sont considérés comme stipulés pour cette durée, même si les parties ont prévu un délai plus long; les pactes sont renouvelables à leur échéance.

Si la durée du pacte n’est pas précisée, chacun des contractants a le droit de se retirer moyennant un préavis de 180 jours.

Les dispositions du présent article ne s’appliquent pas aux actes consistant en des accords de coopération dans la production ou dans l’échange de biens ou de services concernant des sociétés détenues à 100 % par les participants à l’accord. »

9

L’article 2355 bis du code civil dispose:

« Lorsque les actions sont nominatives ou n’ont pas été émises, les statuts peuvent subordonner leur transfert à des conditions particulières et peuvent l’interdire, pour une durée ne dépassant pas cinq ans à dater de la constitution de la société ou de l’introduction de cette interdiction.

Les dispositions des statuts qui subordonnent purement et simplement le transfert des actions à l’assentiment des organes sociaux ou d’autres sociétés sont nulles si elles ne prévoient pas, à la charge de la société ou des autres associés, une obligation de rachat, ou ne reconnaissent pas un droit de retrait en faveur du cédant; les dispositions de l’article 2357 continuent de s’appliquer. Le prix de vente ou le dividende de liquidation sont déterminés conformément aux modalités et dans la mesure prévue à l’article 2437 ter.

Les dispositions de l’alinéa précédent s’appliquent dans tous les cas où des clauses soumettent à des conditions particulières le transfert des actions à cause de mort, sauf si l’assentiment prévu est accordé.

Les limites au transfert des actions doivent résulter du titre lui-même. »

10

Le décret législatif n o 267 portant texte unique des lois sur l’organisation des entités locales (testo unico delle leggi sull’ordinamento degli enti locali), du 18 août 2000 (supplément ordinaire à la GURI n o 227, du 28 septembre 2000 ), tel que modifié par le décret-loi n o 269 portant des dispositions urgentes pour favoriser le développement et pour la correction de la situation des finances publiques (disposizioni urgenti per favorire lo sviluppo e per la correzione dell’andamento dei conti pubblici), du 30 septembre 2003 (supplément ordinaire à la GURI n o 229, du 2 octobre 2003 ), converti en loi, après modification, par la loi n o 326 du 24 novembre 2003 (supplément ordinaire à la GURI n o 274, du 25 novembre 2003 , ci-après le « décret législatif n o 267/2000 » ), dispose à son article 113, paragraphe 5:

« La prestation de services s’opère selon la réglementation du secteur et dans le respect de la réglementation de l’Union européenne, en attribuant l’exploitation du service:

a)

à des sociétés de capitaux sélectionnées au moyen d’une procédure d’appel d’offres;

b)

à des sociétés à capital mixte public et privé, dans lesquelles l’associé privé a été choisi au moyen d’une procédure d’appel d’offres garantissant le respect des dispositions internes et communautaires en matière de concurrence d’après les lignes directrices adoptées par les autorités compétentes dans des actes ou des circulaires spécifiques;

c)

à des sociétés à capital entièrement public à condition que la ou les collectivités publiques titulaires du capital social exercent sur la société un contrôle analogue à celui exercé sur leurs propres services et que la société réalise l’essentiel de son activité avec la ou les collectivités publiques qui la contrôlent. »

11

L’article 1 er , paragraphe 3, des statuts de Setco est libellé comme suit:

« Étant donné la nature de la société, peuvent être associées les collectivités locales telles que désignées à l’article 2, paragraphe 1, du décret législatif n o 267/2000 ainsi que d’autres administrations et entreprises publiques ayant la personnalité morale et dont l’activité et l’expérience peuvent offrir des opportunités favorables au plein accomplissement des objectifs de la société. »

12

Aux termes de l’article 1 er , paragraphe 4, desdits statuts:

« N’est pas admise la participation de personnes privées ou d’autres organismes et, en tout état de cause, de personnes dont la participation, même qualitativement ou quantitativement minoritaire, est susceptible d’entraîner une altération des mécanismes de ‘ contrôle analogue ’ (tels que définis par les dispositions ci-dessous et par les législations communautaire et nationale) ou une incompatibilité de gestion par rapport à la réglementation en vigueur. »

13

L’article 3 des statuts de Setco stipule:

« 1. La société a pour objet la gestion des services publics locaux et des services publics locaux intercommunaux concernant exclusivement les collectivités publiques locales attribuant lesdits services en vertu des articles 113 et suivants du décret législatif n o 267/2000 […], également par voie contractuelle entre les collectivités locales.

[…]

3. Les services et les ouvrages mentionnés ci-dessus:

pourront être effectués également en faveur de personnes privées, lorsque cela n’est pas contraire aux objectifs sociaux ou contribue à leur meilleure réalisation;

[…] »

14

L’article 6, paragraphe 4, de ces statuts prévoit:

« La société, pour éventuellement favoriser l’actionnariat le plus étendu au niveau local (des citoyens et/ou des opérateurs économiques) ou [l’actionnariat] des employés, pourra aussi émettre des actions privilégiées […] »

15

L’article 8 bis desdits statuts énonce:

« 1. L’attribution directe de services publics locaux à la société pourra être décidée, dans le respect de la réglementation nationale et communautaire en vigueur, par des associés représentant des collectivités locales ( ‘ associés adjudicateurs ’ ) pour tous ou pour certains parmi les secteurs énumérés à l’article 3 et correspondant aux divisions suivantes: division n o 1: déchets; division n o 2: eau; division n o 3: gaz; division n o 4: tourisme; division n o 5: énergie; division n o 6: services d’utilité publique.

2. La société gère les services exclusivement au profit des associés adjudicateurs et, en tout état de cause, dans les limites des territoires relevant de la compétence desdites administrations.

3. Les associés exercent conjointement et/ou séparément les plus larges pouvoirs de direction, de coordination et de supervision des organes et des organismes de la société, et, en particulier: ils peuvent convoquer les organes de la société pour des précisions sur les modalités de déroulement des services publics locaux; ils demandent périodiquement, et en tout état de cause au moins deux fois par an, des rapports sur la gestion de services et sur la situation économique financière; ils exercent des formes de contrôle de gestion selon les modalités établies par les règlements intérieurs des administrations adjudicatrices; ils expriment leur accord préalable, constituant une condition de licéité, pour toute modification statutaire inhérente à la gestion des services publics locaux.

4. Les divisions déterminent l’application de mécanismes de contrôle analogue, conjoint ou séparé, selon les modalités prévues au présent acte et dans les contrats de service concernés.

5. Les associés adjudicateurs exercent les pouvoirs à l’égard des divisions pour lesquelles ils ont décidé l’attribution directe des services. Aux fins de la gestion efficace des services en question, les organes et les employés de la société répondent de l’activité effectuée notamment devant les organismes désignés au présent acte.

6. Le contrôle par les associés adjudicateurs, outre au moyen des prérogatives en tant qu’actionnaires de la société telles que définies par le droit des sociétés, s’exerce par l’intermédiaire: d’un comité unitaire d’orientation et de contrôle politique administratif (ci-après ‘ comité unitaire ’ ); d’un comité technique de contrôle (ci-après ‘ comité technique ’ ) pour chaque division.

7. Les associés non adjudicateurs peuvent participer, sans droit de vote, aux réunions du comité unitaire […] et du comité technique […] pour chaque division. La majorité absolue des membres des comités précités peut décider l’exclusion de la participation à certaines réunions ou à des phases d’une réunion des associés non adjudicateurs, en donnant une justification motivée portée au procès-verbal de chaque réunion. »

16

L’article 8 ter des statuts de Setco est libellé comme suit:

« 1. Le comité unitaire […] est composé: d’un représentant pour chaque associé adjudicateur, choisi entre le représentant légal de la collectivité, le membre de l’exécutif local délégué ou un conseiller délégué pro tempore en charge; d’un dirigeant, avec des fonctions de support et de verbalisation, et sans droit de vote, nommé conjointement par les associés adjudicateurs au cours de la première réunion et choisi parmi les secrétaires, les directeurs généraux ou les dirigeants (ou les responsables des services dans les collectivités dépourvues de personnel ayant la qualité de dirigeant) en service au moins auprès d’une des collectivités adjudicatrices.

2. Le comité unitaire exerce des fonctions consultatives, des fonctions d’orientation et des fonctions décisionnelles aux fins de l’exercice du contrôle analogue, et en particulier: a) il exerce, à l’égard des organes et des organismes de la société, les compétences et les prérogatives reconnues au conseil, à l’organe exécutif et au maire/président en ce qui concerne le contrôle de leurs propres fonctions et services. Le contrôle porte sur tous les aspects d’organisation et de fonctionnement des services objet d’une attribution; b) il donne les orientations aux comités de division aux fins de la gestion coordonnée et unitaire des services ainsi que dans les matières et pour les aspects impliquant plusieurs divisions; c) il désigne les représentants des collectivités locales au sein du conseil d’administration de la société; d) il désigne le président du conseil d’administration et du conseil des commissaires aux comptes et peut les révoquer dans les cas visés aux présents statuts; e) il donne les orientations pour la nomination des administrateurs délégués et du directeur général de la société; f) il adopte la proposition du projet de programme, du budget économique pluriannuel, du budget économique annuel et du compte-rendu annuel d’activité; g) il procède à des auditions des organes dirigeants de la société, entendant au moins une fois par an le président et/ou le directeur général; h) il reçoit périodiquement, avec une fréquence au moins semestrielle, des organes dirigeants de la société, des rapports sur le déroulement des services publics locaux; i) il peut déléguer certaines de ses fonctions à un ou à plusieurs comités techniques, notamment en fonction de la spécificité des compétences de ces derniers; l) il donne un avis préalable sur les actes des administrateurs soumis à l’approbation de l’assemblée dans les cas prévus aux présents statuts.

3. Le comité unitaire se réunit à titre ordinaire au moins une fois par an et, à titre extraordinaire, à la demande: a) d’un des associés adjudicateurs; b) du représentant légal de la société. »

17

Aux termes de l’article 8 quater desdits statuts:

« 1. Il est institué un comité technique […] pour chacune des divisions suivantes: division n o 1: déchets; division n o 2: eau; division n o 3: gaz; division n o 4: tourisme; division n o 5: énergie; division n o 6: services d’utilité publique.

2. Le comité technique […] est composé: d’un représentant pour chaque associé adjudicateur choisi entre les secrétaires, les directeurs généraux ou les dirigeants (ou les responsables des services dans les collectivités dépourvues de personnel ayant la qualité de dirigeant) en service au moins auprès d’une des collectivités adjudicatrices […]

3. Une même personne peut faire partie du comité technique de plusieurs divisions.

4. Le comité technique, en particulier: a) exerce, à l’égard des organes et des organismes de la société, les compétences et les prérogatives reconnues aux organes techniques de l’administration sur leurs propres services. Le contrôle porte sur tous les aspects d’organisation et de fonctionnement des services qui font l’objet d’une attribution dans les limites de la compétence de la division et dans le respect des directives du comité unitaire; b) soutient le comité unitaire dans les décisions inhérentes à l’organisation et au fonctionnement des services relevant de la compétence de la division; c) exerce les fonctions déléguées par le comité unitaire; d) coordonne les systèmes de contrôle de gestion de la société; e) propose au comité unitaire ou aux organes de la société l’adoption des actes nécessaires à la coordination de l’action de la société avec les objectifs des administrations adjudicatrices tels qu’ils découlent du plan exécutif de gestion et du plan des objectifs; f) fournit un soutien technique administratif à l’activité de la société selon les modalités établies par les règlements des administrations adjudicatrices et/ou par la convention régissant les rapports entre ces dernières; g) signale d’éventuels disfonctionnements dans la gestion des services et propose les corrections à apporter à la réglementation municipale et aux actes qui réglementent les services publics locaux. »

18

L’article 14 des mêmes statuts stipule:

« 1. Sans préjudice des prérogatives des organes de contrôle analogue, conjoint et séparé, visées aux articles 8 bis, 8 ter et 8 quater précédents, l’assemblée ordinaire décide sur toutes les matières prévues par la loi et par les présents statuts, compte tenu des directives, des orientations et des éventuelles instructions données par lesdits organes au regard de l’organisation et de la gestion des services publics qui sont confiés directement à la société.

[…]

3. Sont soumis à l’autorisation préalable de l’assemblée ordinaire, sur avis favorable conforme du comité unitaire visé à l’article 8 ter précédent quant aux parties relevant de l’organisation et du fonctionnement des services publics locaux, les actes des administrateurs suivants:

a)

planification programmatique, bilans prévisionnels pluriannuels et annuels et bilan intermédiaire de rectification du bilan prévisionnel;

b)

constitution de sociétés de capitaux ayant pour objet des activités de support ou complémentaires par rapport à celle de la société; acquisition de participations, même minoritaires, dans de telles sociétés, et leur abandon;

c)

activation de nouveaux services prévus par les statuts ou cessation de ceux déjà exercés;

d)

acquisition et aliénation d’immeubles et d’installations, prêts hypothécaires et autres opérations similaires, de quelque type et de quelque nature que ce soit, comportant un engagement financier d’une valeur excédant 20 % du patrimoine net résultant du dernier bilan approuvé;

e)

lignes directrices pour la formulation des tarifs et des prix des services fournis, lorsqu’ils ne sont pas soumis à des contraintes légales ou ne sont pas fixés par des organes ou des autorités compétentes.

[…]

5. L’assemblée et le comité unitaire peuvent donner leur consentement à l’accomplissement des actes visés aux points précédents, même sous la condition de certaines instructions, obligations ou actes devant être accomplis par les administrateurs. Dans ce cas, les administrateurs établissent un rapport sur le respect des instructions dans le délai imparti dans l’acte d’autorisation ou bien, à défaut, dans les 30 jours à compter de l’accomplissement de l’acte en question.

6. Les collectivités locales actionnaires représentant au moins un vingtième du capital social, et chaque actionnaire adjudicateur, par le biais du comité unitaire, peuvent exiger, s’ils estiment que la société n’a pas accompli ou n’est pas en train d’accomplir l’acte conformément à l’autorisation accordée, la convocation immédiate de l’assemblée, conformément à l’article 2367, paragraphe 1, du code civil, afin que celle-ci adopte les mesures qu’elle estimera opportunes dans l’intérêt de la société.

7. L’exécution des actes soumis à autorisation préalable sans avoir demandé et obtenu l’assentiment de l’assemblée ou l’avis conforme du comité unitaire dans les cas prévus par les statuts ou encore le défaut d’exécution de l’acte conformément à l’autorisation accordée pourra constituer une juste cause pour la révocation des administrateurs.

8. Le conseil d’administration qui n’entend pas exécuter l’acte autorisé par l’assemblée adopte, dans le délai de quinze jours à compter du jour de la décision de l’assemblée, une décision ad hoc motivée, qui doit être immédiatement transmise aux collectivités locales actionnaires et, pour les matières relevant de la gestion des services publics locaux, au comité unitaire. Le comité unitaire, pour ce qui concerne les décisions qui ont trait à l’organisation et/ou à la gestion des services publics locaux, peut adopter, dans les 30 jours à compter de la réception de la communication du conseil d’administration, une décision de confirmation de son avis et/ou de ses instructions. L’acte adopté sera obligatoire pour l’organe d’administration.

[…] »

19

L’article 16 desdits statuts énonce:

« 1. La société est administrée par un conseil d’administration ayant des pouvoirs d’administration ordinaire et extraordinaire, sans préjudice des pouvoirs qui, en vertu de la loi ou des statuts:

a)

sont réservés à l’assemblée,

b)

sont soumis à l’autorisation préalable de l’assemblée,

c)

sont réservés aux organes de contrôle analogue visés aux articles 8 bis et suivants des statuts.

2. Le conseil d’administration est formé de 3 (trois) à 7 (sept) membres, nommés par l’assemblée sur désignation du comité unitaire visé à l’article 8 ter. Dans tous les cas, il revient aux actionnaires attributaires de nommer directement, de révoquer et de remplacer un nombre d’administrateurs (y compris le président du conseil d’administration) proportionnel à l’étendue de leur participation et, en tout état de cause, supérieur à la moitié de ceux-ci.

[…]

6. Le conseil d’administration adopte les décisions relatives à l’organisation et/ou à la gestion des services publics locaux faisant l’objet d’une attribution directe dans le respect des orientations adoptées par les organes de contrôle visés aux articles 8 bis et suivants des présents statuts.

[…] »

Le litige au principal et la question préjudicielle

20

Sea, adjudicataire à la suite d’une procédure d’appel d’offres du marché du service de collecte, de transport et d’élimination des déchets solides urbains et assimilés sur le territoire du Comune di Ponte Nossa, a fourni ledit service pendant une période de trois ans, du 1 er janvier 2004 au 31 décembre 2006 .

21

Setco est une société par actions détenue par un certain nombre de communes du Val Seriana et dont l’actionnaire majoritaire est le Comune di Clusone.

22

Par décision du 16 décembre 2006 , le Comune di Ponte Nossa a décidé de devenir associé minoritaire de Setco en vue de l’attribution directe à cette société du service en question à partir du 1 er janvier 2007 .

23

Le 23 décembre 2006 , les communes actionnaires de Setco, dont le Comune di Ponte Nossa, ont adapté les statuts de cette société en vue de soumettre celle-ci à un contrôle analogue à celui exercé sur leurs propres services, conformément à l’article 113, paragraphe 5, sous c), du décret législatif n o 267/2000.

24

Par décision du 30 décembre 2006 , le Comune di Ponte Nossa a attribué directement le service de collecte, de transport et d’élimination des déchets solides urbains et assimilés sur son territoire à Setco à partir du 1 er janvier 2007 , sans procédure préalable d’appel d’offres.

25

Le 2 janvier 2007 , Sea a introduit un recours devant le Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia (tribunal administratif régional de la Région de Lombardie) contre les décisions du Comune di Ponte Nossa des 16 et 30 décembre 2006 .

26

Sea a fait notamment valoir que le Comune di Ponte Nossa, en attribuant directement le service en question à Setco, a enfreint l’article 113, paragraphe 5, du décret législatif n o 267/2000 ainsi que les articles 43 CE, 49 CE et 86 CE, dans la mesure où il n’exerce pas sur Setco un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services, qui est exigé pour l’attribution directe d’un service à une entreprise détenue par le pouvoir adjudicateur.

27

La juridiction de renvoi estime que certains éléments pourraient susciter des doutes quant au point de savoir si le Comune di Ponte Nossa exerce sur Setco un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services.

28

D’une part, la participation de personnes privées au capital de Setco, bien qu’actuellement inexistante, serait potentiellement possible. La juridiction de renvoi précise à cet égard que, nonobstant l’exclusion expresse d’associés privés du capital de Setco prévue à l’article 1 er , paragraphe 4, de ses statuts, cette participation semblerait possible au titre de l’article 6, paragraphe 4, des mêmes statuts ainsi qu’en vertu de l’article 2355 bis du code civil italien.

29

D’autre part, concernant les pouvoirs de contrôle effectivement dévolus au Comune di Ponte Nossa à l’égard de Setco, cette juridiction se demande si un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services peut exister dès lors qu’il ne détient qu’une participation minoritaire dans ladite société.

30

Dans ces conditions, le Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

« L’attribution directe d’un service de collecte, de transport et d’élimination de déchets solides urbains et assimilés à une société par actions à capital entièrement public et aux statuts modifiés de la façon exposée dans les motifs, afin de se conformer à l’article 113 du décret législatif n o 267/2000, est-elle compatible avec le droit communautaire, et en particulier avec la liberté d’établissement ou la libre prestation des services, avec l’interdiction de discrimination et avec les obligations d’égalité de traitement, de transparence et de libre concurrence visées aux articles 12 CE, 43 CE, 45 CE, 46 CE, 49 CE et 86 CE? »

Sur la question préjudicielle

31

À titre liminaire, il y a lieu de relever que l’attribution d’un service de collecte, de transport et d’élimination des déchets urbains, tel que celui en cause au principal, peut relever, selon les spécificités de la contrepartie de ce service, de la définition des marchés publics de services ou de celle d’une concession de services publics au sens, respectivement, de l’article 1 er , paragraphe 2, sous d), ou paragraphe 4, de la directive 2004/18.

32

D’après les éléments figurant dans la décision de renvoi et dans le dossier transmis à la Cour par la juridiction de renvoi, le contrat en cause au principal pourrait constituer un marché public de services, notamment en raison du fait que le contrat intervenu entre Setco et le Comune di Ponte Nossa pour la prestation de services en question prévoit que ce dernier verse à Setco la contrepartie des services fournis par celle-ci.

33

Un tel marché serait susceptible de relever de la directive 2004/18, en tant que marché de services d’enlèvement des ordures appartenant à la catégorie 16 de l’annexe II A de cette directive.

34

La décision de renvoi ne comporte toutefois pas les informations nécessaires pour déterminer s’il s’agit d’une concession de services ou d’un marché public de services et, dans ce dernier cas, si toutes les conditions d’application de ladite directive sont remplies. En particulier, elle ne précise pas si le montant du marché en cause au principal dépasse le seuil d’application de celle-ci.

35

En tout état de cause, la question de savoir si l’affaire au principal concerne une concession de services ou un marché public de services ainsi que la question de savoir si, dans ce dernier cas, un tel marché de services relève ou non du champ d’application de la directive 2004/18 n’influencent pas la réponse que la Cour doit apporter à la question préjudicielle posée.

36

En effet, selon la jurisprudence de la Cour, un appel à la concurrence n’est pas obligatoire en cas de contrat à titre onéreux conclu avec une entité juridiquement distincte de l’autorité locale qui est le pouvoir adjudicateur dans l’hypothèse où cette collectivité exerce sur ladite entité un contrôle analogue à celui qu’elle exerce sur ses propres services et où cette entité réalise l’essentiel de son activité avec la ou les collectivités qui la détiennent (voir, en ce sens, arrêt du 18 novembre 1999 , Teckal, C-107/98, Rec. p. I-8121 , point 50).

37

Or, cette jurisprudence est pertinente tant pour l’interprétation de la directive 2004/18 que pour celle des articles 12 CE, 43 CE et 49 CE ainsi que des principes généraux dont ils constituent l’expression spécifique (voir, en ce sens, arrêts du 11 janvier 2005 , Stadt Halle et RPL Lochau, C-26/03, Rec. p. I-1 , point 49, ainsi que du 13 octobre 2005 , Parking Brixen, C-458/03, Rec. p. I-8585 , point 62).

38

Il convient de rappeler que, nonobstant le fait que certains contrats ne relèvent pas du champ d’application des directives communautaires en matière de marchés publics, les pouvoirs adjudicateurs les concluant sont tenus de respecter les règles fondamentales du traité CE (voir, en ce sens, arrêt du 7 décembre 2000 , Telaustria et Telefonadress, C-324/98, Rec. p. I-10745 , point 60, ainsi que ordonnance du 3 décembre 2001 , Vestergaard, C-59/00, Rec. p. I-9505 , point 20).

39

S’agissant de la passation de marchés publics de services, les pouvoirs adjudicateurs doivent notamment respecter les articles 43 CE et 49 CE ainsi que les principes d’égalité de traitement et de non-discrimination en raison de la nationalité de même que l’obligation de transparence qui en découle (voir, en ce sens, arrêts Parking Brixen, précité, points 47 à 49, et du 6 avril 2006 , ANAV, C-410/04, Rec. p. I-3303 , points 19 à 21).

40

L’application des règles énoncées aux articles 12 CE, 43 CE et 49 CE ainsi que des principes généraux dont elles constituent l’expression spécifique est cependant exclue si, tout à la fois, la collectivité territoriale qui est le pouvoir adjudicateur exerce sur l’entité adjudicataire un contrôle analogue à celui qu’elle exerce sur ses propres services et si cette entité réalise l’essentiel de son activité avec l’autorité ou les autorités qui la détiennent (voir, en ce sens, arrêts Teckal, précité, point 50; Parking Brixen, précité, point 62, ainsi que du 9 juin 2009 , Commission/Allemagne, C-480/06, Rec. p. I-4747 , point 34).

41

La circonstance que l’entité adjudicataire prend la forme d’une société de capital n’exclut nullement l’application de l’exception admise par la jurisprudence rappelée au point précédent. Dans l’arrêt ANAV, précité, la Cour a reconnu l’applicabilité de cette jurisprudence dans le cas d’une société par actions.

42

La juridiction de renvoi relève que, nonobstant le fait que l’article 1 er , paragraphes 3 et 4, des statuts de Setco réserve l’accès au capital de celle-ci à des entités publiques, l’article 6, paragraphe 4, de ces statuts prévoit que Setco peut émettre des actions privilégiées pour éventuellement favoriser l’actionnariat, au niveau local, des citoyens et des opérateurs économiques ou l’actionnariat des employés.

43

Lors de l’audience, le Comune di Ponte Nossa a fait valoir que ledit article 6, paragraphe 4, aurait dû être supprimé dans le cadre de la modification des statuts de Setco intervenue le 23 décembre 2006 , mais y est demeuré par erreur. Toujours selon le Comune di Ponte Nossa, cet article 6, paragraphe 4, a été supprimé ultérieurement. Il appartient à la juridiction nationale de vérifier la réalité de ces éléments, lesquels pourraient conduire à exclure la possibilité que le capital de Setco soit ouvert à des investisseurs privés.

44

La décision de renvoi soulève la question de savoir si un pouvoir adjudicateur peut exercer sur une société dont il est actionnaire, avec laquelle il entend conclure un contrat, un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services dans le cas où la possibilité que des investisseurs privés entrent dans le capital de la société en question existe, bien qu’elle ne se soit pas concrétisée.

45

Pour répondre à cette question, il convient de rappeler que la circonstance que le pouvoir adjudicateur détient, ensemble avec d’autres pouvoirs publics, la totalité du capital d’une société adjudicataire tend à indiquer, sans être décisive, que ce pouvoir adjudicateur exerce sur cette société un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services (voir, en ce sens, arrêts du 11 mai 2006 , Carbotermo et Consorzio Alisei, C-340/04, Rec. p. I-4137 , point 37, ainsi que du 13 novembre 2008 , Coditel Brabant, C-324/07, Rec. p. I-8457 , point 31).

46

En revanche, la participation, fût-elle minoritaire, d’une entreprise privée dans le capital d’une société à laquelle participe également le pouvoir adjudicateur concerné exclut, en tout état de cause, que ce pouvoir adjudicateur puisse exercer sur cette société un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services (voir, en ce sens, arrêts précités Stadt Halle et RPL Lochau, point 49, ainsi que Coditel Brabant, point 30).

47

En règle générale, l’existence effective d’une participation privée dans le capital de la société adjudicataire doit être vérifiée au moment de l’attribution du marché public en cause (voir, en ce sens, arrêt Stadt Halle et RPL Lochau, précité, points 15 et 52). Il peut également être pertinent de tenir compte de la circonstance que, au moment où un pouvoir adjudicateur attribue un marché à une société dont il détient l’ensemble du capital, la législation nationale applicable prévoit l’ouverture obligatoire de la société, à court terme, à d’autres capitaux (voir, en ce sens, arrêt Parking Brixen, précité, points 67 et 72).

48

Exceptionnellement, des circonstances particulières peuvent requérir la prise en considération d’évènements survenus après la date de l’attribution du marché en cause. Tel est le cas notamment lorsque des parts de la société adjudicataire, précédemment détenues entièrement par le pouvoir adjudicateur, sont cédées à une entreprise privée peu après que le marché en cause a été attribué à cette société dans le cadre d’une construction artificielle destinée à contourner les règles communautaires en la matière (voir, en ce sens, arrêt du 10 novembre 2005 , Commission/Autriche, C-29/04, Rec. p. I-9705 , points 38 à 41).

49

Certes, il ne peut pas être exclu que des parts d’une société soient vendues à tout moment à des tiers. Cependant, admettre que cette simple possibilité puisse indéfiniment tenir en suspens l’appréciation quant au caractère public ou non du capital d’une société adjudicataire d’un marché public ne serait pas conforme au principe de sécurité juridique.

50

Si le capital d’une société est entièrement détenu par le pouvoir adjudicateur, seul ou avec d’autres autorités publiques, au moment où le marché concerné est attribué à cette société, l’ouverture du capital de celle-ci à des investisseurs privés ne peut être prise en considération que s’il existe, à ce moment-là, une perspective concrète et à court terme d’une telle ouverture.

51

Il en résulte que, dans une situation telle que celle au principal, où le capital de la société adjudicataire est entièrement public et où il n’y a aucun indice concret d’une ouverture prochaine du capital de cette société à des actionnaires privés, la simple possibilité pour des personnes privées de participer au capital de ladite société ne suffit pas pour conclure que la condition relative au contrôle de l’autorité publique n’est pas remplie.

52

Cette conclusion n’est pas infirmée par les considérations figurant au point 26 de l’arrêt du 21 juillet 2005 , Coname ( C-231/03, Rec. p. I-7287 ), selon lesquelles le fait qu’une société telle que celle en cause dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt soit ouverte aux capitaux privés empêche de la considérer comme une structure de gestion interne d’un service public dans le chef des communes qui en font partie. En effet, dans cette affaire, un service public avait été attribué à une société dont le capital était non entièrement public, mais majoritairement public, et donc mixte, au moment de cette attribution (voir arrêt Coname, précité, points 5 et 28).

53

Il convient toutefois de préciser que, dans l’hypothèse où un marché aurait été attribué sans mise en concurrence à une société à capital public dans les conditions indiquées au point 51 du présent arrêt, le fait que, ultérieurement, mais toujours pendant la durée de validité de ce marché, des actionnaires privés soient admis à participer au capital de ladite société constituerait un changement d’une condition fondamentale du marché qui nécessiterait une mise en concurrence.

54

La question se pose ensuite de savoir si, dans le cas où une autorité publique devient associée minoritaire d’une société par actions à capital entièrement public en vue d’attribuer à celle-ci la gestion d’un service public, le contrôle que les autorités publiques associées au sein de cette société exercent sur celle-ci doit, pour être qualifié d’analogue au contrôle qu’elles exercent sur leurs propres services, être exercé individuellement par chacune de ces autorités ou peut l’être conjointement par celles-ci.

55

La jurisprudence n’exige pas que le contrôle exercé sur la société adjudicataire dans un tel cas soit individuel (voir, en ce sens, arrêt Coditel Brabant, précité, point 46).

56

En effet, dans le cas où plusieurs autorités publiques choisissent d’effectuer certaines de leurs missions de service public en ayant recours à une société qu’elles détiennent en commun, il est normalement exclu que l’une de ces autorités n’ayant qu’une participation minoritaire dans cette société exerce seule un contrôle déterminant sur les décisions de cette dernière. Exiger en pareille hypothèse que le contrôle exercé par une autorité publique soit individuel aurait pour effet d’imposer une mise en concurrence dans la plupart des cas où une telle autorité entendrait s’associer à une société détenue par d’autres autorités publiques en vue de lui attribuer la gestion d’un service public (voir, en ce sens, arrêt Coditel Brabant, précité, point 47).

57

Un tel résultat ne serait pas conforme au système des règles communautaires en matière de marchés publics et de concessions. En effet, il est admis qu’une autorité publique a la possibilité d’accomplir les tâches d’intérêt public qui lui incombent par ses propres moyens, administratifs, techniques et autres, sans être obligée de faire appel à des entités externes n’appartenant pas à ses services (arrêts précités Stadt Halle et RPL Lochau, point 48; Coditel Brabant, point 48, et Commission/Allemagne, point 45).

58

Cette possibilité pour les autorités publiques de recourir à leurs propres moyens pour accomplir leurs missions de service public peut être exercée en collaboration avec d’autres autorités publiques (voir, en ce sens, arrêts du 19 avril 2007 , Asemfo, C-295/05, Rec. p. I-2999 , point 57, et Coditel Brabant, précité, point 49).

59

Il convient donc d’admettre que, dans le cas où plusieurs autorités publiques détiennent une société à laquelle elles confient l’accomplissement d’une de leurs missions de service public, le contrôle de ces autorités publiques sur cette société peut être exercé conjointement par ces dernières (voir, en ce sens, arrêt Coditel Brabant, précité, point 50).

60

S’agissant d’un organe collégial, la procédure utilisée pour la prise de décision, notamment le recours à la majorité, est sans incidence (voir arrêt Coditel Brabant, précité, point 51).

61

Cette conclusion n’est elle non plus pas infirmée par l’arrêt Coname, précité. Certes, la Cour a considéré, au point 24 de celui-ci, qu’une participation de 0,97 % est tellement faible qu’elle n’est pas de nature à permettre à une commune d’exercer un contrôle sur le concessionnaire gérant un service public. Cependant, dans ce passage dudit arrêt, la Cour ne visait pas la question de savoir si un tel contrôle pouvait être exercé de façon conjointe (voir arrêt Coditel Brabant, précité, point 52).

62

Du reste, la Cour a admis ultérieurement, dans l’arrêt Asemfo, précité (points 56 à 61), que, dans certaines circonstances, la condition relative au contrôle exercé par l’autorité publique adjudicatrice pouvait être remplie dans un cas où celle-ci ne détenait que 0,25 % du capital d’une entreprise publique (voir arrêt Coditel Brabant, précité, point 53).

63

Il en découle que, si une autorité publique devient associée minoritaire d’une société par actions à capital entièrement public en vue de lui attribuer la gestion d’un service public, le contrôle que les autorités publiques associées au sein de cette société exercent sur celle-ci peut être qualifié d’analogue au contrôle qu’elles exercent sur leurs propres services lorsqu’il est exercé conjointement par ces autorités.

64

La question posée par la juridiction de renvoi vise en outre à déterminer si des structures décisionnelles telles que celles prévues par les statuts de Setco sont de nature à permettre aux communes actionnaires d’exercer effectivement sur la société qu’elles détiennent un contrôle analogue à celui qu’elles exercent sur leurs propres services.

65

Pour apprécier si le pouvoir adjudicateur exerce sur la société adjudicataire un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services, il convient de tenir compte de l’ensemble des dispositions législatives et des circonstances pertinentes. Il doit résulter de cet examen que la société adjudicataire est soumise à un contrôle permettant au pouvoir adjudicateur d’influencer les décisions de ladite société. Il doit s’agir d’une possibilité d’influence déterminante tant sur les objectifs stratégiques que sur les décisions importantes de cette société (voir, en ce sens, arrêts précités Carbotermo et Consorzio Alisei, point 36, ainsi que Coditel Brabant, point 28).

66

Parmi les éléments pertinents qui se dégagent de la décision de renvoi, il convient d’examiner d’abord la législation applicable, ensuite la question de savoir si la société en question a une vocation de marché et, enfin, les mécanismes de contrôle prévus par les statuts de Setco.

67

En ce qui concerne la législation applicable, l’article 113, paragraphe 5, sous c), du décret législatif n o 267/2000 prévoit que l’exploitation du service peut être attribuée, dans le respect de la réglementation de l’Union européenne, à des sociétés à capital entièrement public à condition que la ou les collectivités publiques titulaires du capital social « exercent sur la société un contrôle analogue à celui exercé sur leurs propres services et que la société réalise l’essentiel de son activité avec la ou les collectivités publiques qui la contrôlent » .

68

En adoptant ces termes, le législateur italien a repris textuellement le libellé des conditions énoncées au point 50 de l’arrêt Teckal, précité, et confirmées dans plusieurs arrêts ultérieurs de la Cour. Une telle législation nationale est en principe conforme au droit communautaire, étant précisé que l’interprétation de cette législation doit également être conforme aux exigences du droit communautaire (voir, en ce sens, arrêt ANAV, précité, point 25).

69

Par ailleurs, il ressort de la décision de renvoi que les communes actionnaires de Setco ont modifié les statuts de cette société, le 23 décembre 2006 , en vue de soumettre celle-ci à un contrôle analogue à celui qu’elles exercent sur leurs propres services, conformément à l’article 113, paragraphe 5, sous c), du décret législatif n o 267/2000.

70

Le fait que cette modification des statuts de Setco vise à assurer le respect de la réglementation communautaire en la matière résulte également de l’article 8 bis, paragraphe 1, de ces statuts.

71

Au demeurant, aucun élément du dossier ne tend à indiquer que lesdits statuts ont été modifiés dans l’intention de contourner les règles communautaires en matière de marchés publics.

72

Enfin, ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, tant le cadre législatif que le cadre statutaire pertinents ne permettent aux collectivités locales secondaires de confier directement la gestion de services publics locaux d’intérêt économique à des sociétés à capital entièrement public que si ces collectivités exercent sur la société un contrôle analogue à celui exercé sur leurs propres services au sens du droit communautaire. Selon la juridiction nationale, l’expression « contrôle analogue » n’y est toutefois pas définie.

73

En ce qui concerne la question de savoir si la société concernée a une vocation de marché rendant précaire le contrôle des collectivités qui en sont les actionnaires, il convient d’examiner la portée géographique et matérielle des activités de cette société ainsi que la possibilité pour celle-ci de nouer des relations avec des entreprises du secteur privé.

74

L’article 3 des statuts de Setco, intitulé « Objet social » , prévoit que Setco gère les services publics locaux concernant exclusivement les collectivités publiques locales attribuant lesdits services.

75

En outre, l’article 8 bis, paragraphe 2, de ces statuts énonce que Setco gère les services exclusivement au profit des associés adjudicateurs et dans les limites des territoires relevant de la compétence de ces associés.

76

De telles dispositions tendent à indiquer, d’une part, que le champ géographique des activités de la société adjudicataire en cause au principal ne s’étend pas au-delà du territoire des communes qui en sont les actionnaires et, d’autre part, que cette société a pour objet de gérer les services publics seulement pour ces communes.

77

Cependant, l’article 3, paragraphe 3, desdits statuts prévoit que Setco peut également effectuer des services en faveur de personnes privées lorsque cela n’est pas contraire aux objectifs sociaux ou contribue à leur meilleure réalisation.

78

Lors de l’audience, Setco a affirmé que le pouvoir dont elle dispose de traiter avec des entreprises du secteur privé est un accessoire nécessaire à l’exécution de ses missions de service public. À titre d’illustration, elle a mentionné le tri sélectif des déchets, lequel pourrait rendre nécessaire de revendre certaines catégories de matières récupérées à des entités spécialisées en vue de leur recyclage. Selon Setco, il s’agirait d’activités accessoires à la collecte des déchets et non pas d’activités étrangères à l’activité principale.

79

Il convient de considérer que, si le pouvoir reconnu à la société adjudicataire en cause au principal de fournir des services à des opérateurs économiques privés est simplement accessoire à son activité essentielle, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier, l’existence de ce pouvoir n’empêche pas que l’objectif principal de cette société demeure la gestion de services publics. Dès lors, l’existence d’un tel pouvoir ne suffit pas pour considérer que ladite société a une vocation de marché qui rend précaire le contrôle des collectivités qui la détiennent.

80

Cette conclusion est confirmée par le fait que la seconde condition posée au point 50 de l’arrêt Teckal, précité, selon laquelle la société adjudicataire doit réaliser l’essentiel de son activité avec les collectivités qui la détiennent, permet que cette société exerce une activité ayant un caractère marginal avec d’autres opérateurs que ces collectivités (voir, en ce sens, arrêt Carbotermo et Consorzio Alisei, précité, point 63). Cette condition serait privée d’objet si la première condition posée au point 50 de l’arrêt Teckal, précité, était interprétée comme interdisant toute activité accessoire, y compris avec le secteur privé.

81

En ce qui concerne les mécanismes de contrôle prévus par les statuts de Setco, il ressort du dossier que, par les modifications apportées à ces statuts le 23 décembre 2006 , les associés ont entendu superposer à l’assemblée générale et au conseil d’administration, tels que prévus par le droit italien des sociétés, des structures décisionnelles non explicitement prévues par ce droit, destinées à assurer sur Setco un contrôle analogue à celui qu’ils exercent sur leurs propres services. Il s’agit notamment d’assurer un contrôle renforcé au moyen, d’une part, du comité unitaire et, d’autre part, d’un comité technique pour chaque division responsable des différentes activités de Setco.

82

Ainsi que cela ressort des articles 8 ter et 8 quater desdits statuts, le comité unitaire et les comités techniques sont composés de représentants des collectivités associées. Chacune de ces collectivités possède une voix au sein de ces comités, quels que soient la taille de la collectivité concernée ou le nombre d’actions qu’elle détient.

83

Par ailleurs, les articles 8 bis à 8 quater des statuts de Setco attribuent au comité unitaire et aux comités techniques de larges pouvoirs de contrôle et de décision.

84

Corrélativement, l’article 14 de ces statuts limite les pouvoirs de l’assemblée générale en imposant à celle-ci de tenir compte des orientations et des instructions arrêtées par les comités susmentionnés et en exigeant un avis favorable du comité unitaire avant que l’assemblée générale puisse autoriser l’accomplissement de certains actes par les administrateurs de la société.

85

De même, l’article 16 desdits statuts restreint l’autonomie décisionnelle du conseil d’administration en lui imposant de respecter les pouvoirs réservés auxdits comités et en subordonnant ses décisions au respect des instructions émanant de ceux-ci.

86

Compte tenu de l’étendue des pouvoirs de contrôle et de décision qu’elles attribuent aux comités qu’elles établissent ainsi que de la circonstance que ces comités sont composés de délégués des collectivités actionnaires, des dispositions statutaires telles que celles de la société adjudicataire en cause au principal doivent être considérées comme mettant les collectivités actionnaires en mesure d’exercer, par l’intermédiaire de ces comités, une influence déterminante tant sur les objectifs stratégiques que sur les décisions importantes de cette société.

87

La juridiction de renvoi considère toutefois que les articles 8 bis à 8 quater des statuts de Setco, en ce qu’ils visent le comité unitaire et les comités techniques, sont assimilables à des pactes d’actionnaires relevant de l’article 2341 bis du code civil italien. Elle en déduit que le contrôle analogue à celui que les collectivités actionnaires exercent sur leurs propres services auquel vise le mécanisme desdits comités pourrait être inopérant.

88

Il s’agit là d’une question d’interprétation des normes nationales qu’il appartient à la juridiction de renvoi de trancher.

89

Sous réserve de la vérification par celle-ci du caractère opérant des dispositions statutaires concernées, il en résulte que, dans des circonstances telles que celles de l’affaire au principal, le contrôle exercé, au travers des organes statutaires, par les collectivités actionnaires sur la société adjudicataire peut être considéré comme permettant à ces collectivités d’exercer sur cette société un contrôle analogue à celui qu’elles exercent sur leurs propres services.

90

Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de répondre à la question posée comme suit:

Les articles 43 CE et 49 CE, les principes d’égalité de traitement et de non-discrimination en raison de la nationalité ainsi que l’obligation de transparence qui en découle ne s’opposent pas à l’attribution directe d’un marché public de services à une société par actions à capital entièrement public dès lors que la collectivité publique qui est le pouvoir adjudicateur exerce sur cette société un contrôle analogue à celui qu’elle exerce sur ses propres services et que cette société réalise l’essentiel de son activité avec la ou les collectivités qui la détiennent.

Sous réserve de la vérification par la juridiction de renvoi du caractère opérant des dispositions statutaires concernées, le contrôle exercé par les collectivités actionnaires sur ladite société peut être considéré comme analogue à celui qu’elles exercent sur leurs propres services dans des circonstances telles que celles de l’affaire au principal, où:

l’activité de ladite société est limitée au territoire desdites collectivités et est essentiellement exercée au bénéfice de celles-ci, et

au travers des organes statutaires composés de représentants desdites collectivités, celles-ci exercent une influence déterminante tant sur les objectifs stratégiques que sur les décisions importantes de ladite société.

Sur les dépens

91

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit:

Les articles 43 CE et 49 CE, les principes d’égalité de traitement et de non-discrimination en raison de la nationalité ainsi que l’obligation de transparence qui en découle ne s’opposent pas à l’attribution directe d’un marché public de services à une société par actions à capital entièrement public dès lors que la collectivité publique qui est le pouvoir adjudicateur exerce sur cette société un contrôle analogue à celui qu’elle exerce sur ses propres services et que cette société réalise l’essentiel de son activité avec la ou les collectivités qui la détiennent.

Sous réserve de la vérification par la juridiction de renvoi du caractère opérant des dispositions statutaires concernées, le contrôle exercé par les collectivités actionnaires sur ladite société peut être considéré comme analogue à celui qu’elles exercent sur leurs propres services dans des circonstances telles que celles de l’affaire au principal, où:

l’activité de ladite société est limitée au territoire desdites collectivités et est essentiellement exercée au bénéfice de celles-ci, et

au travers des organes statutaires composés de représentants desdites collectivités, celles-ci exercent une influence déterminante tant sur les objectifs stratégiques que sur les décisions importantes de ladite société.

Signatures


( *1 ) Langue de procédure: l’italien.

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CJCE, n° C-573/07, Arrêt de la Cour, Sea Srl contre Comune di Ponte Nossa, 10 septembre 2009