Conseil national de l'ordre des médecins, Section des assurances sociales, 14 avril 2011, n° 4835-2

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

N’a pas veillé à la tenue du dossier médical de patients résidant en EHPAD, en négligeant d’y porter les indications nécessaires à leur suivi, notamment, lorsqu’il existe, en ne faisant état d’aucun acte, tels que des bilans dans les cas de troubles mnésiques ou de dépression, ni d’aucune prescription.

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Sur la décision

Référence :
CNOM, sect. des assurances soc., 14 avr. 2011, n° 4835-2
Numéro(s) : 4835-2
Dispositif : Interdiction temporaire d'exercer Réformation Réformation - 6 mois d'interdiction, dont 2 mois avec sursis + publication pendant 1 mois + 33928,40 euros de remboursement

Sur les parties

Texte intégral

Dossier n° 4835 Dr Félix COHEN-SEBAN Séance du 24 mars 2011 Lecture du 14 avril 2011
LA SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS, Vu, 1°), enregistrés au secrétariat de la section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins le 3 novembre 2010 et le 2 décembre 2010, la requête et le mémoire présentés pour le Dr Félix COHEN-SEBAN, qualifié spécialiste en médecine générale, exerçant 61, rue Vauban, 68100 MULHOUSE, tendant à ce que la section annule une décision, en date du 7 octobre 2010, par laquelle la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins d’Alsace, statuant sur les plaintes de la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin, dont le siège est 26, avenue Robert Schuman, 68083 MULHOUSE CEDEX, et du médecin-conseil chef de service de l’échelon local du Haut-Rhin, dont l’adresse postale est B.P. 3289, 68065 MULHOUSE CEDEX, a prononcé à l’encontre du Dr COHEN-SEBAN la sanction de l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant une durée de neuf mois dont trois mois avec le bénéfice du sursis, avec publication pendant un mois et l’a condamné à reverser à la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin la somme de 33928,40 euros, par les motifs tout d’abord que la décision contestée est intervenue selon une procédure entachée de nullité en raison, d’une part, du fait que les plaintes s’appuient sur des données statistiques numérisées et informatisées relatives à l’activité du Dr COHEN-SEBAN, ce qui est contraire à l’article 10 de la loi 78-17 informatique et libertés, d’autre part, des conditions dans lesquelles a été réalisé le contrôle de son activité sans l’autorisation des patients et en violation du secret médical, et enfin de la violation du principe du contradictoire en raison de l’absence du praticien lors de la consultation des dossiers par le contrôle médical et de l’absence de procès verbal fiable à l’issue de son entretien avec le médecin contrôleur ; qu’au fond, le Dr COHEN-SEBAN entend contester le bien fondé des griefs retenus à son encontre ; que le grief de détournement de patientèle n’est pas établi, comme cela ressort des attestations produites pour les dossiers en cause ; que, s’il est reproché au Dr COHEN-SEBAN la facturation de visites non effectuées, aucune preuve n’est apportée à l’appui de ce grief global ; qu’au contraire il produit toutes les pièces montrant que l’activité facturée correspond à une réalité, et que l’état des résidents exige un suivi particulier, comme le montre l’étude des cas nos 28 à 41 pour l’EHPAD « Les Écureuils », des cas nos 1, 2, 3, 5, 8, 9, 11 à 19, 22 et 26 pour la maison de « l’Arc », et des cas nos 43, 44, 46, 47, 49, 51, 55, 58, 60, 61, 63, 65 et 66 pour la résidence René HIRSCHLER, correspondant à des malades dépendants et souffrant de poly pathologies ; que sont produits des témoignages attestant du professionnalisme et de la disponibilité du Dr COHEN-SEBAN ; que le grief de redondance dans les ordonnances vise deux renouvellements rapprochés de médicaments, liés à des ajustements de disponibilité qui ne peuvent être regardés comme des anomalies de prescription ; que ne peut être davantage considéré comme établi le grief d’accès direct par le praticien aux cartes vitales des résidents qui lui aurait permis une surfacturation d’actes sans contrôle, puisque ces cartes ne sont pas en accès libre dans les trois établissements et sont placées sous la responsabilité de services administratifs ; que la présomption d’actes fictifs qui lui sont imputés en raison de la facturation de 115 actes en vingt-quatre heures à une date précise tombe dès lors que le Dr COHEN-SEBAN explique que, ayant été absent la semaine précédente, il a dû affronter trois journées de suractivité du fait de l’état des patients, et qu’il a facturé les actes correspondant sur une seule journée, et il ajoute qu’à cette période il travaillait avec trois internes en soins autonomes supervisés, ce qui peut expliquer cette facturation ; que, pour le reproche d’avoir facturé des consultations pour deux patients alors hospitalisés, il s’agit d’erreurs infimes, dues à une confusion entre la réunion de préparation et l’examen physique ; que doit être écarté le grief de confusion du temps dû par le Dr COHEN-SEBAN en qualité de médecin coordonnateur et celui consacré à son activité libérale, comme le montrent les divers témoignages qu’il produit, desquels il ressort notamment que 35 résidents l’ont librement choisi comme médecin traitant ; que ne peut être retenu le grief d’absence de dossiers pour les patients dépressifs ou insuffisants mnésiques, dans la mesure où le praticien les produit, et explique que, compte tenu de la prise en charge pluridisciplinaire des patients, leurs dossiers ne sont pas conservés de la même manière que les dossiers ordinaires ; qu’enfin, les dossiers médicaux dont on lui reproche l’absence ont été retrouvés, qu’il les joint de façon à ce que soit constatés la traçabilité et le suivi pour les patients en cause et qu’il affirme que les dossiers médicaux des patients sont actuellement conformes aux normes imposées, aucun patient n’ayant eu à souffrir d’une absence de mention de prise en charge dans ses dossiers médicaux ;

Vu la décision attaquée ;

Vu, 2°), enregistrés comme ci-dessus le 5 novembre 2010 et le 3 décembre 2010, la requête et le mémoire présentés par le médecin-conseil chef de service de l’échelon local du Haut-Rhin ; il tend à ce qu’une sanction soit infligée au Dr COHEN-SEBAN en tenant compte des griefs non retenus en première instance ; le médecin-conseil entend souligner le systématisme et la régularité des consultations aboutissant à la facturation d’une consultation par semaine et par patient, le Dr COHEN-SEBAN assurant la fonction de médecin traitant pour environ un tiers des patients de chaque maison de retraite, facturant forfaitairement une visite hebdomadaire à ces patients suivis par leur médecin traitant, facturant globalement les actes du mois précédent au début du mois suivant, et facturant même des actes pendant les périodes d’hospitalisation du patient ; le médecin-conseil relève l’absence de mention de prise en charge dans les dossiers médicaux des patients, alors que le Dr COHEN-SEBAN est médecin traitant et médecin coordonnateur dans les trois établissements ; qu’en raison de l’importance de l’activité libérale de ce praticien, on retrouve, pour le semestre étudié, 38 journées comportant plus de 60 actes par jour, avec un maximum de 115 actes pour une seule journée ; que, le Dr COHEN-SEBAN ne peut expliquer cette activité par son expérience, l’aide qu’il reçoit de résidents en médecine générale (SASPAS), et une bonne organisation du travail, alors que, pour la période en cause, aucune attestation de stage n’a été fournie ; que l’examen des dossiers médicaux des résidents en EHPAD ne permet pas de retrouver la trace d’un examen médical dans pratiquement tous les cas ; qu’ainsi il y a probablement confusion des rôles et du temps de médecin coordonnateur et de médecin traitant au sein des EHPAD, le Dr COHEN-SEBAN ne pouvant utiliser que le temps dévolu à sa fonction de médecin coordonnateur pour effectuer des consultations de médecine libérale en EHPAD, car il ne dispose pas matériellement du temps nécessaire pour effectuer ces consultations ; qu’en cela, il bénéficie d’une double rémunération par l’assurance maladie ; que le libre choix des patients n’est pas respecté dans la mesure où les patients arrivant à l’EHPAD se voient pris en charge par le médecin coordonnateur de l’établissement qui devrait se récuser, et non pas se faire désigner comme médecin traitant ; que sont maintenus en conséquence les griefs d’abus d’actes, de fraude par double facturation, et non respect des articles 6, 27 et 98 du code de déontologie médicale ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 3 janvier 2011, le mémoire présenté pour le Dr COHEN-SEBAN, qui tend aux mêmes fins que sa requête avec les mêmes moyens ; le Dr COHEN-SEBAN entend répondre aux arguments du médecin-conseil chef de service de l’échelon local du Haut-Rhin ; il considère en premier lieu que celui-ci reconnaît bien avoir utilisé des données automatisées pour décider d’un contrôle d’activité du praticien ; que l’élaboration d’un dossier type est l’une des obligations mentionnées à l’article D 3121-158 du code de l’action sociale et des familles qui incombe au médecin coordonnateur sous la responsabilité et l’autorité administrative du responsable de l’établissement ; que l’admission en EHPAD n’est pas une hospitalisation mais constitue un substitut à un domicile privé ; que la prise en charge hebdomadaire des personnes âgées par le Dr COHEN-SEBAN est faite pour éviter la prescription d’actes médicaux et que la transmission des informations aux lits des malades est toujours assurée de façon à rendre possible une réactivité maximale ; que sur l’importance de l’activité libérale de ce praticien sont produites des déclarations qui n’ont pas été signées par leur auteur, ce qui les prive de toute valeur ; qu’est produit, en copie, le cahier de doléances qui n’apporte aucun élément à charge du Dr COHEN-SEBAN, et des attestations relatives à la régularité et à l’effectivité de ses visites ; que le grief d’hyperactivité libérale repose uniquement sur des statistiques, les affirmations des plaignants quant à l’impossibilité matérielle d’effectuer des consultations pendant l’activité de coordonnateur d’EHPAD reposant sur des apparences non vérifiées, juridiquement irrecevables ; qu’il n’y a aucune incompatibilité entre la fonction de médecin traitant et de médecin coordonnateur d’EHPAD, le libre choix des malades quant à leur médecin traitant ayant été par ailleurs totalement respecté ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 6 janvier 2011, le mémoire présenté par le médecin-conseil chef de service de l’échelon local du Haut-Rhin ; il tend aux mêmes fins que sa requête avec les mêmes moyens ; il entend répondre aux arguments du Dr COHEN-SEBAN en faisant valoir, concernant la nullité de la procédure, que l’article 10 de la loi du 6 janvier 1978 est à tort invoqué dans la mesure où l’analyse d’activité du praticien a été menée en application des dispositions de l’article L 315-1-4 du code de la sécurité sociale, où les faits reprochés se fondent sur l’absence de mention dans la plupart des dossiers médicaux pour les actes qu’il a réalisés, et où la procédure suivie pour le contrôle s’est déroulée dans le respect du contradictoire ; que l’article L 315-1-4 du code de la sécurité sociale précise que le service du contrôle médical peut se faire communiquer l’ensemble des documents, actes, prescriptions et éléments relatifs à l’activité du praticien contrôlé ; que les règles de déontologie médicale ont été respectées, la direction des établissements ayant été informée du passage des médecins-conseils, et ayant permis la consultation de l’intégralité du dossier médical de chaque patient, et une discussion ayant eu lieu avec le Dr COHEN-SEBAN ; qu’en ce qui concerne le grief de facturations de visites non effectuées, il est rappelé que les dossiers médicaux présentés au médecin-conseil étaient pratiquement vides, le Dr COHEN-SEBAN n’étant pas en mesure de donner les informations nécessaires, et ayant indiqué que les patients en cause étaient porteurs de pathologies lourdes nécessitant un suivi dont le détail aurait dû se trouver dans le dossier ; qu’il n’y a aucune concordance entre la facturation des actes ayant un caractère systématique et les besoins effectifs des patients ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 2 février 2011, le mémoire présenté par le médecin-conseil chef de service de l’échelon local du Haut-Rhin ; il tend aux mêmes fins que la requête avec les mêmes moyens ; le médecin-conseil ajoute que le médecin coordonnateur ne peut ignorer l’importance de la bonne tenue à jour des dossiers médicaux ; que la période pendant laquelle le Dr COHEN-SEBAN a pu bénéficier de l’aide de stagiaires en médecine générale est limitée, d’autant que ceux-ci ne peuvent être considérés comme des remplaçants ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 9 février 2011, le mémoire présenté par la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin ; la caisse primaire d’assurance maladie intervient dans le même sens que le médecin-conseil chef de service de l’échelon local du Haut-Rhin et reprend ses griefs à l’encontre du Dr COHEN-SEBAN : le cumul d’une activité libérale de médecin généraliste et des fonctions de médecin coordonnateur en EHPAD et des anomalies dans la facturation de ses consultations au sein des EHPAD, une grande partie des actes n’ayant pas été réalisée ; la caisse primaire d’assurance maladie demande le remboursement de 33928,40 euros correspondant aux consultations indûment facturées à l’assurance maladie ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 7 mars 2011, le mémoire présenté pour le Dr COHEN-SEBAN ; il tend aux mêmes fins que la requête avec les mêmes moyens ; le Dr COHEN-SEBAN demande à titre subsidiaire que les sanctions qui seraient éventuellement prononcées ne portent que sur son activité libérale en EHPAD ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de la santé publique, notamment le code de déontologie médicale figurant aux articles R 4127-1 et suivants ;

Vu le code de la sécurité sociale, notamment ses articles L 145-1 à L 145-9 et R 145-4 à R 145-29 ;

Vu le décret n° 48-1671 du 26 octobre 1948 modifié, relatif au fonctionnement des conseils de l’Ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et de la section disciplinaire du Conseil national de l’Ordre des médecins maintenu en vigueur par les dispositions de l’article 9 du décret n° 2007-434 du 25 mars 2007 ;

Vu la nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux fixée par l’arrêté du 27 mars 1972 modifié ;

Vu la classification commune des actes médicaux ;

Après avoir entendu en séance publique :

 – Le Dr ANSART en la lecture de son rapport ;

 – Me LEVEN-EDEL, avocat, en ses observations pour le Dr COHEN-SEBAN et le Dr Félix COHEN-SEBAN en ses explications orales ;

 – Le Dr BALASKA, médecin-conseil chef de service de l’échelon local du Haut-Rhin, en ses observations ;

 – Mme NEANT, représentant la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin, en ses observations ;

Le Dr COHEN-SEBAN ayant eu la parole en dernier ;

APRES EN AVOIR DELIBERE, Sur les conclusions de la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin :

Considérant que les conclusions de la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin, en date du 9 février 2011, tendant à ce que soit réformée la décision du 7 octobre 2010 de la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins d’Alsace ont été produites postérieurement à l’expiration du délai d’appel ; que le recours incident n’étant pas recevable devant les juridictions disciplinaires, ces conclusions doivent être rejetées comme présentées tardivement ;

Considérant qu’à l’occasion d’un contrôle ayant porté sur l’activité du Dr COHEN-SEBAN entre le 1er juillet 2007 et le 31 décembre 2007, des anomalies ont été relevées dans soixante sept dossiers, correspondant à des patients séjournant dans des établissements d’hébergement de personnes âgées dépendantes (EHPAD) ;

Sur la régularité de la procédure de l’enquête préalable au dépôt des plaintes :

Considérant que les conditions dans lesquelles s’est déroulée la procédure de contrôle de l’activité du Dr COHEN-SEBAN avant le dépôt des plaintes du médecin-conseil chef de service de l’échelon local du Haut-Rhin et de la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin devant la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins d’Alsace, notamment en ce qui concerne l’utilisation de données statistiques numérisées, la violation du secret médical et la méconnaissance du principe du contradictoire alléguées, sont sans influence sur la régularité de la procédure suivie devant cette juridiction ; qu’il appartient à cette dernière, comme à la juridiction d’appel, d’apprécier la valeur probante des documents qui leur sont soumis, tant par les services plaignants que par le praticien poursuivi, dans le cadre de la procédure juridictionnelle contradictoire qui se déroule devant elles ; que dès lors le Dr COHEN-SEBAN n’est pas fondé à soutenir que les conditions dans lesquelles s’est déroulée la procédure d’enquête suivie entacheraient d’irrégularité la saisine de la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins d’Alsace, et devraient entraîner, pour ce motif, l’annulation de la décision contestée par lui ;

Sur les griefs :

Considérant, en premier lieu, qu’il ressort de l’instruction que, dans les soixante sept dossiers en cause correspondant à des personnes âgées hébergées dans trois établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), le Dr COHEN-SEBAN a, pendant la période considérée, facturé une consultation hebdomadaire à chacune de ces personnes ; que la régularité et la fréquence de ces actes, pratiqués sur des personnes très âgées et en état de dépendance, ne trouvent pas de justification dans le dossier médical des intéressés ; qu’ainsi doit être retenu le grief d’abus d’actes à l’encontre du Dr COHEN-SEBAN ;

Considérant, en second lieu, que les premiers juges ont justement estimé que le Dr COHEN-SEBAN avait facturé pour trois personnes (nos 47, 49 et 63) des actes qu’il ne pouvait avoir réalisés, puisque celles-ci étaient hospitalisées aux dates correspondantes ; qu’ainsi, et bien que le praticien allègue la circonstance qu’il aurait commis des erreurs involontaires, il doit être constaté que ces actes facturés ont eu un caractère fictif ;

Considérant, en troisième lieu, que du fait des fonctions de médecin coordonnateur qui étaient les siennes dans les trois EHPAD et correspondaient à une durée de travail de 1,3 équivalent temps plein (ETP), le Dr COHEN-SEBAN n’a pu disposer du temps nécessaire à la réalisation des très nombreuses consultations relevant de son activité libérale facturées en sa qualité de médecin traitant à une partie des pensionnaires de ces établissements ; qu’il ne peut pour s’en justifier, faire valoir, qu’en raison d’une organisation stricte de ses activités et du renfort reçu du fait de l’assistance de nombreux stagiaires, utilement contester qu’il a utilisé des périodes où il était rémunéré pour ses activités de coordonnateur pour réaliser et facturer des consultations dans le cadre de son activité libérale ; qu’ainsi c’est à bon droit que les premiers juges ont retenu le grief de double facturation pour les mêmes actes ;

Considérant, en quatrième lieu, que les dossiers médicaux et les pièces complémentaires produites en appel par le Dr COHEN-SEBAN ne suffisent pas à faire considérer comme établi que celui-ci, comme il le prétend, ait consacré aux personnes suivies par lui le temps nécessaire à une prise en charge régulière effective ; que, pour certaines d’entre elles, le dossier médical, lorsqu’il existe, ne fait état d’aucun acte, tels que des bilans, alors qu’elles souffrent de troubles mnésiques (nos 2, 28, 29, 32, 36, 39, 41, 46, 49, 51, 60, 63 et 65) ou de dépression (nos 4, 8, 10, 17, 18, 21, 22, 23, 27, 33, 35, 36, 39, 43, 46, 47, 51, 58 et 61), ni d’aucune prescription ; qu’il apparaît ainsi que le Dr COHEN-SEBAN n’a pas veillé à la tenue du dossier médical des patients en cause, en négligeant d’y porter les indications nécessaires à leur suivi ;

Considérant en cinquième lieu, que comme l’ont estimé les premiers juges, il ne ressort pas des pièces du dossier que le Dr COHEN-SEBAN aurait utilisé ses fonctions de médecin coordonnateur pour évincer les médecins traitants de certains pensionnaires des trois établissements afin de prendre leur place ;

Considérant que les faits ci-dessus retenus à l’encontre du Dr COHEN-SEBAN sont contraires aux obligations qui s’imposent à tout médecin, rappelées aux articles L 162-2-1 du code de la sécurité sociale selon lequel il doit observer dans ses actes la plus stricte économie compatible avec la qualité, la sécurité et l’efficacité des soins, R 4127-53 du code de la santé publique, aux termes duquel les honoraires ne peuvent être perçus qu’à l’occasion d’actes réellement effectués par le médecin, R 4127-32 du code de la santé publique selon lequel le médecin doit assurer des soins consciencieux et dévoués, et R 4127-45 du code de la santé publique relatif à la tenue des documents nécessaires au suivi des patients ; que ce comportement fautif justifie que soit prononcée à l’encontre du Dr COHEN-SEBAN une sanction, en application des articles L 145-1 et L 145-2 du code de la sécurité sociale ; qu’il sera fait une juste appréciation de la gravité des fautes de ce praticien en ramenant la sanction à une interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant une période de six mois, dont deux mois avec sursis, en confirmant la condamnation du Dr COHEN-SEBAN à rembourser la somme de 33928,40 euros à la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin, et en ordonnant la publication de cette sanction pendant un mois ;

PAR CES MOTIFS,
D E C I D E :

Article 1er : Les conclusions de la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin et la requête du médecin-conseil chef de service de l’échelon local du Haut-Rhin sont rejetées.

Article 2 : Il est infligé au Dr COHEN-SEBAN la sanction de l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant six mois. Il sera sursis pour une durée de deux mois à l’exécution de cette sanction dans les conditions fixées à l’article L 145-2 du code de la sécurité sociale.

Article 3 : L’exécution de cette sanction pour la partie non assortie du sursis, prononcée à l’encontre du Dr COHEN-SEBAN prendra effet le 1er août 2011 à 0 h et cessera de porter effet le 30 novembre 2011 à minuit.

Article 4: Le Dr COHEN-SEBAN devra reverser à la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin la somme de 33928,40 euros.

Article 5 : La publication de cette sanction sera assurée par les soins de la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin, par affichage, dans ses locaux administratifs ouverts au public pendant la période d’un mois à compter du 1er août 2011.

Article 6 : La décision de la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins d’Alsace, en date du 7 octobre 2010, est réformée en ce qu’elle a de contraire à la présente décision.

Article 7 : La présente décision sera notifiée au Dr COHEN-SEBAN, à la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin, au médecin-conseil chef de service de l’échelon local du Haut-Rhin, à la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins d’Alsace, au conseil départemental de l’Ordre des médecins du Haut-Rhin, au directeur général de l’Agence régionale de santé d’Alsace, au ministre chargé de la sécurité sociale et au ministre chargé de l’agriculture.

Délibéré dans la même composition qu’à l’audience du 24 mars 2011, où siégeaient M. SAUZAY, Conseiller d’Etat honoraire, président ; M. le Dr COLSON, membre titulaire et M. le Dr BOBOIS, membre suppléant, nommés par le Conseil national de l’Ordre des médecins ; M. le Dr ANSART et M. le Dr DELIGNE, membres suppléants, nommés par le ministre chargé de la sécurité sociale.

Lu en séance publique le 14 avril 2011.

LE CONSEILLER D’ETAT HONORAIRE PRESIDENT DE LA SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS

P. SAUZAY
LE SECRETAIRE DE LA
SECTION DES ASSURANCES SOCIALES
M-A. PEIFFER

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Conseil national de l'ordre des médecins, Section des assurances sociales, 14 avril 2011, n° 4835-2