Tribunal administratif d'Amiens, 3ème chambre, 18 avril 2023, n° 2104069

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Village Justice · 5 février 2024

La nouvelle bonification indiciaire (NBI) est un complément de traitement qui a été institué pour certains agents relevant des trois fonctions publiques par l'article 27 de la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales. La NBI consiste en l'attribution de points d'indice majoré supplémentaires pour les fonctionnaires qui occupent des emplois comportant des responsabilités ou des technicités particulières. Au sommaire de cet article... I. Les agents publics bénéficiaires de la NBI. II. Les modalités de versement de …

 
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Sur la décision

Référence :
TA Amiens, 3e ch., 18 avr. 2023, n° 2104069
Juridiction : Tribunal administratif d'Amiens
Numéro : 2104069
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 25 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 13 décembre 2021,

31 mai et 23 septembre 2022, Mme B A, représentée par Me Witkowski, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision implicite du 12 octobre 2021 par laquelle le maire de la commune de Sinceny a refusé de l’indemniser des préjudices que lui a causés l’illégalité des deux arrêtés du 10 novembre 2014 lui retirant le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire et réduisant le coefficient multiplicateur d’ajustement de son indemnité d’exercice de missions des préfectures à compter du 1er novembre 2014 ;

2°) de condamner la commune de Sinceny à lui verser une somme de 30 000 euros en réparation des préjudices moral et matériels qu’elle a subis à raison de l’illégalité de ces deux arrêtés ;

3°) d’enjoindre au maire de la commune de Sinceny de lui rétablir le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire de 30 points dont elle bénéficiait et de fixer à 0,8 le coefficient multiplicateur d’ajustement de son indemnité d’exercice de missions des préfectures à compter du 1er jour du mois suivant le jugement à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Sinceny une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— le maire de la commune de Sinceny a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en lui retirant le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire à compter du

1er novembre 2014 par un arrêté du 10 novembre 2014, pris en méconnaissance de l’article 23 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de l’article 12 du décret du 28 septembre 2017 relatif aux garanties accordées aux agents publics exerçant une activité syndicale ;

— le maire de la commune de Sinceny a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en lui réduisant le coefficient multiplicateur d’ajustement de son indemnité d’exercice de missions des préfectures à compter du 1er novembre 2014 par un arrêté du

10 novembre 2014, pris en méconnaissance de l’article 23 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de l’article 12 du décret du 28 septembre 2017 relatif aux garanties accordées aux agents publics exerçant une activité syndicale ;

— le maire de la commune de Sinceny a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en lui réduisant, à compter du 1er novembre 2014 par un arrêté du 10 novembre 2014, le coefficient multiplicateur d’ajustement de son indemnité d’exercice de missions des préfectures en-deçà de la valeur minimale de 0,8 en méconnaissance de l’article 2 du décret du 26 décembre 1997 portant création d’une indemnité d’exercice de missions des préfectures ;

— la commune de Sinceny a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en la discriminant en raison de ses activités syndicales en méconnaissance de l’article 6 de la loi du

13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de l’article 1er de la loi du

27 mai 2018 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire en matière de lutte contre les discriminations ;

— l’illégalité des deux arrêtés litigieux lui a causé un préjudice moral à hauteur de

10 000 euros et des préjudices matériels à hauteur de 20 000 euros.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 30 mars et 14 septembre 2022, la commune de Sinceny, représentée par Me Viguier, conclut au rejet de la requête et demande au tribunal de mettre à la charge de Mme A une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— la légalité des arrêtés du 10 novembre 2014 ne peut être remise en cause sans méconnaitre l’autorité de la chose jugée de l’ordonnance du tribunal du 4 septembre 2018 ;

— Mme A ne démontre pas disposer d’une décharge d’activité de service ;

— Mme A ne disposait d’aucun droit à se voir verser une nouvelle bonification indiciaire en tant que secrétaire générale dès lors qu’elle n’appartient pas à la catégorie A ;

— Mme A ne disposait d’aucun droit à se voir verser une indemnité d’exercice de missions des préfectures dès lors que le décret du 26 décembre 1997 qui instituait cette prime a été abrogé ;

— les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 10 octobre 2022, la clôture de l’instruction a été fixée en dernier lieu au 28 octobre 2022 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

— la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

— la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 ;

— le décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 ;

— le décret n° 97-1223 du 26 décembre 1997 ;

— le décret n° 2006-779 du 3 juillet 2006 ;

— le décret n° 2017-1419 du 28 septembre 2017 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. Richard, rapporteur,

— les conclusions de Mme Minet, rapporteure publique,

— et les observations de Me Borg, représentant Mme A.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B A, rédactrice territoriale principale, est employée par la commune de Sinceny depuis le 1er septembre 2008. Elle bénéficie, depuis le 1er septembre 2012, d’une décharge partielle d’activité de service en raison de son activité syndicale. Par deux arrêtés du 10 novembre 2014, le maire de la commune de Sinceny lui a retiré le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire et a réduit le coefficient multiplicateur d’ajustement de son indemnité d’exercice de missions des préfectures à compter du 1er novembre 2014. Par un courrier du

10 août 2021, Mme A a demandé l’indemnisation des préjudices que lui a causés l’illégalité de ces deux arrêtés au maire de la commune de Sinceny qui a implicitement refusé le 12 octobre 2021. Mme A demande, d’une part, l’annulation de la décision implicite du

12 octobre 2021 et, d’autre part, la condamnation de la commune de Sinceny à lui verser une indemnité de 30 000 euros.

Sur les conclusions indemnitaires et les conclusions à fin d’annulation et d’injonction présentées par Mme A :

2. En premier lieu, d’une part, le fonctionnaire qui bénéficie d’une décharge totale de service pour l’exercice d’un mandat syndical a droit, durant l’exercice de ce mandat, que lui soit maintenu le bénéfice de l’équivalent des montants et droits de l’ensemble des primes et indemnités légalement attachées à l’emploi qu’il occupait avant d’en être déchargé pour exercer son mandat, à l’exception des indemnités représentatives de frais et des indemnités destinées à compenser des charges et contraintes particulières, tenant notamment à l’horaire, à la durée du travail ou au lieu d’exercice des fonctions, auxquelles le fonctionnaire n’est plus exposé du fait de la décharge de service. En cas de décharge partielle, le fonctionnaire a droit, durant l’exercice de son mandat syndical, au versement, sous les mêmes réserves, de l’ensemble des primes et indemnités qui lui sont attribuées au titre des fonctions qu’il continue d’exercer, au taux déterminé pour les fonctions effectivement exercées appliqué sur la base d’un temps plein.

3. D’autre part, aux termes du I de l’article 27 de la loi du 18 janvier 1991 portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales : « I. – La nouvelle bonification indiciaire des fonctionnaires et des militaires instituée à compter du 1er août 1990 est attribuée pour certains emplois comportant une responsabilité ou une technicité particulières dans des conditions fixées par décret ». Aux termes de l’article 1er du décret du 3 juillet 2006 portant attribution de la nouvelle bonification indiciaire à certains personnels de la fonction publique territoriale : « Une nouvelle bonification indiciaire, prise en compte pour le calcul de la retraite, est versée mensuellement aux fonctionnaires territoriaux exerçant une des fonctions figurant en annexe au présent décret ». Il résulte du point 35 du tableau annexé à ce même décret que sont éligibles à une nouvelle bonification indiciaire de 30 points les agents exerçant des fonctions de : « 35. Secrétariat général dans les communes de 2000 à 3500 habitants ».

4. Il résulte des termes mêmes des dispositions de la loi du 18 janvier 1991 précitées que le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire, qui ne constitue pas un avantage statutaire mais dépend seulement de l’exercice effectif des fonctions qui y ouvrent droit, est lié aux seules caractéristiques des emplois occupés, au regard des responsabilités qu’ils impliquent ou de la technicité qu’ils requièrent.

5. S’il est constant que Mme A a occupé le poste de C de la commune de Sinceny, qui comprend entre 2 000 et 3 500 habitants, antérieurement à novembre 2014, il résulte de l’instruction qu’une réorganisation des services de la commune a été initiée dès février 2012, antérieurement à l’octroi à l’intéressée d’une décharge d’activité de service en raison de son activité syndicale supérieure à 70 %. Au terme de cette réorganisation et conformément aux préconisations d’un rapport du centre de gestion de la fonction publique territoriale de l’Aisne du 15 octobre 2012, un agent de catégorie A a été recruté à compter du 18 juillet 2014 pour exercer les fonctions de D. Il a été mis fin en conséquence aux fonctions de C de la mairie de Mme A ainsi que le relève l’arrêté du 10 novembre 2014 lui retirant le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire. Dans ces conditions, et alors que Mme A qui n’établit ne disposer que d’une décharge partielle d’activité de service en raison de son activité syndicale, ne peut se prévaloir des principes applicables aux agents bénéficiant d’une décharge totale d’activité, le maire de la commune de Sinceny pouvait légalement retirer à l’intéressée, par son arrêté du 10 novembre 2014, la nouvelle bonification indiciaire qui lui était versée au titre de ses anciennes fonctions. Dès lors, Mme A n’est pas fondée à soutenir que cet arrêté est entaché d’une illégalité fautive.

6. En deuxième lieu, d’une part, aux termes du premier alinéa de l’article 20 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors applicable : « Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l’indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire. () ». Aux termes de l’article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, alors applicable : « L’assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale () fixe les régimes indemnitaires dans la limite de ceux dont bénéficient les différents services de l’Etat (). ». Aux termes de l’article 2 du décret du 6 septembre 1991 pris pour l’application du premier alinéa de l’article 88 de la loi du 26 janvier 1984 : « L’assemblée délibérante de la collectivité () fixe, dans les limites prévues à l’article 1er, la nature, les conditions d’attribution et le taux moyen des indemnités applicables aux fonctionnaires de ces collectivités () L’autorité investie du pouvoir de nomination détermine, dans cette limite, le taux individuel applicable à chaque fonctionnaire ».

7. Il résulte de ces dispositions qu’il revient à l’assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale de fixer elle-même la nature, les conditions d’attribution et le taux moyen des indemnités bénéficiant aux fonctionnaires de la collectivité. Le respect du principe d’égalité entre les agents publics ne s’oppose pas à l’institution de différences dans le régime indemnitaire dont ils bénéficient fondées sur des différences dans les conditions d’exercice de leurs fonctions ou sur les nécessités du bon fonctionnement du service auquel ils appartiennent.

8. D’autre part, aux termes de l’article 1er du décret du 26 décembre 1997 portant création d’une indemnité d’exercice de missions des préfectures, alors en vigueur : « Une indemnité d’exercice est attribuée aux fonctionnaires des filières administrative, technique et sociale qui participent aux missions des préfectures dans lesquelles ils sont affectés ». Aux termes de l’article 2 du même décret : « Le montant de l’indemnité mentionnée à l’article 1er du présent décret est calculé par application à un montant de référence fixé par arrêté conjoint du ministre de l’intérieur, du ministre chargé de la fonction publique, du ministre chargé de l’outre-mer et du ministre chargé du budget d’un coefficient multiplicateur d’ajustement compris entre 0,8 et 3 ».

9. S’il résulte de l’instruction que par une délibération du conseil municipal de la commune de Sinceny du 25 septembre 2008 relative au régime indemnitaire des agents, le conseil municipal a approuvé l’attribution d’une indemnité d’exercice de missions des préfectures aux agents de la commune dont il a défini le plafond du coefficient multiplicateur d’ajustement, il n’a, d’une part, défini ni le plancher de ce coefficient, ni les conditions d’attribution de cette prime en dehors de celles qui résultent de son intitulé, lequel ne peut d’ailleurs trouver à s’appliquer aux agents d’une commune, et n’a, d’autre part, pas renvoyé, pour ce faire, au décret du 26 décembre 1997. Dans ces conditions, le maire de la commune de Sinceny pouvait légalement, et par son arrêté du 10 novembre 2014, modifier le coefficient multiplicateur de cette indemnité de Mme A et le fixer à 0,3, en raison de l’évolution des fonctions de l’intéressée telle que décrite au point 5, alors qu’en tout état de cause, cette dernière n’établit pas exercer de missions des préfectures alors qu’elle sert dans une commune. Dans ces conditions, Mme A, qui ne peut se prévaloir des dispositions qui régissent les agents bénéficiant d’une décharge totale d’activité, n’est pas fondée à soutenir que l’arrêté du

10 novembre 2014 est, pour cette raison, entaché d’une illégalité fautive.

10. En troisième lieu, il résulte de ce qui précède que Mme A n’est pas fondée à soutenir que les deux arrêtés en litige sont entachés de discrimination en raison de son activité syndicale et que leur édiction est en conséquence fautive.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A n’est pas fondée à soutenir que la commune de Sinceny a commis une faute de nature à engager sa responsabilité. Par suite, les conclusions indemnitaires présentées par l’intéressée et ainsi que celles à fin d’injonction et d’annulation, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de ces dernières, doivent être rejetées.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’il soit mis à la charge de la commune de Sinceny, qui n’est pas la partie perdante, la somme demandée par Mme A au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens.

13. Par ailleurs, il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de Mme A la somme demandée par la commune de Sinceny au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Sinceny sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme B A et à la commune de Sinceny.

Délibéré après l’audience du 22 mars 2023, à laquelle siégeaient :

— M. Thérain, président,

— Mme Rondepierre, première conseillère,

— M. Richard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 avril 2023.

Le rapporteur,

signé

J. Richard

Le président,

signé

S. Thérain

La greffière,

signé

S. Chatellain

La République mande et ordonne au préfet de l’Aisne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent jugement.

No 2104069

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