Tribunal administratif de Bastia, 1ère chambre, 26 avril 2024, n° 2100992

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Bastia, 1re ch., 26 avr. 2024, n° 2100992
Juridiction : Tribunal administratif de Bastia
Numéro : 2100992
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Satisfaction totale
Date de dernière mise à jour : 28 avril 2024

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 août 2021 et le 20 mai 2022, Mme B A, représentée par Me A, demande au tribunal :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 14 avril 2021 du maire d’Ajaccio en tant qu’il l’a placée en retraite pour invalidité non imputable au service ;

2°) d’enjoindre au maire d’Ajaccio de la placer en retraite pour invalidité imputable au service à compter du 1er avril 2021 avec un taux d’invalidité lié aux atteintes cervico-bracchiales de 15 % et un taux d’invalidité lié aux atteintes du rachis lombaire de 30 % et de la radier des cadres dans un délai d’un mois à compter de la notification du présent jugement.

La requérante soutient que :

— l’arrêté attaqué est illégal car il a été pris avant que l’avis conforme soit rendu par la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) en méconnaissance de l’article 31 du décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ;

— il est insuffisamment motivé ;

— il méconnaît l’article 36 du décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003, est entaché d’une erreur d’appréciation eu égard aux conclusions des expertises médicales et à l’avis de la commission de réforme du 10 décembre 2020 et a été rendu sur la base d’un avis du médecin de prévention qui doit recevoir la qualification de faux en écriture ;

— il méconnaît le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 en ce que la collectivité n’a pas pris les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé de ses agents ;

— à titre subsidiaire, l’avis émis par le médecin de prévention le 10 décembre 2020 est une preuve déloyale qui doit être écartée des débats.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 14 avril 2022 et le 17 juin 2022, la commune d’Ajaccio, représentée par Me Magnaval, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de 2 500 euros soit mis à la charge de Mme A au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. La commune soutient que :

— la requête n’est pas recevable car la décision ne fait pas grief ;

— les moyens soulevés par Mme A ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 21 juin 2022, la clôture d’instruction a été fixée au 20 juillet 2022.

Un mémoire présenté par Mme A a été enregistré le 9 avril 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

— le code des relations entre le public et l’administration ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme Nathalie Sadat, conseillère ;

— et les conclusions de Mme Christine Castany, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A, née en 1955 a été recrutée en 1989 par la commune d’Ajaccio en qualité d’agent territorial spécialisé des écoles maternelles puis affectée en crèche à compter de 1994. Placée en arrêt de travail par son médecin traitant à compter du 20 juin 2019, elle a sollicité auprès de son employeur la reconnaissance de l’origine professionnelle de ses pathologies le 19 septembre 2019. Par un avis du 10 décembre 2020, la commission de réforme a émis un avis favorable au placement en retraite pour invalidité non imputable au service. Par un arrêté du 14 avril 2021, la commune d’Ajaccio a autorisé Mme A à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité non imputable au service à compter du 1er avril 2021. Mme A demande l’annulation de cet arrêté en tant qu’il l’a placée en retraite pour invalidité non imputable au service.

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune d’Ajaccio :

2. Aux termes de l’article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : « Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l’incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d’infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées () en service () peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d’office () » Aux termes de l’article L. 28 du même code : « Le fonctionnaire civil radié des cadres dans les conditions prévues à l’article L. 27 a droit à une rente viagère d’invalidité () » Aux termes de l’article L. 29 de ce code : « Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l’incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d’une invalidité ne résultant pas du service et qui n’a pu être reclassé dans un autre corps en application de l’article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d’office () ».

3. Aux termes de l’article R. 4 du code précité : « L’acte de radiation des cadres spécifie les circonstances susceptibles d’ouvrir droit à pension et vise les dispositions légales invoquées à l’appui de cette décision. / Les énonciations de cet acte ne peuvent préjuger ni la reconnaissance effective du droit, ni les modalités de liquidation de la pension, ces dernières n’étant déterminées que par l’arrêté de concession. » Aux termes de l’article R. 65 de ce code : « Le service chargé de la mise en œuvre de la gestion administrative et financière du régime de retraite et d’invalidité des fonctionnaires civils et militaires de l’Etat constitue, pour chaque fonctionnaire, magistrat et militaire, à compter de la date de son affiliation au régime du présent code, un compte individuel de retraite. A partir de ce compte et après contrôle des informations y figurant, ainsi que, le cas échéant, des durées d’assurance et des périodes reconnues équivalentes validées dans un ou plusieurs autres régimes de retraite de base obligatoires, la pension de l’intéressé ou celle de ses ayants cause ou, le cas échéant, la rente viagère d’invalidité est liquidée et concédée par arrêté du ministre chargé du budget. »

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que si, en cas de proposition d’octroi d’une rente viagère par l’administration gestionnaire, le ministre du budget n’est pas tenu par les énonciations de l’arrêté de radiation et les propositions de bases de liquidation, en revanche, le fait que l’arrêté de radiation des cadres ne soit pas pris sur le fondement de l’article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite fait obstacle à ce qu’il puisse, en l’absence de proposition en ce sens de l’administration gestionnaire, concéder une rente viagère d’invalidité. Dès lors, la décision de la commune d’Ajaccio plaçant Mme A en retraite pour invalidité non imputable au service, qui refuse de radier la requérante sur le fondement de l’article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, fait grief à cette dernière. Il suit de là que la fin de non-recevoir opposée par la commune d’Ajaccio ne saurait être accueillie.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

5. Aux termes de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration : « Les personnes physiques ou morales ont le droit d’être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : () 6° Refusent un avantage dont l’attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l’obtenir () ». Aux termes de l’article L. 211-5 du code précité : « La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ».

6. En se bornant à viser l’avis de la commission départementale de réforme du 10 décembre 2020 sans qu’il ressorte des pièces du dossier que cet avis aurait préalablement été adressé à la requérante, l’arrêté en litige n’a pas permis à Mme A de comprendre les considérations de fait ayant conduit son administration à considérer que son invalidité n’était pas imputable au service. Par suite, la requérante est fondée à soutenir que cet arrêté est insuffisamment motivé.

7. Il résulte de ce qui précède que, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, l’arrêté du 14 avril 2021 doit être annulé en tant qu’il a placé Mme A en retraite pour invalidité non imputable au service.

Sur les conclusions à fin d’injonction :

8. L’annulation de l’arrêté du 14 avril 2021, en raison du motif qui la fonde implique seulement qu’il soit enjoint à la commune d’Ajaccio de procéder au réexamen de la demande de Mme A dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme A, qui n’a pas la qualité de partie perdante, verse à la commune d’Ajaccio une quelconque somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : L’arrêté du 14 avril 2021 est annulé en tant qu’il a placé Mme A en retraite pour invalidité non imputable au service.

Article 2 : Il est enjoint à la commune d’Ajaccio de procéder au réexamen de la demande de Mme A dans un délai de deux mois suivant la notification du présent jugement.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à Mme B A et à la commune d’Ajaccio.

Délibéré après l’audience du 11 avril 2024, où siégeaient :

— M. Pierre Monnier, président ;

— M. Jan Martin, premier conseiller ;

— Mme Nathalie Sadat, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 avril 2024.

La rapporteure,

Signé

N. SADATLe président,

Signé

P. MONNIER

La greffière,

Signé

H. NICAISE

La République mande et ordonne au préfet de Corse, préfet de la Corse-du-Sud en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

Signé

H. NICAISE

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