Tribunal administratif de Dijon, 3ème chambre, 11 janvier 2023, n° 2202166

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Sur la décision

Référence :
TA Dijon, 3e ch., 11 janv. 2023, n° 2202166
Juridiction : Tribunal administratif de Dijon
Numéro : 2202166
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 25 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 14 août 2022, M. C B, représenté par Me Brey, demande au tribunal :

1°) d’annuler l’arrêté du 27 juillet 2022 par lequel le préfet de la Côte-d’Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l’a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d’office ;

2°) d’enjoindre au préfet de la Côte-d’Or de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d’un mois à compter de la notification du jugement ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros au titre des dispositions combinées de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

M. B soutient que :

— l’arrêté attaqué est entaché d’un vice d’incompétence ;

S’agissant du refus de délivrance d’un titre de séjour :

— cette décision est entachée d’un défaut d’examen de sa situation personnelle et d’une erreur de droit ;

— elle est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation quant au refus du préfet de faire usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation ;

— elle méconnait les stipulations du 5° de l’article 6 de l’accord franco-algérien ;

— elle méconnait l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

S’agissant de l’obligation de quitter le territoire français :

— cette décision est illégale en raison de l’illégalité du refus de titre de séjour ;

S’agissant de la décision fixant le pays de destination :

— cette décision est illégale en raison de l’illégalité du refus de titre de séjour.

Par décision du 31 octobre 2022, M. B a été admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2022, le préfet de la Côte-d’Or, représenté par la SELARL Centaure avocats, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce que la somme de 500 euros soit mise à la charge de M. B sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le préfet fait valoir que les moyens soulevés par M. B ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique ;

— le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme A,

— les observations de Me Brey, représentant M. B, et les observations de Me Ioannidou, représentant le préfet de la Côte-d’Or.

Considérant ce qui suit :

1. M. B, ressortissant algérien né le 13 août 1979, est entré irrégulièrement en France le 13 septembre 2012 selon ses déclarations. Par un arrêté non exécuté du 25 octobre 2016, le préfet de la Loire a refusé de l’autoriser à séjourner en France et l’a obligé à quitter le territoire français. Le 8 mars 2021, M. B a sollicité la délivrance d’un certificat de résidence algérien. Par un arrêté du 27 juillet 2022, dont M. B demande l’annulation, le préfet de la Côte-d’Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l’a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d’office.

Sur les conclusions aux fins d’annulation et d’injonction :

En ce qui concerne le moyen commun aux décisions attaquées :

2. Par un arrêté du 9 mars 2022, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial du 11 mars suivant, le préfet de la Côte-d’Or a donné délégation à M. Frédéric Carre, secrétaire général de la préfecture, à l’effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l’Etat dans le département, à l’exception d’actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions attaquées. Il suit de là que le moyen tiré de l’incompétence manque en fait et ne peut qu’être écarté.

En ce qui concerne le surplus des moyens dirigés contre le refus de certificat de résidence algérien :

3. En premier lieu, il ne ressort ni des termes de la décision attaquée, ni des pièces du dossier que le préfet de la Côte-d’Or n’aurait pas, préalablement à l’édiction de son arrêté, procédé à un examen particulier de la situation personnelle de l’intéressé, qui, du reste, ne justifie par aucune des pièces au dossier avoir saisi le préfet d’une demande d’admission exceptionnelle au séjour. Par suite, le moyen tiré de l’erreur de droit et du défaut d’examen particulier de la situation de M. B ne peut qu’être écarté.

4. En second lieu, aux termes de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale / 2. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui ». Aux termes de l’article 6 de l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : « Le certificat de résidence d’un an portant la mention » vie privée et familiale « est délivré de plein droit : / () 5) au ressortissant algérien, qui n’entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d’autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus () ».

5. M. B se prévaut de la durée de son séjour en France, de son insertion et de la présence d’une sœur et de sa nièce sur le territoire français. S’il est vrai que M. B justifie de la réalité d’une activité en qualité de compagnon travailleur solidaire au sein de l’association Emmaüs depuis 2016, antérieurement il ne démontre, par les pièces produites, qu’une présence sur le territoire français au mieux ponctuelle. En tout état de cause et alors que, d’une part, il ne justifie que d’une adresse chez Emmaüs et non chez des proches et, d’autre part, que sa sœur comme sa nièce se bornent, postérieurement à la décision attaquée, à attester de la date de son entrée en France et de son départ pour « vivre et travailler pour Emmaüs » en 2013, le requérant, célibataire et sans enfant, ne justifie d’aucune attache personnelle ou familiale sur le territoire français telle que le refus opposé à sa demande porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Au contraire, il a vécu la majeure partie de sa vie en Algérie où vivent, en outre, sa mère et trois de ses frères et sœurs. Il s’ensuit que le préfet n’a pas méconnu les stipulations citées au point 4 en refusant de délivrer à M. B un certificat de résidence et n’a pas davantage entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation en ne régularisant pas, à titre exceptionnel, sa situation.

En ce qui concerne le surplus des moyens dirigés contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

6. Les moyens invoqués à l’encontre de la décision de refus de titre de séjour ayant été écartés, M. B n’est pas fondé à exciper de l’illégalité de cette décision à l’appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, ni en tout état de cause contre celle fixant le pays de destination.

7. Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que M. B n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêté du 27 juillet 2022. Ses conclusions à fin d’annulation et, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d’injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, verse une quelconque somme au bénéfice du conseil de M. B au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

9. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur le fondement des mêmes dispositions par le préfet de la Côte-d’Or.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le préfet de la Côte-d’Or sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. C B, au préfet de la Côte-d’Or et à Me Brey.

Une copie de ce jugement sera transmise, pour information, au ministre de l’intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l’audience du 7 décembre 2022 à laquelle siégeaient :

— M. Boissy, président,

— M. Blacher, premier conseiller,

— Mme Karima Hunault, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 janvier 2023.

La rapporteure,

K. ALe président,

L. BoissyLa greffière,

E. Herique

La République mande et ordonne au préfet de la Côte-d’Or, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Le greffier

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