Tribunal administratif de Grenoble, 22 mars 2018, n° 1504518

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Sur la décision

Référence :
TA Grenoble, 22 mars 2018, n° 1504518
Juridiction : Tribunal administratif de Grenoble
Numéro : 1504518

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE GRENOBLE

1504518 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE ___________

SOCIETE MODUS VALORIS

___________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


M. Y X

Rapporteur

___________ Le tribunal administratif de Grenoble

(3ème Chambre) M. Pierre Thierry Rapporteur public

___________

Audience du 8 février 2018 Lecture du 22 mars 2018 _________ 39-02 C

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 22 juillet 2015 et les 18 août 2016 et 20 décembre 2017, la société Modus Valoris, représentée par la SELARL Philippe Petit & associés, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d’annuler le contrat conclu le 21 juillet 2015 par la métropole Grenoble-Alpes Métropole avec la société Lely environnement portant sur le transport, le traitement, la valorisation ou l’élimination des mâchefers d’incinération de déchets non dangereux de l’usine d’incinération Athanor à La Tronche ;

2°) de condamner la métropole Grenoble-Alpes Métropole à lui verser la somme de 1 939 140 euros en réparation du préjudice subi ;

3°) de mettre à la charge de la métropole Grenoble-Alpes Métropole la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a intérêt à agir à l’encontre du contrat contesté alors même qu’elle n’a pas pu présenter sa candidature ;

- le contrat litigieux a le même objet que le contrat qui la lie à la Compagnie de chauffage intercommunale de l’agglomération grenobloise et qui a été conclu le 22 décembre 2004 ;



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- le règlement de consultation est irrégulier en tant qu’il implique pour les soumissionnaires de disposer tant d’une installation de maturation et d’élaboration que d’une installation de stockage de déchets non dangereux ;

- le règlement de consultation est irrégulier en tant qu’il méconnaît l’article 35 du code des marchés publics ;

- le règlement de consultation est irrégulier en tant qu’il ne prévoit pas la durée ferme du contrat et méconnaît ainsi l’article 16 du code des marchés publics ;

- le choix du cocontractant s’est effectué sur le fondement d’un critère illégal tenant à l’implantation géographique des installations du cocontractant et alors que ledit critère n’a pas fait l’objet d’une publicité adéquate en méconnaissance des dispositions de l’article 53 du code des marchés publics ;

- la métropole n’a pas procédé à la publicité adéquate concernant la hiérarchisation et la pondération des sous-critères employés dans le cadre de l’évaluation de la valeur technique des offres ;

- le critère prix a fait l’objet d’une évaluation irrégulière en l’absence de toute précision dans le règlement de consultation de la commande-type employée à cet effet et alors que la métropole ne pouvait régulièrement avoir recours à la méthode du « chantier masqué » ;

- le contrat est irrégulier dés lors qu’il existe une incohérence entre la prohibition faite des variantes et les deux solutions alternatives telles que mentionnées par le règlement de consultation ;

- l’attributaire du marché ne dispose pas des capacités techniques pour réaliser les prestations contractuellement confiées ;

- le contrat litigieux est illégal en tant qu’il met à la charge du cocontractant des sommes indues en cas de suspension des apports lorsque la capacité de stockage de l’IME dédiée aux mâchefers de l’usine d’incinération d’Athanor est inférieure à 7 000 tonnes ;

- le contrat méconnaît les dispositions de l’arrêté du 18 novembre 2011 relatif au recyclage en technique routière des mâchefers d’incinération de déchets non dangereux pour ce qui est des conditions de constitution des lots de mâchefer en ce qui concerne la traçabilité des lots de mâchefer ainsi que le protocole d’échantillonnage tel que prévu au point 5.2.3.3 du cahier des clauses techniques particulières ;

- le pouvoir adjudicateur ne sera pas en mesure de respecter les stipulations du point 5.1.4 du cahier des clauses techniques particulières ;

- le contrat est irrégulier en ce qu’il met à la charge du prestataire une composante de la taxe générale sur les activités polluantes ;

- elle a subi un préjudice de 1 939 140 euros.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 26 avril 2016 et le 20 décembre 2017, la métropole Grenoble Alpes métropole conclut au rejet de la requête, en outre, à ce que la société Modus Valoris lui verse une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens tirés de ce que le contrat conclu entre la société Modus Valoris et la Compagnie de chauffage intercommunale de l’agglomération grenobloise a un objet similaire au marché litigieux et de ce que le contrat conclu ne comporterait pas de durée sont inopérants ;

- les autres moyens soulevés par la société Modus Valoris ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 novembre 2017, la société Lely environnement fait valoir qu’elle dispose des capacités techniques lui permettant d’accomplir ses obligations contractuelles.



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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- l’arrêté du ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement du 18 novembre 2011 relatif au recyclage en technique routière des mâchefers d’incinération de déchets non dangereux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

- le rapport de M. X,

- les conclusions de M. Thierry, rapporteur public,

- et les observations de Me Thoinet, représentant la société Modus Valoris, et de Me Durieux, représentant Grenoble-Alpes Métropole.

Une note en délibéré présentée pour Grenoble-Alpes Métropole a été enregistrée le 12 février 2018.

1. Considérant que par un contrat conclu dans le courant du mois de décembre 2004, Grenoble-Alpes Métropole a délégué à la Compagnie de chauffage intercommunale de l’agglomération grenobloise (CCIAG) l’exploitation de l’usine d’incinération d’ordures ménagères Athanor située à La Tronche ; que dans ce cadre, la CCIAG était notamment chargée d’assurer le traitement des mâchefers en les évacuant ou les valorisant ; que par un avenant n° 9 conclu le 24 avril 2015, la CCIAG ne s’est plus vu confier que le traitement des mâchefers issus des seuls apports des tiers, Grenoble-Alpes Métropole prenant en charge le traitement des mâchefers issus de ses apports ainsi que ceux de ses partenaires dans le cadre de la « charte sillon Alpin » ;

2. Considérant par ailleurs que par un contrat conclu le 22 décembre 2004, la CCIAG avait sous-traité à la société Modus Valoris la gestion de l’intégralité des mâchefers issus de l’usine Athanor ; qu’après la conclusion de l’avenant n°9 mentionné au point 1 du présent jugement, la CCIAG et la société Modus Valoris ont conclu un avenant le 6 juin 2015 afin de prendre en compte la reprise en gestion directe par Grenoble-Alpes Métropole de la quote-part des mâchefers issus de ses apports ;

3. Considérant que Grenoble-Alpes Métropole a, par un avis du 10 avril 2015, lancé une procédure d’appel d’offre ouvert en vue de l’attribution d’un marché public de services portant sur le transport, le traitement, la valorisation ou l’élimination des mâchefers d’incinération de déchets non dangereux de l’usine d’incinération Athanor en ce qui concerne les mâchefers issus des déchets dont la métropole est responsable ; que par un contrat conclu le 21 juillet 2015, la société Lely environnement s’est vu confier l’exécution dudit marché ;

4. Considérant que par la présente requête, la société Modus Valoris, qui ne s’est pas portée candidate à l’attribution du contrat conclu suite à l’avis d’appel d’offre du 10 avril 2015, demande au tribunal d’annuler le contrat conclu le 21 juillet 2015 par la métropole Grenoble- Alpes Métropole avec la société Lely environnement portant sur le transport, le traitement, la valorisation ou l’élimination des mâchefers d’incinération de déchets non dangereux de l’usine



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d’incinération Athanor à La Tronche et de condamner la métropole Grenoble-Alpes Métropole à lui verser la somme de 1 939 140 euros en réparation du préjudice subi ;

Sur la validité du contrat :

5. Considérant qu’indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l’excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d’un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d’être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles ;

6. Considérant qu’à l’appui d’un tel recours, le tiers qui n’a pas présenté sa candidature ou une offre mais qui a vocation compte tenu de son domaine d’activité à exécuter le contrat en cause, doit être regardé comme un concurrent évincé ; qu’à ce titre, il ne peut utilement invoquer, outre les vices d’une gravité telle que le juge devrait les relever d’office, que les manquements aux règles applicables à la passation de ce contrat qui l’ont dissuadé de présenter une offre ou qui sont en rapport direct avec sa décision de ne pas présenter d’offre ;

7. Considérant, en premier lieu, que la requérante allègue que le contrat litigieux a un objet identique à celui qui la lie à la CCIAG et présente donc un caractère redondant ; qu’un tel moyen manque toutefois en fait au regard des modifications apportées au contrat liant la requérante à la CCIAG par l’avenant conclue entre ces deux parties le 6 juin 2015 mentionné au point 2 du présent jugement et redéfinissant les quantités de mâchefers dont le traitement revient à la société Modus Valoris en excluant ceux issus des apports effectués par Grenoble-Alpes Métropole et ses partenaires ; que sa qualité de sous-traitante du délégataire de service public de Grenoble-Alpes Métropole ne faisait par ailleurs pas obstacle à ce que la requérante se porte candidate en vue de l’attribution du marché litigieux et qu’elle devienne le cocontractant de Grenoble-Alpes Métropole ; que le moyen doit par suite être écarté ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que la société Modus Valoris soutient que le contrat litigieux a été conclu en méconnaissance du principe d’égal accès à la concurrence dés lors qu’en portant tout à la fois sur la valorisation et l’élimination des mâchefers, il impose au cocontractant de l’administration de disposer tant d’une installation de maturation et d’élaboration que d’une installation de stockage de déchets non dangereux ; que la requérante fait valoir qu’en procédant de la sorte, Grenoble-Alpes Métropole a privilégié la candidature de la seule société rhône-alpine disposant de ces deux types d’équipement ;

9. Considérant, toutefois, que si les deux types d’installation précités sont nécessaires à l’exécution des prestations confiées par la métropole, il ne résulte pas des documents contractuels que Grenoble-Alpes Métropole a exigé des candidats qu’ils soient autorisés à exploiter tant une installation de maturation et d’élaboration (IME) qu’une installation de stockage de déchets non dangereux (ISDND) ; qu’ainsi, aucune stipulation n’interdisait à un candidat de soumissionner dans le cadre d’un groupement ou de s’adjoindre les services d’un sous-traitant ; que la circonstance que le prestataire de la métropole doit contractuellement s’engager sur une composante de la taxe générale sur les activités polluantes n’implique pas nécessairement que le prestataire soit lui-même le titulaire d’une autorisation d’exploiter une ISDND ; que dans ces circonstances, la société Modus Valoris n’est pas fondée à soutenir que les documents contractuels ont eu pour effet de permettre la candidature d’une seule société rhône-



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alpine disposant tant d’une installation de maturation et d’élaboration et d’une installation de stockage de déchets non dangereux ;

10. Considérant, en troisième lieu, que la société Modus Valoris soutient que le contrat litigieux a été conclu à l’issue d’une procédure méconnaissant les dispositions de l’article 35 du code des marchés publics ;

11. Considérant qu’aux termes de l’article 35 du code des marchés publics tel qu’applicable en l’espèce : « (…) II.-Peuvent être négociés sans publicité préalable et sans mise en concurrence : (…) / 6° Les marchés de services ou de travaux ayant pour objet la réalisation de prestations similaires à celles qui ont été confiées au titulaire d’un marché précédent passé après mise en concurrence. / Le premier marché doit avoir indiqué la possibilité de recourir à cette procédure pour la réalisation de prestations similaires. Sa mise en concurrence doit également avoir pris en compte le montant total envisagé, y compris celui des nouveaux services ou travaux. La durée pendant laquelle les nouveaux marchés peuvent être conclus ne peut dépasser trois ans à compter de la notification du marché initial (…) ».

12. Considérant qu’aux termes de l’article 1er du règlement de consultation : « les prestations, objet de la présente consultation, pourront donner lieu à un nouveau marché pour la réalisation de prestations similaires, passé en application de la procédure négociée de l’article 35-II. 6 et qui seront exécutées par l’attributaire de ce présent marché. Les conditions de ce nouveau marché seront précisées au CCAP » ;

13. Considérant qu’il résulte de l’instruction qu’en procédant à une mise en concurrence dans le cadre des dispositions de l’article 33 du code des marchés publics eu égard à la circonstance que le montant cumulé des marchés conclus ou à conclure était supérieur à 207 000 euros, Grenoble-Alpes Métropole a régulièrement pris en compte le montant total envisagé en y incluant celui des nouveaux services qu’elle pourrait être amenée à décider ; que le moyen doit, en tout état de cause, être écarté ;

14. Considérant, en quatrième lieu, que la requérante soutient que le contrat litigieux ne mentionne aucune durée ferme des prestations à accomplir et que sont ainsi méconnus le principe d’égal accès à la commande publique ainsi que les dispositions de l’article 16 du code des marchés public applicables en l’espèce et aux termes desquelles, « Sous réserve des dispositions fixant la durée maximale pour les accords-cadres et les marchés à bons de commande, les marchés complémentaires passés en procédure négociée ainsi que les marchés relatifs à des opérations de communication, la durée d’un marché ainsi que, le cas échéant, le nombre de ses reconductions, sont fixés en tenant compte de la nature des prestations et de la nécessité d’une remise en concurrence périodique. / Un marché peut prévoir une ou plusieurs reconductions à condition que ses caractéristiques restent inchangées et que la mise en concurrence ait été réalisée en prenant en compte la durée totale du marché, périodes de reconduction comprises. / Sauf stipulation contraire, la reconduction prévue dans le marché est tacite et le titulaire ne peut s’y opposer. » ;

15. Considérant qu’aux termes de l’article 2 du règlement de consultation : « la durée du marché fait l’objet de solutions alternatives. / La solution A prévoit une durée d’enlèvement des mâchefers de trois ans à compter du 1er jour du mois suivant la notification du marché, reconductible une fois un an de manière expresse, étant entendu que la prestation de traitement, valorisation ou élimination se poursuivra pour une durée maximale de 18 mois, jusqu’à ce que tous les mâchefers entrés sur le site dans le cadre du marché aient été traités et valorisés ou éliminés. / La solution B prévoit une durée d’enlèvement des mâchefers de cinq ans à compter du



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1er jour du mois suivant la notification du marché, reconductible deux fois un an de manière expresse, étant entendu que la prestation de traitement, valorisation ou élimination se poursuivra pour une durée maximale de 18 mois, jusqu’à ce que tous les mâchefers entrés sur le site dans le cadre du marché aient été traités et valorisés ou éliminés. » ; que ce même article 2 prévoit par ailleurs que « aucune variante n’est autorisée » ;

16. Considérant qu’il résulte des termes mêmes du règlement de consultation que la métropole exigeait de chaque candidat qu’elle présente son offre au regard de deux solutions alternatives A et B dont la description comportait pour chacune leur durée ; que le moyen doit être écarté en tant qu’il manque en fait ;

17. Considérant, en cinquième lieu, que la requérante fait valoir que le contrat est irrégulier dés lors qu’il existe une incohérence entre la prohibition faite des variantes et l’exigence de présentation de deux solutions alternatives telles que mentionnées par le règlement de consultation ;

18. Considérant que contrairement à ce qu’allègue la société Modus Valoris, les termes du règlement de consultation ne révèlent pas de contradiction dés lors que les solutions alternatives sont à l’initiative du seul pouvoir adjudicateur alors qu’une variante est constituée par des modifications, faites à l’initiative des candidats, de spécifications prévues dans les solutions de base décrites dans les documents de consultation ; qu’au surplus, et contrairement à ce que fait valoir la requérante, le pouvoir adjudicateur a évalué au regard des mêmes critères les deux solutions proposées par les candidats ; que le moyen doit par suite être écarté ;

19. Considérant, en sixième lieu, qu’il résulte des termes de l’article 5 du règlement de consultation que les critères de sélection des offres étaient le prix des prestations, critère pondéré à 50%, la valeur technique, critère pondéré à 30% et la valeur environnementale, critère pondéré à 20% ; qu’en ce qui concerne l’évaluation de la valeur technique des offres, le règlement de consultation mentionne qu’elle est « notée au vu du mémoire technique sur 30 points : – un maximum de 25 points est attribué à l’organisation de la plateforme et de la prestation (notamment le mode de traitement, les capacités de stockage, le suivi des lots et les exutoires, les performances d’élaboration et les moyens matériels et humains affectés à la réalisation des prestations) / – un maximum de 5 points est attribué à la qualité des livrables et des rendus. » ; qu’en ce qui concerne la valeur environnementale de l’offre, le même règlement indique qu’elle est « notée au vu du mémoire technique sur 20 points : – un maximum de 15 points est attribué à la qualité du plan d’assurance qualité et traçabilité / – un maximum de 5 points est attribué à la démarche de qualité environnementale mise en œuvre pour la réalisation des prestations (gestion de l’installation de maturation et d’élaboration et de l’installation de stockage) et aux modalités de transport (éco-conduite, qualité environnementale des véhicules) » ;

20. Considérant que la société Modus Valoris soutient que le choix du cocontractant s’est effectué sur le fondement d’un critère illégal tenant à l’implantation géographique des installations du cocontractant et alors que ledit critère n’a pas fait l’objet d’une publicité adéquate en méconnaissance des dispositions de l’article 53 du code des marchés publics ;

21. Considérant toutefois qu’aucun des critères et sous-critères mentionnés dans le règlement de consultation ne porte sur l’implantation géographique du prestataire et de ses équipements ; que si le point 5.2.2 du cahier des clauses techniques particulières mentionne que « le choix de l’implantation de l’installation proposée par le prestataire dans le cadre du présent marché devra être effectué en privilégiant au maximum la proximité de l’usine d’incinération afin de limiter le transport », une telle mention, qui a trait aux choix faits par les candidats au



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moment de la formulation de leur offre, ne saurait révéler la mise en œuvre d’un critère géographique à l’occasion de la désignation par Grenoble-Alpes Métropole de son cocontractant ; que le moyen doit par suite être écarté ;

22. Considérant, en septième lieu, que la requérante fait valoir que la Grenoble-Alpes Métropole n’a pas procédé à la publicité adéquate concernant la hiérarchisation et la pondération des sous-critères employés dans le cadre de l’évaluation de la valeur technique des offres ;

23. Considérant qu’il résulte des termes mêmes du règlement de consultation mentionnés au point 19 du présent jugement que le pouvoir adjudicateur a informé les candidats des critères de sélection des offres ainsi que de leur pondération ; qu’il en a fait de même en ce qui concerne les sous-critères employés ainsi que de leur conditions de mise en œuvre, soit leur pondération ; que Grenoble-alpes Métropole n’a par suite pas méconnu les règles de publicité et de mise en concurrence applicables en l’espèce ; que le moyen doit être écarté ;

24. Considérant, en huitième lieu, que la requérant soutient que le critère prix a fait l’objet d’une évaluation irrégulière en l’absence de toute précision dans le règlement de consultation de la commande-type employé à cet effet et alors que la métropole ne pouvait régulièrement avoir recours à la méthode du « chantier masqué » ;

25. Considérant qu’il résulte des termes de l’article 5 du règlement de consultation que « les offres réputées conformes au vu des éléments d’informations figurant dans le mémoire technique seront notées sur le critère prix. / L’offre la moins disante, évaluée au vu d’une commande type pré établie par le pouvoir adjudicateur, se verra attribuer la note de 50 points. / Pour chaque candidat, un ratio est calculé en divisant le montant du candidat présentant l’offre la moins chère par le montant de l’offre du candidat considéré évalué au vu de la même commande type. Les candidats sont classés par ordre décroissant en multipliant le ratio obtenu par la note maximum pouvant être obtenue, l’offre la moins élevée se voyant ainsi attribuer la note maximum. » ;

26. Considérant que le pouvoir adjudicateur définit librement la méthode de notation pour la mise en œuvre de chacun des critères de sélection des offres qu’il a définis et rendus publics ; qu’en effectuant, pour évaluer le montant des offres qui lui sont présentées, une « simulation » consistant à multiplier les prix unitaires proposés par les candidats par le nombre d’interventions envisagées, le pouvoir adjudicateur n’a pas recours à un sous-critère, mais à une simple méthode de notation des offres destinée à les évaluer au regard du critère du prix ; qu’il n’est donc pas tenu d’informer les candidats, dans les documents de la consultation, qu’il aura recours à une telle méthode ;

27. Considérant par suite que la requérante ne peut utilement faire valoir que le bordereau de commande type employé par Grenoble Alpes métropole à l’occasion de la mise en œuvre de sa méthode de notation n’a pas été préalablement communiqué aux candidats ; qu’il ne résulte pas par ailleurs de l’instruction que le pouvoir adjudicateur aurait commis une illégalité en recourant à une telle méthode et qu’il aurait méconnu à cette occasion le principe d’égal accès à la commande publique ; que le moyen doit par suite être écarté ;

28. Considérant, en neuvième lieu, que la requérante fait valoir que l’attributaire du marché ne dispose pas des capacités techniques pour réaliser les prestations contractuellement confiées alors qu’aux termes de l’article 52 du code des marchés publics : « (…) Les candidatures (…) sont examinées au regard des niveaux de capacités professionnelles, techniques et financières mentionnées dans l’avis d’appel public à la concurrence, (…) Les



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candidatures qui ne satisfont pas à ces niveaux de capacité sont éliminées. » ; que, toutefois, un tel manquement, à le supposer établi, n’est pas susceptible d’avoir dissuadé la requérante de présenter une offre et n’est pas en rapport direct avec son éviction ; qu’il ne constitue pas non plus un vice d’une gravité telle que le juge devrait le relever d’office ; que le moyen doit par suite être écarté ;

29. Considérant, en dixième lieu, que la requérante soutient que les stipulations contractuelles impliquant la suspension des apports lorsque la capacité disponible de stockage de l’IME et dédiée aux mâchefers de l’usine d’incinération d’Athanor est inférieure à 7 000 tonnes a des incidences financières pour le cocontractant tenant au paiement de pénalités ainsi qu’à une mise en régie du service aux frais et risque de ce dernier alors que le contrat prévoit par ailleurs que l’obligation de valorisation des mâchefers stockés sur l’IME relève du pouvoir adjudicateur ;

30. Considérant, toutefois, qu’il ne résulte pas de l’instruction qu’en cas de suspension des apports décidée par le pouvoir adjudicateur en raison de l’atteinte d’un seuil plancher de 7000 tonnes, le cocontractant de l’administration se voit infliger des pénalités de retard et qu’une telle décision soit susceptible de déboucher sur une mise en régie ; que les stipulations du contrat n’ont ainsi pas pour effet de reporter sur le cocontractant les conséquences d’une défaillance du pouvoir adjudicateur ; que le moyen doit par suite être écarté ;

31. Considérant, en onzième lieu, que la requérante fait valoir que le contrat méconnaît les dispositions de l’arrêté ministériel du 18 novembre 2011 relatif au recyclage en technique routière des mâchefers d’incinération de déchets non dangereux (MIDND) en tant que ses stipulations prévoient une méthode constitution des lots contraires à cet arrêté et que le processus d’échantillonnage retenu n’est pas compatible avec les prescriptions de l’arrêté ;

32. Considérant que si l’arrêté ministériel précité impose la constitution de lots de mâchefer d’incinération de déchets non dangereux de manière périodique et prohibe le mélange entre ces lots, il n’a pas pour objet ni pour effet d’imposer une traçabilité des MIDND constituant les lots et alors que ceux-ci sont constitués de « l’ensemble de MIDND produit dans une période P par une même installation de traitement thermique de déchets non dangereux et réceptionné dans une même installation de maturation et d’élaboration des MIDND » ainsi que le prévoit l’article 2 de l’arrêté du 18 novembre 2011 ; que les allégations quant à l’incompatibilité du processus d’échantillonnage avec les prescriptions de l’arrêté sont quant à elles dépourvues des précisions suffisantes permettant d’en apprécier le bien-fondé ; que le moyen doit par suite être écarté ;

33. Considérant que si la requérante fait valoir que le pouvoir adjudicateur ne sera pas en mesure de respecter les stipulations du point 5.1.4 du cahier des clauses techniques particulières, cette allégation n’est pas assortie des précisions suffisantes pour en apprécier l’incidence dans le cadre de la présente requête ; que le moyen doit par suite être écarté ;

34. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède qu’aucun des motifs invoqués par la société Modus Valoris pour expliquer son absence de candidature et de présentation d’une offre n’est fondé ; que la requérante n’est ainsi pas fondée à soutenir qu’elle a été irrégulièrement dissuadée de candidater et à contester la validité du contrat conclu entre Grenoble-Alpes Métropole et la société Lely environnement ;



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Sur les conclusions à fin de condamnation :

35. Considérant qu’aucun des vices invoqués par la société requérante n’étant fondé, celle-ci n’est pas fondée à réclamer une indemnisation réparant les préjudices qu’elle estime avoir subi du fait de l’irrégularité de la procédure ; que les conclusions à fin de condamnation présentées par la société Modus Valoris doivent par suite être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

36. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Grenoble-Alpes Métropole, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Modus Valoris demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société Modus Valoris une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par Grenoble-Alpes Métropole et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Modus Valoris est rejetée.

Article 2 : La société Modus Valoris versera à Grenoble-Alpes Métropole la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la société Modus Valoris, à Grenoble Alpes Métropole et à la Société Lely environnement.

Délibéré après l’audience du 8 février 2018, à laquelle siégeaient : M. E, président, M. X, premier conseiller, Mme Caullireau-Forel, première conseillère.

Lu en audience publique le 22 mars 2018.

Le rapporteur, Le président,

B. X F. E



N° 1504518 1

La greffière,

J. A

La République mande et ordonne au préfet de l’Isère en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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