Tribunal administratif de Grenoble, Juge unique 4, 30 décembre 2022, n° 1904661

  • Vente·
  • Justice administrative·
  • Établissement·
  • Meubles·
  • Titre·
  • Décret·
  • Cotisations·
  • Commerce de détail·
  • Sociétés·
  • Imposition

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
TA Grenoble, juge unique 4, 30 déc. 2022, n° 1904661
Juridiction : Tribunal administratif de Grenoble
Numéro : 1904661
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 15 juillet 2019, le 25 mai 2020 et le 26 avril 2021, la société Lapeyre demande au tribunal :

1°) de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires de taxe sur les surfaces commerciales auxquelles elle a été assujettie, au titre des années 2011 et 2012, à raison de ses établissements situés à Epagny, Annemasse, Saint-Alban-Leysse, Montélimar, Valence, Saint-Martin-d’Hères et Salaise-sur-Sanne, à hauteur des fractions de cotisations correspondant aux surfaces de vente affectées à titre exclusif à la vente de meubles meublants et de matériaux de construction ;

2°) à titre subsidiaire, de prononcer la réduction de la moitié de ces cotisations supplémentaires de taxe sur les surfaces commerciales ;

3°) d’ordonner la restitution de ces sommes assorties des intérêts au taux de 0,4 % par mois conformément aux dispositions de l’article L. 208 alinéa 1 du livre des procédures fiscales ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat les sommes exposées pour sa défense en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.

Elle soutient que :

— l’article 3-A du décret du 26 janvier 1995 relatif à la taxe sur les surfaces commerciales est contraire à la Constitution dès lors qu’il porte atteinte au principe d’égalité devant la loi et au principe d’égalité devant les charges publiques garantis par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ;

— les magasins de commerce de détail en litige ont toujours exercé à titre principal une activité de vente de meubles meublants dans une proportion significative pour requérir des surfaces de vente anormalement élevées, ce qui n’a été à aucun moment contesté par l’administration fiscale ; elle est donc en droit de bénéficier y compris au titre des années antérieures à 2013 de la réduction de 30 % du taux de la taxe sur les surfaces commerciales ;

— la condition d’exclusivité prévue par l’article 3-A du décret s’apprécie au niveau des surfaces taxables au sein d’un même établissement et en conséquence, l’administration fiscale n’était en droit de refuser l’application de la réduction du taux de 30 % qu’à la seule fraction des cotisations de la taxe correspondant aux surfaces de vente des magasins de commerce de détail qui n’étaient pas affectées à titre exclusif en 2010 et 2011 à la vente de meubles meublants et de matériaux de construction ;

— compte tenu de l’identité d’objet, de cause et de parties entre la requête et celle accueillie favorablement par le jugement rendu par le tribunal administratif de Montreuil le 25 février 2021, devenu définitif, une décision contraire serait entachée d’une erreur de droit.

Par des mémoires enregistrés les 25 novembre 2019, 24 mars 2021 et 29 avril 2021, l’administrateur général des finances publiques, chargé de la direction des vérifications nationales et internationales conclut au rejet de la requête et à ce qu’il soit mis à la charge de la SAS Lapeyre une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens invoqués pas la société Lapeyre ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

— la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés ;

— le décret n° 95-85 du 26 janvier 1995 relatif à la taxe sur les surfaces commerciales ;

— le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné M. A en application de l’article R. 222-13 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Après avoir, au cours de l’audience publique, présenté son rapport et entendu les conclusions de M. Journé, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Lapeyre exploite des établissements ayant pour objet la vente et la réalisation de prestations concernant l’aménagement de la maison. A la suite de vérifications de comptabilité, l’administration fiscale a remis en cause l’application de la réduction de 30 % de la base imposable à la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM) au titre des années 2011 et 2012. La SAS Lapeyre demande, à titre principal, la décharge et, à titre subsidiaire, la réduction des cotisations supplémentaires de taxe sur les surfaces commerciales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 à raison des établissements qu’elle exploite à Epagny (Haute-Savoie), Annemasse (Haute-Savoie), Saint-Alban-Leysse (Savoie), Montélimar (Drôme), Valence (Drôme), Saint-Martin-d’Hères (Isère) et Salaise-sur-Sanne (Isère).

2. Aux termes de l’article 3 de la loi du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés, dans sa rédaction applicable aux années d’imposition en litige : « Il est institué une taxe sur les surfaces commerciales assise sur la surface de vente des magasins de commerce de détail, dès lors qu’elle dépasse quatre cents mètres carrés des établissements ouverts à partir du 1er janvier 1960 quelle que soit la forme juridique de l’entreprise qui les exploite. () / Un décret prévoira () des réductions pour les professions dont l’exercice requiert des superficies de vente anormalement élevées () ». Aux termes de l’article 3 du décret du 26 janvier 1995 relatif à la taxe sur les surfaces commerciales, pris pour l’application de ces dispositions, dans sa rédaction applicable aux années d’imposition en litige : « A. La réduction de taux prévue au dix-septième alinéa de l’article 3 de la loi du 13 juillet 1972 susvisé en faveur des professions dont l’exercice requiert des superficies de vente anormalement élevées est fixée à 30 p. 100 en ce qui concerne la vente exclusive des marchandises énumérées ci-après : () – meubles meublants () matériaux de construction () ».

3. En adoptant les dispositions précitées, le législateur a entendu instituer une réduction de taux en faveur des professions dont l’exercice requiert des superficies de vente anormalement élevées et a confié au pouvoir réglementaire le soin de déterminer le champ d’application et le montant de cette réduction. Ainsi, en prévoyant que les établissements redevables de la taxe sur les surfaces commerciales bénéficieraient de la réduction de taux prévue par la loi à raison des surfaces qu’ils affectent à titre exclusif à une activité consistant à vendre des marchandises mentionnées dans une liste qu’il a définie, le pouvoir réglementaire a fondé son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction du but fixé par le législateur sans créer, entre les établissements exerçant une telle activité de vente à titre exclusif et ceux l’exerçant seulement à titre principal, une différence de traitement qui ne serait pas en rapport direct avec l’objet de la loi du 13 juillet 1972. La société Lapeyre n’est dès lors pas fondée à soutenir que l’article 3 du décret du 26 janvier 1995, en prévoyant une condition d’exclusivité pour bénéficier de la réduction du taux, méconnaîtrait les principes constitutionnels d’égalité devant la loi et d’égalité devant les charges publiques en ce qu’il conduirait à une différence de traitement entre les contribuables qui vendent exclusivement les marchandises énumérées par le décret et ceux qui en vendent à titre principal.

4. Il résulte des dispositions précitées, que les établissements réalisant à la fois des ventes de marchandises éligibles et non éligibles bénéficient de la réduction du taux de la taxe sur les surfaces commerciales prévue par le A de l’article 3 du décret du 26 janvier 1995 en faveur des professions dont l’exercice nécessite des superficies de vente anormalement élevées, à raison des surfaces affectées à titre exclusif à la vente de marchandises éligibles.

5. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l’impôt, au vu de l’instruction et compte tenu, le cas échéant, de l’abstention d’une des parties à produire les éléments qu’elle est seule en mesure d’apporter et qui ne sauraient être réclamés qu’à elle-même, d’apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l’assujettissement à l’impôt ou, le cas échéant, s’il remplit les conditions légales d’une exonération.

6. En l’espèce, la SAS Lapeyre produit des tableaux de « familles et sous-famille de produits commercialisés dans l’établissement durant les années 2010 et 2011 » détaillant des « surfaces de vente » affectées respectivement à la vente de meubles meublants, à la vente de matériaux de construction et à la vente de marchandises ne relevant pas de ces catégories. Toutefois, alors que la présentation des accessoires avec les meubles et matériaux auxquels ils se rapportent répond à une logique commerciale, les listes réalisées pour les besoins de la cause par les propres services de la société ne sont pas assorties d’éléments tels que des photographies, plans, consignes d’aménagement des magasins ou constats d’huissier confirmant que les surfaces dédiées à la vente de meubles meublants et de matériaux de construction seraient distinctes des autres surfaces de vente de ses établissements. Dans ces conditions, la société requérante ne peut être regardée pour les établissements concernés comme pouvant bénéficier de la réduction du taux de la taxe.

7. La société Lapeyre ne peut utilement se prévaloir de l’autorité de la chose jugée qui s’attacherait au jugement du 25 février 2021 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a prononcé la décharge partielle des cotisations de taxe sur les surfaces commerciales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012, dès lors que ces impositions concernent des établissements distincts de ceux à raison desquels les impositions en litige ont été établies, et qu’en tout état de cause ce jugement ne saurait être regardé comme définitif, ayant été annulé par le Conseil d’État statuant au contentieux par la décision n°451869 du 20 juillet 2022.

8. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de la société Lapeyre à fin de décharge, de réduction et de restitution assortie d’intérêts moratoires des rappels de taxe sur les surfaces commerciales mis à sa charge pour les établissements cités au point 1 doivent être rejetées.

9. L’Etat n’étant pas la partie perdante dans la présente instance, les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à sa charge une somme au titre des frais, au demeurant non chiffrés, exposés par la société Lapeyre et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner la société requérante à verser à l’Etat une somme au titre des mêmes dispositions.

8. La société requérante ne justifiant pas avoir engagé, dans la présente instance, des frais mentionnés à l’article R. 761-1 du code de justice administrative, ses conclusions tendant à la condamnation de l’Etat aux entiers dépens doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Lapeyre est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l’administrateur général des finances publiques chargé de la direction des vérifications nationales et internationales présentées sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la société par actions simplifiée Lapeyre et à l’administrateur général des finances publiques chargé de la direction des vérifications nationales et internationales.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 décembre 2022.

Le magistrat désigné,

T. A

La greffière,

C. BILLON

La République mande et ordonne au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Tribunal administratif de Grenoble, Juge unique 4, 30 décembre 2022, n° 1904661