Tribunal administratif de Melun, 21 octobre 2021, n° 2109122

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Sur la décision

Référence :
TA Melun, 21 oct. 2021, n° 2109122
Juridiction : Tribunal administratif de Melun
Numéro : 2109122

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE MELUN

N° 2109122

__________ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
M. B…

__________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS M. Pierre-Yves X

Juge des référés

__________

Ordonnance du 21 octobre 2021 Le juge des référés __________

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 8 et 18 octobre 2021, M. A… B…, représenté par Me Rousseau, demande au juge des référés, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l’exécution de la décision du 20 septembre 2021 par laquelle la directrice des ressources humaines du centre hospitalier Léon-Binet de Provins l’a suspendu de ses fonctions ;

2°) d’enjoindre au centre hospitalier Léon-Binet de le rétablir dans sa position antérieure.

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier Léon-Binet la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la condition tenant à l’urgence est remplie ;

- il existe un doute sérieux sur la légalité de la décision dès lors que :

- la signataire de la décision n’était pas compétente ;

- il n’a pas été destinataire des informations prévues par l’article 14 de la loi du 5 août 2021 et n’a pas été convoqué à un entretien;

- le conseil de discipline n’a pas été saisi ;

- la décision est entachée d’une erreur de droit dès lors qu’il ne pouvait être suspendu alors qu’il était en congé de maladie, dont le bien-fondé n’a pas été régulièrement remis en cause.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 octobre 2021, le centre hospitalier Léon- Binet de Provins conclut au rejet de la requête et à ce qu’il soit mis à la charge du requérant la somme de 3 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n’est pas établi qu’un recours au fond a été introduit ;



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- la condition tenant à l’urgence n’est pas satisfaite ;

- la signataire de la décision a reçu une délégation de signature régulière du directeur de l’établissement ;

- l’article 14 de la loi du 5 août 2021 ne prévoit pas une procédure contradictoire ou l’information de l’agent suspendu préalablement à la suspension ;

- les dispositions de l’article L. 121-1 du code des relations entre le public et l’administration n’est pas applicable ;

- le centre hospitalier était en situation de compétence liée pour suspendre le requérant ;

- la décision ne constitue pas une sanction disciplinaire ;

- aucune disposition de la loi du 5 août 2021 ne permet à déroger à l’obligation vaccinale pour les agents en congé de maladie dès lors que ceux-ci sont en position d’activité ;

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la requête enregistrée sous le n° 2109160 tendant à l’annulation de la décision en litige.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 ;

- la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 ;

- le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné M. X, vice-président, pour statuer sur les demandes de référés.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Au cours de l’audience publique du 19 octobre 2021 tenue en présence de Mme V…, greffière d’audience, M. X a lu son rapport et a entendu les observations de :

- Me Basic, représentant M. B… qui a conclu aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

- Me Bitar, représentant le centre hospitalier Léon-Binet, qui a maintenu les termes de son mémoire en défense.

La clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience.

Considérant ce qui suit :

1. M. B…, en congé de maladie du 17 juin au 31 octobre 2021, a été suspendu de ses fonctions sans traitement, en application de l’article 14 de la loi du 5 août 2021, par une décision du 20 septembre 2021 du directeur du centre hospitalier Léon-Binet. M. B… demande la suspension de cette décision.

2. Aux termes de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension



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de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (…) ».

3. Aux termes de l’article 12 de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire : « I. – Doivent être vaccinés, sauf contre-indication médicale reconnue, contre la covid-19 : 1° Les personnes exerçant leur activité dans : a) Les établissements de santé mentionnés à l’article L. 6111-1 du code de la santé publique ainsi que les hôpitaux des armées mentionnés à l’article L. 6147-7 du même code ; (…) ». Aux termes de l’article 13 de la même loi : « (…) II. – Les personnes mentionnées au I de l’article 12 justifient avoir satisfait à l’obligation prévue au même I ou ne pas y être soumises auprès de leur employeur lorsqu’elles sont salariées ou agents publics. (…) V. – Les employeurs sont chargés de contrôler le respect de l’obligation prévue au I de l’article 12 par les personnes placées sous leur responsabilité. (…) ». Aux termes de l’article 14 de la même loi : « (…) B. – A compter du 15 septembre 2021, les personnes mentionnées au I de l’article 12 ne peuvent plus exercer leur activité si elles n’ont pas présenté les documents mentionnés au I de l’article 13 ou, à défaut, le justificatif de l’administration des doses de vaccins requises par le décret mentionné au II de l’article 12. (…) III. – Lorsque l’employeur constate qu’un agent public ne peut plus exercer son activité en application du I, il l’informe sans délai des conséquences qu’emporte cette interdiction d’exercer sur son emploi ainsi que des moyens de régulariser sa situation. L’agent public qui fait l’objet d’une interdiction d’exercer peut utiliser, avec l’accord de son employeur, des jours de congés payés. A défaut, il est suspendu de ses fonctions ou de son contrat de travail. La suspension mentionnée au premier alinéa du présent III, qui s’accompagne de l’interruption du versement de la rémunération, prend fin dès que l’agent public remplit les conditions nécessaires à l’exercice de son activité prévues au I. (…) ».

4. En l’état de l’instruction le moyen tiré de ce qu’un agent en congé de maladie ne peut faire l’objet de la suspension prévue par l’article 14 de la loi du 5 août 2021 est propre à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision en litige.

5. L’urgence justifie que soit prononcée la suspension d’une décision administrative lorsque l’exécution de celle-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi d’une demande tendant à la suspension d’une telle décision, d’apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l’acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l’exécution de la décision soit suspendue.

6. En l’espèce, alors que M. B… n’est pas susceptible d’être présent au sein du centre hospitalier avant la fin de son congé de maladie et ne constitue dès lors pas un risque pour les patients ou les personnels de cet établissement, la suspension de son traitement porte une atteinte suffisamment grave à ses intérêts pour que la condition tenant à l’urgence soit regardée comme satisfaite.

7. Il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de suspendre la décision du 20 septembre 2021 par laquelle la directrice des ressources humaines du centre hospitalier Léon-Binet de Provins a suspendu M. B… de ses fonctions.

8. La présente décision implique que M. B… soit placé, dans l’attente du jugement au fond, dans la position qui corresponde à sa situation, soit, en l’état de l’instruction et sous



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réserve de changement dans sa situation, en position de congé de maladie jusqu’au 31 octobre 2021, ce dans un délai de cinq jours à compter de la notification de la présente ordonnance, sans qu’il soit besoin d’ordonner une astreinte.

9. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B…, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande le centre hospitalier Léon-Binet au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du centre hospitalier Léon-Binet le versement d’une somme de 300 euros à M. B… au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

O R D O N N E :

Article 1er : La décision du 21 septembre 2021 par laquelle la directrice des ressources humaines du centre hospitalier Léon-Binet de Provins a suspendu M. B… de ses fonctions est suspendue.

Article 2 : Il est enjoint au centre hospitalier Léon-Binet de placer M. B…, dans l’attente du jugement au fond, dans la position qui corresponde à sa situation, soit, en l’état de l’instruction et sous réserve de changement dans sa situation, en position de congé de maladie jusqu’au 31 octobre 2021, ce dans un délai de cinq jours à compter de la notification de la présente ordonnance.

Article 3 : Le centre hospitalier Léon-Binet versera à M. B… une somme de 300 euros au titre de l’article L. 761-1.

Article 4 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier Léon-Binet au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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