Tribunal administratif de Nîmes, 5 juillet 2013, n° 1102423

  • Sodium·
  • Stockage·
  • Installation classée·
  • Environnement·
  • Rubrique·
  • Pollution·
  • Nomenclature·
  • Site·
  • Activité·
  • Antériorité

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
TA Nîmes, 5 juill. 2013, n° 1102423
Juridiction : Tribunal administratif de Nîmes
Numéro : 1102423

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE NÎMES

N° 1102423

___________

SOCIETE JO.PRO.CHIM

___________

Mme Achour

Rapporteur

___________

M. Peretti

Rapporteur public

___________

Audience du 20 juin 2013

Lecture du 5 juillet 2013

___________

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Nîmes

(2e chambre)

44-02-02-01-02

44-02-02-005

Vu la requête, enregistrée le 2 août 2011, présentée pour la société Jo.Pro.Chim, dont le siège est XXX, représentée par son représentant légal, par Me Guin ;

La société Jo.Pro.Chim demande au tribunal :

— d’annuler la décision du 8 juillet 2011 par laquelle le préfet de Vaucluse lui a imposé une suspension d’activité ainsi que diverses prescriptions spéciales ;

— de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2.500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

— s’agissant d’une mesure de police, la suspension d’activité devait être motivée conformément aux dispositions de la loi du 11 juillet 1979 ; elle devait ainsi être précédée d’une procédure contradictoire en application de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000, ce qui n’a pas été le cas en l’espèce ; la décision encourt de ce chef l’annulation ;

— elle exploite un établissement spécialisé dans le stockage de reconditionnement de produits liquides chimiques industriels et de stockage d’hypochlorite de sodium et de perchloroéthylène, sous couvert d’un récépissé de déclaration du 14 septembre 2000 ; en suspendant l’exploitation des activités de stockage et de transversement d’hypochlorite de sodium et de perchloroéthylène dans l’attente de leur autorisation administrative, le préfet a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d’appréciation eu égard, d’une part, à sa demande de régime d’antériorité et à la constitution d’un dossier de déclaration pour l’hypochlorite de sodium, et, d’autre part, au classement erroné du stockage de perchloroéthylène dans la rubrique n° 1175, sous le régime de la déclaration, alors que la société n’exerce aucune activité d’emploi pour l’extraction et la distillation de ce produit mais uniquement de stockage et de conditionnement, pour des quantités bien inférieures au seuil de 100 tonnes ;

Vu la décision attaquée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 octobre 2011, présenté par le préfet de Vaucluse, qui conclut au rejet de la requête ;

Le préfet fait valoir que :

— les dispositions de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 n’imposaient pas que l’arrêté litigieux soit précédé d’une procédure contradictoire, s’agissant de mesures prises au titre de l’urgence, en application de l’article L. 512-20 du code de l’environnement ;

— la mesure de suspension, a bien été précédée d’une procédure contradictoire, telle que prévue par les dispositions de l’article L. 514-5 du code de l’environnement, l’exploitant s’étant vu communiquer des fiches d’écart et des remarques sur place lors de la visite d’inspection du 10 juin 2011 et par courrier du 21 juin 2011, à la suite duquel il a fait connaître ses observations par courrier du 7 juillet 2011 ;

— la société requérante ne pouvait bénéficier d’un régime d’antériorité dès lors que sa déclaration complémentaire concernant l’hypochlorite de sodium était postérieure de plus d’un an à l’entrée en vigueur du classement de ce produit au titre de la rubrique n°1172, quand bien même sa déclaration initiale mentionnait cette activité ; ni cette dernière circonstance, ni le dépôt d’une demande d’antériorité le 3 février 2011, ni le fait que la déclaration requise ait été en cours d’élaboration, ne faisait obstacle à l’application de l’article L. 514-2 du code de l’environnement ;

— le classement de l’activité de la société requérante concernant le stockage de percholoréthylène au titre de la rubrique n° 1175 de la nomenclature, laquelle n’exclut pas les seules activités de stockage, et comme relevant du régime de déclaration eu égard au volume de produit stocké, n’est entaché d’aucune erreur de droit ;

— la déclaration d’antériorité au titre de cette rubrique ne comportait pas la nature et le volume des activités exercées ni aucune référence à la rubrique n° 1175, tel qu’exigé par les dispositions de l’article R. 513-1 du code de l’environnement ;

— l’arrêté litigieux n’est en aucun cas motivé par une pollution d’origine inconnue sur la commune de Vedène ni par un incident mineur survenu dans l’installation ; les conséquences de l’incident du 9 juin 2011, l’inobservation des conditions de fonctionnement imposées par le code de l’environnement, la protection des intérêts visés à l’article L. 511-1 de ce code, étaient de nature à justifier l’application de l’article L. 512-20 du même code ; dans les circonstances de l’espèce, les mesures prises ne sont entachées d’aucune disproportion ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 24 juin 2013, présentée pour la société Jo.Pro. Chim ;

Vu le règlement européen CLP du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l’environnement ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le décret n° 2010-1700 du 30 décembre 2010 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 20 juin 2013 :

— le rapport de Mme Achour, rapporteur ;

— les conclusions de M. Peretti, rapporteur public ;

— et les observations de Me Hequet, représentant la société requérante ;

Considérant qu’à la suite d’un incident survenu sur le site de la société Jo.Pro. Chim à Vedène le 9 juin 2011, ayant entraîné une pollution du site agroalimentaire voisin et par un arrêté du 8 juillet 2011, le préfet a, d’une part, imposé la suspension des activités de stockage et de transversement d’hypochlorite de sodium et de perchloroéthlylène dans l’attente de leur autorisation administrative et, d’autre part, maintenu hors exploitation les installations de stockage et de reconditionnement de tout produit liquide susceptible de créer une pollution sur le site ; que la société Jo.Pro.Chim conteste ces décisions ;

Sur la légalité de la décision portant maintien hors exploitation des installations de stockage et de reconditionnement de tout produit liquide susceptible de créer une pollution :

Considérant qu’aux termes de l’article L 512-20 du même code : « En vue de protéger les intérêts visés à l’article MACROBUTTON HtmlResAnchor L. 511-1, le préfet peut prescrire la réalisation des évaluations et la mise en œuvre des remèdes que rendent nécessaires soit les conséquences d’un accident ou incident survenu dans l’installation, soit les conséquences entraînées par l’inobservation des conditions imposées en application du présent titre, soit tout autre danger ou inconvénient portant ou menaçant de porter atteinte aux intérêts précités. Ces mesures sont prescrites par des arrêtés pris, sauf cas d’urgence, après avis de la commission départementale consultative compétente » ; que la mise en œuvre des pouvoirs du préfet sur ce fondement n’impose pas de mise en demeure préalable ; qu’en tout état de cause, les dispositions du premier alinéa de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, qui fixent les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public, ne s’imposent pas en cas d’urgence ou de circonstances exceptionnelles ;

Considérant, en premier lieu, que la société requérante soutient que le préfet ne pouvait procéder à la suspension immédiate de ses activités qu’au terme d’une procédure contradictoire ; que cependant, il résulte de l’instruction qu’à la suite de l’incident survenu le 9 juin 2011, à l’occasion duquel de l’eau concentrée d’acide chlorydrique s’est répandue sur le site voisin exploitant une fromagerie, résultant d’un dysfonctionnement lors d’une opération de livraison de ce produit, les causes et le déroulement de l’incident n’ont pu être clairement établis par l’exploitant qui n’a pas été en mesure de préciser à l’inspecteur des installations classées les conditions techniques et de gestion ayant permis cet accident ni de déterminer les mesures correctives susceptibles d’être mises en place ; qu’à l’occasion de deux visites des 10 et 20 juin 2011, l’inspection des installations classées a constaté plusieurs infractions à la législation sur les installations classées applicable à cet établissement, consignées dans le rapport du 30 juin 2011 ; qu’il est constant que deux incidents occasionnant des pollutions de sites voisins étaient déjà survenus en 2007 et 2008 ; que cette situation révélait ainsi une situation d’urgence de nature à permettre au préfet de décider la suspension provisoire du fonctionnement de l’installation sans mise en demeure préalable ni procédure contradictoire en application des dispositions précitées, nonobstant le délai de quelques semaines séparant l’incident de la décision litigieuse nécessaire à l’examen de la situation ; qu’en tout état de cause, le préfet avait fait part à la société requérante des écarts qui avaient été constatés par l’inspection des installations classées les 10 et 20 juin 2011, trois fiches d’écart ayant été remises sur place le 10 juin 2011, six fiches d’écart et trois remarques ayant été communiquées, par courrier du 21 juin 2011, invitant l’exploitant à communiquer ses observations ; que la société Jo. Pro. Chim a produit des éléments de réponse par courrier du 7 juillet 2011 ; que, dans ces conditions, la société Jo. Pro. Chim n’est pas fondée à soutenir que la décision attaquée serait entachée de vice de procédure ;

Considérant, en second lieu, qu’il ne résulte pas de l’instruction que la décision querellée ait été prise à la suite d’un incident mineur et pour ce seul motif ; que, dans les circonstances de l’espèce telles que précédemment examinées, dès lors que l’exploitant n’avait pas été en mesure de proposer une analyse des causes de l’incident survenu le 9 juin 2011 ayant occasionné une pollution du site voisin de production agroalimentaire, que deux autres incidents étaient survenus sur le site depuis 2007 donnant lieu à des pollutions de sites voisins, et eu égard aux constats du rapport de l’inspection des installations classées relevant plusieurs points de non-conformité des installations, le préfet a pu imposer à la société Jo. Pro. Chim, par l’article 2 de l’arrêté litigieux, le maintien hors exploitation des installations de stockage et de reconditionnement de tout produit liquide susceptible de créer une pollution, « jusqu’à la fourniture et réalisation d’une expertise technique de l’ensemble des installations présentes sur le site » et fixer des prescriptions complémentaires sans entacher sa décision d’une erreur d’appréciation ;

Sur la légalité de la suspension des activités relatives à l’hypochlorite de sodium et au perchloroéthlylène dans l’attente de leur autorisation administrative :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 513-1 du code de l’environnement, dans sa rédaction en vigueur à la date de l’arrêt attaqué, dont les dispositions sont issues de l’article 16 de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l’environnement tel que modifié par la loi du 4 janvier 1993 : « Les installations qui, après avoir été régulièrement mises en service, sont soumises, en vertu d’un décret relatif à la nomenclature des installations classées, à autorisation ou à déclaration peuvent continuer à fonctionner sans cette autorisation ou cette déclaration, à la seule condition que l’exploitant se soit déjà fait connaître du préfet ou se fasse connaître de lui dans l’année suivant la publication du décret. / Les renseignements que l’exploitant doit transmettre au préfet ainsi que les mesures que celui-ci peut imposer afin de sauvegarder les intérêts mentionnés à l’article L. 511-1 sont précisés par décret en Conseil d’Etat. » ; qu’il appartient au juge administratif, pour se prononcer sur l’existence des droits que l’exploitant tient de ces dispositions, de rechercher si, compte tenu de la date de mise en service régulière de l’installation, l’exploitant peut se prévaloir, à la date à laquelle elle est entrée dans le champ de la législation relative aux installations classées pour la protection de l’environnement par l’effet d’une modification de la nomenclature, d’une situation juridiquement constituée le dispensant de solliciter l’autorisation ou de déposer la déclaration prévue par les dispositions régissant une telle installation ;

Considérant que le stockage d’hypochlorite de sodium a été classé dans la rubrique n° 1172 de la nomenclature des installations classées à compter du 20 janvier 2009, date de l’entrée en vigueur du règlement européen CLP du 16 décembre 2008 ; qu’en vertu du décret susvisé du 30 décembre 2010 modifiant la colonne A de l’annexe à l’article R. 511-9 du code de l’environnement relative à la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement, le stockage de perchloroéthylène a été classé dans la rubrique n° 1175 de la nomenclature des installations classées, sous l’intitulé « Organohalogénés (emploi ou stockage de liquides) pour la mise en solution, l’extraction, etc., à l’exclusion du nettoyage à sec visé par la rubrique 2345, du nettoyage, dégraissage, décapage de surfaces visés par la rubrique 2564 et des substances ou mélanges classés dans une rubriques comportant un seuil AS. », laquelle fixe le seuil d’autorisation à une quantité de produit susceptible d’être présente sur le site supérieure à 1.500 litres ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que la société Jo. Pro. Chim s’est vue délivrer le 14 septembre 2000 un récépissé de déclaration au titre de ses activités relevant de la rubrique n° 1611 de la nomenclature des installations classées ; que la déclaration déposée en préfecture par l’exploitant mentionnait l’ensemble des cuves de stockage présentes sur le site, notamment celles contenant des produits non classés à cette date, dont une cuve de 30 m³ d’hypochlorite de sodium et une cuve de 10 m³ de perchloroéthylène ; que le préfet n’établit ni même n’allègue que les conditions d’exploitation ainsi mentionnées aient évolué depuis cette date s’agissant des produits en cause ; que l’exploitant devait, en conséquence, être regardé comme justifiant d’un droit acquis au titre de ces activités, lequel l’autorisait à se prévaloir du régime d’antériorité défini par l’article L. 513-1 précité du code de l’environnement sans que lui soient opposables les conditions de dépôt d’une déclaration d’antériorité ; que, dès lors, si le préfet demeurait à même d’imposer toute mesure de nature à sauvegarder les intérêts mentionnés à l’article L. 511-1 du code de l’environnement, il ne pouvait, en l’espèce, faire usage du pouvoir qu’il détient en application des dispositions de l’article L. 514-2 du code de l’environnement ; que l’article 1 de l’arrêté attaqué est ainsi entaché d’erreur de droit en ce qu’il suspend l’exploitation des activités de stockage d’hypochlorite de sodium et de perchloroéthylène dans l’attente de leur autorisation administrative, et doit, pour ce motif, être annulé, sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens dirigés contre cette décision ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il n’y a lieu d’annuler l’arrêté du préfet de Vaucluse qu’en son article 1, en tant qu’il suspend l’exploitation des activités de stockage d’hypochlorite de sodium et de perchloroéthylène dans l’attente de leur autorisation administrative ;

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il résulte des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée ; il peut, même d’office, ou pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner l’Etat à verser à la société Jo. Pro. Chim une somme sur le fondement de ces dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : L’article 1er de l’arrêté du préfet de Vaucluse n° SI2011-07-08-0070 DDPP du 8 juillet 2011 est annulé en tant qu’il suspend l’exploitation des activités de stockage d’hypochlorite de sodium et de perchloroéthylène dans l’attente de leur autorisation administrative.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la société Jo. Pro. Chim et au préfet de Vaucluse.

Délibéré après l’audience du 20 juin 2013, à laquelle siégeaient :

M. Abauzit, président,

Mme Achour, premier conseiller,

Mme Galtier, conseiller,

Lu en audience publique le 5 juillet 2013.

Le rapporteur, Le président,

signé signé

P. ACHOUR F. ABAUZIT

Le greffier,

signé

E. NIVARD

La République mande et ordonne au ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution du présent jugement.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Tribunal administratif de Nîmes, 5 juillet 2013, n° 1102423