Tribunal administratif de Paris, 30 novembre 2017, n° 1716842

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Paris, 30 nov. 2017, n° 1716842
Juridiction : Tribunal administratif de Paris
Numéro : 1716842

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PARIS
N° 1716842/3-5 ___________
Société ARCHIMED ___________ Mme Dhiver Juge des référés ___________
Audience du 17 novembre 2017
Ordonnance du 30 novembre 2017 ___________ 39-08-015-01
C RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
La juge des référés Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 3 novembre 2017 et le 17 novembre 2017, la société Archimed, représentée par Me Letellier, demande au juge des référés, sur le fondement de l’article L. 551-1 du code de justice administrative : 1°) d’annuler la procédure de passation du marché public initiée par le secrétariat général pour l’administration du ministère de la défense portant sur la création et la maintenance d’un système de gestion des bibliothèques numériques, de gestion des connaissances et de capitalisation documentaire au profit de l’ensemble des organismes du ministère de la défense ; 2°) d’annuler la décision du 26 octobre 2017 rejetant son offre ; 2°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761- 1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— le pouvoir adjudicateur a méconnu les dispositions de l’article 99 du décret du 25 mars 2016 ;

— à supposer que les sous-critères techniques mentionnés au point VI du règlement de la consultation doivent être lus au regard des éléments énoncés au IV du même règlement, qui décrit le contenu du rapport technique, ces éléments doivent être regardés comme des critères d’attribution au sens du IV de l’article 62 du décret du 25 mars 2016 ; la procédure de consultation est irrégulière en ce que, pour les sous-critères SC1 « organisation, méthodologie »,
SC2 « présentation de la solution » et SC5 « démonstration », le poids respectif des éléments d’appréciation énoncés au point IV n’a pas été indiqué ; le manquement, qui affecte 80 % de la notation technique, est nécessairement susceptible de l’avoir lésée ;

— le sous-critère technique SC2 « présentation de la solution » est entaché de plusieurs irrégularités ; il est imprécis et inintelligible en ce qui concerne les attentes relatives au « manuel utilisateur de la version 1 » ; il est discriminatoire en ce qui concerne les « éléments permettant de juger de la robustesse et de la fiabilité du système » ; il se rapporte à des éléments de contrôle N° 1716842 2 de la conformité des offres et est redondant avec le SC3 en ce qui concerne la « matrice des exigences renseignées » ; ces manquements, qui affectent un sous-critère représentant 30 points, sont susceptibles de l’avoir lésée ;

— les éléments d’appréciation du sous-critère technique SC5 « démonstration » sont redondants avec ceux concourant à l’analyse du sous-critère SC3 ; cette irrégularité, qui affecte un sous-critère représentant 30 points, est susceptible de l’avoir lésée ;

— dans l’hypothèse où les informations données au point IV du règlement de la consultation seraient une simple aide à la rédaction du mémoire technique, la consultation est irrégulière en ce que les sous-critères techniques énoncés dans la partie VI, à l’intitulé très général, ne sont pas intelligibles ; le manquement est particulièrement constitué pour le souscritère technique SC2 qui a finalement été analysé au regard de deux éléments non affichés liés à la « présentation de la solution hors robustesse » et à la « présentation de la solution partie robustesse » ;

— la méthode d’analyse financière est irrégulière dans la mesure où elle est déconnectée de la réalité et de l’étendue des prestations devant être réalisées ; elle conduit à dévaloriser le scénario A qui constitue pourtant le cœur du contrat ; au sein de chaque scénario, le mode de calcul est faussé.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 novembre 2017, la ministre des armées conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 600 euros soit mise à la charge de la société Archimed sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— les obligations de communication résultant des dispositions du II de l’article 99 du décret du 25 mars 2016 ont été respectées ;

— les informations figurant à l’article IV du règlement de la consultation constituent une simple aide aux candidats pour construire leur mémoire technique et l’article VI expose précisément les critères et sous-critères d’attribution ; si, s’agissant du sous-critère SC2 « présentation de la solution », les deux parties « présentation hors robustesse » et « présentation robustesse » ne figurent pas dans le règlement, cette absence d’information n’est pas susceptible d’avoir exercé une influence sur la présentation des offres dès lors que les deux parties sont affectées d’une note d’égale importance ;

— le sous-critère technique SC2 « présentation de la solution » est régulier ; la demande d’un manuel d’utilisateur est commune dans un marché de ce type et a au demeurant été suffisamment explicitée dans le CCTP ; la société requérante avait la possibilité d’interroger le pouvoir adjudicateur, ce qu’elle n’a pas fait ; les « éléments permettant de juger de la robustesse et de la fiabilité du système » ne sont pas relatifs aux capacités de l’entreprise elle-même mais aux prestations attendues et aux moyens humains et matériels en relation avec le logiciel à développer ; l’ancienneté de la solution déployée n’a pas été prise en compte pour l’appréciation de ce sous-critère ; les éléments relatifs à la « matrice des exigences renseignée » n’ont pas été des éléments d’appréciation du sous-critère SC2 ;

— elle pouvait demander aux candidats une démonstration et en tenir compte dans l’attribution de la note technique ; cette démonstration avait partiellement pour objet de vérifier la crédibilité et la conformité des offres (exigences primordiales des versions 1 et 2, architecture proposée) et cette vérification n’est pas intervenue dans la notation du sous-critère SC5 ; pour cette notation, seuls ont été pris en compte les éléments relatifs à la capacité d’hébergement du produit et à l’ergonomie de la solution ; la société requérante n’a pas pu être lésée puisqu’elle a obtenu la meilleure note ;

— le critère du prix prend en compte, d’une part, l’ensemble des postes et bons de commande, d’autre part, le coût du projet dans le temps, avec deux blocs prépondérants, le premier (scénario A) correspondant au stade du déploiement des deux versions, le second N° 1716842 3 (scénario C) à la maintenance qui, sur la durée de vie du produit, constitue le poste le plus coûteux ; en tout état de cause, la requérante n’a manifestement pas été lésée par la pondération retenue puisqu’elle a proposé le prix le plus élevé pour le scénario A et le moins élevé pour le scénario C.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 novembre 2017, la société Ausy, société attributaire du marché, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 7 000 euros soit mise à la charge de la société Archimed sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du II de l’article 99 du décret du 25 mars 2016 manque en fait ;

— les éléments figurant dans la partie IV du règlement de la consultation, qui ne figurent pas en partie VI, sont de simples éléments d’appréciation ; le pouvoir adjudicateur a donné une simple grille d’appréciation s’apparentant à une méthode de notation et non, comme le prétend la société Archimed, un critère ;

— la requérante ne démontre pas que les éléments d’appréciation du sous-critère technique SC2 « présentation de la solution » ont eu une incidence sur la pondération de l’ensemble des sous-critères ; la mention relative au manuel utilisateur est intelligible à la lecture du CCTP ; les deux évaluations « robustesse » et « hors robustesse », qui devaient nécessairement être traitées, n’ont pas lésé les candidats qui n’auraient pas présenté une offre différente s’ils avaient été avertis de la division de ce sous-critère ;

— la requérante ne peut se prévaloir d’avoir été lésée par la notation du sous-critère SC5 « démonstration », pour lequel elle a obtenu la meilleure note ; ce sous-critère est régulier ;

— les coefficients appliqués dans la méthode d’analyse financière sont cohérents au regard des besoins du marché et l’évaluation financière de chacun des scenarii est régulière ; la société requérante ne saurait se plaindre des coefficients appliqués qui lui ont été favorables.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015, — le décret n° 2016-360 du 25 mars 2016, — le code de justice administrative.

La présidente du tribunal a désigné Mme Dhiver en application de l’article L. 551-1 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique, le 17 novembre 2017 à 14 heures, en présence de Mme Lagrède, greffier d’audience :

— le rapport de Mme Dhiver ;

— les observations de Me Letellier, avocat de la société Archimed qui conclut par les mêmes moyens aux mêmes fins que ses précédentes écritures ; il précise qu’il abandonne son premier moyen, tiré de la méconnaissance des dispositions du II de l’article 99 du décret du 25 mars 2016 ;

— les observations de MM. Cauchy et Bonenfant et de Mme Bonifacio, représentants de la ministre des armées, qui conclut aux mêmes fins que son mémoire en défense ; ils apportent N° 1716842 4 notamment des précisions sur les modalités de mise en œuvre des sous-critères techniques et du critère financier ;

— les observations de Me Duvignau, avocat de la société Ausy qui conclut par les mêmes moyens aux mêmes fins que ses précédentes écritures.

A l’issue de l’audience, la clôture de l’instruction a été différée au 22 novembre 2017 à 18 heures, en application des dispositions de l’article R. 522-8 du code de justice administrative, afin de permettre à la ministre des armées de produire le rapport d’analyse technique des offres occulté des éléments protégés par le secret industriel et commercial.

La clôture de l’instruction a été reportée en dernier lieu au 23 novembre 2017 à 19 heures. La ministre des armées a produit deux mémoires, enregistrés les 20 novembre 2017 et 23 novembre 2017, par lesquels elle conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures et verse au dossier le rapport d’analyse technique des offres.

Elle soutient que :

— le rapport d’analyse fourni devait être occulté pour respecter le secret industriel et commercial ; il ressort de sa structuration qu’aucun sous-critère n’a été ajouté ;

— les sous-critères techniques ont été suffisamment clairement définis, à la lumière des attentes telles qu’exprimées au IV du règlement de la consultation ; les éléments d’appréciation du sous-critère SC1 figurent dans la partie 1 « présentation, méthodologie » ; pour le sous-critère SC2, les éléments d’appréciation sont ceux qui figurent dans la partie 2 « présentation de la solution », à l’exception du paragraphe d) de cette partie ; la société requérante a perdu des points sur la partie robustesse du SC2 car elle n’a pas répondu à des points qui figuraient pourtant expressément dans cette partie IV ; les deux derniers items de la partie « démonstration » ont été pris en compte en compte dans la notation du sous-critère SC5 ;

— la société Archimed n’a pas fait l’objet d’un traitement discriminatoire dans l’appréciation de la robustesse de la solution proposée et, contrairement à ce qu’elle soutient, les candidats ont été appréciés au regard des éléments contenus dans leurs offres, y compris les liens hypertextes vers lesquels il était renvoyé ;

— il n’appartient pas au juge du référé précontractuel d’examiner l’appréciation portée sur les mérites respectifs de chacun des candidats.

La société Archimed a produit deux mémoires, enregistrés les 22 novembre 2017 et 23 novembre 2017, par lesquels elle conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures.

Elle soutient que :

— le rapport d’analyse communiqué, occulté de toutes les mentions relatives à l’analyse des offres, n’apporte aucun indice quant aux éléments effectivement pris en compte et les explications contradictoires de l’administration n’apportent aucun éclaircissement ;

— il ressort de l’exploitation du document fourni que son offre a été dénaturée et que le pouvoir adjudicateur s’est fondé sur des éléments extérieurs aux offres.

La société Ausy a produit un mémoire, enregistré le 22 novembre 2017, par lequel elle conclut par les mêmes moyens aux mêmes fins que ses précédentes écritures.

Elle soutient que la société Archimed a méconnu le principe de loyauté de la preuve et violé le secret des affaires ; de ce fait, sa requête ne peut qu’être rejetée. N° 1716842 5 1. Considérant qu’en application des articles 66 à 68 et 78 à 80 du décret du 25 mars 2016, le secrétariat général pour l’administration du ministère de la défense a lancé une procédure d’appel d’offres ouvert en vue de la passation d’un accord-cadre à bons de commande portant sur la création et la maintenance d’un système de gestion des bibliothèques numériques, de gestion des connaissances et de capitalisation documentaire au profit de l’ensemble des organismes du ministère de la défense, système dénommé CLADE BN ; que ce marché, eu égard à son objet, ne constitue pas un marché de défense ou de sécurité au sens de l’article 6 de l’ordonnance du 23 juillet 2015 ; que le pouvoir adjudicateur a retenu deux offres recevables, celle de la société requérante et celle de la société Ausy ; que, par une décision du 26 octobre 2017, il a informé la société Archimed du rejet de son offre classée, après examen, en seconde position tant pour le critère technique que pour le critère financier et de l’attribution du marché à la société Ausy ; qu’à la suite de la demande de la société requérante présentée sur le fondement du II de l’article 99 du décret du 25 mars 2016, le pouvoir adjudicateur lui a communiqué, par une lettre du 13 novembre 2017, les motifs détaillés de rejet de son offre ainsi que les caractéristiques et avantages de l’offre de la société Ausy retenue ; que la société Archimed demande au juge des référés précontractuels d’annuler la procédure de passation du marché ainsi que la décision du 26 octobre 2017 rejetant son offre ; 2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 551-1 du code de justice administrative : « Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu’il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs ayant pour objet l’exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d’exploitation, la délégation d’un service public ou la sélection d’un actionnaire opérateur économique d’une société d’économie mixte à opération unique. (…) / Le juge est saisi avant la conclusion du contrat. » ; que l’article L. 551-2 du même code dispose que : « I.- Le juge peut ordonner à l’auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre l’exécution de toute décision qui se rapporte à la passation du contrat, sauf s’il estime, en considération de l’ensemble des intérêts susceptibles d’être lésés et notamment de l’intérêt public, que les conséquences négatives de ces mesures pourraient l’emporter sur leurs avantages. Il peut, en outre, annuler les décisions qui se rapportent à la passation du contrat et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations. / II.- Toutefois, le I n’est pas applicable aux contrats passés dans les domaines de la défense ou de la sécurité au sens de l’article 6 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics. » ; 3. Considérant qu’il appartient au juge administratif, saisi en application de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, de se prononcer sur le respect des obligations de publicité et de mise en concurrence incombant à l’administration ; qu’en vertu de cet article, les personnes habilitées à agir pour mettre fin aux manquements du pouvoir adjudicateur à ses obligations de publicité et de mise en concurrence sont celles qui sont susceptibles d’être lésées par de tels manquements ; qu’il appartient, dès lors, au juge des référés précontractuels de rechercher si l’entreprise qui le saisit se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l’avoir lésé ou risquent de la léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant une entreprise concurrente ; 4. Considérant qu’aux termes de l’article 62 du décret du 25 mars 2016 : « (…)
II. Pour attribuer le marché public au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l’offre économiquement la plus avantageuse, l’acheteur se fonde : / (…) 2° Soit sur une pluralité de critères non-discriminatoires et liés à l’objet du marché public ou à ses N° 1716842 6 conditions d’exécution au sens de l’article 38 de l’ordonnance du 23 juillet 2015 susvisée, parmi lesquels figure le critère du prix ou du coût et un ou plusieurs autres critères comprenant des aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux. (…) / D’autres critères peuvent être pris en compte s’ils sont justifiés par l’objet du marché public ou ses conditions d’exécution. / (…)
IV. Les critères ainsi que les modalités de leur mise en œuvre sont indiqués dans les documents de la consultation. / Pour les marchés publics passés selon une procédure formalisée, les critères d’attribution font l’objet d’une pondération ou, lorsque la pondération n’est pas possible pour des raisons objectives, sont indiqués par ordre décroissant d’importance. La pondération peut être exprimée sous forme d’une fourchette avec un écart maximum approprié. » ; 5. Considérant que, pour assurer le respect des principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, l’information appropriée des candidats sur les critères d’attribution d’un marché public est nécessaire, dès l’engagement de la procédure d’attribution du marché, dans l’avis d’appel public à concurrence ou le cahier des charges tenu à la disposition des candidats ; que dans le cas où le pouvoir adjudicateur souhaite retenir d’autres critères que celui du prix, l’information appropriée des candidats doit alors porter également sur les conditions de mise en œuvre de ces critères ; qu’il appartient au pourvoir adjudicateur d’indiquer les critères d’attribution du marché et les conditions de leur mise en œuvre selon les modalités appropriées à l’objet, aux caractéristiques et au montant du marché concerné ; qu’en outre, si le pouvoir adjudicateur décide, pour mettre en œuvre ces critères de sélection des offres, de faire usage de sous-critères, il doit porter à la connaissance des candidats leurs conditions de mise en œuvre dès lors que ces sous-critères sont susceptibles d’exercer une influence sur la présentation des offres par les candidats ainsi que sur leur sélection et doivent en conséquence être eux-mêmes regardés comme des critères de sélection ; 6. Considérant que les critères d’attribution du marché litigieux font l’objet du chapitre VI du règlement de la consultation ; que celui-ci prévoit que les offres recevables seront jugées en fonction d’un critère financier et d’un critère technique auxquels sont respectivement attribuées des pondérations de 30 % et 70 % ; que, s’agissant du critère technique, le règlement retient cinq sous-critères affectés de pondérations différentes, parmi lesquels le sous-critère SC2 « présentation de la solution » est doté d’une note de 30 points sur 100 ; 7. Considérant qu’il résulte de l’instruction, tant du rapport d’analyse technique des offres que de la lettre du 13 novembre 2017, que la notation du sous-critère SC2 « présentation de la solution » a été réalisée à partir de deux éléments, d’une part, la « présentation de la solution hors robustesse » et, d’autre part, la « présentation de la solution – partie robustesse », auxquels a été attribuée une même note de 15 points sur 100 ; que ces deux éléments doivent être regardés comme des critères d’attribution du marché, ce que ne conteste pas la ministre des armées ; que cependant ni l’existence de ces critères portant sur l’évaluation de la solution proposée avec et sans robustesse ni leur pondération ne sont mentionnées dans le chapitre VI du règlement de la consultation consacré au jugement des offres qui, en dépit d’un intitulé très général et imprécis du sous-critère SC2 « présentation de la solution », ne fournit aucune indication sur les modalités de mise en œuvre de ce sous-critère ; que le pouvoir adjudicateur a indiqué, dans ses écritures et à l’audience, que ces éléments figurent dans le règlement de la consultation, au sein du chapitre IV consacré à la présentation des offres qui décrit le contenu du dossier technique devant être fourni ; que toutefois la distinction robustesse/hors robustesse ne ressort pas davantage explicitement de la description du dossier technique, pas plus nécessairement que les notes de 15/100 dont les deux critères sont affectés ; que, contrairement à ce que soutient la ministre des armées, il incombait pourtant au pouvoir adjudicateur d’informer les candidats de l’existence de ces deux critères utilisés pour la notation du sous-critère SC2 ainsi N° 1716842 7 que de leur pondération, sans que la circonstance qu’il leur a été attribué une égale importance puisse l’exonérer d’une telle obligation ; qu’au surplus, le chapitre IV du règlement de la consultation, dont au demeurant il n’est nullement fait référence dans la partie VI consacrée au jugement des offres, ne permettait pas aux candidats de connaître la façon dont le sous-critère SC2 serait mis en œuvre dès lors que, selon les dires mêmes de la ministre des armées, une partie seulement des éléments énumérés comme devant figurer dans la partie 2 du dossier technique consacrée à la présentation de la solution ont été pris en compte pour la notation du sous-critère ; qu’ainsi, en ne fournissant pas aux candidats une information claire de son choix de mise en œuvre du sous-critère SC2 « présentation de la solution », en n’identifiant pas clairement les deux critères « avec robustesse » et « sans robustesse » utilisés pour évaluer le sous-critère et, a fortiori, en n’indiquant pas qu’il attribuait à chacun une note égale, le secrétariat général pour l’administration du ministère de la défense a commis un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles il était soumis ; que les circonstances que la requérante n’a pas sollicité du pouvoir adjudicateur des informations sur le sous-critère pendant la préparation de son offre et qu’elle a présenté une offre de qualité sont sans incidence sur l’existence du manquement ; 8. Considérant qu’il résulte de l’instruction que la société Archimed s’est vu attribuer une note technique de 68,63/100 contre 78,33/100 pour la société Ausy ; que, s’agissant du souscritère SC2 « présentation de la solution », la requérante a obtenu la note de 12/30, décomposée en 10/15 pour la partie hors robustesse et 2/15 pour la partie robustesse alors que la société attributaire a obtenu la note de 25/30, avec pour chacune des deux parties les notes respectives de 12/15 et 13/15 ; que, alors même que les deux candidats ont pu être affectés par l’incertitude tenant aux conditions de mise en œuvre du sous-critère SC2 « présentation de la solution », le manquement retenu est susceptible, eu égard à sa portée et au stade de la procédure auquel il se rapporte, d’avoir lésé la société Archimed dès lors que son offre aurait pu être modifiée si le pouvoir adjudicateur avait clairement précisé ses intentions ; 9. Considérant enfin que, comme il a été dit au point 1 ci-dessus, le marché litigieux ne constitue pas, eu égard à son objet, un marché de défense ou de sécurité au sens de l’article 6 de l’ordonnance du 23 juillet 2015 ; que dès lors, il incombe au juge des référés précontractuels de faire usage des pouvoirs que lui confèrent les dispositions de l’article L. 551-2 du code de justice administrative ; 10. Considérant qu’il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que la société Archimed est fondée à demander l’annulation de la décision du 26 octobre 2017 rejetant son offre ainsi que l’annulation de la procédure de passation litigieuse ; 11. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de la société Archimed, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que demandent la ministre des armées et la société Ausy au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 500 euros à verser à la société Archimed sur le fondement des mêmes dispositions ; N° 1716842 8
O R D O N N E :

Article 1er : La décision du 26 octobre 2017 rejetant l’offre de la société Archimed est annulée.

Article 2 : La procédure engagée par le secrétariat général pour l’administration du ministère de la défense en vue de la passation d’un contrat ayant pour objet la création et la maintenance d’un système de gestion des bibliothèques numériques, de gestion des connaissances et de capitalisation documentaire au profit de l’ensemble des organismes du ministère de la défense est annulée.

Article 3 : l’Etat versera à la société Archimed une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la ministre des armées et celles de la société Ausy présentées sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Archimed, à la ministre des armées et à la société Ausy.

Fait à Paris, le 30 novembre 2017.

La juge des référés, M. Dhiver La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne ou à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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