Tribunal administratif de Rouen, 19 octobre 2015, n° 1503110

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Rouen, 19 oct. 2015, n° 1503110
Juridiction : Tribunal administratif de Rouen
Numéro : 1503110

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE ROUEN

N°1503110

___________

Société SIDE

___________

Mme X

Juge des référés

___________

Ordonnance du 19 octobre 2015

__________

PCJA : 54-035-02-01

Code publication : C

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le juge des référés

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 2 octobre 2015 et un mémoire enregistré le 14 octobre 2015, la société SIDE, représentée par Me Dugard, demande au juge des référés :

—  1°) d’ordonner, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de la décision de l’association Qualibat du 22 septembre 2015 confirmant le retrait de sa certification provisoire 1552 travaux de traitement de l’amiante , jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur la légalité de cette décision ;

—  2°) de mettre à la charge de l’association Qualibat une somme de 1500 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative .

Elle soutient :

— que la juridiction administrative est compétente pour connaître du litige car l’accréditation et la délivrance d’une certification sont une activité de puissance publique ;

— que la condition d’urgence est remplie car elle ne peut travailler sans cette certification, ce qui aura pour conséquence qu’elle devra déposer le bilan et mettre en œuvre un plan social ; que les délais d’appel et les délais pour obtenir une nouvelle certification sont extrêmement longs ;

— qu’il existe un doute sérieux sur la légalité de la décision :

• que la décision n’est pas motivée ;

• qu’elle n’a pas disposé des éléments nécessaires à la préparation de sa défense ;

• que le délai prévu à l’article 6.2 de la norme NF 46-011 n’a pas été respecté ;

• que la sanction est manifestement disproportionnée ;

• qu’elle ne recherche pas la responsabilité de Qualibat et que ses moyens sont donc opérants .

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2015, l’association Qualibat, représentée par Me Touffait, demande au juge des référés :

— de rejeter la requête ;

— de mettre la somme de 3000 euros à la charge de la société SIDE, sur le fondement des dispositions de l’article L 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient :

— que la juridiction administrative est incompétente pour connaître du litige car elle est une personne morale de droit privé n’agissant ni au nom ni pour le compte de l’Etat, ni n’utilisant des prérogatives de puissance publique dans le cadre d’une délégation de service public ;

— que la condition d’urgence n’est pas remplie ; que la mesure de retrait a été prise au regard d’un impératif de santé publique qui justifie l’exécution immédiate de la décision ; que la société SIDE s’est placée elle-même dans la situation qu’elle déplore ; qu’elle n’a pas formé appel à l’encontre de la décision déférée ni entrepris des démarches pour obtenir une nouvelle certification ;

— que les règles dont la méconnaissance est invoquée étant de nature contractuelle, la société SIDE est irrecevable à s’en prévaloir ;

— que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu :

— les autres pièces du dossier .

Vu :

— le code du travail ;

— l’arrêté du 14 décembre 2012 fixant les conditions de certification des entreprises réalisant des travaux de retrait ou d’encapsulage d’amiante, de matériaux, d’équipements ou d’articles en contenant ;

— le code de justice administrative .

Par la requête n°1503111, enregistrée le 2 septembre 2015 la société SIDE demande l’annulation de la décision du 22 septembre 2015 confirmant le retrait de sa certification provisoire 1552 travaux de traitement de l’amiante.

Le président du tribunal a désigné Mme X, vice-présidente, pour statuer sur les demandes de référé .

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus, au cours de l’audience publique du 16 octobre à 10 heures :

— le rapport de Mme X, juge des référés ;

— les observations de Me Velly, représentant la société SIDE, et de Me Touffait, pour l’association Qualibat ;

— les nouvelles observations de Me Velly, puis de Me Touffait.

A l’issue de l’audience, à 10 heures 45, la clôture de l’instruction a été prononcée en application de l’article R. 522-8 du code de justice administrative.

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 521-1 du code de justice administrative :

1. Considérant qu’aux termes de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (…) » ; qu’en vertu du premier alinéa de l’article R. 522-1 dudit code, la requête visant au prononcé de mesures d’urgence doit justifier de l’urgence de l’affaire ;

2. Considérant que la décision, dont elle doit informer le ministre chargé du travail, par laquelle l’association Qualibat procède au retrait d’une certification, dont la possession est obligatoire, en vertu des dispositions de l’article R 4412-129 du code du travail, pour les entreprises souhaitant réaliser des travaux d’encapsulage et de retrait d’amiante procède de l’exercice de prérogatives de puissance publique ; que, dans ces conditions, et en l’état au surplus de l’existence d’une jurisprudence de cour administrative d’appel statuant sur un litige relatif à l’abrogation d’une qualification par la société Qualibat, les conclusions de la société SIDE tendant à la suspension de la décision de l’association Qualibat du 22 septembre 2015 confirmant le retrait de sa certification provisoire 1552 travaux de traitement de l’amiante n’est pas manifestement insusceptible de se rattacher à un litige relevant de la compétence de la juridiction administrative ;

3. Considérant que l’urgence justifie que soit prononcée la suspension d’un acte administratif lorsque l’exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre ; qu’il appartient au juge des référés d’apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l’acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l’exécution de la décision soit suspendue ; qu’il lui appartient également, l’urgence s’appréciant objectivement et compte tenu de l’ensemble des circonstances de chaque espèce, de faire apparaître dans sa décision tous les éléments qui, eu égard notamment à l’argumentation des parties, l’ont conduit à considérer que la suspension demandée revêtait un caractère d’urgence ;

4. Considérant que la société SIDE soutient, et qu’il n’est pas contesté en défense, que l’exécution de la décision du 22 septembre 2015 peut la conduire à cesser son activité et menacer, ainsi, l’emploi de 39 personnes ; qu’elle apporte d’ailleurs des éléments de preuve de ses affirmations par la production d’une attestation de son expert-comptable et de deux courriers de maîtres d’ouvrage renonçant, du fait de la perte de sa certification, à lui confier des marchés ; que, si l’association Qualibat fait valoir, de son côté, pour démontrer l’urgence à exécuter sa décision, qu’elle a été prise au regard d’impératifs de santé publique, il ne résulte pas de la lecture de la décision en litige, corroborée d’ailleurs par les écritures en défense, que celle-ci serait fondée sur un autre manquement que celui tenant en l’absence de déclaration, à l’association défenderesse, du chantier réalisé au 39 bis rue d’Harrouard à Evreux au mois de juin 2015 ; qu’il ne résulte pas de l’instruction que ce seul manquement à une obligation ayant pour objet de permettre à l’organisme certificateur d’exercer son contrôle soit, en lui-même, de nature à porter atteinte à la santé publique ; qu’eu égard aux effets de la décision sur la pérennité de l’activité de la société requérante, la condition d’urgence doit donc, en l’espèce, être regardée comme remplie ;

5. Considérant que l’article 15 du règlement général de l’association Qualibat selon lequel les entreprises demandant une qualification ou une certification s’engagent à se conformer à ses règles ne peut être interprété comme conférant audit règlement une valeur contractuelle ; que l’association Qualibat n’est, dès lors, pas fondée à soutenir qu’eu égard à la valeur contractuelle de son règlement général, la société SIDE ne saurait utilement se prévaloir de la méconnaissance de certaines de ses dispositions comme moyen de légalité développé à l’appui de sa demande de suspension ;

6. Considérant qu’en l’état de l’instruction, le moyen tiré de ce que la décision en litige serait entachée d’une disproportion manifeste au regard des dispositions de l’article 35 du règlement général de l’association Qualibat et de l’article 6.1 de la norme NF X46-011 visée à l’article 1er de l’arrêté du 14 décembre 2012 susvisé fixant les conditions de certification des entreprises réalisant des travaux de retrait ou d’encapsulage d’amiante, de matériaux, d’équipements ou d’articles en contenant est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ; que, par suite, il y a lieu d’ordonner la suspension de l’exécution de cette décision ;

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société SIDE qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande l’association Qualibat au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

8. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la société Qualibat le versement à la société SIDE de la somme de 1000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

O R D O N N E

Article 1er : L’exécution de la décision de l’association Qualibat du 22 septembre 2015 confirmant le retrait de la certification provisoire 1552 travaux de traitement de l’amiante de la société SIDE est suspendue.

Article 2 : L’association Qualibat versera à la société SIDE la somme de 1000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de l’association Qualibat tendant à la condamnation de la société SIDE au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à la société SIDE et à l’association Qualibat.

Fait à Rouen , le 19 octobre 2015.

Le juge des référés, Le greffier,

A. X S. Girard

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Textes cités dans la décision

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