Tribunal de grande instance d'Évry, 3e chambre, 8 janvier 2016, n° 13/04067

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Évry, 3e ch., 8 janv. 2016, n° 13/04067
Juridiction : Tribunal de grande instance d'Évry
Numéro(s) : 13/04067

Texte intégral

TRIBUNAL

DE GRANDE INSTANCE

d’EVRY

3e Chambre

MINUTE N°

DU : 08 Janvier 2016

AFFAIRE N° : 13/04067

Jugement Rendu le 08 Janvier 2016

AFFAIRE :

COMMUNE D’Y

C/

Z

ENTRE :

COMMUNE D’Y, dont le siège social est sis 2 rue de la Mairie – 91340 Y

représentée par Maître Jean-marie BECAM de la SELARL BECAM/MONCALIS, avocats au barreau d’ESSONNE plaidant

DEMANDERESSE

ET :

Monsieur X, C Z, né le […] à […]

représenté par Maître Atika CHELLAT de la SELARL PILPRE & CHELLAT, avocats au barreau d’ESSONNE postulant, Me Hervé G DENIS, avocat au barreau de PARIS plaidant

Monsieur D A, né le […] à […]

représenté par Maître Serge REP de la SCP REP CORBIN JACQUET & BENOIST, avocats au barreau de PARIS plaidant, Maître Sophie HADDAD de la SELARL HADDAD/MOUTIER, avocats au barreau d’ESSONNE postulant

DÉFENDEURS

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Sandra ORUS, Premier Vice-Président, siégeant à Juge Rapporteur avec l’accord des avocats ;

Magistrats ayant délibéré :

Président : Sandra ORUS, Premier vice-président,

Assesseur : Céline RILLIOT – LE NU, Vice-Présidente,

Assesseur : Sophie RAFIN, Juge,

Greffier lors des débats : Dounia BELOUA, Greffier.

DÉBATS :

Vu l’ordonnance de clôture en date du 17 septembre 2015 ayant fixé l’audience de plaidoiries au 20 Novembre 2015 date à laquelle l’affaire a été plaidée et mise en délibéré au 08 Janvier 2016.

JUGEMENT : Prononcé publiquement,

par mise à disposition au greffe,

contradictoire et en premier ressort.

EXPOSÉ DU LITIGE

La commune d’Y ( 91ྭ340) s’est engagée depuis plusieurs années à mettre un terme aux nombreuses constructions illicites qui ont surgi sur son territoire, au milieu des zones rurales ou des espaces boisés protégés, en exerçant son droit de préemption dès lors qu’une mutation à titre onéreux d’un terrain agricole ou boisé et de faible superficie peut présenter un caractère suspect.

Par acte d’huissier du 12 avril 2013, la commune d’Y a fait assigner M. X, C Z et M. D A devant le tribunal de grande instance d’EVRY aux finsྭ:

  • De dire et juger que la donation consentie par M. Z à M. A portant sur diverses parcelles en nature de terre situées sur la commune d’Y est fictive faute d’intention libérale.
  • De la requalifier en vente immobilière à titre onéreux.
  • De dire que cette vente déguisée est atteinte de nullité absolue en ce qu’elle repose sur une cause illicite.
  • De prononcer son annulation.
  • Subsidiairement, de déclarer inopposable à la commune d’Y l’acte de donation et que le délai d’exercice d’un éventuel droit de préemption pourra courir au profit de la commune associée à la SAFERྭ;
  • De condamner solidairement les défendeurs au paiement d’une somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
  • D’ordonner l’exécution provisoire et condamner les défendeurs aux dépens.

Au soutien de sa demande, la commune d’Y prétend que l’intention libérale de M. Z à l’égard de M. A est inexistante et que seul le motif de se soustraire aux droits de préemption de la commune et des fermiers en place a animé M. Z. La donation doit être en conséquence frappée de nullité absolue et l’acte doit être requalifié en acte onéreux. Subsidiairement, la commune fait valoir que son préjudice est indéniable dans la mesure où la donation critiquée ne lui permet pas d’exercer un droit de préemption en association avec la SAFER, en vue d’acquérir les terrains et les rétrocéder, le cas échéant, à un exploitant agricole afin de préserver le caractère agricole de la zone.

Par conclusions notifiées par voie électronique du 01 juillet 2014, M. D A réplique que la commune ne justifie par aucun élément de l’absence d’intention libérale ni de l’existence d’un prix de venteྭ; que l’existence

« d’une propositionྭ» d’acquisition n’est pas exclusive d’une intention libérale et que si le doute devait être retenu, cela devrait se faire au détriment de la commune d’Y qui a la charge de la preuve. Il soutient que la procédure engagée par la commune est particulièrement abusive et doit être sanctionnée à hauteur de 5000 euros de dommages-intérêts car elle est motivée par la volonté d’empêcher les membres de la communauté des gens du voyage d’accéder à la propriété de terrains agricoles sur son territoire. Reconventionnellement, il sollicite la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

M. B, dûment assigné et représenté, n’a pas conclu.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 28 mai 2015.

MOTIFS

Aux termes de l’article 894 du code civil, la donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée, en faveur du donataire qui l’accepteྭ;

En cas de contestation, il convient de rechercher, en interprétant la volonté des parties, si elles ont agi ou non dans une intention libéraleྭ;

Il est constant que M. Z, par acte notarié du 2 mai 2012, a fait donation à M. D A, forain, de plusieurs parcelles en nature de terre situées sur la commune d’Y;

Il est cependant relevé des pièces produites au débat, que quelques jours avant cet acte notarié, par deux lettres distinctes du 25 avril 2012, M. Z a informé les deux fermiers qui exploitent ses terres «ྭavoir une proposition qu’il accepteྭ» et surtout porté à leur connaissance «ྭqu’il vend toutes ses terres situées à OLLAINVILLEྭ» et leur a demandé d’en prendre acte;

La conversation du 20 novembre 2012 avec Mme Z, rapportée par la secrétaire de mairie d’Y, dans le cadre d’une attestation conforme à l’article 202 du code de procédure civile, fait état d’une cession de parcelle « à des forains » où il aurait été évoqué le prix de la cession, corroborant ainsi la présomption forte d’une cession à titre onéreux;

Mais surtout, il est relevé que M. A n’est ni un proche de M. Z, ni un agriculteur et que l’on cherche en vain la cause de l’intention libérale qui aurait animé M. Z pour se dépouiller actuellement et irrévocablement, au sens de l’article 894 du code civil, d’un nombre conséquent de ses parcelles, alors qu’il ne pouvait ignorer que ses terres à vocation strictement agricole se situaient dans le périmètre de la zone A du Plan Local d’Urbanisme et étaient soumises au droit de préemption de la communeྭ;

Il résulte de l’ensemble de ces éléments d’appréciation, que l’absence d’intention libérale est caractérisée en l’espèce et que c’est en réalité une cession à titre onéreux déguisée en donation qui a eu lieu entre les parties;

En conséquence, il y a lieu de requalifier la donation critiquée en acte à titre onéreux dont la cause illicite se déduit des seules manœuvres de M. Z et M. A destinées à masquer la vente ;

Il sera déclaré par suite nul et de nul effetྭ;

M. A ne peut se prévaloir de sa propre turpitude pour solliciter des dommages-intérêts pour procédure abusiveྭ; il sera débouté de sa demandeྭ;

La nature de cette affaire justifie le prononcé de l’exécution provisoireྭ;

M. Z et M. A seront in solidum condamnés aux dépensྭ;

Il n’apparait pas inéquitable de les condamner in solidum à porter et payer à la commune d’Y la somme de 5000 euros sur le fondement de l’article 700 du code procédure civileྭ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoirement, en premier ressort:

DIT que l’acte notarié intitulé donation, reçu par Maître E-F, notaire à Chartres ( Eure et Loir), le 2 mai 2012, consenti par Monsieur X, C Z, retraité, au profit de Monsieur D A, forain, et portant sur divers parcelles en nature de terre situées sur la commune d’Y ( ESSONNE) cadastrées:

— section C n°10, pour 84a65ca lieu-dit Le dessus du parc

— section C n°1417, pour 36a80ca lieu-dit L’Ancien parc

— section D n°495, pour 52a10 ca lieu-dit La Garenne

— section D n°504, pour 5a85ca lieu-dit La Garenne

— section D n°506, pour 4a65ca lieu-dit La Garenne

— section AM n°92, pour 11a21ca lieu-dit La Grosse Haie

est une vente immobilière à titre onéreux;

REQUALIFIE ladite donation en vente immobilère à titre onéreux;

DECLARE cette vente nulle et nul effet;

CONDAMNE in solidum M. X Z et M. D A aux entiers dépens.

CONDAMNE in solidum M. X Z et M. D A à payer à la commune d’Y ( ESSONNE) la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

ORDONNE l’exécution provisoire;

REJETTE toute autre demande plus ample ou contraire.

Ainsi fait et rendu le HUIT JANVIER DEUX MIL SEIZE, par Sandra ORUS, Premier vice-président, assistée de Dounia BELOUA, Greffier, lesquelles ont signé la minute du présent Jugement.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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