Tribunal de grande instance de Grasse, Service des référés, n° 13/01183

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Sur la décision

Référence :
TGI Grasse, service des réf., n° 13/01183
Juridiction : Tribunal de grande instance de Grasse
Numéro(s) : 13/01183

Texte intégral

[…]

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE GRASSE

SERVICE DES RÉFÉRÉS

ORDONNANCE DU 05 Juillet 2013

COMMUNE DE X LA NAPOULE c\ Z A, D E F, B C

DÉCISION N° : 2013/

RG N°13/01183

A l’audience publique des référés tenue le 03 Juillet 2013

Nous, Marie-Laure GUEMAS, Première vice-présidente du tribunal de grande instance de GRASSE, assistée de Barbara BERTELOOT, greffier , avons rendu la décision dont la teneur suit :

ENTRE :

COMMUNE DE X LA NAPOULE

[…]

[…]

06212 X LA NAPOULE

représentée par Me B Alain RAVOT, avocat au barreau de GRASSE

ET :

Monsieur Z A

Monsieur D E F

Monsieur B C

représentés par Me Benoit CANDON, avocat au barreau de MARSEILLE

Avis a été donné aux parties à l’audience publique du 03 Juillet 2013 que l’ordonnance serait prononcée par mise à disposition au greffe à la date du 05 Juillet 2013

***

FAITS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Autorisée à cette fin par ordonnance rendue sur requête le 2 juillet 2013, la Commune de X a fait assigner Z A, D E F et B C en référé d’heure à l’heure, par acte d’huissier signifié le même jour, pour voir, au visa des articles 485, 809 du code de procédure civile :

— constater que « des gens du voyage » se trouvant sur le terrain cadastré section AN 40 à X, avenue des anciens combattants, l’occupent sans droit ni titre et que cette occupation présente des risques d’insalubrité et de trouble à l’ordre public, que les conditions d’occupation causent un trouble manifestement illicite ;

— constater l’impossibilité pour la commune de l’établissement formel et exempt de l’identité totale des occupants du terrain lui appartenant ;

— en conséquence, ordonner à l’ensemble« des gens du voyage » stationnant sur le terrain litigieux ainsi que de tous occupants de leur chef, de libérer les lieux dans un délai de 4: heures commençant à courir à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir, de tous biens, véhicules et caravanes leur appartement, sous astreinte de 1500 € par jour de retard;

— dire et juger qu’à défaut, il sera procédé à leur expulsion avec le concours de la force publique si besoin est et que la commune pourra procéder ou faire procéder à leurs frais à l’enlèvement des caravanes, bien et autres véhicules, entreposés à tel lieu de son choix.

Elle sollicite la condamnation solidaire des défendeurs au paiement d’une indemnité de 1500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Au soutien de son action, elle expose qu’elle a été informée par les forces de l’ordre, suite à un dépôt de plainte, qu’un certain nombre de caravanes et de fourgons appartenant aux gens du voyage s’étaient installés sans autorisation et par la force sur un terrain sportif communal, que le portail fermant l’accès a été forcé, que le maire de la commune, informé le 15 octobre dernier du passage de 150 caravanes du 23 juin au 7 juillet 2013 par l’association «Action Grand Passage", a signifié l’impossibilité pour la commune d’accueillir ces caravanes puisque la mise à disposition d’un terrain et de la compétence du préfet et non des communes dès lors que le nombre excède 50.

Elle indique que le directeur de la police municipale et directeur adjoint ainsi que le directeur général adjoint les services de la mairie, présent sur les lieux au moment de l’arrivée, ont tenté de leur former barrage, sans succès ayant même été victime de violence, qu’un dépôt de plainte a été opéré.

La commune ajoute que le terrain n’est pas viabilisé, qu’il ne comporte pas de point d’eau, d’électricité, de sanitaires, de poubelles, qu’il ne présente pas la configuration susceptible de permettre le séjour d’une population nomade composée de jeunes enfants, dans des conditions minimales de sécurité et de salubrité, que cette concentration anormale de population sur la parcelle constitue un trouble manifestement illicite, une violation délibérée des règles régissant la matière aux termes de laquelle l’autorisation du propriétaire et de l’occupant légitime des lieux est nécessaire à l’implantation de tous occupants, que leur présence est génératrice de graves nuisances tant sur le plan de l’hygiène et la salubrité des lieux que de la sécurité dans la zone périphérique.

Elle précise que l’huissier de justice qu’elle a mandaté a constaté le percement d’une canalisation d’eau enterrée servant à l’alimentation des vestiaires et sanitaires ainsi qu’en branchements sauvages sur la borne incendie situer le long de l’avenue outre un branchement électrique sauvage sur le poste EDF, que les cadenas assurant la condamnation des portails fermant l’allée le long de la Siagne ont été brisés, que ces faits constituent une véritable voie de fait.

Elle évoque la possibilité pour les gens du voyage de se rendre sur les terrains mis à leur disposition près du stade Charles Ehrmann et à la Gaude.

Elle s’oppose à l’octroi de tout délai et sollicite l’entier bénéfice de son assignation introductive d’instance.

***

Z A, D E F et B C demandent au juge des référés de prononcer leur expulsion à compter du 14 juillet 2013 à 12 heures, date à laquelle ils s’engagent à libérer les lieux, de rejeter tout autre demande et de laisser à la charge de chaque partie ses frais et dépens.

Ils font valoir que :

— la commune de X ne possède pas d’aire de stationnement malgré la loi du 5 juillet 2000, celle du 31 mai 19920, du schéma départemental des Alpes Maritimes publié le 27 décembre 2012, qui prévoit un emplacement encor inexistant, dans un délai de deux ans pour le réaliser, très largement dépassé ; il en est de même pour les communes avoisinantes ;

— ils ont écrit aux communes avoisinantes et participent à plusieurs réunions en sous-préfecture afin de trouver intérêts adapté mais aucune solution n’a été trouvée ;

— les terrains de Nice et de LA GAUDE, cités par l’assignation, ont été réquisitionnés pour des groupes de moindres tailles ;

— la carence des communes dont celle de X à créer une aire de stationnement réglementaire, comme à proposer un intérêt quelconque, a pour conséquence une grave atteinte à une liberté fondamentale, la liberté d’aller et venir, principe constitutionnel et libertés public et les places dans une situation de contrainte les obligeant à occuper illégalement le terrain d’autrui ou à renoncer à leur mode de vie ; elle constitue enfin un droit reconnu et protégé par le législateur français traduite dans la loi ;

— étant en famille, avec personnes et enfants, leur expulsion porterait atteinte à leur droit de mener une vie privée, familiale et domiciliaire normale, droit protégé par l’article huit de la convention européenne des droits de l’homme ;

— le terrain choisi l’a été en fonction de critères objectifs qui rendent le stationnement possible, non nuisible et paisible, s’agissant d’un terrain de rugby, peu usités à cette période de l’année, les saisons sportives et activités sportives étant terminée.

S’agissant des voies de fait qui leur sont imputées, ils soutiennent qu’elles sont très exagérées, non établies et contestées, qu’il s’agisse des violences sur les policiers municipaux, sur les raccordements, sur les sanitaires et les poubelles en faisant valoir qu’ils se sont montrés attentifs à la préservation des lieux.

Ils contestent l’existence d’un trouble à l’ordre public, à la sécurité ou à la salubrité publique, d’une quelconque urgence, la simple occupation illicite étant pas suffisante pour justifier une expulsion à bref ou à très bref délai.

DISCUSSION

L’occupation de la parcelle située à X avenue des Anciens Combattants, cadastrée section AM sur laquelle est implanté le terrain de sport de la ville dont la Commune de X LA NAPOULE démontre être propriétaire par une centaine de caravanes appartenant à des gens du voyage, n’est pas contestée. Il s’agit en effet d’un rassemblement organisé, dans le cadre d’une mission évangélique, par l’association Action Grand Passage.

Elle est établie par le procès-verbal dressé le 1er juillet 2013 par un huissier de justice à la requête de la commune.

Il n’est pas contesté qu’aucune autorisation n’a été donnée en vue de cette installation sur une parcelle non destinée à l’accueil des gens du voyage, non aménagée.

Cette occupation par un nombre important de véhicules et de personnes d’une propriété privée sans autorisation préalable de son propriétaire constitue une violation caractérisée des droits de propriété et incontestablement un trouble manifestement illicite au sens de l’article 809 du code de procédure civile.

Z A, D E F et B C, en tant que pasteurs et organisateurs du rassemblement, justifient avoir entrepris les démarches auprès des autorités administratives et notamment de la préfecture des Alpes-Maritimes, antérieurement à leur arrivée sur site, afin d’obtenir la mise à disposition d’un espace, conformément à la loi numéro 2000-614 du 5 juillet 2000 relatif à l’accueil des gens du voyage, au travail de prévention effectué en vue d’une gestion des séjours et aux demandes formulées lors des commissions sur les schémas départementaux des gens du voyage.

Il est constant que la commune n’a pas donné une suite favorable à la demande formulée par l’association le 15 octobre 2012 de la mise à disposition d’un espace d’environ 3,5 ha, non nécessairement aménagée, de style parking vert, herbage ou champ, conformément à la loi numéro 2000-616 du 5 juillet 2000 relatif à l’accueil des gens du voyage qui prescrit des aires de grand passage, en faisant valoir en réponse, par une lettre du 17 décembre 2012 que « les aires de grand passage" sont de la compétence du préfet et non des communes », que nombre d’autres communes n’ont pas davantage satisfait aux demandes formulées.

La Commune de X LA NAPOULE dont la population est supérieure à 5000 habitants ne peut disconvenir qu’elle ne satisfait pas à l’obligation lui incombant d’aménager une aire d’accueil des gens du voyage de 40 à 50 places.

Les défendeurs sont fondés à se prévaloir de cette loi mais également du schéma départemental du 27 décembre 2012, de la circulaire interministérielle du 23 avril 2013.

Certes la loi numéro 2000-614 du 5 juillet 2000 prévoit dans son article deux que les schémas départementaux d’accueil des gens du voyage déterminent les emplacements destinés à la gestion des grands passages des grands rassemblements, le département des Alpes maritimes étant essentiellement concernés par les grands passages. Cette disposition ne saurait l’exonérer de sa propre obligation alors qu’elle ne démontre pas que des aires invoquées dans son assignation soient susceptibles d’accueillir autant de caravanes et qu’elle n’a pas proposé de solution alternative

Cette carence fait effectivement obstacle aux gens du voyage d’exercer leur droit d’aller et venir et de séjourner, principe constitutionnel.

Des voies de fait leur sont reprochées sur lesquelles ils se sont précisément expliqués qu’il s’agisse des heurts avec les policiers municipaux, du bris non contesté du cadenas.

Ils ont également donné toute explication utile quant aux raccordements, quant aux sanitaires dont sont pourvues les caravanes, la commune ayant refusé de mettre à leur disposition des sanitaires implantés en bordure du terrain.

La réalité du trouble à l’ordre, sécurité et salubrité publique est alléguée mais non démontrée.

Cela étant, postérieurement à la délivrance assignation, des mesures ont manifestement été prises dans l’intérêt général afin de sécuriser les lieux, de les alimenter en eau et en électricité, de les doter de bennes à ordures. La zone a été délimitée ainsi qu’il en est justifié par les clichés photographiques produits par les défendeurs.

S’agissant les poubelles, il existe deux bennes à ordures, deux containers de taille moyenne, que Z A, D E F et B C estiment suffisants.

Le procès-verbal dressé à la requête de la commune ne mentionne pas de nuisances particulières si ce n’est par la présence des caravanes, garés sur le stade.

Si l’absence de solution conforme aux exigences et préconisations posées ne saurait justifier une occupation illicite de la parcelle qu’il convient de faire cesser, les circonstances de l’espèce, les accords pris, l’engagement de quitter les lieux dans un délai raisonnable, l’absence de solution alternative, de lieu de repli alors que le tribunal administratif a suspendu l’arrêté du préfet des Alpes Maritimes de réquisition sur la commune d’un terrain de 7 hectares pour le grand passage des gens du voyage ainsi que la méconnaissance avérée par la commune l’obligation d’aménagement d’aires d’accueil, commandent de laisser à la communauté des gens du voyage présents sur le site un délai pour s’exécuter et libérer les lieux, expirant le 14 juillet 2013 à 12 heures.

Il convient d’ordonner, passé ce délai, leur expulsion au besoin de la force publique, sous astreinte de 2000 euros par jour de retard, qui commencera à courir à cette date, pendant 8 jours passé lequel délai il pourra être à nouveau statué.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la Commune de X LA NAPOULE la totalité des frais irrépétibles exposés dans le cadre de la présente instance ; une indemnité de 1500 euros lui sera allouée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Z A, D E F et B C supporteront in solidum les dépens de l’instance.

PAR CES MOTIFS

Nous, Marie-Laure GUEMAS, 1° vice-président, statuant par ordonnance contradictoire, en premier ressort et mise à disposition au greffe,

Vu les articles 808, 809 du code de procédure civile, 544 du Code civil, vu le procès-verbal de constat de Maître Y du 1° juillet 2013, vu les dispositions de la loi numéro 2000-614 du 5 juillet 2000 relatif à l’accueil des gens du voyage, la circulaire interministérielle du 23 avril 2013, la circulaire interministérielle NOR IOCA 1022704 C du 28 août 2010 du 28 août 2010 et la circulaire d’application du 23 mars 2012 NOR numéro IOCD 1208696C et la circulaire NOR INTD1307138C ;

Constatons l’occupation illicite, sans autorisation, constitutive d’un trouble manifestement illicite par Z A, D E F et B C et les personnes qui les accompagnent de la parcelle cadastrée section AN 40 à X, avenue des Anciens Combattants, propriété de la commune ;

Disons qu’ils devront libérer cette parcelle au plus tard le 14 juillet 2013 à 12 heures ;

Ordonnons à défaut de départ volontaire par Z A, D E F et B C de ce terrain susvisé, de leurs personnes, de tous occupants de leur chef ou à titre personnel, occupant sans droit ni titre ou en tant que propriétaires ou utilisateurs de caravanes ou de véhicules, leur expulsion au besoin à l’aide de la force publique, sous astreinte de 2000 € par jour de retard à compter du 14 juillet 2013 à 12 heures, astreinte qui courra pendant un délai de 8 jours, passé lequel il pourra être à nouveau statué ;

Condamnons in solidum Z A, D E F et B C à porter et payer à Z A, D E F et B C d’une indemnité de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Les condamnons in solidum aux entiers dépens de l’instance, conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE JUGE DES REFERES

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