Tribunal de grande instance de Mulhouse, 1re chambre civile, 1er décembre 2004

  • Envoi de courriers à des concessionnaires du réseau·
  • Volonté de tirer profit d'un avantage financier·
  • Revendication de propriété·
  • Connaissance de cause·
  • Concurrence déloyale·
  • Transfert du titre·
  • Dépôt frauduleux·
  • Professionnel·
  • Sociétés·
  • Concessionnaire

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Mulhouse, 1re ch. civ., 1er déc. 2004
Juridiction : Tribunal de grande instance de Mulhouse
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 3122551
Brevets cités autres que les brevets mis en cause : EM2687564 ; EM2438612 ; EM2494805 ; EM2689370
Classification internationale des marques : CL12; CL39
Référence INPI : M20040745
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Texte intégral

Par assignation du 17 juin 2004, la Société S.E.A. Société Européa Autocaravan S.P.A. fait valoir que Monsieur P a frauduleusement déposé la marque « S.E.A. ». Elle fait valoir que ce dépôt est intervenu après que Monsieur P ait eu connaissance de l’existence de la société demanderesse. Elle demande donc au Tribunal de prononcer le transfert à son profit de la marque « S.E.A. » et d’interdire à Monsieur P l’utilisation du signe « S.E.A. » ou de tout signe similaire, sous astreinte de 150 Euros par infraction constatée. Elle fait observer que le défendeur s’est rendu coupable de concurrence déloyale à l’origine d’une grave désorganisation de son réseau et ayant préjudicié à sa réputation auprès de ses concessionnaires. A ce titre elle sollicite la condamnation de Monsieur P au paiement d’une somme de 80.000 Euros en réparation du préjudicié résultant des lettres adressées aux membres du réseau S.E.A. Outre le bénéfice de l’exécution provisoire, elle conclut à l’allocation d’une somme de 10.000 Euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. Bien que l’assignation lui ait été remise personnellement, Monsieur Pierre P n’a pas constitué avocat. Par application des dispositions de l’article 473 du nouveau code de procédure civile, la présente décision sera réputée contradictoire.

I – Sur la demande principale 1) Sur le dépôt de la marque « S.E.A. » : Il résulte des dispositions de l’article L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle que : « si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d’un tiers, soit en violation d’une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice (…) ». S’agissant du droit des marques, la fraude, fondant l’action en revendication telle qu’elle est prévue à l’article ci-dessus, se caractérise notamment par le fait de commettre un acte d’apparence régulière, mais dans le but de nuire aux intérêts d’un tiers ; que tel est le cas de celui qui, sachant qu’un tiers utilise une marque sans l’avoir déposée, dépose cette marque à son nom pour l’opposer à un usager antérieur. La fraude consiste à utiliser le droit des marques non pas tant pour diffuser des produits sous le signe enregistré, que pour gêner l’activité d’un concurrent ou pour tirer un profit injustifié de l’existence de la marque. En l’espèce, il résulte des pièces versées au dossier que Monsieur P est un professionnel de la commercialisation de camping-cars depuis 1992, présent sur le marché français mais également à l’étranger, notamment par le biais de sites internet. En mars 2001, la presse spécialisée faisait état de la Société Européenne d’Autocaravanes (SEA) en ces termes : « Cette nouvelle société est en fait une holding constituée par le rapprochement des entreprises Elnagh et Mobilvetta. Ce rapprochement économique est récent puisqu’il s’est concrétisé dans le courant du mois de décembre 2000. » La société demanderesse justifie également que depuis son immatriculation au RCS de

Milan le 27 janvier 2000, elle est désignée habituellement comme le Groupe « SEA » qui est l’acronyme de la dénomination sociale « S.E.A. Societa Europea Autocaravan ». Les magazines : « Le Monde du Camping-car », « Camping-car magazine » et « Top camping car » font en mai et juillet 2001 état du Groupe S.E.A. Le signe « SEA » figure également sur tous les documents commerciaux, factures, papiers à lettres, voire même véhicules de loisirs commercialisés par la société. C’est ce qui explique le dépôt, à partir du mois de novembre 2001, par la Société S.E.A. de quatre marques communautaires composées du radical d’attaque « SEA » qui en constitue l’élément distinctif essentiel, pour désigner ses produits et services. La demanderesse justifie ainsi du dépôt des marques suivantes :

- « S.E.A. Societa Europea Autocaravan » n° 002 438 612 le 5 novembre 2001
- « S.E.A. Rent » n° 002 494 805 le 7 décembre 2001
- « SeA Societat Europea Autocaravan » n° 002 689 370 le 8 mai 2002
- « Sea Rent » n° 002 494 805 le 8 mai 2002. Ces éléments n’ont pu échapper à Monsieur P, professionnel avisé et attentif à tout ce qui peut concerner le domaine d’activités dans lequel il intervient. Il n’en demeure pas moins que Monsieur P a déposé la marque « SEA » le 25 septembre 2001, auprès de l’INPI pour désigner des produits identiques à ceux commercialisés par la Société SEA. Il n’apparaît pas que Monsieur P ait entendu exploiter la marque « SEA » autrement qu’en proposant un partenariat financier et commercial à la société demanderesse en septembre 2003. Il est établi dans ces conditions la connaissance présumée par Monsieur P de l’usage de la marque « SEA » par la Société Europea Autocaravan. Le dépôt de cette marque, effectué en connaissance des droits antérieurs détenus par un tiers sur le signe, est manifestement frauduleux. Il sera donc fait droit à la demande de la Société S.E.A. Société Européa Autocaravan tendant à prononcer à son profit le transfert de l’enregistrement de la marque « S.E.A. » n° 3 122 551 à son profit. Monsieur PHILIPPS se verra interdire de reproduire ou d’utiliser le signe « S.E.A. » ou tout signe similaire, sur tout support et à quelque titre que ce soit, sous astreinte de 150 euros par infraction constatée à compter de la signification du jugement à intervenir. 2) Sur la demande de dommages et intérêts : La Société Européa Autocaravan fait valoir que Monsieur PHILIPPS s’est rendu coupable de concurrence déloyale en adressant aux concessionnaires de son réseau, le 12 décembre 2003, une lettre circulaire aux termes de laquelle il les « mettait en garde » contre les conséquences dommageables de l’usage en France de la dénomination SEA qu’il qualifiait de « contrefaçon ». Il leur demandait que lui soit confirmé « dans un délai de 3 jours » à compter de la réception de sa lettre qu’ils cessaient « avec effet immédiat toute utilisation de sa marque ». La Société demanderesse évalue son préjudice à la somme de 80.000 euros. La Société Européa Autocaravan indique, qu’actuellement elle commercialise ses camping-cars, à l’aide d’un réseau de 18 concessionnaires implantés sur l’ensemble du territoire national. Elle ne justifie toutefois que de l’envoi, à cinq de ses concessionnaires,

de la lettre circulaire de Monsieur P. Dès le 16 décembre 2003, Monsieur P était mis en demeure par la Société S.E.A. de cesser « immédiatement tout nouveau contact avec les concessionnaires » de son réseau. Si l’envoi de ces courriers a pu momentanément perturber les concessionnaires, il convient d’observer que le nombre de ces derniers a été limité et que la Société S.E.A. a réagi très rapidement. Ces éléments, ainsi que ceux figurant au dossier, sont de nature à permettre au Tribunal d’évaluer à la somme de 15.000 euros le préjudice que la Société S.E.A. a subi du fait des agissements de Monsieur P. Ce dernier sera donc condamné à payer cette somme. II – Sur les demandes annexes 1) Sur l’exécution provisoire : La nature et le caractère de la présente décision ne justifie pas que l’exécution provisoire soit ordonnée. 2) Sur l’article 700 du NCPC : Il serait inéquitable de laisser à la charge de Société Européa Autocaravan l’intégralité des frais non compris dans les dépens dont elle a fait l’avance, il lui sera alloué une somme de 1.200 Euros au paiement de laquelle Monsieur P sera condamné. 3) Sur les dépens : Ce dernier, partie perdante au procès au sens de l’article 696 du Nouveau Code de Procédure Civile sera condamné aux dépens. PAR CES MOTIFS Le Tribunal, Statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, CONSTATE que la marque « S.E.A. » n° 3 122 551, déposée le 25 septembre 2001 a été enregistrée par Monsieur P en fraude des droits de la Société Européa Autocaravan, PRONONCE en conséquence le transfert de l’enregistrement de la marque « S.E.A. » n° 3 122 551 au profit de la Société S.E.A. Société Européa Autocaravan, ORDONNE la notification du jugement à intervenir, par les soins du greffe de la présente juridiction, à Monsieur l de l’Institut National de la Propriété Industrielle en vue de son inscription sur le Registre National des Marques, INTERDIT à Monsieur Pierre P de reproduire ou d’utiliser le signe « S.E.A. » ou tout signe similaire, sur tout support et à quelque titre que ce soit, sous astreinte de CENT CINQUANTE EUROS (150 Euros) par infraction constatée à compter de la signification du jugement à intervenir, CONDAMNE Monsieur Pierre P à payer à la société S.E.A. Société Européa Autocaravan la somme de QUINZE MILLE EUROS (15.000 Euros) à titre de dommages et intérêts, DIT n’y avoir lieu à exécution provisoire, CONDAMNE Monsieur Pierre P à payer à la société S.E.A. Société Européa Autocaravan la somme de MILLE DEUX CENTS EUROS (1.200 Euros) en application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

CONDAMNE Monsieur Pierre P aux entiers dépens avec le bénéfice pour Maître des dispositions de l’article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

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