Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre, 27 mars 1998

  • Acte de disposition ou acte d'administration·
  • Article 146 nouveau code de procédure civile·
  • Carence dans l'administration de la preuve·
  • Marque de fabrique et de services·
  • Défaut de fondement juridique·
  • Cl16, cl20, cl21, cl35, cl41·
  • Article 815-5 code civil·
  • Copropriété des marques·
  • Mesure d'instruction·
  • Demande d'expertise

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch., 27 mars 1998
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : HOLD EVERYTHING;TOUT RANGER;ROOMING
Classification internationale des marques : CL10;CL16;CL20;CL21;CL35;CL41
Référence INPI : M19980276
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Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE Madame Christiane W et Monsieur Frédéric P ont déposé conjointement les marques HOLD EVERYTHING et TOUT RANGER les 12 et 29 juillet 1994 en couleurs et pour désigner les produits des classes 10, 20 et 21. Une société dénommée FREEWAY a été constituée entre Laurence G, fille de Madame W, et Monsieur P, et immatriculée au registre du commerce le 9 mars 1995. Mademoiselle G, titulaire de 245 parts sur 500, effectuait un apport en compte courant d’un montant de 755 000 francs. Le siège social de cette société était situé dans la galerie du Carrousel du Louvre, […], à l’enseigne « HOLD EVERYTHING-L’ART DU RANGEMENT-TOUT RANGER » ; Monsieur P en fut nommé gérant pour une durée non limitée. L’activité en était l’étude, la création, la conception, l’utilisation, la commercialisation, l’achat, la vente, l’import-export d’objets, d’ustensiles, de meubles de tous types existant ou à créer. Le 22 mars 1995, Monsieur P constituait, avec Monsieur P, une société dénommée FREDERIC PERIGOT ENTREPRISES dont il détenait 450 parts sociales sur un total de 500 parts. L’objet de cette société tel qu’il ressort des statuts était le conseil, l’audit, la prestation de services intellectuels de tous types, en organisation, communication, marketing, de toutes personnes morales ou physiques ; l’exploitation et la commercialisation de marques existantes ou à créer. Par contrat du 12 avril 1995, Madame W et Monsieur P ont cédé à la société FREDERIC PERIGOT ENTREPRISES la propriété des deux marques précitées. Madame W expose qu’à la suite de difficultés ayant surgi entre les parties, elle a été contrainte de saisir, ainsi que sa fille, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris qui a désigné un mandataire de justice « avec mission de faire rapport sur l’opportunité de la mise sous mandat de justice des sociétés FREEWAY et FREDERIC P E ainsi que sur leur apparente situation active et passive et leurs perspectives d’exploitation et de tous les faits allégués en l’assignation ». A la suite de cette désignation, un procès-verbal de transaction a été signé le 5 avril 1996 entre Madame W, Mademoiselle G, Monsieur P, la société FREEWAY et en présence de la société PERIGOT ENTREPRISE et de Monsieur Jacques B. Aux termes de cette transaction, Monsieur P s’engageait à racheter les parts détenues par Mademoiselle G dans le capital social de la société FREEWAY ainsi que le compte courant soit la somme de 755 000 francs majorée des intérêts. Il acceptait, en outre, tant en son nom personnel qu’en sa qualité de gérant de la société FREDERIC PERIGOT ENTREPRISES, de mettre à néant l’acte de cession des marques HOLD EVERYTHING et TOUT RANGER en date du 12 avril 1995 de sorte que ces marques redevenaient la propriété indivise de Madame W et de Monsieur P. Enfin, ces derniers proposaient que soit consenti rétroactivement à la date de création de la société FREEWAY, soit le 30 janvier 1995, un contrat de licence des marques susvisées. Le même jour était conclu ce contrat de licence exclusive aux termes duquel était notamment prévu le versement aux concédants d’une redevance calculée sur le prix hors

taxes des produits fabriqués et/ou vendus sous les marques HOLD EVERYTHING et TOUT RANGER avec une redevance annuelle minima de 50 000 francs. Il était précisé au contrat que la licenciée s’engageait à ne pas déposer une ou des marques semblables à la marque sous licence ou de nature à faire naître la confusion dans l’esprit des consommateurs. Par courrier du 21 octobre 1996, la société FREEWAY, désormais dénommée FPE CARROUSEL, adressait un courrier à Madame W pour l’informer de ce qu’elle mettait fin au contrat de licence à compter du 29 janvier 1997. Madame W indique qu’à la suite de cette résiliation, qu’elle estime abusive, elle a appris que la société FREDERIC PERIGOT ENTREPRISES avait déposé la marque ROOMING le 29 février 1996 pour désigner les produits et services des classes 16, 20, 21, 35 et 41, et qu’ainsi il aurait trompé le tribunal de commerce alors saisi et le mandataire de justice désigné par celui-ci de même que ses cocontractants en signant un procès-verbal de transaction et un contrat de licence de marque alors qu’il aurait eu déjà l’intention d’exploiter une autre marque ; qu’elle a, de plus, constaté que la société FPE CARROUSEL avait modifié son enseigne pour substituer à l’enseigne « TOUT RANGER-L’ART DE LA TABLE-HOLD EVERYTHING », celle de « ROOMING ». Considérant avoir été trompée par les manoeuvres dolosives de Monsieur P, Madame W a, par acte d’huissier du 23 juin 1997, fait assigner Monsieur Frédéric P, la société FPE CARROUSEL et la société FREDERIC PERIGOT ENTREPRISES aux fins de voir « dans un premier temps » désigner un administrateur judiciaire ou un expert avec pour mission, notamment, de prendre connaissance de tous les documents juridiques, comptables et financiers des sociétés FPE CARROUSEL et FREDERIC P E, dresser la situation actuelle et l’évolution de ces deux sociétés ainsi que les relations financières et commerciales, directes et indirectes qu’elles ont pu avoir depuis leur création, d’examiner le dépôt de la marque ROOMING, de déterminer les chiffres d’affaires réalisés sous les marques TOUT RANGER et ROOMING, la liste des produits vendus sous chacune de ses marques, de donner son avis sur les préjudices qu’elle a pu subir du fait de l’exploitation de la marque ROOMING et donner tous pouvoirs à l’expert de procéder à toutes investigations utiles dans l’intérêt de sa protection." Elle réclame une provision de 1 000 000 francs ainsi que la somme de 20 000 francs en application de l’article 700 du Nouveau Code de procédure civile. Les défendeurs soulèvent l’irrecevabilité de la demande sur le fondement de l’article 815- 5 du Code civil. Ils concluent, subsidiairement, au rejet de la demande d’expertise qui ne serait sollicitée que pour suppléer l’absence manifeste de motifs et de preuves à l’appui des prétentions de la requérante. S’agissant du protocole intervenu entre les parties, ils rappellent que celles-ci étaient assistées d’un conseil et agissaient sous l’autorité d’un mandataire de justice et que l’insinuation de dol ne peut être qu’écartée. Ils font observer que le contrat de licence a été honoré et résilié régulièrement et que depuis son ouverture le point de vente du Carrousel commercialise plus de quarante marques différentes. Enfin, ils font valoir que tant le

procès-verbal de transaction que le contrat de licence ne prévoyait d’obligation relative à l’enseigne. Ils concluent à la condamnation de Madame W au payement de la somme de 10 000 francs au profit de chacun d’eux à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ainsi qu’à celle de 7 000 francs en vertu des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de procédure civile. Madame W rétorque que Monsieur P a signé le procès-verbal de transaction alors qu’il avait, deux mois auparavant, déposé en sa qualité de gérant de la société FREDERIC PERIGOT ENTREPRISES la marque ROOMING de sorte qu’il aurait signé un acte « qu’il avait déjà transgressé depuis plusieurs mois » au vu des obligations de non-concurrence incluses dans le contrat de licence. Elle ajoute que Monsieur P opère une distinction fallacieuse en évoquant sous la dénomination « marque » des fabrications différentes alors que pour les acheteurs tous les produits, quelle que soit leur fabrication et leur origine, étaient vendus sous la dénomination TOUT RANGER et le sont maintenant sous la marque ROOMING. Les défendeurs objectent que l’article 6. 1 du contrat de licence stipulait que « la licenciée tiendra une comptabilité spécifique de la présente licence dans laquelle elle indiquera les quantités de produits fabriqués ou vendus sous la marque ainsi que le nom des clients livrés », ce qui établit que les parties avaient entendu que d’autres marques seraient distribuées.

DECISION I – SUR LA FIN DE NON-RECEVOIR Attendu que les défendeurs soutiennent que la demande de Madame W serait irrecevable en application des dispositions de l’article 815-5 du Code civil. Attendu que cet article dispose qu’un « indivisaire peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le consentement d’un coïndivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci met en péril l’intérêt commun ». Mais attendu qu’en l’espèce la demande de Madame W tend seulement à voir désigner un administrateur judiciaire ou un expert aux fins « d’analyser les agissements qu’elle considère répréhensibles et préjudiciables » de la part de l’ensemble des défendeurs ;

qu’il ne s’agit donc ni d’un acte de disposition ni d’un acte d’administration des marques, dont elle-même et Monsieur P sont copropriétaires, requérant le consentement de tous les indivisaires ; que la fin de non-recevoir sera, en conséquence, rejetée. II – SUR LA DEMANDE PRINCIPALE Attendu que Madame W demande au tribunal « dans un premier temps » de nommer « un administrateur judiciaire ou un expert aux fins de voir analyser, de façon exhaustive, les agissements qu’elle considère répréhensibles et préjudiciables effectués conjointement par Monsieur Frédéric P et les entreprises sous son animation », afin de « permettre au tribunal de faire sa religion au vu d’explications complémentaires et parfaitement objectives ». Attendu que les défendeurs, se fondant sur l’article 146 du Nouveau Code de procédure civile, s’opposent à cette demande soutenant qu’elle n’aurait d’autre but que de « suppléer l’absence manifeste de motifs et de preuves ». Attendu qu’il résulte de cet article « qu’en aucun cas une mesure d’instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l’administration de la preuve » ; que Madame W, qui n’a pas énoncé sur quel fondement juridique reposait sa demande contrairement aux dispositions de l’article 15 du Nouveau Code de procédure civile, ne peut solliciter du tribunal la désignation d’un administrateur judiciaire ou d’un expert pour étudier la nature des agissements des défendeurs qu’elle estime lui avoir porté préjudice, telle n’étant pas la finalité de la mesure d’instruction prévue par les articles 143 et suivants du Nouveau Code de procédure civile ; qu’il y a lieu, dès lors, de déclarer sa demande irrecevable. III – SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE Attendu que les défendeurs réclament chacun la somme de 10 000 francs pour procédure abusive. Mais attendu qu’ils ne démontrent pas l’existence d’une intention malveillante de la part de Madame W dans l’exercice de son droit d’agir en justice ; que leur demande de dommages-intérêts sera donc rejetée. IV – SUR L’EXÉCUTION PROVISOIRE Attendu qu’il n’apparaît pas nécessaire d’ordonner l’exécution provisoire eu égard à la nature de la décision rendue. V – SUR L’ARTICLE 700 DU NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE

Attendu que l’équité commande d’allouer aux défendeurs la somme totale de 12 000 francs au titre des frais irrépétibles qu’ils ont dû engager dans le cadre de la présente instance. VI – SUR LES DÉPENS Attendu que Madame W, qui succombe dans sa demande, supportera les dépens. PAR CES MOTIFS Le tribunal, statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort, Rejette la fin de non-recevoir fondée sur l’article 815-5 du Code civil. Déclare irrecevable la demande de Madame W. Déboute les défendeurs de leur demande de dommages-intérêts. Condamne Madame W à verser à Monsieur P, à la société FPE CARROUSEL et à la société FREDERIC PERIGOT ENTREPRISES la somme totale de DOUZE MILLE FRANCS (12 000 francs) sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de procédure civile. Condamne Madame W aux dépens.

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