Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 3e section, 18 novembre 2003, n° 01/06528

  • Validité du brevet ¿ annulation partielle·
  • Nombre de personnes assistant l'huissier·
  • Opposabilité du transfert de licence·
  • Validité de la saisie-contrefaçon·
  • Date d'inscription au rnb·
  • Réalisation impossible·
  • Exception de nullité·
  • Validité du brevet·
  • Brevet européen·
  • Recevabilité

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 3e sect., 18 nov. 2003, n° 01/06528
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 01/06528
Publication : Propriété industrielle, 11, novembre 2004, p. 18-20, note de Privat Vigand ; PIBD 2004, 783, IIIB-188
Domaine propriété intellectuelle : BREVET
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : EP230804
Titre du brevet : Joint d'étanchéité métallique
Classification internationale des brevets : F16J
Brevets cités autres que les brevets mis en cause : JP60292893 ; JP60292894
Référence INPI : B20030204
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Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS 3e chambre 3e section JUGEMENT rendu le 18 Novembre 2003

№ RG : 01/06528

DEMANDERESSES Société NIHON METAL GASKET KK 3308 Mikajiri Kumagaya-Shi, Saitama-Ken 360 (JAPON)

Société ELRINGKLINGER AG Max E S 2 72S81 Dettingen/Erms (ALLEMAGNE) représentées par Me Jean-Pierre STENGER, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire P372

DÉFENDERESSE S.A. MEDULOR […] 87140 NANTIAT représentée par Me Pierre COUSIN, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire E 255

COMPOSITION DU TRIBUNAL Mme B, Vice-Président, signataire de la décision Mme V. Vice-Président Mme R, Vice-Président assistée de Catherine MAIN, Greffier, signataire de la décision

DEBATS A l’audience du 09 Septembre 2003 tenue publiquement

JUGEMENT Prononcé en audience publique Contradictoire en premier ressort

Faits et procédure

La société NIHON METAL GASKET KABUSHJXI KAISHA, ci-après NIHON METAL est titulaire du brevet européen n° 0 230 804 dépos é le 28 novembre 1986 pour "un

joint d’étanchéité métallique", délivré le 13 juin 1990 sous priorité de deux brevets japonais déposés le 27 décembre 1985 respectivement sous les n°60-292893 et 60-292894.

Ce brevet a été maintenu sous une forme modifiée après opposition.

Selon contrat en date du 3 avril 2000, la société NIHON METAL a concédé une licence à la société ELRING KLINGER Gmbh, contrat inscrit au Registre National des Brevets le 26 mai 2000 sous le n° 117 487.En ve rtu d’une ordonnance rendue le 5 février 2001 par le Président du Tribunal de Grande Instance de Limoges, la société NIHON METAL a fait procéder le 7 mars 2001 à une saisie-contrefaçon dans les locaux de la société MEELLOR à Nantiat.

Par acte en date du 20 mars 2001, la société NIHON METAL et la société ELRING KLINGER AG, en qualité de licenciée ont assigné la société MEELLOR en contrefaçon du brevet ci-dessus visé. Elles demandent de: * dire et juger que les joints de culasse saisis sont la contrefaçon des revendications n°1, 3, 5 et 6 de ce brevet,

* condamner la société MEELLOR à verser aux sociétés NIHON METAL et ELRING KLINGER AG des dommages et intérêts à fixer après expertise et, par provision, une somme de 250 000 francs à chacune d’elles, * interdire à la société MEILLOR la poursuite des actes de contrefaçon sous astreinte de 100 francs par pièce vendue en violation de l’interdiction et de 20 000 francs par jour de retard à se conformer à celle-ci, * ordonner la confiscation et la remise à la société NIHON METAL des joints contrefaisants appartenant à la société MEILLOR,

* ordonner des mesures de publications judiciaires,

le tout sous le bénéfice de l’exécution provisoire, outre la condamnation de la défenderesse aux dépens.

In limine litis, la société MEILLOR demande en premier lieu de surseoir à statuer dans l’attente d’une décision à intervenir dans le cadre de la procédure en déclaration de non contrefaçon introduite le 13 avril 1999 par elle-même et par les sociétés CORCOS EMDUSTRIALE SPA, CORTECO SRL, OIGRA MEILLOR SRL, FREUDENBERG DICHTUNGS UND SCHWINGUNGTECKNIK KG et FREUDENBERG & CO devant le tribunal italien de PINEROLO, actuellement en instance d’appel devant la cour de TURIN après jugement d’incompétence. Elle se prévaut d’un lien de litispendance qui doit être résolu selon les dispositions de l’article 21 de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 et subsidiairement d’un lien de connexité entre les deux affaires.

Elle soulève en second lieu la nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon en ce que la procédure a été conduite avec l’assistance de deux experts alors que

l’ordonnance n’en autorisait qu’un seul. Elle estime qu’il s’agit là d’une cause de nullité de fond.

Sur le fond, elle soulève l’irrecevabilité à agir de la société ELRING KLINGER AG, entité juridique distincte de la société ELRING KLINGER Gmbh titulaire de la licence, la fusion- absorption intervenue le 20 mai 2000 au profit de la première n’ayant pas été inscrite au Registre National des Brevets et n’étant dès lors pas opposable aux tiers.

Elle demande de prononcer la nullité du brevet sur le fondement des articles L 614-12 du Code de la Propriété Intellectuelle et 138 §lc) de la Convention de Munich en ce que son objet s’étend au-delà du contenu de la demande initiale, ainsi qu’en application de l’article 138 §la) du même texte pour défaut d’activité inventive.

Sur le premier point, elle fait valoir que la demande initiale décrivait strictement les combinaisons possibles de revendications produisant des modes de réalisation bien définis alors que dans la version finale modifiée, des combinaisons nouvelles ont été introduites produisant des modes de réalisation non contenus dans la demande initiale. En effet, dans la demande d’origine, il était expressément précisé, tant dans la description que des les revendications 5,7 et 8 que les moyens de compensation sont « constitués de » suivis d’une liste exhaustive des éléments contenus dans chacun des trois modes de réalisation correspondant respectivement aux figures 1, 2 et 3 du brevet, à savoir la plaque de compensation, le bord replié de la plaque de compensation, la bord de la plaque intermédiaire, le bord de la première plaque de base et le bord de la deuxième plaque de base, alors que la revendication 1 dans sa rédaction finale, précise que les moyens de compensation « comprennent » la plaque de compensation, le bord replié de celle-ci et le bord de la plaque de base, ce qui induit la possibilité d’ajouter d’autres éléments comme moyens de compensation, produisant ainsi un nombre de combinaisons très largement multiplié.

Sur le défaut d’activité inventive, elle se prévaut des enseignements du brevet US CATERPILLAR n°1 982 759 et du document JP 59 475 62.

Plus subsidiairement, elle oppose que les joints saisis ne constituent pas des contrefaçons du brevet en ce que les plaques, compensatrice, de base et intermédiaire, ne sont pas disposées respectivement de façon identique: le bord replié de la plaque compensatrice est dans le brevet, replié sous la première plaque de base alors que dans le dispositif argué de contrefaçon, ce bord replié est disposé sous la deuxième plaque, dite intermédiaire, d’autre part, le bord de la plaque intermédiaire se trouve dans la brevet, soit, sous le bord replié de la plaque compensatrice, soit derrière le bord replié de celle-ci, alors que dans le dispositif argué de contrefaçon, il est disposé sous le bord de la première plaque de base, enfin, le bord replié de la plaque compensatrice est en contact entier, soit avec la plaque compensatrice, soit avec la plaque intermédiaire avant d’être fixé, or le joint MEILLOR comporte un jeu entre le bord replié et la plaque compensatrice.

Elle conclut au débouté de la demande en contrefaçon et demande de :

* lui allouer la somme de 304 899 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, * autoriser la publication du jugement à intervenir à titre de complément de dommages et intérêts, * condamner in solidum les sociétés NIHON METAL et ELRING KLJNGER AG à lui payer la somme de 76 225 € au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, * ordonner l’exécution provisoire du jugement, * condamner les défenderesses aux dépens recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Nouveau Code de Procédure civile.

Les sociétés NIHON METAL et ELRTNG KLTNGER AG répliquent que la fin de non recevoir tirée de l’absence de publicité de la licence concédée à la société ELRENG KLTNGER AG n’est plus fondée depuis l’inscription de celle-ci au Registre National des Brevets le 14 avril 2003; sur la litispendance, elles opposent que l’instance engagée devant les juridictions italiennes n’ont pas le même objet que la présente, l’une étant une action déclaratoire visant à permettre l’exploitation d’un produit, l’autre visant à obtenir une indemnisation et que les produits visés ne sont pas identiques s’agissant de joints pour moteurs Peugeot d’une part et de joints pour moteurs Renault d’autre part, dont rien ne permet d’affirmer qu’ils présentent les mêmes caractéristiques. Quant à l’exception de connexité, elles estiment que l’intérêt d’une bonne administration de la justice ne commande pas le sursis en ce que la procédure italienne n’a pour but que de bloquer l’issue de la présente instance. Elles ajoutent que la confirmation de la décision d’incompétence par la Cour d’Appel de TURIN rendrait irrecevable la demande de sursis à statuer (art 22, al.2 de la Convention de Bruxelles).

Sur la procédure de saisie-contrefaçon, elles font valoir que : * le nombre des conseils en propriété industrielle, qui n’est pas limité par la loi, et ne peut être réduit par l’ordonnance présidentielle, * le rôle du second expert se bornait à prendre des photographies,

* l’éventuelle nullité ne serait qu’une nullité de forme soumise à la justification d’un grief.

Sur la validité du brevet, elles opposent que la demande de brevet initialement déposée incluait plus de trois moyens de compensations ainsi que le montre la description (p. 7, ligne 5 et suivantes de la traduction) et les figures 2 et 5 de sorte qu’il convenait d’utiliser l’expression non limitative « comprennent » et non celle de « sont constituées par » et qu’en tout état de cause le déposant a le droit d’élargir la portée de ses revendications définitives à la double condition, respectée en l’espèce, qu’elles ne s’étendent pas au delà du contenu de la demande initiale et que celle-ci contienne une description suffisante de l’invention finalement revendiquée. Sur les

antériorités opposées au soutien du défaut d’activité inventive, elles développent que le brevet CATERPILLAR ne décrit pas un joint entièrement métallique mais un joint contenant une matière fibreuse, déformable et techniquement isolante telle que l’amiante et que ce joint ne comporte aucune nervure ou demi nervure, l’épaulement de la plaque supérieure 10 et de son extrémité abaissée n’étant que le résultat du sertissage, sans exercer de fonctionnalité particulière. Quant au document japonais, il ne divulgue que la nervure, sans autre moyen de compensation, de sorte que rien ne permet de penser que l’homme du métier pouvait trouver dans le brevet Caterpillar l’idée du moyen de compensation et du profit que l’on pouvait en tirer en l’associant à la nervure entière de l’antériorité japonaise.

Elles estiment en conséquence que le joint saisi reproduit les revendications 1, 3, 5 et 6 du brevet en ce que l’on y retrouve la superposition des moyens de compensation, y compris le bord replié de la plaque compensatrice repliée sur elle-même et le bord non recouvert de la plaque de base porteuse de la nervure, disposée à l’extérieur par rapport au trou, peu important qu’il n’existe pas de « contact entier » entre le bord replié de la plaque compensatrice et le corps de celle-ci avant la mise en place du joint, cette expression contenue dans la revendication 1 devant être interprétée à la lumière de la description et du sens qui y est donné dans le domaine de la métallurgie et de la mécanique à savoir deux parties serrées complètement l’une sur l’autre sans qu’elles soient nécessairement soudées.

Elles maintiennent l’ensemble de leurs demandes initiales sous les modifications suivantes: l’astreinte assortissant la mesure d’interdiction est sollicitée à hauteur de 206 par pièce vendue et à 5000 € par jour de retard, les dommages et intérêts provisionnels sont demandés à hauteur de 100 000 € par la société NIHON METAL et à hauteur de 30 000 € par la société ELRJNG KLINGER AG, le coût des publications judiciaires est estimé au total à 10 000 € HT. Elles concluent au débouté des demandes reconventionnelles.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 16 juin 2003.

Motifs de la décision

Sur la demande de sursis à statuer:

Attendu que l’article 21 de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, applicable en l’espèce, dispose que: « Lorsque des demandes ayant le même objet et la même cause sont formées entre les mêmes parties devant des juridictions d’états contractants différents, la juridiction saisie en second lieu sursoit d’office à statuer jusqu’à ce que la compétence du tribunal premier saisi soit établie. Lorsque la compétence du tribunal premier saisi est établie, le tribunal saisi en second lieu se dessaisit en faveur de celui-ci »;

Attendu qu’à la suite d’une mise en demeure délivrée le 7 décembre 1998 par la société ELRING KLINGER Gmbh, se prévalant de sa qualité de licenciée de la société NIHON METAL, plusieurs sociétés dépendant du groupe FREUDENBERG, dont la société MEILLOR ont saisi le Tribunal de PINEROLO (Italie) d’une action en déclaration de non-contrefaçon du brevet 0230804 dont la société NIHON METAL

est titulaire, action dirigée, outre contre cette dernière, contre la société ELRING KLINGER Gmbh; que par jugement en date du 24 juin 2000, le tribunal de PINEROLO s’est déclaré incompétent; que cette décision est frappée d’appel;

Attendu que la société ERLDMG KLENGER Gmbh ayant été depuis lors absorbée par la société anonyme du même nom par voie de fusion-absorption, il ne saurait être sérieusement contesté que les deux affaires pendantes mettent en cause les mêmes parties;

Attendu cependant que les éléments versés aux débats ne permettent pas de déterminer avec certitude si les joints de culasse, objet de la procédure initiée en Italie sont identiques à ceux saisis dans le cadre de la présente instance; que les photographies cotées 9 et 10-12, cités dans la procédure en déclaration de non contrefaçon ne montrent pas clairement l’agencement des plaques entre elles; qu’il n’est pas contesté par la défenderesse que les joints de culasse qui auraient été commercialisés en Italie étaient destinés à des moteurs de véhicules de marque Peugeot alors que dans le cadre de la présente instance, les produits argués de contrefaçon sont destinés à des moteurs équipant des véhicules Renault;

Attendu que cette identité d’objet est d’autant plus sujette à caution que l’acte introductif d’instance en Italie précise en page 4 de la traduction: « Il faut indiquer que Freudenberg (directement ou par les sociétés du groupe) produit et commercialise différents types de joints métalliques de culasses, qui présentent des différences substantiellement dues au modèle de moteur sur lesquels ils doivent être montés. Ces joints de culasse peuvent être réalisés à 2, 3 ou 4 couches. Une couche peut présenter, sur le côté orienté vers l’arrête de la chambre de combustion, un collier replié sur lui-même ou par rapport à une autre couche. Au moins une couche extérieure peut présenter une pliure qui entoure la chambre de combustion. La pliure peut se trouver en dehors de la zone dans laquelle se trouve le collier » ;

Attendu que la société MEELLOR invoque vainement le fait qu’elle a sollicité une déclaration générale de non contrefaçon sur l’ensemble de ses modèles, alors qu’à l’évidence, le juge italien ne pourra se prononcer que sur les faits de fabrication ou de commercialisation réalisés sur le territoire de cet Etat;

Que les conditions de la litispendance ne sont donc pas réunies, pas davantage que celles de la connexité invoquée en second heu.

Qu’ainsi la demande de sursis à statuer doit être écartée quel que soit son fondement.

Sur la validité de la procédure de «"<àft-contrefàçon :

Attendu que l’ordonnance rendue le 5 février2001 par le Président du Tribunal de Grande Instance de Limoges autorisait l’huissier saisissant "à se faire assister d’un expert de son choix, qui pourra être un Conseil en propriété industrielle du cabinet Harlé & Phélip… ainsi que d’un photographe";

Attendu que les opérations de saisie ont été réalisées le 7 mars 2001 en présence de deux conseils en propriété industrielle dudit cabinet, Messieurs C et B ;

Attendu que la société MEILLOR estimant que les termes de l’ordonnance doivent être interprétés restrictivement dans la mesure où la saisie-contrefaçon est une procédure exceptionnelle et exorbitante du droit commun et que tout dépassement de l’autorisation donnée constitue un vice de fond, demande l’annulation de l’acte de saisie ;

Attendu que la requérante à la saisie oppose que Monsieur B, collaborateur de Monsieur C est intervenu comme photographe, que l’article L 615-5 du Code de la Propriété Intellectuelle ne limite pas le nombre d’experts pouvant assister l’huissier de sorte que ce nombre ne peut être restreint par l’ordonnance et qu’en tout état de cause, la défenderesse n’allègue d’aucun grief;

Attendu en effet, que si les dispositions du texte susvisé doivent être interprétées restrictivement en considération du fait que la saisie-contrefaçon permet au breveté de pénétrer chez autrui sans son consentement et sans qu’il puisse s’y opposer, pour y procéder à des constatations tendant à établir la preuve de la contrefaçon alléguée, il doit être relevé que l’autorisation donnée par le président du tribunal ne peut porter, sauf circonstances particulières dûment motivées, ni sur le choix de l’expert assistant l’huissier, ni sur le nombre de ceux-ci dès lors que ce texte prévoit expressément la possibilité pour l’huissier de se faire assister « d’experts de son choix »;

Attendu en outre qu’aux termes des dispositions de l’article 116 du Nouveau Code de Procédure civile, l’inobservation d’une formalité de procédure antérieure aux débats est soumise aux règles gouvernant les irrégularités de forme;

Qu’il s’en suit que le moyen de nullité n’est pas fondé;

Sur la recevabilité à agir de la société ELRING KLINGER AG :

Attendu que selon l’article L 613-9 du Code de la Propriété Intellectuelle tous les actes transmettant ou modifiant les droits attachés à une demande de brevet ou à un brevet doivent, pour être opposables aux tiers, être inscrits au Registre National des Brevets ;

Attendu qu’il est constant que la licence de brevet inscrite au Registre National des Brevets à la date de l’assignation était au bénéfice de la société ELRING KLINGER Gmbh; que le transfert de cette licence au profit de la société ELRING KLINGER AG n’a été transcrit audit registre que le 14 avril 2003 et n’est donc devenu opposable aux tiers qu’à compter de cette date; qu’il s’en suit que la société ELRING KLINGER AG n’est recevable à demander réparation du préjudice dont elle se prévaut qu’à compter de celle-ci.

Sur la validité de la partie française du brevet européen :

* Sur la portée de la demande de brevet:

Attendu que le brevet a pour objet un joint de culasse métallique, pièce du moteur qui a pour fonction d’assurer l’étanchéité entre la culasse et le bloc-cylindre ;

Attendu que l’art antérieur décrit un joint comportant une ou plusieurs nervures raidisseuses assurant des lignes d’étanchéité élastiques sur les surfaces d’appui entre ces deux pièces une fois que l’ensemble est fixé par des boulons; que cependant, la culasse une fois fixée, se déforme en s’incurvant de sorte que l’espace entre la culasse et le bloc culasse augmente, générant ainsi des problèmes de fuite de gaz de combustion et des salissures consécutives du joint du fait du dépôt de matières; que de plus, la pression des gaz de combustion et la chaleur du moteur produisent des variations de l’intervalle entre les surfaces d’appui autour de la chambre de combustion, affaiblissant l’élasticité de la nervure du fait de son usure; que cette usure affecte également les boulons; que les détériorations qui s’en suivent conduisent à des différences de pression entre les endroits de fixation des boulons et celles qui en sont éloignées de nature également à provoquer des fuites;

Attendu que pour résoudre ces inconvénients, il a été envisagé d’augmenter les forces de fixation des boulons, cette solution comportant cependant le risque d’endommageaient des surfaces d’appui; que le brevet DE A 2 220 536 enseigne un joint métallique comportant un trou de chambre de combustion, une plaque avec un bord replié et une plaque de base avec une nervure raidisseuse; que le brevet GB A 2 115 503 se rapporte à un joint comportant une plaque métallique et une partie ondulée avec une forme d’ondulation double, le joint étant pourvu d’un support, tel qu’une cale;

Attendu que l’invention se propose de remédier aux inconvénients ci-dessus décrits en fournissant un joint métallique dans lequel l’intervalle entre les surfaces d’appui autour de la chambre de combustion qui est crée lorsque la culasse est fixée, peut être compensé par la partie compensatrice, laquelle a pour second effet d’assurer une pression d’étanchéité uniforme;

Attendu que le brevet enseigne que la partie compensatrice, d’une épaisseur prédéterminée est formée sur le côté du trou de la chambre de combustion de façon à l’entourer de manière à réduire l’intervalle créé lorsque la culasse est boulonnée, à amortir les augmentations et diminutions de d’intervalle dues à l’influence de la pression des gaz de combustion et de la chaleur du moteur et du fait du laminage de la plaque de base comportant la nervure raidisseuse sur l’une au moins des plaques compensatrice et intermédiaire, à augmenter l’amplitude et la force de rappel de la nervure, améliorant ainsi l’action d’étanchéité élastique;

Attendu que le brevet décrit trois modes de réalisation de l’invention : . le premier et le troisième concernent un joint formé de quatre plaques superposées: deux plaques dites de base, comportant chacune une nervure, une plaque dite intermédiaire et une plaque dite compensatrice dont le bord, du côté du trou de chambre de combustion, est replié sur la plaque intermédiaire dans la direction opposée au trou de la chambre de combustion; les plaques de base enserrent l’assemblage des deux autres plaques de part et d’autre; la différence entre les deux modes de réalisation consistant en ce que dans le premier, les sommets des nervures raidisseuses sont dirigés vers le bas de telle sorte que le sommet de la

première vient en appui sur la plaque intermédiaire alors que dans le troisième mode de réalisation les sommets des nervures sont en opposition de telle sorte que le sommet de la deuxième vient en appui sur le dessous de la plaque compensatrice,

. le second mode de réalisation concerne un joint formé de trois plaques superposées: une plaque de base comportant une nervure raidisseuse, une plaque intermédiaire et une plaque de compensation repliée sur elle-même de telle façon que la plaque compensatrice repliée soit d’une épaisseur légèrement supérieure à celle de la plaque intermédiaire et qu’il existe un espace entre l’extrémité du bord replié de la plaque compensatrice et l’extrémité de la plaque intermédiaire;

Attendu que le brevet initialement déposé comportait 17 revendications; que les revendications 5 et 7 décrivaient les moyens de compensation afférents respectivement au premier et au troisième mode de réalisation de manière identique à savoir: « les moyens »compensatrice'' sont constitués par: la plaque compensatrice, le bord replié de celle-ci, le bord de la plaque intermédiaire et les bords des première et deuxième plaques de base;

Attendu que les moyens de compensation du deuxième mode de réalisation étaient définis à la revendication 9 de la manière suivante : les moyens « compensatrice » sont constitués par la plaque compensatrice, le bord replié de celle-ci et le bord de la première plaque de base";

Attendu que le brevet délivré qui ne comporte plus que 7 revendications, enseigne dans sa revendication 1 "un joint métallique comprenant une structure laminée de plaques comportant une plaque de base métallique plate et élastique pourvue d’une nervure raidisseuse entière adjacente au bord entourant le trou de la chambre de combustion, une plaque compensatrice plate, des moyens de compensation s’étendant autour du trou de chambre de combustion, ayant une épaisseur plus grande que celle de l’autre partie lorsque le joint métallique est monté, formé par repliage du bord de la plaque compensatrice du côté du trou de la chambre de combustion dans la direction opposée audit trou et une plaque intermédiaire plate, caractérisé en ce que : la plaque intermédiaire disposée entre la plaque de base et la plaque compensatrice est laminée sur la plaque compensatrice, les moyens de compensation comprennent la plaque de compensation, le bord replié de celle-ci et le bord de la plaque de base, le bord replié étant replié de telle façon qu’il soit déjà en contact entier avec la plaque compensatrice ou avec la plaque intermédiaire avant d’être fixé, la plaque de base est une plaque extérieure, le bord n’étant pas recouvert par le bord replié de la plaque compensatrice et, la nervure de la plaque de base est disposée à l’extérieur des moyens de compensation;

* Sur le moyen de nullité du brevet tenant à l’extension de son objet

Attendu que l’article L 614-12 du Code de la Propriété Intellectuelle dispose que la nullité du brevet européen est prononcé en ce qui concerne la France par décision de justice pour l’un quelconque des motifs visés par l’article 138, paragraphe 1 de la convention de Munich;

Attendu qu’aux termes de l’article 138 §1 c) de cette convention le brevet est nul "si l’objet du brevet européen s’étend au delà du contenu de la demande telle qu’elle a été déposée…'' ;

Attendu que la société MELLIOR fait valoir que tel est bien le cas en l’espèce en ce que, alors que la demande initiale de brevet décrivait strictement les combinaisons possibles de revendications produisant des modes de réalisation précisément définis, le brevet délivré introduit des possibilités de combinaisons nouvelles produisant d’autres modes de réalisation possibles et qu’en précisant dans la revendication 1 dans sa version définitive, que les moyens de compensation « comprennent » la plaque de compensation, le bord replié de celle-ci et le bord de la plaque de base, elle a laisser la possibilité d’ajouter d’autres éléments comme faisant partie de ces moyens, possibilité qui était exclue de la formulation contenue dans les revendications 5, 7 et 9 initiales dans lesquelles était définie une liste exhaustive de moyens énoncés après l’indication selon laquelle les moyens de compensation sont « constitués de » ;

Attendu que les demanderesses opposent que l’emploi de l’expression non limitative "comprennent'' dans la rédaction définitive du brevet ne saurait être critiquée dès lors que la description (page 7, ligne 5 et suivantes de la traduction) ainsi que les figures 2 et 5 montrent deux ou trois autres moyens de compensation que ceux énoncés dans la revendication 1 ; que le déposant est en droit d’élargir la portée de ses revendications définitives à la double condition que celles-ci ne s’étendent pas au-delà du contenu de la demande initiale et que celle-ci contienne une description suffisante de l’invention finalement revendiquée;

Attendu cependant que ces arguments ne répondent pas à la critique de fond formulée par la société MEELLOR tenant à l’extension du champs de protection obtenue au travers de la formulation modifiée des revendications et du jeu de leur dépendance ;

Attendu en effet que s’il est exact que les trois moyens de compensation énoncés dans la revendication définitive 1 : la plaque de compensation, le bord replié de celle-ci et le bord de la plaque de base, étaient bien inclus dans la description, il est en revanche impossible de soutenir que la description et les figures pouvaient inclure que, dans le second mode de réalisation décrit au paragraphe précédent, dans lequel la plaque compensatrice est repliée sur elle-même, le nombre des moyens de compensation puisse être supérieur à trois, ce que permet pourtant la revendication 1 dans sa rédaction définitive du fait du caractère non limitatif des moyens énumérés ;

Attendu qu’en englobant dans la revendication 1 deux modes de réalisation pourtant bien distincts dans lesquels le moyen de compensation recherché, à savoir essentiellement la création d’un vide de nature à conserver un degré d’élasticité optimale à la nervure, est obtenu de deux manières radicalement différentes, soit le repliement de la plaque compensatrice sur la plaque intermédiaire, soit le repliement de la plaque compensatrice sur elle-même alliée à une moindre épaisseur de la plaque intermédiaire et en plaçant les six revendications suivantes dans la dépendance de cette première revendication, la société NIHON METAL a autorisé une combinaison de moyens notablement plus large que ceux initialement exposés

de façon limitative qui correspondait à trois modes de réalisation clairement définis; que la rédaction définitive du brevet aboutit d’ailleurs à des modes de réalisation impossibles, la revendication 7 ne pouvant par exemple être associée à la revendication 2, le repli de la plaque compensatrice ne pouvant à l’évidence être réalisé à la fois sur lui-même et sur la plaque intermédiaire;

Qu’il s’en suit que la revendication 1 est nulle, cette nullité entraînant la nullité des revendications opposées 3, 5 et 6 qui en dépendent.

Sur la demande reconventionnelle :

Attendu que la société MEELLOR soutient que les demanderesses à la présente instance ont abusé de leur droit d’agir en justice en ce que, ne pouvant ignorer que les joints qu’elle fabrique ne reproduisaient pas les enseignements du brevet européen n°0 230 804, le but poursuivi était en fai t de lui faire perdre son principal client, la société RENAULT;

Attendu cependant que ces allégations ne sont étayées par aucun élément de preuve permettant d’établir que le choix par cette dernière société de la société ELRING KLINGER en tant que fournisseur des joints de culasse pour le moteur M1D ait été le fruit d’une manoeuvre destinée à troubler le jeu normal de la concurrence;

Qu’en conséquence, cette demande n’est pas fondée.

Sur les frais et dépens : Attendu qu’aucune considération tirée de l’équité ou de la situation économiques des parties ne commande de faire application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure civile.

Attendu que les sociétés demanderesses seront condamnées aux entiers dépens de l’instance, lesquels seront recouvrés directement par le conseil de la défenderesse en application des dispositions de l’article 699 du Nouveau Code de Procédure civile.

Par ces motifs

Le Tribunal, Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort,

Rejette la demande de sursis à statuer,

Rejette la demande de nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon,

Dit que la société ELRING KLINGER AG est recevable à agir en contrefaçon à compter du 14 avril 2003, date de l’inscription de la licence à son profit au Registre National des Brevets,

Annule les revendications 1, 3, 5 et 6 de la partie française du brevet européen n°0 230 804 dont est titulaire la société NIHO META L ayant pour objet un joint d’étanchéité métallique,

Dit que la présente décision, une fois devenue définitive, sera inscrite au Registre National des Brevets à la diligence du greffier saisi à la requête de la partie la plus diligente,

En conséquence,

Déboute les sociétés NIHON METAL et ELRING KLINGER AG de leurs demandes en contrefaçon,

Déboute la société MEILLOR de ses demandes reconventionnelles,

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure civile,

Condamne les sociétés NEHON METAL et ELRING KLINGER AG aux entiers dépens de l’instance, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du même code.

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Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 3e section, 18 novembre 2003, n° 01/06528