Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 3e section, 18 novembre 2003

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 3e sect., 18 nov. 2003
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Publication : PIBD 2004, 783, IIIB-186
Domaine propriété intellectuelle : BREVET
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : FR9905546
Titre du brevet : Serrure manoeuvrable électriquement ou mécaniquement
Classification internationale des brevets : E05B ; E05C
Référence INPI : B20030205
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Sur les parties

Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE La SOCIETE D’ETUDE ET DE REALISATION DE SYSTEMES DE SECURITE ci- après dénommée SERSYS a pour activité la conception, la fabrication et la commercialisation de serrures à moteur électrique et commande électronique. Monsieur Edmond S, associé non salarié de SERSYS, est devenu salarié de la société à compter du 1er janvier 1989 dans les fonctions de responsable technique, sans qu’aucun contrat de travail n’ait été signé entre les parties. Il s’est vu confier, dans le cadre de ses fonctions et à compter du 1er décembre 1997 l’étude et la fabrication d’une serrure à larder connue également sous la dénomination de serrure à encastrer. Monsieur Edmond S a été licencié pour faute grave le 7 janvier 1999. Il a déposé le 30 avril 1999 à l’Institut National de la Propriété Industrielle, à son nom et en qualité d’inventeur, un brevet français sous le n° 99 05546 concernant une serrure manoeuvrable électriquement ou mécaniquement, brevet qui a été délivré le 15 juin 2001, et a fondé en janvier 2000 la société LOCKTECH qui exploite l’invention brevetée en commercialisant une serrure dite « Sigma ». Faisant valoir que la serrure objet du brevet n’est autre que la serrure à larder dont l’étude et la conception ont été confiées à Monsieur Edmond S en 1997 dans le cadre de son activité salariée, que cette serrure a été réalisée avant la fin du contrat de travail, et que par conséquent il s’agit d’une invention de mission dont la propriété lui revient, la société SERSYS a, selon acte d’huissier en date du 22 novembre 2002, fait assigner Monsieur Edmond S en revendication dudit brevet sur le fondement des articles L 611-7 et L 611-8 du Code de la Propriété Intellectuelle. Par conclusions récapitulatives en date du 14 mars 2003, la société SERSYS reprenant ses arguments demande au Tribunal de :

- la déclarer recevable et bien fondée en son action en revendication du brevet n° 99 05546
- ordonner à l’Institut National de la Propriété Industrielle le transfert dudit brevet à son profit
- condamner Monsieur Edmond S à lui payer la somme de 2.287 euros au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

- ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir. Par conclusions en date du 27 janvier 2003, Monsieur Edmond S s’oppose aux demande et sollicite à titre reconventionnel paiement, au bénéfice de l’exécution provisoire, de la

somme de 10.000 euros pour procédure abusive ainsi que de celle de 10.0000 euros au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Il fait valoir que la société SERSYS ne rapporte aucune preuve sérieuse de ce que la serrure objet du brevet litigieux aurait été conçue avant la fin de son contrat de travail, qu’il s’agit d’une serrure différente de celle réalisée en 1998 pour le compte de la société SERSYS, enfin que dégagé de ses contraintes salariales dès janvier 1999, il a pu se consacrer à son activité d’étude et de recherches pour déposer fin avril de la même année le brevet litigieux. Il ajoute que la société SERSYS a engagé une procédure judiciaire à son encontre non pas pour défendre ses droits mais pour exercer une pression dans le cadre de difficultés existant entre les parties relatives d’une part à son maintien dans le capital de la société et d’autre part à une autre action judiciaire pendante relative au paiement de redevances dues par la société SERSYS au titre d’un contrat de licence qui lui a été consenti sur un précédent brevet. L’ordonnance de clôture a été rendue le 8 septembre 2003.

DECISION I – SUR L’ACTION EN REVENDICATION Attendu qu’en application de l’article L 611-6 du Code de la Propriété Intellectuelle le droit au brevet appartient à l’inventeur ou à son ayant cause ; Qu’il est constant en l’espèce que le demandeur du brevet et l’inventeur déclaré dans la demande est Monsieur Edmond S et que le brevet n° 99 05546 a été déposé le 30 avril 1999 postérieurement à son départ de la société SERSYS ; Qu’il appartient donc à cette dernière qui revendique la propriété du brevet déposé par son ancien salarié sur le fondement des articles L 611-7 et L 611-8 du Code de la Propriété Intellectuelle, d’établir que l’invention a été réalisée pendant la durée du contrat de travail de Monsieur Edmond S et correspond au résultat des recherches effectuées par celui-ci ; Attendu qu’il est établi tant par les déclarations des parties que par les termes du jugement du Conseil des Prud’hommes d’Argenteuil du 23 mai 2000, que Monsieur Edmond S a eu la qualité de responsable technique au sein de la société SERSYS de 1989 à 1999, avec pour mission d’assurer l’étude, le développement, la logistique et la fabrication des serrures électriques ; Qu’il s’est vu confier en 1997, dans le cadre de ses fonctions, une mission spécifique d’étude et de conception d’une serrure motorisée à larder (ou à encastrer) commercialisée depuis par la société SERSYS sous la référence 70120 ;

Attendu que la société SERSYS prétend qu’il y a identité entre les études et les conceptions de fabrication de cette serrure et les revendications du brevet n° 99 05546 qui correspondraient au cahier des charges de la serrure à larder de 1998 ; Qu’il y a lieu de relever en premier lieu qu’aucun cahier des charges de la serrure à larder n’est versé aux débats par la demanderesse ; Que d’autre part, si les comptes rendus de réunions des 1er et 8 décembre 1997, 2 et 16 février, 9 mars, 27 avril, 25 mai et 8 juin 1998 qui sont versés aux débats établissent que le dossier serrure motorisée à encastrer a été confiée à Monsieur Edmond S, ce qui n’est pas contesté, force est de constater que ce ne sont pas des documents d’études et qu’il ne contiennent aucune indication concernant les caractéristiques de la serrure à larder c’est à dire à encastrer, si ce n’est qu’il s’agissait bien d’une serrure de ce type ; Que selon la plaquette commerciale de SERSYS, il s’agit d’une serrure de 20 mm d’épaisseur, à pêne dormant et pêne demi-tour motorisés utilisant un système de transformation de mouvement par pignon-crémaillère et dotée d’une poignée ; Que les modifications qui auraient été envisagées par la société SERSYS sur cette serrure à larder et qu’invoque la société SERSYS pour démontrer la similitude entre les deux serrures en cause, outre que le fait qu’il s’agit précisément des caractéristiques de la serrure « Sigma » telles que décrites dans la brochure de la société LOCKTECH, ne sont établies par aucun élément de preuve ; Attendu au surplus que le Tribunal relève que la serrure à larder commercialisée par la société SESYS sous la référence 70120 ne comporte aucun système d’embrayage alors que la serrure objet du brevet n° 99 05546 est caractérisée notamment par un mécanisme d’embrayage intercalé entre l’arbre du moteur et l’un des bras de manoeuvre ; Attendu enfin qu’au moment du dépôt de la demande de brevet le 30 avril 1999, Monsieur Edmond S était délié de ses obligations à l’égard de son ancien employeur puisqu’il a été licencié le 7 janvier 1999 ; Qu’en raison de sa parfaite connaissance de la technique des serrures électriques, il a eu tout le loisir de concevoir en trois mois et trois semaines, les éléments techniques de l’ensemble de la serrure manoeuvrable électriquement ou mécaniquement objet de l’invention visée par le brevet enregistré sous le n° 99 05546 ; Que d’ailleurs la société SERSYS n’ignorait pas cette activité de recherche de son ancien salarié puisqu’elle a annoncé par une note d’information interne à l’entreprise en date du 14 janvier 1999, que Monsieur Edmond S quittait la société pour reprendre une activité d’études et de recherches qu’il exercera dans le cadre d’une structure professionnelle indépendante ;

Attendu dans ces conditions que la société SERSYS ne peut légitimement revendiquer la propriété de ce brevet et demander le transfert à son nom du titre obtenu par Monsieur Edmond S ; II – SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE Attendu que le défendeur, qui ne démontre ni l’intention de nuire seule de nature à constituer un abus fautif du droit d’agir en justice, ni la réalité du préjudice qu’il invoque, sera débouté de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ; Attendu qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur Edmond S la totalité des frais irrépétibles et qu’il convient de lui allouer la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. PAR CES MOTIFS : Le Tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire et en premier ressort,
- Déboute la société SERSYS de sa demande de revendication du brevet n° 99 05546 déposé le 30 avril 1999 parMonsieur Edmond S.

- Déboute Monsieur Edmond S de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.

-Condamne la société SERSYS à payer à Monsieur Edmond S la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

-Rejette toute autres demandes.

-Condamne la société SERSYS aux dépens dont distraction au profit de Maître J. Fréneaux, Avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

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