Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 2e section, 5 juillet 2013, n° 12/02431

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 2e sect., 5 juill. 2013, n° 12/02431
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 12/02431
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : GROTTE CHAUVET ; GROTTE CHAUVET PONT D'ARC ; CHAUVET
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 98736438 ; 98736439 ; 3633188 ; 3633190 ; 3849106
Classification internationale des marques : CL09 ; CL16 ; CL18 ; CL20 ; CL21 ; CL24 ; CL25 ; CL28 ; CL30 ; CL32 ; CL35 ; CL37 ; CL38 ; CL41 ; CL42
Référence INPI : M20130462
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Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS JUGEMENT rendu le 05 Juillet 2013

3e chambre 2e section N° RG : 12/02431

DEMANDEURS Madame Eliette B

Monsieur Jean-Marie C

Monsieur Christian H représentés par Me Marc SABATIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1840

DEFENDERESSE SYNDICAT MIXTE ESPACE DE RESTITUTION DE LA GROTTE CHAUVET – PONT D’ARC Hôtel du Département la Chaumette 07007 PRIVAS CEDEX 07 représentée par Me Richard MILCHIOR. SCP GRANRUT avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P00 ! 4

COMPOSITION DU TRIBUNAL Eric H. Vice-Président, signataire de la décision Arnaud D. Vice-Président Valérie D. Juge assistés de Jeanine ROSTAL, FF Greffier, signal aire de la décision

DEBATS A l’audience du 23 mai 2013 tenue en audience publique

JUGEMENT Prononcé par remise de la décision au greffe Contradictoire en premier ressort

FAITS. PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES Madame Eliette B, Monsieur Jean-Marie C et Monsieur Christian H qui ont le 18 décembre 1994 découvert une grotte située au lieu-dit La Combe d’Arc dans le cirque d’Estre dans laquelle se trouvaient des fresques datées de plus de 33.000 ans et qu’ils ont baptisée Grotte Chauve indiquent avoir déposé, le 8 juin 1998, les deux marques françaises GROTTE C n°736 439 et GROTTE CHA UVET PONT D’ARC n°736 438. N’ayant pas pris la précaution de les renouveler à échéance, ils ont constaté que le Syndicat Mixte Espace de Restitution de la Grotte Chauvet (ci-après SMERGC), les avait déposées le 17 février 2009

sous son nom, sous les nouveaux numéros respectifs 3 633 188 et 3 633 190, pour désigner différents produits et services des classes 9, 16, 18, 20, 21, 24, 25. 28. 30. 32. 35, 37, 41 et 42, avant de déposer le 22 juillet 2011 sous le n°3 849 106 une nouvelle marque, la marque française C qui a fait l’objet, à la suite d’une opposition des demandeurs, de deux décisions du Directeur de l’INPI du 16 avril 2012 ayant limité l’enregistrement à deux services de la classe 42. C’est dans ce contexte que par acte du 19 janvier 2012, ils ont fait assigner ce syndicat pour voir prononcer le transfert à leur profit des trois marques françaises en question, qui auraient été déposées en fraude et en portant atteinte à leurs droits préexistants, et obtenir l’allocation de dommages-intérêts. Dans leurs conclusions en réplique signifiées le 7 mai 2013. Madame B et Messieurs C AU VET et H, après avoir réfuté les arguments présentés en défense, demandent en ces termes au Tribunal de:

- les recevoir en l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- débouter le Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet – Pont d’Arc de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions. En conséquence,
- dire et juger que les marques françaises GROTTE C n°3 633 188, GROTTE CHAUVET PONT D’ARC n°3 633 190 et C n°3 849 106, ont été déposées par le Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grolle Chauvet – Pont d’Arc en portant atteinte au patronyme de Monsieur Jean-Marie C,
- dire et juger que les marques françaises GROTTE C n°3 633 188, GROTTE CHAUVET PONT D’ARC n°3 633 190 et C n°3 849 106, ont été déposées par le Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet – Pont d’Arc en portant atteinte à leurs droits préexistants,
- dire et juger que les marques françaises GROTTE C n°3 633 188. GROTTE CHAUVET PONT D’ARC n°3 633 190 et C n°3 849 106, ont été déposées par le Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet – Pont d’Arc dans des conditions frauduleuses à leur détriment.

- prononcer le transfert de propriété des marques françaises GROTTE C n°3 633 188. GROTTE CHAUVET PONT D’ARC n°3 633 190 et C n°3 849 106 à leur profit, à titre de répa ration, par application de l’article L. 712-6 du Code de la propriété intellectuelle.

- à titre subsidiaire, prononcer l’annulation des dites marques, par application de l’article L. 711-4 du Code de la propriété intellectuelle et de la règle Fraus omnia corrompit,
- donner acte au Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet – Pont d’Arc qu’il considère comme acquise l"annulation des marques pour les produits et services des classes 9, 16, 25, 35, 38, 41 et 42,

— en tout état de cause, dire cl juger que le jugement à intervenir sera transmis par le Greffe auprès de l’INPI pour inscription au Registre national des marques au titre des marques concernées,
- faire interdiction au Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet- Pont d’Arc d’utiliser ou de concéder l’utilisation des marques GROTTE CHAUVET n°3 633 188. GROTTE CHAUVET PONT D’ARC n°3 633 190 et C n°3 849 106, et de mani ère générale tout signe identique ou similaire au nom « Chauvet », à quelque titre et sous quelque forme que ce soit, en tous lieux et sur tous supports.

- leur donner acte de ce que cette interdiction ne concerne pas l’utilisation par le Syndical Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet – Pont d’Arc, dans le cadre d’une licence d’exploitation à intervenir entre lui et eux. de la marque GROTTE CHAUVET pour désigner ledit Espace de Restitution de la Grotte Chauvet, des expositions consacrées à la grotte Chauvet au sein de l’Espace de Restitution et pouvant se poursuivre de manière itinérante,
- assortir le respect des condamnations d’une astreinte 200 euros par jour de retard et de 700 euros par infraction constatée, à compter de la signification du jugement à intervenir, le Tribunal se réservant expressément la possibilité de liquider l’astreinte directement,
- condamner le Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet – Pont d’Arc à leur verser la somme de 300.000 euros à titre de dommages cl intérêts, au titre de la fraude, sauf à parfaire à la date du jugement à intervenir,
- condamner le Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet – Pont d’Arc à leur verser la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts, au titre de l’atteinte au patronyme de M. C, sauf à parfaire à la date du jugement à intervenir.

- condamner le Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet – Pont d’Arc à leur verser la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts, au titre de l’atteinte aux droits d’auteur et d’inventeur, sauf à parfaire à la date du jugement à intervenir,
- dire et juger que le jugement à intervenir sera publié sur les sites internet du Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet – Pont d’Arc, en première page, pendant une durée de trois mois.

- dire et juger que le jugement à intervenir sera publié dans sept des journaux ou revues de leur choix, aux frais du Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet – Pont d’Arc, à raison de 2000 euros hors TVA par insertion, ce montant étant dû à titre de supplément de dommages et intérêts, payables d’avance,
- condamner le Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet- Pont d’Arc à leur verser la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
- condamner le Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet – Pont d’Arc aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Sabatier avocat aux offres de droits,

— ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir, nonobstant appel ou autres voies de recours, et sans garantie, uniquement en ce qui concerne leurs demandes, y compris pour les condamnations prononcées au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. Dans ses dernières écritures signifiées le 17 mai 2013, le SMERGC conteste toute atteinte aux droits d’inventeur, d’auteur et au nom patronymique de Monsieur C, relève l’absence de toute confusion, conteste toute fraude, et s’oppose donc au transfert. Il sollicite l’octroi de la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. L’ordonnance de clôture a été rendue le jour de l’audience de plaidoiries, le 23 mai 2013. MOTIFS DE LA DÉCISION
- Sur l’atteinte au nom patronymique Selon l’article L.711-4 du Code de la propriété intellectuelle, « nepe.nl être adopté comme marque un signe parlant atteinte (…) au droit de la personnalité d’un tiers, notamment à son patronyme, à .son pseudonyme, à son image ». Se fondant sur ce texte. Monsieur Jean-Marie C expose que son nom a été choisi par les trois inventeurs comme étant celui qu’il convenait de donner à la grotte en question, avec pour unique but de présenter leur expédition et leur découverte, et bénéficier ainsi des retombées qui pouvaient en découler.

Il ajoute que le SMERGC savait pertinemment au moment du dépôt des marques litigieuses que le nom Chauvet était son patronyme, et que ce syndicat a entendu créer une confusion entre ce patronyme et l’exploitation de marques commerciales, en laissant croire indûment que lui-même aurait consenti au dépôt des marques. Pour sa part, le SMERGC fait valoir que le risque de confusion ne serait pas démontré en l’espèce, en particulier en raison de l’absence de notoriété du demandeur qui exclurait toute éventualité de rapprochement avec les marques, précisant que le risque s’amenuise de surcroît lorsque les marques cl le patronyme ne sont pas identiques. De fait, il est exact, contrairement à ce que soutient le demandeur, que l’atteinte à un patronyme suppose que soit caractérisé un risque de confusion. Par ailleurs, seule la reprise d’un nom connu peut avoir des conséquences sur l’existence de ce risque. En revanche, il peut y avoir confusion même lorsque le nom n’est pas repris à l’identique. En l’espèce, sans être célèbre sur l’ensemble du territoire national, Monsieur C a néanmoins bénéficié de son moment de notoriété

lorsqu’il a. en compagnie des deux autres demandeurs, découvert la grotte qui porte désormais son nom ainsi que le montrent les coupures de presse versées aux débats. Dans la région où se trouve celte grotte, le grand public associe naturellement son nom à celui de la grotte dont s’agit, d’autant qu’avec ses acolytes Monsieur C a médiatisé celle dernière, révélant l’existence de la grolle publiant un ouvrage, donnant des conférences, présentant des films et même commercialisant des produits dérivés, ce qui montre que celte notoriété a perduré. D’autre part, le syndicat défendeur s’est constitué justement pour valoriser et exploiter la grotte en cause, accroissant ainsi, par cette similitude avec l’activité de Monsieur C. le risque de confusion. Enfin, pour ce qui est de l’assimilation entre les signes CHAUVET d’une part. GROTTE CHAUVET ou GROTTE C POINT D’ARC de l’autre, il apparaît que ce dernier nom. qui localise géographiquement la grotte, ne peut suffire à écarter le risque de confusion, alors que l’ajout du mot GROTTE, purement descriptif, n’est pas de nature à dominer le nom C. De la sorte. ]e public est incité à donner aux marques cl au nom patronymique la même origine, ce qu’a d’ailleurs relevé lui aussi le Président de ITNPI dans ses décisions dont il a été question plus haut. Dès lors, l’atteinte au nom patronymique par le dépôt des trois marques françaises est constituée.

— Sur l’atteinte aux droits antérieurs

*l’atteinte aux droits d’auteur Selon l’article L711 -4 du Code de la propriété intellectuelle évoqué ci-dessus, ne peut davantage être adopté comme marque un signe portant atteinte à des droits antérieurs, et notamment aux droits d’auteur.

Sur ce point, les trois demandeurs considèrent qu’en ayant révélé et publié des œuvres originales qui étaient restées totalement inconnues, à savoir les fresques découvertes, ils bénéficient des dispositions de l’article L.123-4 du même Code sur la divulgation des œuvres posthumes. Ils ajoutent que le titre qu’ils ont choisi, Grotte Chauvet, présente un caractère original par rapport à la découverte en question. Le SMERGC, quant à lui explique qu’un « incident » soulevé par lui aurait « contraint les demandeurs à modifier leurs demandes et spécifiquement à retirer lu demande fondée sur leur qualité d’inventeur, ce qui selon eux justifiait leurs demandes au titre du droit d’auteur sur la découverte de la Grotte Chauvet », et demande donc au Tribunal « de ne pas prendre en considération les

développements qui ont été maintenus dans les conclusions récapitulatives des demandeurs (…) du 7 mai 20!3 ». Sur ce dernier point qui plonge le Tribunal dans une perplexité certaine, il est manifeste qu’aucun incident n’a été plaidé et tranché par le Juge de la mise en état dans cette instance, au point qu’on comprend mal à quoi il est lait allusion par le défendeur, d’autant qu’il n’en a nullement été question à l’audience. Il convient donc d’examiner la question de cette atteinte. Or il apparaît que les demandeurs évoquent en premier lieu des droits d’auteur dont ils seraient titulaires sur une découverte, sans aborder en quoi que ce soit l’œuvre ou les œuvres dont il serait question. Puisqu’aucune des fresques invoquées n’est citée ou décrite, et sans caractériser en quoi elles bénéficieraient d’une quelconque protection par le droit d’auteur, étant ajoute que le texte sur les œuvres posthumes dont s’agit, s’il prévoit la durée de la protection et précise que le droit d’exploitation appartient aux ayants- droit, ne contient aucune disposition au sujet des inventeurs. Par ailleurs, aucune indication n’est donnée sur celui des trois demandeurs qui serait l’auteur de la dénomination Grotte Chauvet, à moins qu’il ne s’agisse d’une œuvre collective ou d’une œuvre de collaboration, mais là encore le mystère reste entier. En outre, les demandeurs se bornent à dire que ce qu’ils qualifient de titre serait arbitraire et non nécessaire, sans caractériser en quoi une appellation qui associe une grotte au nom de l’un de ses découvreurs serait original pour décrire une grotte qui a été découverte notamment par Monsieur C. L’atteinte alléguée n’est donc pas constituée.

*l’atteinte aux droits d’inventeurs En se fondant toujours sur le même texte, les demandeurs font valoir qu’il aurait été porté atteinte par le dépôt des marques à leurs droits d’inventeurs.

Ils soutiennent que la liste donnée par l’article L.711-4 évoque ci-dessus ne sciait pas limitative, de sorte que le droit antérieur de l’inventeur pourrait aussi s’opposer à l’adoption d’un signe lui portant atteinte. Ils ajoutent qu’ayant signe le 15 février 2000 un protocole transactionnel aux termes duquel L’État leur a reconnu la qualité d’inventeur, ils bénéficieraient à ce litre d’un droit moral d’inventeur. Cependant, comme le soutient à bon droit le SMERGC, le Code de la propriété intellectuelle n’a nullement accorde un droit moral à l’inventeur, le seul droit moral reconnu étant celui de l’auteur d’une œuvre de l’esprit.

En outre, il n’est pas davantage précisé en quoi ce qui aurait été découvert par les inventeurs, à savoir les fresques, OU la grotte, ou le nom de la grotte, nul ne le sait, mériterait davantage protection que celle qui vient d’être refusée au titre du droit d’auteur, étant encore observé que les demandes présentées à ces deux litres ne se distinguent pas réellement. Enfin, on peut relever avec le détendeur que le texte dont s’agit ne renvoie nullement au Code du patrimoine, qui traite des inventeurs.

Dès lors, les demandes présentées à ce litre seront rejetées.

— Sur le dépôt frauduleux L’article L.712-6 du Code de la propriété intellectuelle dispose que «si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d’un tiers, soit en violation d’une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice ». Se fondant sur ce texte, Madame B et Messieurs C et I1I1XAIRE, qui estiment que la fraude suppose la preuve de la connaissance par le déposant de l’existence d’un droit antérieur ainsi que de sa volonté de nuire aux droits d’autrui, exposent que le SMERGC a profité de leur erreur ayant consisté à oublier de renouveler leurs propres marques pour procéder à des dépôts à leur détriment, alors qu’il aurait été plus simple de les prévenir. Ils ajoutent que la date des dépôts litigieux, soit juste après le délai de grâce de six mois accordé aux titulaires de marques pour rectifier leur oubli éventuel, montre que le syndicat avait surveillé de près le moment de l’expiration des dites marques. Par ailleurs, l’historique des relations entre les partenaires confirme selon eux l’existence de celte fraude, puisque le 19 juillet 2001 l’État français et le département de l’Ardèche se sont engagés à associer les inventeurs au projet d’Espace de restitution de la grotte, des rémunérations forfaitaires étant notamment prévues que les dépôts contestés avaient selon eux la vocation de contrarier, et montre la volonté du SMERGC de procéder à une exploitation lucrative de la grotte, « après s’être empressé d’éliminer les inventeurs », concédant en particulier une licence d’exploitation des marques en cause à une société tierce. Le défendeur soutient pour sa part que les inventeurs auraient choisi d’abandonner leurs marques, et qu’il a procédé aux dépôts qui lui sont reprochés pour éviter que ces marques soient déposées par des tiers.

Cependant, il est indéniable que les trois demandeurs ont déposé les deux marques GROTTE CHAUVET et GROTTE C PONT D’ARC le 8 juin 1998, marques qu’ils ont par la suite omis de renouveler. Bien loin de les avenir de cet oubli pour les inciter, tant qu’il était encore temps, à Taire ce qu’il était encore possible de faire, le SMERGC est au contraire resté taisant, déposant ses propres marques le 17 février 2009, soit un peu plus de deux mois après l’expiration du délai de grâce expirant le 8 décembre 2008, étant en outre observé que lesdites marques ont des signes identiques aux marques expirées. De plus, la volonté on ne peut plus louable d’empêcher que des tiers puissent occuper le terrain laissé vacant par la négligence des demandeurs, à la supposer effective, est en l’occurrence tempérée par la réticence mise par le SMERGC à restituer lesdites marques à ceux-ci lorsqu’ils en ont fait la demande, et ce en dépit des déclarations apaisantes de son président, également président du Conseil général de l’Ardèche. Enfin, le fait de déposer une troisième marque, le 22 juillet 2011 justement à un moment où la question de la restitution des deux précédentes se posait, a apporté comme une concrétisation à la fraude qui vient donc d’être caractérisée. Il y a lieu en conséquence, en application du texte susvisé et sans qu’il soit besoin d’examiner la portée de l’adage Fraus omnia corrumpit invoqué à titre subsidiaire, d’ordonner le transfert au profit des demandeurs des (rois marques dont s’agit.

- Sur les mesures réparatrices Outre le transfert des marques tous les produits el services, il sera alloué à l’ensemble des trois demandeurs la somme globale de 10.000 euros, en réparation du préjudice causé par le dépôt frauduleux, el à Monsieur C celle de 5.000 euros en réparation de l’atteinte portée à son nom patronymique. Par ailleurs, il sera fait droit à la mesure d’interdiction sollicitée, ainsi qu’il sera dil au dispositif de la présente décision. Il convient, à titre de complément d’indemnisation, d’autoriser la publication demandée ainsi qu’il sera également dit au dispositif.

- Sur les autres demandes II y a lieu de condamner le SMERCG, partie perdante, aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

En outre, il doit être condamné à verser à Madame B, Monsieur C et Monsieur H, qui ont dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir

leurs droits, une indemnité au titre de l’article 700 du Code de procédure civile qu’il est équitable de fixer à la somme globale de 4.000 euros. Par ailleurs, les circonstances de l’espèce justifient le prononcé de l’exécution provisoire, qui est compatible avec la nature du litige. PAR CES MOTIFS Le Tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et rendu en premier ressort,
- DIT que l’enregistrement par le Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet des marques françaises GROTTE C n°3 633 188, GROTTE CHAUVET PONT D’ARC n° 3 633 190 et C n°3 849 106 a été effectué en fraude des droits de Madame Eliette B, de Monsieur Jean-Marie C et de Monsieur Christian H ;

- DIT qu’en déposant ces marques, le Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet a en outre porté atteinte au nom patronymique de Monsieur Jean-Marie C ;

- INTERDIT en tant que besoin la poursuite de ces agissements, sous astreinte de 350 euros par infraction constatée à compter de la signification de la présente décision, sauf accord entre les parties pour une utilisation, dans le cadre de toute licence qu’elles voudront mettre en place ;

- ORDONNE le transfert de propriété des marques françaises GROTTE C n°3 633 188, GROTTE CHAUVET PONT D’ARC n°3 633 190 et C n°3 849 106 au profit de Madame Eliette B, de Monsieur Jean-Marie C et de Monsieur Christian H pour tous les produits et services visés à leur enregistrement en classes 9, 16, 18, 20, 21, 24, 25, 28, 30, 32, 35, 37, 41 et 42 ;

- DIT que la présente décision, une fois devenue définitive, sera portée à la connaissance de l’INPI pour inscription au Registre National des Marques par le greffier à la requête de la partie la plus diligente ;

- CONDAMNE le Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet à payer à Madame Eliette B, Monsieur Jean-Marie C et Monsieur Christian H la somme globale de 10.000 euros en réparation du préjudice causé par les dépôts de marques frauduleux, et à Monsieur Jean-Marie C la somme de 5.000 euros en réparation de l’atteinte portée à son nom patronymique ;

- AUTORISE la publication du dispositif du présent jugement dans deux journaux ou revues au choix de Madame Eliette B, de Monsieur Jean-Marie C et de Monsieur Christian H et aux frais du Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet, sans que le

coût de chaque publication n’excède, à la charge de ce dernier, la somme de 3.500 euros II.T. ;

- CONDAMNE le Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet à payer à Madame Elietle B, Monsieur Jean-Marie C et Monsieur Christian H la somme globale de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

- REJETTE les demandes plus amples ou contraires ;

- CONDAMNE le Syndicat Mixte de l’Espace de Restitution de la Grotte Chauvet aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile ;

- ORDONNE l’exécution provisoire.

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