Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 1re section, 7 mai 2015, n° 14/02407

  • Dénomination sociale et enseigne le comptoir de mathilde·
  • Inscription en blanc sur un bandeau noir·
  • Nom de domaine lecomptoirdemathilde.com·
  • Partie verbale en écriture manuscrite·
  • Similarité des produits ou services·
  • Mosaïque de carreaux multicolores·
  • Activité identique ou similaire·
  • Action en nullité du titre·
  • Différence intellectuelle·
  • Situation de concurrence

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

termes CHOCO VEGAS écrits en gros caractères et lettres pleines majuscules de couleur blanche sur un fond vert

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 1re sect., 7 mai 2015, n° 14/02407
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 14/02407
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : À la table de Mathilde ; A la table de Mathilde ; CHOCO VEGAS LE COMPTOIR DE MATHILDE ; Le Comptoir de Mathilde
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 3546638 ; 7578263 ; 4031985 ; 3680445 ; 11733821
Classification internationale des marques : CL03 ; CL21 ; CL24 ; CL29 ; CL30 ; CL31 ; CL32 ; CL33
Référence INPI : M20150241
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Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS JUGEMENT rendu le 07 Mai 2015

3e chambre 1re section N° RG : 14/02407

DEMANDERESSE SAS SL AGRO […] 78670 VILLENNES-SUR-SEINE représentée par Maître Cédric HERBIN de l’AARPI H&P AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C2621

DEFENDERESSE S.A.R.L. LE COMPTOIR DE MATHILDE Zone Artisanale ou Zone d’activité le Grand Devès 26790 TULETTE représentée par Maître Alain CUKIERMAN de la SELARL HERTZOG- ZIBI & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #L0262 et plaidant par Me Nicolas N -SELARL JURIPOLE, avocat au barreau de MONTPELLIER

COMPOSITION DU TRIBUNAL Marie-Christine C, Vice-Présidente Camille LIGNIERES. Vice-Présidente Julien RICHAUD, Juge assistés de Léoncia BELLON, Greffier,

DEBATS A l’audience du 09 Mars 2015 tenue publiquement

JUGEMENT Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe Contradictoirement en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE : La société SL AGRO, créée le 11 décembre 2007. se présente comme une société proposant ù ses clients des produits d’épicerie fine fabriqués par 28 PME françaises qu’elle commercialise principalement dans la grande distribution mais aussi dans des épiceries fines, sous la marque « A LA TABLE DE MATHILDE ».

Elle indique être titulaire des marques suivantes :

- la marque semi-figurative française « A LA TABLE DE MATHILDE » n° 3546638, déposée le 28 décembre 2007 en classes 29. 30 et 31 ;

— la marque semi-figurative communautaire « A LA TABLE DE MATHILDE» n° 7578263, déposée le 3 février 2009 en classes 29. 30 et 31.

Marques semi-figuratives française n° 3546638 et communautaire n° 7578263 Elle dit disposer d’une visibilité nationale importante, ayant notamment reçu le Trophée 2013 de l’Innovation « 100% Made in France » par la revue LSA, spécialisée dans la distribution et la grande consommation.

La société LE COMPTOIR DE MATI IILDE, qui lors de sa création le 27 août 2007 avait pour dénomination sociale «CDM», puis «SAVOUR-CDM par décision du 30 septembre 2008, puis « Le Comptoir de Mathilde» depuis le 31 mars 2012, a pour nom commercial « SAVOUR » et commercialise en ligne et dans 5 épiceries du sud-est de la France (Lyon. Nyons. Tulette. Annecy et Avignon) des produits de chocolaterie et, plus récemment, des produits d’épicerie fine. La société LE COMPTOIR DE MATHILDE est titulaire de la marque semi-figurative française « CHOCO V LE COMPTOIR DE MATHILDE » n° 4031985, déposée le 12 septembre 2013 en classes 21. 29 et 30.

Marque semi-figurative française n° 4031985

La société LE COMPTOIR DE MATHILDE qui dit bénéficier d’une notoriété tant à l’égard du grand public que des professionnels du

secteur, être citée dans la presse, concevoir, fabriquer et distribuer ses produits, précise que l’utilisation du prénom « Mathilde » dans ses dénomination sociale et marque a une motivation sentimentale, ce prénom étant celui de la grand-mère maternelle de son dirigeant. Monsieur Richard E, créateur de l’enseigne « Le Comptoir de Mathilde ».

Elle indique être titulaire des marques suivantes :

-la marque semi-figurative française «A LA TABLE DE MATHILDE» n° 3546638, déposée le 28 décembre 2007 en classes 29. 30 et 31 ;

-la marque semi-figurative communautaire « A LA TABLE DE MATHILDE» n° 7578263 déposée le 3 février 2009 en classes 29. 30 et 31.

Marque verbale française n° 3680445

La société SL AGRO expose qu’exerçant initialement sur des marchés distincts, la société LE COMPTOIR DE MATHILDE et elle-même ont cohabité jusqu’à ce que la société LE COMPTOIR DE MATHILDE commercialise des produits d’épicerie fine identiques ou similaires à ceux qu’elle commercialise et non plus seulement des produits de chocolaterie, le territoire de commercialisation, initialement régional, de la société LE COMPTOIR DE MATHILDE étant en outre devenu national, voire international, tant par la commercialisation via son site internet que par la commercialisation dans des salons, marchés et foires, et sur d’autres sites internet tels que ceux de La Grande Epicerie de-Paris ou Alice Délice.

Reprochant à la société LE COMPTOIR DE MATHILDE des pratiques commerciales qu’elle estime agressives et susceptibles de constituer des actes de concurrence déloyale et de dénigrement, notamment sa campagne de communication «MEFIEZ- VOUS DES CONTREFAÇONS -EXIGEZ LA MARQUE LE COMPTOIR DE MATHILDE». la société SL AGRO l’a mise en demeure de cesser ces agissements par courrier du 4 octobre 2013, auquel la société LE COMPTOIR DE MATHILDE a répondu le 14 octobre 2013 par l’intermédiaire de son conseil. C’est dans ces circonstances que, par exploit d’huissier du 7 février 2014, la société SL AGRO a assigné la société LE COMPTOIR DE MATHILDE devant le tribunal de grande instance de Paris en concurrence déloyale et contrefaçon de marques. Par dernières conclusions signifiées par voie électronique le 31 décembre 2014, la société SL AGRO demande au tribunal, au visa des articles L. 711-4, L. 713-2, L. 713-3, L. 717-1 et L. 717-4 du

code de la propriété intellectuelle, de l’article R. 211-7 du code de l’organisation judiciaire et de l’article 1382 du code civil, de :

- Déclarer la société SL Agro bien fondée en ses demandes, fins et prétentions et y faisant droit : D’une part, de :

- Débouter le Comptoir de Mathilde de l’ensemble de ses demandes ;

- Constater que la société Le Comptoir de Mathilde a commis des actes constitutifs de concurrence déloyale, par dénigrement ;

- Ordonner à la société Le Comptoir de Mathilde de cesser toute utilisation du slogan «MEFIEZ-VOUS DES CONTREFAÇONS – EXIGEZ LA MARQUE LE COMPTOIR DE MATHILDE » sous astreinte de 2.000 € par infraction constatée dans les huit (8) jours de la signification du jugement à intervenir ;

- Condamner la société Le Comptoir de Mathilde à payer à SL Agro la somme de 5.000 € au titre du préjudice d’image d’ores et déjà causé par les actes de concurrence déloyale ;

- Condamner la société Le Comptoir de Mathilde à publier le jugement dans son intégralité, à ses frais, en première page de son site internet, accessible par l’URL www.comptoirdemamilde.com, dans les 48 heures de la signification du jugement et ce jusqu’à l’arrêt de l’exploitation du site internet.

- Condamner la société Le Comptoir de Mathilde à publier le dispositif du jugement à intervenir sera publié dans les journaux « LSA », « Le Monde de l’Epicerie Fine » et « Elle à Table » en caractère très apparent de couleur noir sur fond blanc aux frais de la société Le Comptoir de Mathilde et à concurrence de 10.000 € par publication.

- Dire et juger que, à défaut pour la société SL AGRO de justifier de ces publications dans un délai de 15 jours suivant la signification du jugement à intervenir, lesdites publications pourront être réalisées à la demande de la société SL Agro aux frais avancés de la société Le Comptoir de Mathilde. D’autre part, de :

- Constater que la marque nationale « Le comptoir de Mathilde », la marque communautaire « Le comptoir de Mathilde » la marque « Choco Vegas Le Comptoir de Mathilde », la dénomination sociale « Le comptoir de Mathilde », l’enseigne « Le comptoir de Mathilde » et le nom de domaine lecomptoirdemathilde. corn des imitations de la marque semi-figurative nationale 3546638 « A la table de Mathilde » et de la marque semi-figurative communautaire 7578263 « A la table de Mathilde » ;
- Dire et juger que par ses agissements, la société Le Comptoir de Mathilde a commis des actes de contrefaçon des marques précitées ;

- Condamner la société Le Comptoir de Mathilde à payer à SL Agro la somme de 5.000 € de dommages et intérêts du fait du préjudice causé par les actes de contrefaçon ;

- Ordonner à la société Le Comptoir de Mathilde de cesser toute exploitation du nom de domaine « lecomptoirdemathilde.com », de la marque « Le Comptoir de Mathilde » et de l’enseigne « Le comptoir

de Mathilde » et ce sous astreinte de 2.000 € par infraction constatée dans les trente (30) jours de la signification du jugement à intervenir ; En tout état de cause :

- Condamner la société Le Comptoir de Mathilde à payer à SL Agro la somme de 15.000 euros au titre de l’Article 700 du Code de Procédure Civile ;

- Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir, nonobstant toute voie de recours, et ce sans constitution de garanties ;

- Condamner la société Le Comptoir de Mathilde aux entiers dépens. Par dernières conclusions signifiées par voie électronique le 12 février 2015, la société LE COMPTOIR DE MATHILDE demande au tribunal, au visa des articles L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle et 1382 du code civil, de :

- Dire et juger, pour les causes sus-énoncées que l’utilisation des termes « Le Comptoir de Mathilde » ne constitue nullement une contrefaçon des termes « à la table de Mathilde » ; Quoi faisant,
- Débouter, pour les causes sus-énoncées, la société SL AGRO de l’intégralité de ses demandes ;

- Condamner, pour les causes sus-énoncées, la société SL AGRO à payer, à la société « Le Comptoir de Mathilde », la somme de 10 000 Euros au titre du préjudice subi pour procédure abusive ;

- Dire et juger que le dispositif du jugement à intervenir sera publié dans le Journal LSA en caractère très apparent de couleur noir sur fond blanc et ce pour un montant de 10 000 Euros ;

- Dire et juger que, à défaut pour la société SL AGRO de justifier de cette publication dans un délai de 15 jours suivant la signification du jugement à intervenir, ladite publication pourra être réalisée à la demande de la société « Le Comptoir de Mathilde » aux frais avancés de la société SL AGRO ;

- Condamner la société SL AGRO à payer à la société « Le Comptoir de Mathilde », la somme de 8000 Euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance ;

- Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir. L’ordonnance de clôture a été prononcée le 3 mars 2015. MOTIFS Sur la concurrence déloyale La demanderesse fait valoir que la société LE COMPTOIR DE MATHILDE a utilisé une publicité très agressive et dénigrante à son égard par l’utilisation du slogan « MEFIEZ-VOUS DES CONTREFAÇONS – EXIGEZ LA MARQUE LE COMPTOIR DE MATHILDE » lors du salon Gourmet Food qui s’est tenu à Paris en septembre 2013, lors du marché de Noël qui s’est déroulé du 22 novembre au 24 décembre 2013 à Lyon, dans le

numéro «septembre/octobre 2013 » de la revue « Le Monde de l’Epicerie Fine», et sur le site internet www.lecomptoirdemathilde.com. Ces actes seraient selon la demanderesse constitutifs de concurrence déloyale par dénigrement : sur le marché concerné, à savoir l’épicerie fine, la seule marque proche qui dispose d’une visibilité importante est « A la table de Mathilde ». Il est donc évident que la société visée est bien SL AGRO ; la publicité de la société LE COMPTOIR DE MATHILDE est manifestement dénigrante à l’égard de SL AGRO, laissant penser aux consommateurs et aux professionnels du marché de l’épicerie fine que SL Agro est une société qui pratique des actes de contrefaçon, ce qui est faux. La société LE COMPTOIR DE MATHILDE réplique que : -elle n’a pas commis de faute au sens de l’article 1382 du code civil constitutive de concurrence déloyale,
-il n’a jamais été dans son intention de viser, de quelque manière que ce soit, dans le cadre de cette campagne la société SL AGRO, ni la marque « à la table de Mathilde »,
-la publicité litigieuse ne fait aucune référence à la société SL AGRO, à la marque « à la table de Mathilde », ni à quelque produit que ce soit commercialisé par la société SL AGRO qui n’a donc pas à se sentir concernée,
-elle a développé cette campagne de publicité aux fins de contrecarrer la commercialisation, par certains de ses concurrents, de produits dont elle est à l’origine tels que le chocolat à casser, le « Hot Chocolaté » ou des pâtes à tartiner aromatisées. Sur ce ; Vu l’article 1382 du code civil, La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu’un signe qui ne fait pas l’objet de droits de propriété intellectuelle, puisse être librement reproduit, sous certaines conditions tenant à l’absence de faute par la création d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit, circonstance attentatoire à l’exercice paisible et loyal du commerce. L’appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d’une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l’imitation, l’ancienneté d’usage, l’originalité, la notoriété de la prestation copiée. En l’espèce, les deux sociétés parties au litige pour être des acteurs du marché français de l’épicerie fine sont en situation de concurrence. S’il est établi que la société LE COMPTOIR DE MATHILDE a utilisé le slogan « MEFIEZ-VOUS DES CONTREFAÇONS – EXIGEZ LA

MARQUE LE COMPTOIR DE MATHILDE », néanmoins, d’une part, ce slogan est trop général pour caractériser un dénigrement ; d’autre part, ce slogan ne peut être qualifié de dénigrement à l’égard de la société SL AGRO en ce qu’il ne vise pas expressément cette dernière.

En effet, il existe d’autres intervenants que la société SL AGRO sur le marché français de l’épicerie fine, et il sera développé plus bas qu’il ne peut y avoir confusion entre les sociétés concurrentes parties au litige du fait de leurs marques respectives qui sont très différentes de par leurs éléments figuratifs distinctifs. La société SL AGRO sera donc déboutée de ses demandes en concurrence déloyale pour dénigrement. Sur la contrefaçon par imitation des marques « A la table de Mathilde » n° 3546638 et n° 7578263
- par le dépôt des marques semi-figuratives française et communautaire « Le comptoir de Mathilde »n° 093680445 et 011733821, la marque semi-figurative française « Choco V le comptoir de Mathilde » n° 40331985 et par leur utilisation constituant une contrefaçon par imitation au sens de l’article L.713-3 du code de la propriété intellectuelle. Selon la demanderesse, il existe un risque de confusion en ce qu’un consommateur « normalement informé et raisonnablement attentif et avisé » peut légitimement penser qu’un même produit d’épicerie fine portant la marque « A la table de Mathilde » ou « Le Comptoir de Mathilde » provient de la même entreprise ou, à défaut, d’entreprises liées économiquement. La société SL AGRO ajoute que, s’agissant de la similarité des produits, outre une identité totale d’une partie importante de la gamme de produits commercialisés par la société LE COMPTOIR DE MATHILDE et ceux commercialisés par la société SL AGRO, cette similitude est renforcée par un choix de termes parfaitement identiques pour désigner ceux-ci. La société SL AGRO fait valoir sur la similitude des signes, qu’il existe :

-une similitude visuelle des signes qui présentent la même structure et la même composition ; l’élément figuratif est en l’espèce négligeable compte-tenu du caractère dominant de l’élément verbal, seul utilisé pour évoquer la marque ;

-une similitude conceptuelle entre les signes, la jurisprudence admettant l’existence d’une telle similitude lorsque deux signes présentent une analogie telle qu’ils suggèrent la même image dans l’esprit du consommateur, ou par le recours à un synonyme. Les mots « table » et « comptoir » ont une signification identique ;

— et que l’élément dominant qui va retenir l’attention du consommateur est le prénom « Mathilde » qui domine l’ensemble du signe, notamment le vocable « Table » et les éléments figuratifs. Selon la société SL AGRO, la marque française « Le comptoir de Mathilde », la marque communautaire « Le comptoir de Mathilde » la marque « Choco Vegas Le Comptoir de Mathilde », la dénomination sociale « Le comptoir de Mathilde », l’enseigne « Le comptoir de Mathilde » et le nom de domaine lecomptoirdemathilde.com des imitations de la marque semi-figurative française n° 3546638 « A la table de Mathilde » et de la marque semi-figurative communautaire 11*7578263 « A la table de Mathilde ». La société LE COMPTOIR DE MATHILDE réplique que sur le plan visuel, il n’existe aucune similarité entre les signes «à la table de Mathilde » et « Le Comptoir de Mathilde » susceptible de caractériser un risque de contusion :

- elle n’a nullement utilisé, dans un même ensemble visuel, un système de mosaïque, une division deux tiers un tiers, des couleurs similaires ou la même typographie que ceux utilisés par la société SL AGRO dans les marques invoquées ;

- dans les marques « à la table de Mathilde ». le terme de « Mathilde » n’étant pas positionné de façon prééminente dans les marques invoquées, il n’est ni l’accroche ni un élément prédominent de ces marques. Il n’est donc pas détaché des autres termes. Il figure au contraire dans leur continuité et ne fait pas l’objet d’une typographie spécifique ni d’une taille de caractère distincte ;

- en revanche, dans la marque « Le Comptoir de Mathilde ». le terme « Mathilde » est expressément mis en exergue notamment par une taille plus importante que le reste des termes, et par un passage à la ligne entre les termes « Le Comptoir de » et le terme « Mathilde ».

La société LE COMPTOIR DE MATHILDE soutient que sur le plan phonétique, l’accroche est différente : « à la table de …. » et « Le Comptoir de … » et que la seule similitude sonore est en conséquence constituée du terme « Mathilde » qui n’est pas prédominant dans l’un ou l’autre des signes litigieux puisqu’il est systématiquement placé en fin d’expression, qu’en outre, un prénom ne saurait constituer, en l’absence de tout autre élément de comparaison complémentaire, une cause de similarité de nature à entraîner un risque de confusion. La société LE COMPTOIR DE MATHILDE ajoute que sur le plan intellectuel, un comptoir et une table sont des objets différents tant par leur constitution que leur destination, et qu’il n’existe donc aucun risque de confusion dans l’esprit du public. Sur ce ; Concernant les demandes fondées sur le dépôt frauduleux au sens de l’article L 711-4 du code de propriété intellectuelle pour les marques « Le Comptoir de Mathilde » n° 093680445 et 011733821 et leur usage

contrefaisant, la société SL AGRO n’est pas recevable dans ses demandes à défaut d’avoir mis en la cause les titulaires de ces marques soit M. Richard F et la société RF INVEST. (pièces 5 et 6 en demande)

Concernant les demandes fondées sur la contrefaçon par imitation par l’utilisation de la marque semi-figurative française « Choco V le comptoir de Mathilde » n° 40331985, la seule dont la société 1.1- COMPTOIR DE MATHILDE est titulaire : L’article L 713-3 du même code dispose que "sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s’il peut en résulter un risque de confusion dans l’esprit du public : a) la reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l’enregistrement", b) l’imitation d’une marque et l’usage d’une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement. Le risque de confusion doit faire l’objet d’une appréciation abstraite par référence au dépôt d’une part en considération d’un public pertinent correspondant au consommateur des produits et services concernés normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, et d’autre part par comparaison entre le signe litigieux utilisé et la marque protégée par référence à son enregistrement indépendamment de ses conditions d’exploitation mais également par comparaison des services et produits visés dans l’enregistrement et des produits et services commercialisés sous le signe litigieux. Le risque de confusion est en outre analysé globalement : tous les facteurs pertinents, dont la notoriété de la marque et l’importance de sa distinctivité, doivent être pris en considération, l’appréciation globale de la similitude de la marque et du signe litigieux devant être fondée sur l’impression d’ensemble qu’ils produisent au regard de leurs éléments distinctifs et dominants. En l’espèce, si le demandeur a procédé à une analyse de la similarité des signes en comparaison, il s’est abstenu d’effectuer le long et laborieux travail de comparaison entre chacun des services et produits visés dans l’enregistrement de ses marques et les produits et services commercialisés par la société LE COMPTOIR DE MATHILDE. Or, la marque de la société SL AGRO a été enregistrée pour une très large liste de produits alimentaires en classes 29 et 30. La seule comparaison des produits faite par le demandeur porte sur les produits suivants : « tapenade verte », « délice de tomate séchée au basilic » , « caviar d’aubergine », « tapenade noire ». Le tribunal ne retiendra donc que ces seuls produits pour examiner la similarité des produits opposés par la société SL AGRO. Quant aux produits enregistrés en classe 31 pour la marque première, s’agissant de produits agricoles qui ne sont pas exploités par la société LE COMPTOIR DE MATHILDE, ils ne peuvent lui être opposés.

-la similarité des produits : Il est valablement opposé par la société SL AGRO les produits suivants : « tapenade verte », « délice de tomates séchées », « caviar d’aubergine », « tapenade noire » entrant la catégorie des fruits et légumes conservés, séchés et cuits de la classe 29 et ces produits sont en effet similaires à ceux vendus par la société LE COMPTOIR DE MATHILDE. -la similarité des signes : Le signe opposé par la société SL AGRO et enregistré par cette dernière sous les marques n° 3546638 et n° 7578263 se présente comme une mosaïque de carreaux multicolores sur les deux tiers du haut et le terme verbal est inscrit en blanc avec une police imitant l’écriture manuscrite dans le dernier tiers du bas sur un bandeau noir en fond et souligné d’un trait blanc, (pièces 1 et 2 en demande) Le signe critiqué se compose des termes verbaux CHOCO V écrits en gros caractères et lettres pleines majuscules de couleur blanche sur un fond vert et à l’intérieur des deux lettres O de choco sont dessinés des cœurs, piques, carreaux et trèfles entourant les termes verbaux « le comptoir de Mathilde » (pièce 4 en demande). Sur un plan visuel, seuls les termes verbaux «Mathilde » sont communs aux deux signes, cependant, ce terme est écrit de façon très discrète dans le signe second alors qu’il est beaucoup plus lisible dans le signe premier. Ce prénom est en outre accolé à des termes mis en attaque qui différent selon les signes comparés, soit « à la table de » pour le signe premier et « au comptoir de » pour le signe second. Sur le plan intellectuel, le signe second sera lu « CHOCO V » qui sont les termes les plus apparents, alors que le signe premier sera lu « A la table de Mathilde » seul terme verbal. Sur le plan conceptuel, le signe premier évoque le décor d’une cuisine traditionnelle dont le propriétaire serait une personne se prénommant Mathilde, alors que dans le signe second, il est évoqué des produits chocolatiers américains avec un aspect ludique mis en exergue par les signes de cartes à jouer. Ces signes sont avant tout figuratifs, c’est en effet l’élément figuratif qui leur confère leur distinctivité, or, il a été démontré que les éléments figuratifs de chacun des signes comparés sont très différents. -le consommateur visé : Le consommateur de produits d’épicerie fine a une attention particulière s’agissant de produits qui ne sont pas de consommation courante.

En l’espèce, du fait des nombreuses différences exposées dans la comparaison des signes en en présence, le consommateur pertinent qui est d’une attention particulière ne sera pas amené à établir de confusion. Concernant la contrefaçon par imitation par l’usage de la dénomination sociale « Le comptoir de Mathilde », l’enseigne « Le comptoir de Mathilde » et le nom de domaine lecomptoirdemathilde.com, société SL AGRO ne démontre nullement en quoi leur utilisation serait constitutive d’actes de contrefaçon, se contentant de limiter son argumentation sur la contrefaçon à l’usage des signes enregistrés comme marques par la société LE COMPTOIR DE MATHILDE. La société SL AGRO sera donc déboutée de ses demandes en contrefaçon de ses marques « A la table de Mathilde » n° 3546638 et n° 7578263 à l’égard de la société LE COMPTOIR DE MATHILDE par l’usage de la marque « Choco Vegas le comptoir de Mathilde » n° 40331985, la dénomination sociale « Le comptoir de Mathilde », l’enseigne « Le comptoir de Mathilde » et le nom de domaine lecomptoirdemathilde.com. Sur la demande reconventionnelle pour procédure abusive En application de l’article 1382 du code civil, tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

L’exercice d’une action en justice constitue par principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d’erreur équipollente au dol. La société SL AGRO a manifesté une légèreté blâmable en présentant une demande en contrefaçon de marques sans mettre en la cause les titulaires de deux des trois marques attaquées, et en se dispensant de procéder à une analyse comparative pour chacun des produits opposés et en n’argumentant pas sa demande en contrefaçon par l’usage de la dénomination sociale, l’enseigne et le nom de domaine. Pour autant, la société LE COMPTOIR DE MATHILDE ne justifie d’aucun préjudice distinct de celui causé par la nécessité de se défendre en justice et qui est intégralement réparé par l’allocation d’une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile. En conséquence, sa demande en paiement de dommages et intérêts au titre de la procédure abusive sera rejetée. Sur les frais et l’exécution provisoire

La société SL AGRO, partie qui succombe, sera condamnée à payer les entiers dépens.

L’équité, commande de condamner la société SL AGRO à participer aux frais irrépétibles engagés par la société LE COMPTOIR DE MATHILDE dans le présent litige à hauteur de 4000 euros à la défenderesse.

L’espèce justifie que soit ordonnée l’exécution provisoire sur l’entier jugement.

PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, par jugement contradictoire rendu en premier ressort et rendu par remise au greffe au jour du délibéré,

Déboute la société SL AGRO de ses demandes envers la société LE COMPTOIR DE MATHILDE fondées sur la concurrence déloyale,

Dit la société SL AGRO irrecevable dans ses demandes en contrefaçon de ses marques « A la table de Mathilde » n° 3546638 et n° 7578263 envers la société LE COMPTOIR DE MATHILDE par l’usage des marques « Le Comptoir de Mathilde » n° 093680445 et 011733821,

Déboute la société SL AGRO dans ses demandes en contrefaçon de ses marques « A la table de Mathilde » n° 3546638 et n° 7578263 envers la société LE COMPTOIR DE MATHILDE par l’usage de la marque « Choco Vegas le comptoir de Mathilde » n° 40331985, la dénomination sociale « Le comptoir de Mathilde », l’enseigne « Le comptoirdeMathilde» et le nom de domaine lecomptoirdemathilde.com, Dit abusive la procédure engagée par la société SL AGRO mais déboute la société LE COMPTOIR DE MATHILDE de sa demande en dommages et intérêts sur ce fondement,

Condamne la société SL AGRO à payer la somme de 4000 euros à la société LE COMPTOIR DE MATHILDE au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision,

Condamne la société SL AGRO aux entiers dépens.

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