Tribunal de grande instance de Toulon, 30 avril 2013, n° 13/00150

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Toulon, 30 avr. 2013, n° 13/00150
Juridiction : Tribunal de grande instance de Toulon
Numéro(s) : 13/00150

Sur les parties

Texte intégral

1

Minute n° 13/00494

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TOULON

ORDONNANCE DE REFERE

[…]

EXTRAIT des Minutes du Greffe du

Tribunal de Grande Instance

Date: TRENTE AVRIL DEUX MIL TREIZE de l’Arrondissement de

TOULON

- DEPARTEMENT DU VAR – Magistrat : François RACHOU, Président

Greffier Valérie DAGUENET, Greffière :

Débats en audience publique le : 02 Avril 2013

: 30 Avril 2013 Ordonnance rendue le

Noms des parties :

DEMANDERESSE
Madame C B, demeurant […]

DU PERRAY (92),

Représentée par Me Jacques GOBERT, avocat au barreau de MARSEILLE

contre

DEFENDEURS
Monsieur Y X, demeurant […]

Représenté par Me Véronique ESTEVE, avocat au barreau de NICE

S.A. I J K, prise en la personne de son liquidateur M° D Z, mandataire judiciaire – […]

Maître D Z, Mandataire judiciaire, demeurant […]

Non comparants ni représentés

Compagnie d’assurances ALLIANZ IARD, dont le siège social est sis […], prise en la personne de son représentant légal en exercice

Représentée par Me Emmanuèle LUTFALLA, avocat au barreau de PARIS

CPAM DE L’ESSONNE, dont le siège social est sis […], prise en GHUSCE a personne de son représentant légal en exercice

a: 17 MAI 2013 comparante ni représentée

[…]



Par acte d’Huissier des 21, 28 et 31 janvier 2013, Madame C B a fait assigner le Docteur Y X, la S.A. I J K, Maître D Z, ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société P.I.P., la compagnie d’assurances ALLIANZ ÍARD et la CPAM de l’Essonne aux fins de :

- condamner solidairement le docteur Y X, la société P.I.P. et son assureur ALLIANZ IARD à lui verser une somme provisionnelle de 10.000 € à valoir sur son indemnisation définitive au titre de son préjudice moral, corporel, esthétique et son préjudice financier.

- ordonner une expertise.

- condamner solidairement le le docteur Y X, la société P.I.P. et son assureur ALLIANZ IARD au paiement d ela somme de 3.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives et en réplique n°2, Madame C B maintient ses demandes.

Par conclusions en réponse Monsieur Y X ne s’oppose pas, sous les plus expresses protestations et réserves, à la mesure d’expertise sollicitée tout en sollicitant la désignation d’un expert en chirurgie plastique hors la ville de paris et un complément de mission. Il conclut, par ailleurs au rejet de la provision.

Par conclusion, la S.A. ALLIANZ IARD soulève l’existence de contestations sérieuses quant à la demande de provision et ne s’oppose pas à l’expertise sous toutes réserves de garanties et de responsabilité.

La S.A. P.I.P., Maître D Z es qualité de liquidateur judiciaire et la

CPAM de l’Essonne régulièrement assignés, ne sont ni présents ni représentés ; la présente décision sera réputée contradictoire.

Madame C B a subi une intervention chirurgicale esthétique en vue de l’implantation de prothèses mammaires et dune liposuccion.

Elle a été opérée par le Docteur Y X à la clinique Villa Isis à Paris (75013) le 07 novembre 2003.

En juillet 2008, à la suite d’une échographie, son médecin traitant lui indiquait que sa K droite était rompue et que du silicone s’était répandu dans son corps.

En avril 2009, le Docteur Y X prescrivait des examens, notamment une mammographie de dépistage et une TDM ammaire ou IRM.

En juin 2009, il était relevé la présence de « siliconomes droits ».

Madame C B sollicitait un rendez-vous. Par mail du 09 septembre 2009, le Docteur X lui répondait qu’il y aurait reprise chirurgicale et « qu’il n’y a pas d’urgence dans la mesure où il s’agit de gel cohésif qui ne migre pas ».


3

Par mail du 09 juillet 2010, le Docteur Y X indiquait à Mme C B qu’ils 'agissait d’implants P.I.P. et lui proposait un rendez-vous.

Par mail du 29 août 2010, le Docteur Y X précisait à Mme C B, qui sollicitait un rendez-vous, qu’il n’y avait pas de raison de s’inquiéter.

Selon courrier du 24 novembre 2010, la CPAM d’Ile de France émettait un avis favorable pour la prise en charge d’une nouvelle intervention du Docteur Y

X sur Madame C B;

Madame C B était opérée par le Docteur E F le 26 avril 2011 à la maison de chirurgie TURIN à PARIS (75008). Il était constaté la rupture « de l’J avec fuite de silicone ».

Selon certificats médicaux des 16 mai 2012, 17 juillet 2012, Madame C B souffre toujours notamment au niveau de la cicatrice.

SUR CE,

sur la demande d’expertise:

Compte tenu du différend opposant les parties, Madame C B est fondée à solliciter une mesure d’instruction la concernant.

Les défendeurs ne s’y opposent pas tout en formulant protestations et réserves.

Il y a lieu d’y faire droit, selon les modalités arrêtées dans le présent dispositif.

sur la demande de provision:

Aux termes de l’article 809 du code de procédures civile, le Juge des référés peut accorder une provision lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable.

• A l’encontre du Docteur Y X:

A l’appui de sa demande, Madame C B fait valoir que le Docteur Y X a failli, au moment de l’établissement du devis à son obligation d’information et de conseil et qu’il en a été de même dans le suivi post opératoire. Il lui apparient d’en rapporter la preuve.

Il y a lieu de rappeler qu’en application des disposition de l’article L 1111-2 du code de la santé publique, tout professionnel de santé est débiteur d’une obligation d’information « dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles, le professionnel devant rapporter la preuve de la délivrance de l’information à l’intéressé. Par ailleurs, il est de jurisprudence constante que la violation de ce droit personnel du patient à être informé peut généré un préjudice moral. »

Enfin, il est constant qu’en matière de chirurgie esthétique, cette obligation d’information est renforcée. Selon les dispositions de l’article L6322-2 du code de la santé publique, l’obligation d’information doit être accompagnée de la remise d’un devis détaillé.



De plus, selon une jurisprudence constante, l’obligation doit porter non seulement sur les risques graves de l’intervention mais également sur tous les inconvénients pouvant en résulter sachant qu’en matière de prothèses mammaires, il a été jugé que le praticien avait une obligation d’information spécifique sur les caractéristiques et les inconvénients et avantages du type de K mammaire proposé et sur les autres types de prothèses existantes avec leurs avantages et inconvénients.

En l’espèce, il convient de relever au vu des pièces versées que le docteur Y X ne rapporte pas la preuve qu’il a rempli son obligation d’information.

En effet, il fournit un devis en date du 17 octobre 2003. Toutefois, ce devis qui ne porte aucune indication sur le matériel implanté est non signé par Madame C B, celle-ci contestant l’avoir reçu avant l’opération.

De plus, il est rappelé de façon justifiée par la demanderesse que le 22 décembre 2000, le directeur de l’AFSSÁPS avait pris la décision individuelle de suspendre la mise sur le marché et l’utilisation des prothèses mammaires internes pré-remplies de gel de silicone, celle-ci étant publiée au J.O. du 16 janvier 2001. Il est vrai que cette mesure de suspension a été levée le 18 avril 2001, la société P.I.P. ayant fourni des réponses jugées satisfaisantes par les autorités sanitaire Pour autant, le docteur Y X qui ne pouvait ignorer la mesure de suspension mise en décembre 2000, celle-ci succédant à des mesures précédemment prise en

1995 et 1996 sur l’ensemble des prothèses mammaires pré-remplies de gel ou de sérum physiologique se devait, au titre de son obligation d’information, de la porter à la connaissance de Mme C B, celle-ci devant prendre sa décision de façon éclairée.

Il appartenait au docteur Y X d’informer Madame C B de façon complète et ce d’autant que s’agissant d’une opération à des fins purement esthétiques, le matériel P.I.P. utilisé avait fait l’objet, dans les années précédant l’opération, de plusieurs décisions relatives aux risques encourus du fait de son utilisation.

En conséquence et sans qu’il soit nécessaire de se prononcer les manquements reprochés quant au suivi post-opératoire assuré par le docteur Y X, la responsabilité de ce dernier est engagée.

. A l’encontre de la S.A. I J K, de Maître D Z es qualité et de la société ALLIANZ :

Concernant la demande dirigée à l’encontre de la S.A. P.I.P., Madame C B ne justifie pas d’une déclaration de créance auprès de Maître Z es qualités. Dès lors, sa demande est irrecevable.

S’agissant de la société ALLIANZ, assureur responsabilité civile de la S.A. P.I.P., celle-ci fait valoir pour s’opposer à la demande le comportement dolosif de la SA PIP. Le gérant de cette dernière ne contestant pas avoir volontairement mis sur le marché des prothèses non-conformes et la procédure en cours visant à la nullité des contrats souscrits.

Madame C B fait valoir que la société ALLIANZ ne démontre pas que la SA I J PROTHESES aurait vicié son consentement au moment de la formation du contrat et que Monsieur A, gérant de la SA P.I.P. n’avait pas la volonté et la conscience de provoquer le dommage. Elle ajoute que les clauses d’exclusion opposées par la défenderesse sont sans effet.


5

Il suffit de rappeler que le Juge du fond est actuellement saisi de la nullité des polices d’assurance souscrites par la SA I J PROTHESES du fait des tromperies et du comportement dolosif de cette dernière. Ces faits volontaires qui ont donné lieu à l’ouverture de plusieurs procédures pénales, sont de nature à exclure la garantie contractuelle.

La société ALLIANZ soulève dés lors, de façon fondée, une contestation sérieuse, seul le Juge du fond étant compétent pour qualifier le comportement de la SA I J PROTHESES, au regard des clauses d’exclusions stipulées, et d’en tirer les conséquences sur la validité du contrat dont s’agit.

En conséquence, la demande de Madame C B à l’encontre de la S.A. ALLIANZ se heurte à une contestation sérieuse.

Au vu de ces éléments, il y a lieu de condamner le Docteur Y X

à payer à Madame C B, à titre de provision à valoir sur son préjudice moral, les autres préjudices allégués relevant d’une appréciation du juge du fond, à la somme de 5.000 €.

Il apparaît inéquitable de laisser tout ou partie des frais irrépétibles à la charge de Madame C B; il convient de lui allouer la somme de 900 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Nous, François RACHOU, statuant publiquement, en référé, par ordonnance Réputée contradictoire, en premier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,

RECEVONS la demande régulière en la forme.

Au principal, RENVOYONS les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront, mais dès à présent, vu l’urgence,

ORDONNONS une expertise médicale sur la personne de Madame C B.

DESIGNONS en qualité d’expert Monsieur G H, demeurant

Service de chirurgie plastique […]

- […], avec la mission suivante :

- Convoquer les parties et les entendre en leurs explications,

- Procéder à l’examen médical de Mme B,

- Se faire remettre l’entier dossier médical de Mme B,

Réclamer tous dossiers médicaux concernant Mme B, les interventions, soins et traitements pratiqués avant l’intervention de 2003 et d’une manière générale tous dossiers concernant son état de santé,

- De manière plus générale, décrire l’état antérieur de Mme B,

- Traiter, en s’assurant de son caractère contradictoire, l’information sur les produits obtenues de l’AFSSAPS, du liquidateur judiciaire de la société PIP, de tout sachant,

- Procéder de manière contradictoire, à l’examen clinique et décrire les lésions



- Procéder de manière contradictoire, à l’examen clinique et décrire les lésions et séquelles directement imputables à la pose d’implants PIP ;

- Dire si les actes et les soins prodigués à Mme B ont été attentifs, diligents, et conformes aux règles de l’art et aux donnés acquises de la science à l’époque des faits, et dans la négative, analyser de façon détaillée et motivée la nature des erreurs, imprudences, manques de précaution nécessaire, négligences pré, per et post opératoires, maladresses et autres défaillances relevées,

- Donner l’avis sur l’existence ou l’absence de lien de causalité entre le ou les manquements éventuellement relevés et les séquelles de Mme B,

- Préciser si ce lien de causalité présente un caractère direct, exclusif ou si seule une perte de chance peut éventuellement être envisagée, S’il s’agit d’une perte de chance, préciser dans quelle proportion (en pourcentage) celle ci est à l’origine des séquelles de Mme B,

- Préciser s’il s’agit, en l’espèce, de la réalisation d’un aléa thérapeutique, à savoir un risque accidentel inhérent à l’acte médical et qui ne pouvait être maîtrisé,

- Donner un avis, en les qualifiant, sur le DFP, le DFTT, DFTP, souffrances endurées, préjudice d’agrément et de façon générale, sur tous les éléments de préjudice qui découlent de la situation décrite, en ne s’attachant qu’aux éléments de préjudice résultant d’éventuels manquements imputables aux requis et en excluant ceux se rattachant aux suites normales de l’intervention pratiquée ou à son état antérieur,

- Préalablement au dépôt du rapport d’expertise, l’expert devra adresser un pré rapport aux parties, lesquelles, dans les quatre semaines de la réception, lui feront connaître leurs observations auxquelles il devra répondre dans son rapport définitif.

DISONS que l’expert désigné pourra s’adjoindre tout spécialiste de son choix, à charge pour lui d’en informer préalablement, le magistrat chargé du contrôle des expertises et de joindre l’avis du sapiteur à son rapport;

DISONS que si le sapiteur n’a pas pu réaliser ses opérations de manière contradictoire, son avis devra être immédiatement communiqué aux parties par

l’expert.

DISONS que l’expert devra adresser un pré-rapport aux conseils des parties qui, dans les quatre semaines de la réception, lui feront connaître leurs observations auxquelles il devra répondre dans son rapport définitif.

DISONS que l’expert commis, saisi par le GREFFE DU TRIBUNAL DE

GRANDE INSTANCE DE TOULON, devra accomplir sa mission en présence des parties ou elles dûment appelées, les entendre en leurs dires et explications et y répondre et leur impartir un délai de rigueur pour déposer les pièces justificatives qui lui paraîtraient nécessaires, à l’expiration du dit délai, passer outre, poursuivre ses opérations et conclure sur les éléments en sa possession.

DISONS que l’expert devra prendre en considération les observations ou réclamations des parties et, lorsqu’elles seront écrites, les joindra à son avis si les parties le demandent et fera mention de la suite qui leur aura été donnée.


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IMPARTISSONS à l’homme de l’art un délai de 4 mois à compter de sa saisine pour accomplir sa mission et déposer rapport en UN SEUL EXEMPLAIRE au GREFFE DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TOULON ainsi qu’une copie à chaque partie et à chaque conseil.

DISONS que l’expert pourra, en cas de non consolidation de la victime et après le dépôt d’un pré-rapport, solliciter une prorogation de délai pour le dépôt de son rapport définitif ainsi que, le cas échéant, une consignation de provision complémentaire.

DÉSIGNONS le juge chargé du contrôle des expertises du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TOULON pour surveiller les opérations d’expertise.

SUBORDONNONS l’exécution de la présente décision en ce qui concerne l’expertise à la consignation auprès du Régisseur DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TOULON par Madame C B d’une avance de 1000 € (MILLE EUROS) dans le mois de la présente ordonnance (accompagnée de la présente décision).

DISONS qu’à défaut de consignation dans ce délai la désignation de l’expert sera caduque en vertu de l’article 271 du code de procédure civile.

DISONS qu’en cas d’empêchement, retard ou refus de l’expert commis, il sera pourvu à son remplacement par ordonnance rendue sur requête.

RESERVONS les droits de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de

l’Essonne.

L Y X à payer à Madame C B, à titre provisionnel, la somme de 5.000 € (cinq mille euros) à valoir sur son indemnisation au titre de son préjudice moral.

DÉBOUTONS les parties du surplus de leurs demandes.

L le Docteur Y X à payer à Madame C B la somme de 900 € (neuf cents euros) en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

L le Docteur Y X aux dépens.

AINSI JUGE ET PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DES REFERES, LE TRENTE AVRIL DEUX MIL TREIZE.

LE PRESIDENT, LE GREFFIER,

q Pour expédition certifiée conforme TOULON, le….1.0 MAI 2019 Le Greffier en Chef GRANDEE INSTANCE E

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D AR E V

TOU ON

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