Tribunal Judiciaire de Bobigny, 21 janvier 2022, n° 21/01329

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TJ Bobigny, 21 janv. 2022, n° 21/01329
Numéro(s) : 21/01329

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY

-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=- Chambre 1/Section 5 N° du dossier : N° RG 21/01329 – N° Portalis DB3S-W-B7F-VPEU

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU 21 JANVIER 2022 MINUTE N° 22/00273

----------------

Nous, Madame Hélène SAPEDE, Vice-présidente, au Tribunal judiciaire de BOBIGNY, statuant en référés, assistée de Madame Tiaihau TEFAFANO, greffier,

Après avoir entendu les parties à notre audience du 10 décembre 2021 avons mis l’affaire en délibéré et avons rendu ce jour, par mise à disposition au greffe du tribunal en application des dispositions de l’article 450 du Code de procédure civile, la décision dont la teneur suit :

ENTRE :

SEQENS SA D’HLM, dont le siège social est sis 14 / […]

représentée par Me Fabienne BALADINE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0744

ET :

Madame A-B X, demeurant […]

représentée par Maître Stéphane INGOLD de la SELARL RETAIL PLACES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : D 0266

S.A.S. Y Z, dont le siège social est sis […]

représentée par Maître Stéphane INGOLD de la SELARL RETAIL PLACES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : D 0266

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EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 5 septembre 2018, la société d’HLM FRANCE HABITATION, aujourd’hui dénommée la société d’HLM SEQENS a donné à bail à la société Y Z des locaux à usage commercial dépendant d’un immeuble situé […], pour une durée de 9 ans à compter du 1 septembre 2018, moyennant un loyer annuel en principal deer 8.262,24 euros, hors taxes et hors charges. Suivant acte séparé conclu à la même date, Mme A-B X s’est engagée en qualité de caution solidaire des sommes dues en vertu du bail.

Par acte extrajudiciaire du 5 novembre 2020, la société d’HLM SEQENS a fait signifier à la société Y Z un commandement visant la clause résolutoire d’avoir à payer la somme de 6.160,14 euros en principal au titre des loyers et charges impayés. Ce commandement a été dénoncé à Mme X par acte extrajudiciaire du 18 novembre 2020.

Par actes des 22 juillet et 2 août 2021, la société d’HLM SEQENS a fait assigner en référé devant M. le président du tribunal de céans la société Y Z et Mme X aux fins de voir :

- constater l’acquisition de la clause résolutoire et la résiliation du bail,

- ordonner l’expulsion de la société Y Z et de tous occupants de son chef des locaux litigieux, avec l’assistance de la force publique si besoin est,

- condamner solidairement la société Y Z et Mme X à lui payer, à titre provisionnel, la somme de 9.728,31 euros au titre des loyers et charges impayés, avec intérêts au taux légal à compter du 5 novembre 2020,

- condamner solidairement la société Y Z et Mme X au paiement d’une indemnité d’occupation égale au montant du loyer assorti du taux d’intérêt légal majoré de trois points, en sus des taxes et charges,

- condamner solidairement la société Y Z et Mme X à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens en ce compris les frais de commandement.

L’affaire a été appelée à l’audience du 4 octobre 2021 et renvoyée à la demande des parties aux 8 novembre et 10 décembre 2021.

Dans ses dernières conclusions développées oralement à l’audience et auxquelles il est fait expressément référence, la société d’HLM SEQENS a maintenu l’intégralité de ses demandes et, y ajoutant, demande que la société défenderesse soit déboutée de ses demandes en réparation de préjudice et délais de paiement.

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Dans leurs conclusions développées oralement à l’audience et auxquelles il convient de se référer de manière expresse, la société Y Z et Madame X sollicitent du juge des référés qu’il :

* à titre liminaire, dise la société d’HLM SEQUENS irrecevable en ses demandes,

* à titre principal, déboute la société d’HLM SEQENS de ses demandes du fait de contestations sérieuses,

* à titre subsidiaire :

- réduise de façon proportionnelle les loyers des périodes de fermeture administrative de 80%,

- lui accorde des délais de paiement sur 24 mois, sur le fondement de l’article 1343-5 du code civil,

* en tout état de cause :

- condamne la société d’HLM SEQENS à lui payer la somme de 5.000 euros en indemnisation de son préjudice,

- condamne la société d’HLM SEQENS à lui payer la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

SUR CE,

L’article 835 du code de procédure civile dispose que le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

En application de l’article L.145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. Les juges saisis d’une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l’article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

Aux termes de l’article 1722 du code civil, applicable aux baux commerciaux, si, pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit ; si elle n’est détruite qu’en partie, le preneur peut, suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix, ou la résiliation même du bail. Dans l’un et l’autre cas, il n’y a lieu à aucun dédommagement.

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L’article 4 de l’ordonnance n°2020-316 du 25 mars 2020 dispose que les personnes mentionnées à l’article 1er ne peuvent encourir de pénalités financières ou intérêts de retard, de dommages-intérêts, d’astreinte, d’exécution de clause résolutoire, de clause pénale ou de toute clause prévoyant une déchéance, ou d’activation des garanties ou cautions, en raison du défaut de paiement de loyers ou de charges locatives afférents à leurs locaux professionnels et commerciaux, nonobstant toute stipulation contractuelle et les dispositions des articles L.622-14 et L.641-12 du code de commerce.

Les dispositions ci-dessus s’appliquent aux loyers et charges locatives dont l’échéance de paiement intervient entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai de deux mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire déclaré par l’article 4 de la loi du 23 mars 2020 précitée.

L’article 14 de la loi n°2020-1379 du 14 novembre 2020 dispose, notamment, que : I. – Le présent article est applicable aux personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique affectée par une mesure de police administrative prise en application des 2° ou 3° du I de l’article 1er de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l’état d’urgence sanitaire ou du 5° du I de l’article L. 3131-15 du code de la santé publique, y compris lorsqu’elle est prise par le représentant de l’Etat dans le département en application du second alinéa du I de l’article L. 3131-17 du même code. Les critères d’éligibilité sont précisés par décret, lequel détermine les seuils d’effectifs et de chiffre d’affaires des personnes concernées ainsi que le seuil de perte de chiffre d’affaires constatée du fait de la mesure de police administrative. II. – Jusqu’à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la date à laquelle leur activité cesse d’être affectée par une mesure de police mentionnée au I, les personnes mentionnées au même I ne peuvent encourir d’intérêts, de pénalités ou toute mesure financière ou encourir toute action, sanction ou voie d’exécution forcée à leur encontre pour retard ou non-paiement des loyers ou charges locatives afférents aux locaux professionnels ou commerciaux où leur activité est ou était ainsi affectée. Pendant cette même période, les sûretés réelles et personnelles garantissant le paiement des loyers et charges locatives concernés ne peuvent être mises en œuvre et le bailleur ne peut pas pratiquer de mesures conservatoires. Toute stipulation contraire, notamment toute clause résolutoire ou prévoyant une déchéance en raison du non-paiement ou retard de paiement de loyers ou charges, est réputée non écrite. III. – Le II ne fait pas obstacle à la compensation au sens de l’article 1347 du code civil. IV. – Le II s’applique aux loyers et charges locatives dus pour la période au cours de laquelle l’activité de l’entreprise est affectée par une mesure de police mentionnée au I. Les intérêts ou pénalités financières ne peuvent être dus et calculés qu’à compter de l’expiration du délai mentionné au premier alinéa du II. En outre, les procédures d’exécution qui auraient été engagées par le bailleur à l’encontre du locataire pour non-paiement de loyers ou de charges locatives exigibles sont suspendues jusqu’à la date mentionnée au même premier alinéa.

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Cette loi, entrée en vigueur le 17 octobre 2020, est d’application immédiate et concerne donc les procédures en cours.

En l’espèce, les locaux, objets du litige, sont à destinés à l’activité de “salon d’esthétique”.

Le bail fixe le loyer à la somme annuelle de 8.262,24 euros, hors taxes et hors charges et prévoit une provision annuelle d’eau froide de 400 euros, hors taxes.

Il stipule notamment, en son article 14, que “en cas de retard dans le paiement du loyer ou de toute autre somme, et à titre de clause pénale, les sommes impayées emporteront de plein droit intérêt au taux légal majoré de trois points. Les parties conviennent expressément que :

- en cas de manquement par le preneur à l’une quelconque de ses obligations contractuelles, qui sont toutes de rigueur,

- en cas de violation des dispositions imposées au preneur par les textes légaux et réglementaires et notamment par les articles L.145-1 et suivants du code de commerce, le contrat sera résilié de plein droit un mois après mise en demeure d’exécuter délivrée par exploit d’huissier restée sans effet : les conditions d’acquisition de la clause résolutoire seront constatées judiciaire et l’expulsion du preneur devenu occupant sans droit ni titre, ordonnée par le juge”.

Par acte séparé du 5 septembre 2018, Mme X s’est engagée en qualité de caution solidaire de la société Y Z du paiement :

- des loyers, charges, taxes et frais dus par le Preneur,

- des indemnités d’occupation, frais, honoraires et réparations qui pourraient être mis à la charge du Preneur en vertu du bail ou en vertu des décisions judiciaires pour la durée du contrat initial et d’un renouvellement,

- l’engagement de caution ne pourra prendre fin que trois ans après que les lieux aient été délaissés par Y Z, ou tout occupant de son chef, et pour quelque cause que ce soit”.

Par acte extrajudiciaire du 5 novembre 2020, la société d’HLM SEQENS a fait signifier à la société Y Z un commandement visant la clause résolutoire d’avoir à payer la somme de 6.160,14 euros au titre des loyers et charges impayés sur la période courant du 6 mai 2020 au 1er octobre 2020, conformément au décompte annexé audit commandement.

Ce commandement a été dénoncé à Mme X par acte extrajudiciaire du 18 novembre 2020.

Il résulte de l’analyse du décompte joint au commandement que celui-ci porte sur les loyers impayés durant les périodes protégées par l’ordonnance du 25 mars 2020 et la loi du 14 novembre 2020. Il a, en outre, été signifié aux parties durant la période protégée visée par la loi n°2020-1379 du 14 novembre 2020 applicable rétroactivement à compter du 17 octobre 2020.

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Au vu de ces éléments, il sera considéré que les demandes en constatation de l’acquisition de la clause résolutoire et expulsion se heurtent à des contestations sérieuses tirées de la régularité du commandement du 5 novembre 2020 et de la bonne foi de la bailleresse dans la délivrance de celui-ci.

Il sera donc dit qu’il n’y a pas lieu à référé s’agissant des demandes en constatation de l’acquisition de la clause résolutoire, expulsion et paiement d’une indemnité provisionnelle d’occupation.

S’agissant de la demande provisionnelle en paiement des loyers, il est constant qu’en application de l’article 1722 du code civil, d’une part, la destruction de la chose louée peut s’entendre d’une perte matérielle mais également d’une perte juridique, notamment, en raison d’une décision administrative et que, d’autre part, la perte peut être totale ou partielle, la perte partielle pouvant s’entendre de toute circonstance diminuant sensiblement l’usage de la chose, la perte partielle de la chose louée n,'étant pas nécessairement définitive et pouvant être temporaire.

En l’espèce, il ne peut être sérieusement contesté que la société Y Z a subi une perte partielle de la chose louée puisqu’elle n’a pu ni en jouir ni en user conformément à sa destination pendant les périodes de fermeture administrative, l’absence de faute du bailleur étant indifférente à la caractérisation de la perte.

Il sera donc considéré qu’il existe une contestation sérieuse sur la demande provisionnelle en paiement des loyers afférents aux périodes de fermeture administrative, c’est-à-dire du 15 mars au 11 mai 2020, du 30 octobre au 1er décembre 2020, et du 19 mars au 19 mai 2021.

Après déduction des loyers demandés afférents aux périodes susvisées, se heurtant à des contestations sérieuses, la demande provisionnelle en paiement formée par la société d’HLM SEQENS apparaît et non contestable à hauteur de 1.808,13 euros au titre de sa dette locative arrêtée au 2 décembre 2021, que la société SO ADDICT Z sera condamnée à payer à titre provisionnel. Cette somme produira intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

En application de l’article 1343-5 du code civil, il sera accordé à la société Y Z des délais de paiement dans les conditions fixées au dispositif de la présente décision.

S’agissant des demandes formées à l’encontre de Mme X, il ressort de la lecture de l’engagement de caution pris par elle le 5 septembre 2018 qu’il n’est pas conforme aux dispositions de l’article L.331-1 du code de la consommation applicable aux personnes physiques.

Dès lors, le principe même des demandes formées à son encontre se heurte à une contestation sérieuse et il sera dit qu’il n’y a pas lieu à référé de ce chef.

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S’agissant, enfin, de la demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts provisionnel tirée d’un manquement du bailleur à son obligation d’exécuter de bonne foi le contrat litigieux, il ne peut qu’être considéré que tant le manquement allégué que le préjudice invoqué se heurtent à des contestations sérieuses. Il sera donc dit qu’il n’y a pas lieu à référé de ce chef.

Chacune des parties succombant partiellement en ses prétentions, aucune considération tirée de l’équité ne justifie qu’il soit fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La société SO ADDICT Z sera condamnée aux dépens, en ce non compris le coût du commandement de payer des 5 et 18 novembre 2020.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire et en premier ressort,

Disons n’y avoir lieu à référé sur les demandes en constatation de l’acquisition de la clause résolutoire inséré au bail du 5 septembre 2018 liant les parties, en expulsion et en paiement provisionnel d’une indemnité d’occupation,

Condamnons la société Y Z à payer à la société Société d’HLM SEQENS la somme provisionnelle de 1.808,13 euros au titre des loyers, taxes et charges impayés à la date du 2 décembre 2021, et ce avec intérêt au taux légal à compter de la présente décision,

Disons que la société Y Z pourra se libérer de la provision ci-dessus allouée en 24 acomptes mensuels, d’égal montant de 75 euros, la dernière mensualité étant majorée du solde,

Disons que ces acomptes mensuels seront à verser en plus des loyers et charges courants, payés aux termes prévus par le contrat de bail,

Disons que le paiement du premier de ces acomptes devra intervenir avant le 5 du mois suivant celui la signification de l’ordonnance, et les suivants avant le 5 de chacun des mois suivants,

Disons qu’à défaut de règlement d’un seul des acomptes ou d’un seul des loyers courants à leurs échéances :

- l’intégralité de la dette sera immédiatement exigible,

- les poursuites pour son recouvrement pourront reprendre aussitôt,

Disons n’y avoir lieu à référé sur le surplus des demandes,

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Disons n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamnons la société Y Z aux dépens, en ce non compris le coût des commandements de payer visant la clause résolutoire des 5 et 18 novembre 2020,

AINSI JUGÉ AU PALAIS DE JUSTICE DE BOBIGNY, LE 21 JANVIER 2022.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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