Tribunal Judiciaire de Paris, Surendettement, 13 février 2024, n° 23/00322

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Sur la décision

Référence :
TJ Paris, surendettement, 13 févr. 2024, n° 23/00322
Numéro(s) : 23/00322
Importance : Inédit
Dispositif : Déclare la demande ou le recours irrecevable
Date de dernière mise à jour : 19 février 2024
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Texte intégral

PROCÉDURE DE SURENDETTEMENT

JUGEMENT

DU MARDI 13 FÉVRIER 2024

TRIBUNAL

JUDICIAIRE

DE PARIS

[Adresse 20]

[Localité 11]

Téléphone : [XXXXXXXX02]

Télécopie : [XXXXXXXX01]

Mél : [Courriel 22]

Surendettement

Références à rappeler

N° RG 23/00322 – N° Portalis 352J-W-B7H-C2AMW

N° MINUTE :

24/00096

DEMANDEURS:

[I] [L]

[Y] [L]

DEFENDERESSE:

[S] [C]

AUTRES PARTIES:

S.C.I. SCI [17]

[V] [Z]

[16]

DEMANDEURS

Madame [I] [L]

[Adresse 13]

[Localité 14]

représentée par Me Julien BRUNET, avocat au barreau de PARIS, toque P579

Monsieur [Y] [L]

[Adresse 8]

[Localité 6]

représenté par Me Camille CHAFFARD-LUÇON, avocate au barreau de PARIS, toque P206

DÉFENDERESSE

Madame [S] [C]

[Adresse 7]

[Localité 10]

représentée par Me Julien DESMOLIN, avocat au barreau de PARIS, toque E1868

AUTRES PARTIES

S.C.I. SCI [17]

CHEZ [18]

[Adresse 12]

[Localité 9]

représentée par Maître Christophe MOUNET de l’AARPI AARPI MOUNET, HUSSON – FORTIN, avocats au barreau de PARIS, toque E668

[V] [Z]

[Adresse 3]

[Localité 15] ETAT UNIS

[16]

[Adresse 4]

[Localité 10]

représentée par Me Alexandre MAILLOT, avocat au barreau de PARIS, toque R112

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Présidente : Deborah FORST

Greffière lors des débats : Trécy VATI

Greffière lors de la mise à disposition: Selma BOUCHOUL

DÉCISION :

réputée contradictoire, rendue en premier ressort, et mise à disposition au greffe.

EXPOSE DU LITIGE

Le 2 février 2022, Madame [S] [C] a déposé un nouveau dossier auprès de la commission de surendettement des particuliers de [Localité 19] (ci-après « la commission ») aux fins de traitement de sa situation de surendettement.

Par décision du 28 mai 2020, elle avait d’ores et déjà bénéficié d’un plan provisoire sur 24 mois.

Son nouveau dossier a été déclaré recevable par la commission le 24 février 2022. Saisi d’un recours contre la décision de recevabilité, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris a déclaré son dossier recevable par décision du 3 février 2023.

Par décision du 30 mars 2023, la commission a adopté des mesures imposées consistant en un plan provisoire sur 18 mois, au taux de 0 %, afin de permettre à la débitrice de déménager dans un logement moins onéreux et de clôturer la liquidation de sa SAS. Le plan prévoit des mensualités maximales de 429 euros.

La décision a été notifiée le 4 avril 2023 à Madame [I] [L], qui l’a contestée par courrier adressé à la commission le 2 mai 2023.

Elle a également été notifiée le 26 avril 2023 à Monsieur [Y] [L], qui l’a contestée par courrier adressé à la commission le 23 mai 2023.

L’ensemble des parties a été convoqué à l’audience du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris le 26 octobre 2023.

À cette audience, au cours de laquelle Madame [S] [C], représentée par son avocat, a formé une demande de renvoi, le juge a soulevé d’office l’éventuelle mauvaise foi de la débitrice et a sollicité des explications des parties sur :

— un virement de 14 000 euros reçu par la débitrice avant le dépôt de son nouveau dossier de surendettement ;

— un virement de 10 000 euros accompli par la débitrice avant le dépôt de son dossier ;

son adresse au cours de la procédure de surendettement et le montant élevé du loyer, de plus de 3000 euros au regard de l’état descriptif de situation dressé par la commission ;

— la liquidation de la SAS dont elle est gérante ;

— la procédure en appel relative au jugement du tribunal de commerce du 5 mai 2021.

L’affaire a ainsi été renvoyée à l’audience du 14 décembre 2023, à laquelle elle a été retenue.

A l’audience, Madame [I] [L], représentée par son conseil, a déposé des conclusions écrites aux termes desquelles elle demande :

à titre principal, de déclarer Madame [S] [C] de mauvaise foi, et en conséquence de prononcer la déchéance de la procédure de surendettement dont elle bénéficie ;

à titre subsidiaire :

— d’ordonner à Madame [S] [C] de trouver un nouveau logement dans le délai de cinq mois à compter de la décision à intervenir et pour un loyer maximum de 1800 euros ;

— d’actualiser la mensualité de remboursement de Madame [S] [C] à son égard ;

— de prononcer l’exécution de droit de la décision à intervenir ;

— de réserver les dépens.

Au soutien de sa demande principale, Madame [I] [L] fait valoir, sur le fondement des articles L711-1 du code de la consommation et L 761-1 3° du même code, que Madame [S] [C] se trouve de mauvaise foi en raison de comportements déloyaux durant la procédure de surendettement. Elle estime que la débitrice a fait de fausses déclarations sur la dette à son égard, dès lors qu’elle a déclaré auprès de la commission que la créance correspondait à la caution engagée pour la société [21] Capital alors que la créance correspond en réalité à une caution engagée pour la société [21] Commodities, qui est une société hongkongaise toujours active. Elle indique en outre que Madame [S] [C] entretient une opacité sur sa situation financière, dans la mesure où elle a déclaré par courrier du 4 février 2022 à la commission qu’elle changeait de situation professionnelle en devenant salariée d’une SAS et en abandonnant son statut d’auto entrepreneur, alors qu’elle ne justifie nullement de son activité d’auto entrepreneur, ni de l’emploi salarié qu’elle déclare exercer. Au surplus, elle expose que Madame [S] [C] a invoqué des frais de garde de l’ordre de 1550 euros par mois pour la garde de sa fille, née le 3 juillet 2019, alors que celle-ci est nécessairement scolarisée, de sorte qu’elle ne supporte plus ces frais sans pour autant en avoir informé la commission. Elle ajoute que Madame [S] [C] déclare un loyer de 3054 euros, ce qui est disproportionné au regard de sa situation de surendettement, alors que dans le même temps elle ne justifie d’aucune démarche pour trouver un autre logement. Elle fait également valoir que Madame [S] [C] a déclaré à la commission rembourser la somme de 635 euros par mois à Monsieur [Z] [V] en remboursement d’un engagement de caution de 1 994 573,55 euros souscrit en 2014, soit postérieurement à sa propre créance d’une part ; d’autre part que Madame [S] [C] s’est portée personnellement caution le 19 août 2015 d’un emprunt auprès de la société [16] pour un montant de 10 022 662,10 euros, soit pour un montant considérable, et ce alors que sa propre créance était déjà née. Elle soutient enfin que Madame [S] [C] n’a accompli aucun des paiements prévus dans la décision du 30 mars 2023.

Subsidiairement, elle estime qu’il n’y a pas lieu de tenir compte, au titre des charges de la débitrice, des frais de garde sa fille dès lors qu’elle est désormais scolarisée, et que le loyer de 3054 euros est manifestement disproportionné au regard de sa situation.

Monsieur [Y] [L], représenté à l’audience par son conseil, a déposé des conclusion écrites aux termes desquelles il demande :

à titre principal, de déclarer Madame [S] [C] de mauvaise foi, et en conséquence de prononcer la déchéance de la procédure de surendettement dont elle bénéficie ;

à titre subsidiaire :

— d’ordonner à Madame [S] [C] de trouver un nouveau logement dans le délai de cinq mois à compter de la décision à intervenir et pour un loyer maximum de 1800 euros ;

— d’actualiser la mensualité de remboursement de Madame [S] [C] à son égard ;

— de prononcer l’exécution de droit de la décision à intervenir ;

— de réserver les dépens.

Les moyens qu’il soulève dans ses écritures sont les mêmes que ceux de Madame [I] [L].

La SC [17], représentée à l’audience par son avocat, a déposé des conclusions écrites aux termes desquelles elle demande :

— de juger que sa créance doit être réglée prioritairement aux autres au regard de sa qualité de bailleur ;

— de fixer la mensualité de remboursement de [S] [C] pour sa créance à la somme de 300 euros par mois sur une période de huit mois, et le solde 335 919,60 euros à la fin du plan de huit mois ;

— de prononcer l’exécution provisoire de droit de la décision à intervenir ;

— de réserver les dépens.

Dans ses observations orales, elle soulève la mauvaise foi de la débitrice, considérant que son lieu de résidence n’est pas connu. Elle précise avoir donné un bail d’habitation situé [Adresse 7] à la société [21] Capital pour un loyer de 14000 euros, et que Madame [S] [C] est restée dans les lieux jusqu’au mois de novembre 2021.

Elle fait valoir sur le fondement de l’article L711-6 du code de la consommation, que le règlement de la créance du bailleur doit s’effectuer en priorité sur les autres créances, et qu’en l’espèce, sa créance résulte d’un jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris ayant jugé l’occupation de Madame [S] [C] sans droit ni titre, ordonné son expulsion, et condamnée à un arriéré locatif de 297 186,51 euros arrêté au mois de juillet 2021, ainsi que d’une indemnité d’occupation de 14 097,97 euros jusqu’à la libération des lieux en novembre 2021. Elle estime en outre qu’il revient à Madame [S] [C] de rechercher un logement dans un délai qui ne saurait être supérieur à huit mois, son loyer actuel de 3400 euros étant excessif.

La société [16], représentée à l’audience par son conseil, a exposé qu’une confusion est liée à la présence de sa dette dans le dossier de surendettement. Elle indique que l’audience en appel de la décision du tribunal de commerce du 5 mai 2021 s’est tenue le 4 décembre 2023 et que le délibéré doit être rendu le 7 février 2024.

Madame [S] [C], représentée par son avocat, a contesté se trouver se mauvaise foi. S’agissant de son logement, elle a exposé vivre en colocation avec ses parents, ce qui explique qu’elle s’acquitte d’un loyer qu’elle a réduit à 2550 euros. Elle précise finalement être signataire d’un bail depuis les mois de novembre – décembre 2021, pour un loyer total de 3200 euros, et que ses parents contribuent pour leur part du loyer. Elle fait valoir qu’elle se trouve dans l’incapacité de reprendre un logement. Elle conteste avoir aggravé sa situation en s’abstenant de régler ses dettes, et avoir entretenu une opacité sur sa situation, faisant valoir qu’elle a mis fin à son activité d’auto-entrepreneur au début de la procédure de surendettement et a arrêté de travailler en 2022. Elle précise que la SAS [21] n’est pas encore clôturée, et qu’elle était gérante de la société [21] Capital et percevait un salaire de 3000 euros. Elle confirme percevoir une pension alimentaire de 1500 euros. Elle expose ne vivre actuellement que de dons et du soutien familial. Elle indique que si elle reprend une activité professionnelle, elle devra nécessairement trouver un mode de garde pour sa fille. Elle ajoute que le versement reçu de 10 000 euros correspond à une facture professionnelle, et que le versement de 10 000 euros accompli depuis son propre compte bancaire visait à apurer une dette familiale.

A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré au 13 février 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

I. Sur la recevabilité du recours

En application des dispositions de l’article L733-10 du code de la consommation, une partie peut contester devant le juge des contentieux de la protection, dans un délai fixé par décret, les mesures imposées par la commission en application des articles L. 733-1, L. 733-4 ou L. 733-7.

Les conditions de recevabilité du recours formé contre la décision de la commission relative aux mesures qu’elle entend imposer sont régies par les dispositions des articles L 733-10 et R 733-6 du code de la consommation ; en vertu de ces dispositions, cette contestation doit intervenir dans les trente jours de la notification des mesures imposées, par déclaration remise ou lettre recommandée avec accusé de réception adressée au secrétariat de la Commission.

La computation de ce délai de 30 jours s’effectue conformément aux dispositions des article 640 et suivants du Code de procédure civile.

En l’espèce, la décision de la commission a été notifiée le 4 avril 2023 à Madame [I] [L], qui l’a contestée par courrier adressé à la commission le 2 mai 2023, soit dans le délai de 30 jours. Son recours est donc recevable en la forme.

Elle a également été notifiée le 26 avril 2023 à Monsieur [Y] [L], qui l’a contestée par courrier adressé à la commission le 23 mai 2023, soit dans le délai de 30 jours. Son recours doit donc également être déclaré recevable.

II. Sur la bonne foi de Madame [S] [C]

Aux termes de l’article L 733-12 du code de la consommation, le juge saisi d’une contestation à l’égard des mesures imposées prises par la commission peut s’assurer que le débiteur se trouve bien dans la situation définie à l’article L711-1.

Selon l’article L. 711-1 alinéa 1 du code de la consommation, le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement est ouvert aux personnes physiques de bonne foi. La situation de surendettement est caractérisée par l’impossibilité manifeste de faire face à l’ensemble de ses dettes, professionnelles et non professionnelles, exigibles et à échoir. Le seul fait d’être propriétaire de sa résidence principale dont la valeur estimée à la date du dépôt du dossier de surendettement est égale ou supérieure au montant de l’ensemble des dettes professionnelles et non professionnelles exigibles et à échoir ne fait pas obstacle à la caractérisation de la situation de surendettement.

Il résulte de l’article 2274 du Code civil que la bonne foi se présume et qu’il appartient à celui qui se prévaut de la mauvaise foi d’en rapporter la preuve.

Une simple erreur, négligence ou légèreté blâmable du débiteur sont des comportements insuffisants pour retenir la mauvaise foi qui suppose des actes volontaires manifestant la conscience de celui-ci de créer ou d’aggraver l’endettement en fraude des droits de ses créanciers, soit pendant la phase d’endettement, soit au moment de la saisine de la commission de surendettement ou au cours de la procédure.

Le juge apprécie la bonne foi au vu de l’ensemble des éléments qui lui sont soumis au jour où il statue.

En droit, ni l’existence d’une dette, ni même son augmentation en cours de procédure ne saurait, en soi, constituer le débiteur de mauvaise foi. En revanche, le comportement délibéré du débiteur qui s’arroge unilatéralement le droit de ne pas payer ses dettes en espérant que la procédure de surendettement lui permette d’obtenir à terme l’effacement de sa dette peut caractériser une absence de bonne foi.

Pour être retenus, les faits constitutifs de la mauvaise foi doivent être en rapport direct avec la situation de surendettement.

En l’espèce, l’endettement de Madame [S] [C] tel qu’indiqué sur le plan dressé par la commission est d’un montant de 14 761 973,25 euros.

La dette la plus importante est constituée de celle à l’égard de la société [16], d’un montant de 10 022 662,10 euros, et qui résulte d’un jugement du tribunal de commerce de Paris du 5 mai 2021, et dont un appel est pendant. Aux termes de ce jugement, Madame [S] [C] détient 50% de la société [21] Commodities Limited, immatriculée à Hong Kong et intervenant sur le marché du charbon, qui a souscrit une convention d’ouverture de crédit de 11 000 000 USD pour une durée de 12 mois sous la forme d’un crédit reconstituable, et dont Madame [S] [C] s’est portée caution solidaire. La dette de 10 022 662,10 euros portée sur le plan de surendettement correspond ainsi à cet engagement en qualité de caution personne physique, et dont le remboursement a été sollicité par la société [16].

Deux autres dettes sont constituée de celles à l’égard de Monsieur et Madame [L] pour des montants respectifs de 886 575 euros et 1 519 843 euros. Celles-ci sont référencées dans le plan comme résultant d’actes de caution pour la SAS [21] Capital. Or, Monsieur et Madame [L] soutiennent que ces dettes résultent d’actes de cautions pour la société [21] Commodities conclues en 2012.

Madame [S] [C] a indiqué lors du dépôt de son nouveau dossier de surendettement, dans le courrier joint la déclaration de surendettement, que l’ensemble de ses dettes était relatif à la liquidation de sa société [21] Capital, après un plan de sauvegarde. Madame [S] [C] verse en effet un jugement d’ouverture d’une procédure de sauvegarde du 20 septembre 2017 concernant la SAS [21] Capital, située [Adresse 7], et qui a fait l’objet d’une liquidation judiciaire par jugement du 17 septembre 2019, au regard de l’annonce publiée au Bodacc.

Néanmoins, cette SAS [21] Capital est distincte des sociétés [21] Commodities Limited et [21] Capital Limited, et il résulte des débats que les dettes à l’égard de la société [16] et des consorts [L] résultent d’actes de caution qu’elle a prises pour la société [21] Commodities, et non pour la SAS [21] Capital.

Force est ainsi de constater que Madame [S] [C] a entretenu une confusion lors du dépôt de son dossier de surendettement sur l’origine de ces trois dettes.

Au surplus, il convient de relever que Madame [S] [C] s’est portée caution personnelle pour des montants particulièrement importants pour la société [21] Commodities, en 2012 en ce qui concerne celle à l’égard des consorts [L], puis en 2015 en ce qui concerne celle à l’égard de la société [16]. Elle s’est ainsi portée caution solidaire de la société [21] Commodities auprès de la société [16] pour un montant de 10 022 662,10 euros, soit un montant colossal, et alors qu’elle s’était d’ores et déjà portée caution pour des montants également importants en 2012 pour les consorts [L]. Elle ne pouvait ainsi ignorer qu’en cas d’activation des différentes cautions, elle se trouverait nécessairement dans l’incapacité d’y faire face.

Or, de nouvelles dettes se sont encore constituées par la suite, en particulier la dette à l’égard de la société [17]. Il résulte ainsi du jugement du 13 septembre 2021 du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris qu’elle a été condamnée en son nom personnel in solidum avec la SAS [21] PME Developpement à verser à la SC [17] la somme de 297 186,51 euros représentant la dette locative arrêtée au mois de juillet 2021 inclus et celle de 14 097,97 euros représentant l’indemnité d’occupation jusqu’à la libération des lieux. Or, il résulte des dispositions de ce jugement que la SC [17] avait donné à bail à la SAS [21] Capital un appartement à usage d’habitation situé [Adresse 7], composé notamment de six chambres, deux salons, et une galerie, ainsi qu’une cave dans le même immeuble. Le jugement précise qu’en dépit d’une résiliation du bail ayant pris effet le 1er septembre 2019, Madame [S] [C], représentante légale de la société, s’est maintenue dans les lieux. La dette, locative et personnelle à Madame [S] [C], est ainsi particulièrement importante, pour atteinte plusieurs centaines de milliers d’euros au mois de septembre 2021. Or, il résulte du procès-verbal de reprise qu’elle n’a quitté les lieux que le 22 novembre 2021, soit plus de deux ans après la résiliation du bail. Force est ainsi de constater qu’elle s’est maintenue dans les lieux, laissant ainsi la dette augmenter, alors qu’elle faisait déjà face à d’importantes difficultés financières, caractérisées par l’existence d’une procédure de surendettement ayant donné lieu au moratoire pris par la commission le 28 mai 2020 et portant sur un montant de près de deux millions d’euros, et par la condamnation prononcée par le tribunal de commerce de Paris le 5 mai 2021. Or, au regard de la description des lieux mentionnée dans le jugement, et de sa composition de famille, la débitrice étant divorcée avec deux enfants à sa charge, Madame [S] [C] n’avait pas l’utilité d’un logement aussi grand et onéreux. Dans le même temps, elle n’a justifié d’aucun effort pour se reloger avant le mois de novembre 2021. Ainsi, en se maintenant pendant plus de deux ans après la résiliation du bail dans un logement inadapté à la constitution de sa famille, et alors qu’elle faisait l’objet d’une procédure de surendettement, Madame [S] [C] a constitué un endettement particulièrement important à l’égard de la SC [17] dont elle ne pouvait ignorer qu’elle serait dans l’incapacité d’honorer. Il convient en outre de préciser qu’à cette période, Madame [S] [C] exerçait une activité professionnelle, de sorte qu’elle disposait de ressources pour se reloger.

Par ailleurs, Madame [S] [C] a déclaré lors du dépôt de son nouveau dossier de surendettement, et aux termes de la lettre d’accompagnement jointe à ce dossier, résider [Adresse 5], avec ses parents et ses deux enfants, le temps de se trouver en mesure de louer un appartement seule avec ses enfants. Il convient de relever qu’il s’agit de l’adresse que ses parents ont déclaré sur leur avis d’imposition établi en 2021 sur les revenus de 2020. Il en résulte que Madame [S] [C] est ainsi allée vivre chez ses parents [Adresse 5] après avoir quitté les lieux situés [Adresse 7]. Or, elle fait état pour ce nouveau logement de charges de loyer de 2100 euros lors du dépôt de son nouveau dossier, évalué à la hausse par la commission à 3054 euros dans l’état descriptif de situation du 26 mai 2023, et dont elle déclare à l’audience qu’il s’élève désormais à la somme de 2550 euros. Outre qu’elle ne justifie pas du bail qu’elle indique avoir conclu en colocation avec ses parents au mois de novembre 2021, et ainsi de la nécessité de s’acquitter d’un loyer alors qu’elle s’est trouvée hébergée par ses parents, un tel loyer est excessif au regard des annonces versés par les demandeurs pour des logements dans le [Localité 10] comportant deux chambres et qui n’excèdent pas 1800 euros en moyenne. Madame [S] [C] a ainsi, quelques semaines avant le dépôt de son dossier de surendettement, pris à bail le bien dans lequel ses parents résidaient déjà, pour un montant excessif au regard de sa situation, obérant ainsi sa capacité de remboursement pour l’apurement de ses dettes.

Cette circonstance est d’autant plus problématique qu’il résulte du relevé de compte du 31 décembre 2021 de la débitrice auprès du CIC qu’elle a accompli un virement de 10 000 euros auprès de Madame « [F] [O] » le 2 décembre 2021, et dont l’intéressée indique à l’audience que cela a permis de rembourser une dette familiale. Or, Madame [S] [C] ne justifie nullement de cette précédente dette, ni même de son intégration aux précédentes mesures. Aussi, en réalisant de ce virement non justifié d’un montant important juste avant le dépôt d’un nouveau dossier de surendettement, alors qu’elle venait de prendre à bail un logement pour un loyer excessif, alors même qu’elle bénéficiait de précédentes mesures de surendettement, et que de nouvelles dettes pour un montant particulièrement important s’étaient constituées, Madame [S] [C] ne pouvait ignorer qu’elle priverait ses créanciers de ces fonds pour l’apurement de ses dettes.

L’ensemble de ces raisons permet de caractériser la mauvaise foi de l’intéressée dans la constitution de son endettement, et au cours de la procédure de surendettement, et les quelques recherches d’emploi accomplies aux mois de novembre 2023 et décembre 2023, soit juste avant l’audience sur renvoi, sont insuffisantes en l’espèce pour retenir que la débitrice se trouve à nouveau de bonne foi.

En conséquence, elle sera déclarée irrecevable au bénéfice de la procédure de surendettement.

PAR CES MOTIFS

La juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au greffe,

DÉCLARE recevable en la forme la contestation de Madame [I] [L] à l’encontre de la décision relative aux mesures imposées prise par la commission de surendettement des particuliers de [Localité 19] le 30 mars 2023 ;

DÉCLARE recevable en la forme la contestation de Monsieur [Y] [L] à l’encontre de la décision relative aux mesures imposées prise par la commission de surendettement des particuliers de [Localité 19] le 30 mars 2023 ;

DÉCLARE Madame [S] [C] de mauvaise foi et par conséquent irrecevable au bénéfice de la procédure de surendettement ;

DIT que le dossier de Madame [S] [C] sera transmis à la commission de surendettement de [Localité 19] pour clôture de la procédure ;

REJETTE pour le surplus des demandes ;

DIT, que, par les soins du greffe de ce tribunal, la présente décision sera notifiée à Madame [S] [C] et aux créanciers par lettre recommandée avec avis de réception et que copie sera adressée par lettre simple à la commission de surendettement des particuliers de Paris ;

LAISSE à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

RAPPELLE que la décision est exécutoire de plein droit.

LA GREFFIÈRE LA JUGE

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Tribunal Judiciaire de Paris, Surendettement, 13 février 2024, n° 23/00322