CAA de Paris, conclusions du rapporteur public sur l'affaire n° 02PA03686

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Sur la décision

Référence :
CAA
Juridiction : Cour administrative d'appel
Précédents jurisprudentiels : 9810629/7-2 et 9810664/7-2 du 1er juillet 2002
Cass 2ème civile 6/06/2002 00-15606
CE 19/10/69, p. 595
CE 30/04/2003 212113
CE 5/12/97 Garde des Sceaux 142263

Texte intégral

02PA03686
Ministre de la justice / MAIF, association Montjoie
Lecture le 07/07/2005
Conclusions de Monsieur X, Commissaire du gouvernement
Par ordonnance du 18/05/89, le juge des enfants du Mans a ordonné le placement, à compter du 26/04/89, du jeune T. Y, alors âgé de 15 ans, au service de placement familial de l’association Montjoie, sur le fondement de l’article 375 du code civil.
Par une nouvelle ordonnance du 5/7/89, le juge des enfants a placé l’intéressé sous le régime de la liberté surveillée sur le fondement de l’article 16 de l’ordonnance du 2/02/1945.
Par jugement du 17/06/93, le tribunal pour enfant déclarait le jeune B Y coupable d’avoir à Champagne (72) dans la nuit du 4 au 5/8/89, incendié les locaux de Z, et le condamnait à une peine d’emprisonnement avec sursis.
L’assureur de la Z a saisi le TGI du MANS pour obtenir de l’association MONTJOIE et de son assureur la MAIF l’indemnisation de son préjudice.
Par jugement du 19/10/94, le TGI du Mans, déclarait sur le fondement de l’article 1384 alinéa 1 du code civil, l’Association Montjoie responsable du préjudice subi par la Z, condamnait in solidum l’Association Montjoie et la Maif à payer au GAN la somme de 5 778 929,56 euros, avec intérêts de droit à compter de la date des quittances subrogatives.
Ce jugement a fait l’objet d’un appel devant la Cour d’appel d’Angers, laquelle, par arrêt du 22/10/97, statuait partiellement, et jugeait opposable au GAN la limitation de garantie de la MAIF vis à vis de l’association Montjoie, déclarait l’association Montjoie responsable, prononçait le sursis à statuer sur les autres points, et nommait un expert pour évaluer le préjudice de Z et du GAN, cet arrêt a été confirmé par un arrêt de la Cour de Cassation du 9/12/1999.
Puis, par un 2e arrêt du 18/1/99, la CA Angers statuait définitivement sur appel de l’association Montjoie et de la Maif et constatait la renonciation de Montjoie et de la MAIF à l’expertise, confirmait le montant de l’indemnité en fonction de la valeur au jour du sinistre et fixait les intérêts. Ce dernier arrêt a été cassé par arrêt du 7/5/02 de la Cour de Cassation, uniquement en ce qu’il condamnait à tort MONTJOIE et la MAIF aux intérêts à compter de la quittance subrogative.
Par lettre du 22/12/97, Montjoie demandait à l’Etat de la garantir de la totalité des sommes mises à sa charge au titre de la réparation du préjudice ayant résulté pour la société Z et son assureur le G.A.N. de l’incendie du 5 août 1989 pour la part non prise en charge par son assureur la MAIF
L’association Montjoie et la MAIF, son assureur demandaient au Tribunal administratif de Paris la condamnation de l’Etat à les indemniser de leur préjudice respectif,
Par jugement n° 9810629/7-2 et 9810664/7-2 du 1er juillet 2002, le tribunal administratif de PARIS a condamné l’Etat à garantir l’association MONTJOIE et son assureur la MAIF de la totalité des sommes mises à leur charge au titre de la réparation du préjudice ayant résulté pour la société Z et son assureur le G.A.N. de l’incendie du 5 août 1989 dans la double limite du préjudice effectivement subi par la société Z et son assureur le GAN d’une part et du montant des demandes préalables présentées le 22 décembre 1997 par l’association MONTJOIE et son assureur la MAIF au ministre de la justice.
C’est de ce jugement dont le Garde des Sceaux relève régulièrement appel en vous demandant, en outre, d’étendre la mission de l’expert à l’évaluation du montant que la société Z doit supporter du fait qu’elle avait construit un bâtiment ayant une faible résistance au feu, et de rejeter les demandes présentées par l’association MONTJOIE et la MAIF devant le tribunal administratif de PARIS.
Il conteste en 1er lieu, la régularité du jugement en faisant valoir que le tribunal administratif compétent était celui de Nantes dans le ressort duquel l’association MONTJOIE et la MAIF ont leur siège, en application de l’article R312-14 du code de justice administrative et que les requêtes étant connexes à celles déposées devant le TA de NANTES par la société Z et le GAN contre la commune de CHAMPAGNÉ (SARTHE) le TAP devait renvoyer les requêtes au CE pour attribution de compétence en vertu des articles R342-1 à R342-3 du code de justice administrative.
Bien qu’il ait raison sur l’existence d’une incompétence territoriale du Tribunal administratif de Paris car en vertu du 2° de l’article R.312-14 Code de justice administrative, qui dispose « Les actions en responsabilité fondées sur une cause autre que la méconnaissance d’un contrat ou d’un quasi-contrat et dirigées contre l’Etat, les autres personnes publiques ou les organismes privés gérant un service public relèvent : (…) 2º Lorsque le dommage invoqué est un dommage de travaux publics ou est imputable soit à un accident de la circulation, soit à un fait ou à un agissement administratif, de la compétence du tribunal administratif dans le ressort duquel se trouve le lieu où le fait générateur du dommage s’est produit ; », et s’agissant d’un mineur en institution d’éducation surveillée qui s’évade, le lieu du fait générateur du dommage est celui d’où s’est évadé le mineur et non celui où le méfait a été commis CE 24/02/65 CP centrale de sécurité sociale p.127 voir CHAPUS n° 433 (dernière édition ) et code annoté de M. A, vous n’annulerez pas le jugement car Article R312-2 du Code de justice administrative, issu du décret du 19 avril 2002prévoit en son 2e aliéna que « Lorsqu’il n’a pas été fait application de la procédure de renvoi prévue à l’article R. 351-3 et que le moyen tiré de l’incompétence territoriale du tribunal administratif n’a pas été invoqué par les parties avant la clôture de l’instruction de première instance, ce moyen ne peut plus G ultérieurement soulevé par les parties ou relevé d’office par le juge d’appel ou de cassation ».
Or l’Etat n’a pas défendu en 1re instance, vous considèrerez donc que le moyen tiré de l’incompétence territorial du ta est irrecevable.
Vous examinerez donc le litige au fond.
I) l’Etat fait valoir en 1er lieu, que les conditions d’application de la théorie du risque spécial n’étaient pas remplies, les mineurs placés sur le fondement des articles 375 et suivants du code civil n’entrant pas dans le cadre de cette théorie.
Vous savez que l’arrêt CE DELANNOY CE 19/10/69, p. 595, a affirmé le principe de l’indemnisation sur le fondement du risque des dommages causés aux tiers à raison des méthodes de rééducation fondées sur un régime de liberté surveillée, résultant de l’ordonnance du 2/2/45, pour les mineurs délinquants « QU’IL RESULTE DE L’ENSEMBLE DES PRESCRIPTIONS DE L’ORDONNANCE DU 2 FEVRIER 1945, RELATIVE A L’ENFANCE DELINQUANTE, MODIFIEE PAR LA LOI DU 24 MAI 1951, QUE LE LEGISLATEUR A ENTENDU GENERALISER DANS CE DOMAINE DES METHODES DE REEDUCATION FONDEES SUR UN REGIME DE LIBERTE SURVEILLEE ; QUE LA GENERALISATION DE L’EMPLOI DE CES METHODES CREE UN RISQUE SPECIAL POUR LES TIERS ; QU’IL SUIT DE LA RESPONSABILITE DU SERVICE PUBLIC EN RAISON DES DOMMAGES CAUSES AUX TIERS PAR LES ENFANTS CONFIES AUX ETABLISSEMENTS OU LESDITES METHODES SONT UTILISEES NE F G H A LA PREUVE D’UNE FAUTE, […], […], […] » 1) sur la nature du placement et la mise en jeu de la responsabilité de l’Etat sur le fondement du risque spécial pour les tiers:
Rappelons qu’en l’espèce, l’ordonnance du 18/05/89, qui avait placé T. Y à l’association MONTJOIE à compter du 26/04/89, avait été prise sur le fondement de l’article 375 du code civil, qui prévoit que « Si la santé, la sécurité ou la moralité d’un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation sont gravement compromises, des mesures d’assistance éducative peuvent G ordonnées par justice », et que l’ordonnance par laquelle le juge des enfants a placé l’intéressé sous le régime de la liberté surveillée a été prise sur le fondement de l’ordonnance du 2/02/45 qui prévoit à l’article 16 (2°, 3° et 4°) que le mineur peut faire l’objet de mesures de placement; l’article 16 bis prévoit que le mineur de 16 ans peut faire l’objet de mesures de protection le D du 22/11/76 76-1073 prévoit que ces mesures sont soit le placement des 2° 3) 4) de l’article 16 soit une mesure de protection en milieu ouvert dont l’exécution est confiée à un service ou un établissement de l’éducation surveillée.
[L’article 8-1 issu de la loi 96-585 du 1/07/96 prévoit que lorsqu’il est saisi par le procureur de la république, le juge des enfants peut ordonner, si l’infraction est établie et en attendant l’audience, soit son placement dans un établissement public ou habilité à cet effet, soit une mesure de liberté surveillée préjudicielle, soit une mesure ou activité d’aide ou de réparation; le terme de mesure de liberté surveillée préjudicielle n’existe pas avant 1996 et il est erroné d’employer cette expression; mais le régime de liberté surveillée existe comme alternative au placement en institution fermée: on le voit bien dans le D de 1976 qui prévoit le placement de l’article 16 ou une mesure de protection en milieu ouvert].
Donc, si le jeune Y avait été placé sous le régime de l’article 375 du code civil et faisait l’objet d’une mesure d’assistance éducative, il faisait depuis le 5/07/89, l’objet d’une mesure prévue à l’ordonnance du 2/02/45 consistant dans un régime de liberté surveillée qui n’est pas une mesure de placement, puisque justement c’est l’alternative à une mesure de placement et devait G considéré comme entrant dans la catégorie des mineurs délinquants alors même qu’il continuait à bénéficier d’un placement en milieu ouvert sur le fondement de l’article 375 du code civil; c’est justement là que réside le risque : le choix du maintien en milieu ouvert et non le placement en institution fermée.
Les principes dégagés par l’arrêt DELANNOY CE 19/10/69 sont donc parfaitement applicables à l’espèce dés lors que les méthodes de rééducation fondées sur un régime de liberté surveillée, résultant de l’ordonnance du 2/2/45 étaient appliquées, créant un risque spécial pour les tiers. Voir 90NT00621 du 8/07/92 et 95BX00342 du 3/02/97 (pour le considérant de principe, car en l’espèce, il ne s’agit pas d’un mineur délinquant) conformes à l’arrêt du 12/11/75 du CE 96586 Garde des Sceaux/ Schmitt.
Voir aussi pour quelques ex 92NT00379 3/12/92, 90LY00338 27/12/91, tous ces arrêts exigeant la soumission à l’ordonnance du 2/02/45 pour la mise en jeu de la responsabilité pour risque spécial.
Vous en conclurez que le TAP n’a pas commis d’erreur de droit en estimant que la théorie du risque spécial s’appliquait et il n’a pas non plus réalisé une extension de la mise en jeu de la responsabilité de l’Etat pour risque spécial.
Vous relèverez, au surplus, que l’arrêt MAIF 98NT00320 du 25/04/2002 semble englober toutes les méthodes d’éducation comparables à celles du régime de la liberté surveillée même si le mineur n’est pas soumis à l’ordonnance du 2/02/45.
Enfin, vous noterez enfin que l’absence d’habilitation est sans conséquence s’il s’agit d’une personne jugée digne de confiance par le juge : CE 5/12/97 Garde des Sceaux 142263.
Dans la présente espèce, le TAP a admis que l’association MONTJOIE se trouvait désormais saisie au titre de l’ordonnance du 2/02/45 conformément à l’article 10 de l’ordonnance du 2/02/45 et en même temps sur le fondement de l’article 375 du code civil, la mesure de placement n’ayant pas été pas levée. En effet, la procédure judiciaire est très formaliste et pour cette raison on peut en effet estimer que l’association MONTJOIE ne pouvait se considérer comme libérée de son obligation au titre de l’article 375 du code civil (voir d’ailleurs Cass 2e civile 6/06/2002 00-15606) mais s’était vue confier, à compter de juillet 1989, la garde d’un mineur délinquant, une mesure d’assistance éducative n’étant pas incompatible avec le régime de la liberté surveillée.
Si vous admettez, comme nous vous le proposons de reconnaître que la responsabilité de l’Etat était susceptible d’G engagée sur le fondement du risque spécial, vous devez vous interroger en suite sur le moyen, soulevé par le garde des Sceaux, tiré de ce que l’action en indemnisation fondée sur la responsabilité sans faute de l’Etat pour risque spécial que font courir les méthodes de rééducation des mineurs délinquants n’étant ouverte qu’aux tiers, qualité qui n’est pas celle de l’association MONTJOIE et la MAIF; les requérantes ne pourraient bénéficier d’aucune action en garantie contre l’Etat. Il soutient en effet qu’il ne peut y avoir subrogation sur le fondement des articles 1249 et S. du code civil dès lors que l’association n’est pas tenue à la dette pour l’Etat mais en tant qu’elle est civilement responsable et que l’association n’est pas tenue non plus à la dette avec l’Etat, le fondement distinct des 2 régimes de responsabilité (1384 al 1 et risque spécial) excluant toute forme de solidarité.
En outre, aucune action récursoire n’existait non plus puisque l’Etat n’était pas le gardien du mineur.
2) sur la subrogation ou la garantie de l’Etat :
Le 5/08/89, le jeune Y a donc mis le feu aux entrepôts de la société Z; il a été condamné à 2 mois de prison arec sursis; l’assureur de la Z a saisi le TGI du MANS pour obtenir de l’association MONTJOIE et de son assureur la MAIF l’indemnisation de son préjudice évalué à 37.907.293 F; la CA d’ANGERS, le 18/01/96, a déclaré MONTJOIE responsable du dommage de la Z et de son assureur GAN sur le fondement de l’article 1384 al 1 du code civil, la responsabilité de l’Etat n’étant pas incompatible avec celle du gardien du mineur; un 2e arrêt a fixé le montant des condamnations le 19/01/99 ; la Cour de cassation, le 7/05/02, a cassé cet arrêt qui condamnait à tort MONTJOIE et la MAIF aux intérêts à compter de la quittance subrogative.
L’association MONTJOIE et la MAIF ont saisi le TAP de 2 requêtes du 29/06/98 aux fins d’obtenir la condamnation de l’Etat à réparer les dommages causés par le jeune Y pour les sommes mises à leur charge :
- MONTJOIE demandait à G garantie des condamnations qui pourraient G mises à sa charge et provisoirement à hauteur de 37.741.592,19 F compte tenu du montant en principal réclamé par le GAN et fixé par le TGI 37 907 293 F, la CA ANGERS ayant ensuite confirmé cette somme, et des intérêts et de la capitalisation (il y aura par la suite recours en cassation et cassation sur ce point) portant cette somme à 67 741 592,19 F (au 31/12/97) somme diminuée du montant des versements de la MAIF; le Cour ayant statué par un 2e arrêt du 19/01/99 depuis l’introduction de la requête la demande était ramenée à 7 907 293 F outre les intérêts légaux et la capitalisation ordonnés par la cour, avec intérêts de droit à compter du jugement et capitalisation à compter de la demande en justice de GAN.
- la MAIF demandait la garantie de l’Etat à hauteur de 30 000 000 F correspondant au plafond de garantie puis le 30/04/99 elle demandait la condamnation à la somme de 56 364 609,31 F avec intérêts à compter du paiement intervenu le 4/03/99 et avec capitalisation des intérêts au 30/04/99.
Le TAP a condamné l’Etat à garantir la Z et la MAIF dans la double limite du préjudice effectivement subi et du montant des demandes préalables du 22/12/97 présentées par les requérantes au ministre de la justice; une expertise a été ordonnée ADD pour déterminer le préjudice matériel et commercial de Z; l’Etat contestait en effet le montant du préjudice admis par le JJ.
Les requérants de 1re instance sont en effet, 2 personnes privées condamnées sur le fondement de 1384 al 1 en qualité de gardien du mineur responsable du dommage qui demandent la subrogation dans les droits détenus sur l’Etat par la Z et son assureur; les fondements distincts de la responsabilité feraient obstacle à cette subrogation selon le ministre.
a) En 1er lieu, vous n’aurez aucune difficulté à écarter cette argumentation pour l’assureur, la MAIF, dés lors que la subrogation est légale, c’est celle de l’article L121-12 du code des assurances :
| « L’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance est subrogé, jusqu’à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l’assuré | |contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’assureur./L’assureur peut G déchargé, en| |tout ou en partie, de sa responsabilité envers l’assuré, quand la subrogation ne peut plus, par le fait de l’assuré, s’opérer en faveur de | |l’assureur./Par dérogation aux dispositions précédentes, l’assureur n’a aucun recours contre les enfants, descendants, ascendants, alliés en | |ligne directe, préposés, employés, ouvriers ou domestiques, et généralement toute personne vivant habituellement au foyer de l’assuré, sauf le | |cas de malveillance commise par une de ces personnes » ». |
- Le CE juge que l’assureur qui bénéficie de la subrogation instituée par l’article L121-12 du code des assurances dispose de la plénitude des droits et actions que l’assuré qu’il a dédommagé aurait été admis à exercer à l’encontre de toute personne tenue à quelque titre que ce soit de réparer le dommage ayant donné lieu au paiement de l’indemnité d’assurances avis CE 11766 16/02/90 société GAN incendie Accidents (en l’espèce régime de responsabilité du fait des dommages commis à force ouverte ou par violence par des attroupements et rassemblements loi 7/01/83)
Ainsi peu importe que la condamnation qui a obligé l’assureur au paiement résulte d’un fondement juridique différent de celui qui peut G invoqué par l’assuré.
- en outre, il juge également que l’assureur de l’auteur du dommage (incendie causé par un malade mental en sortie d’essai) qui a été condamné par le juge judiciaire à indemniser de son préjudice l’assureur de la victime est doublement subrogé dans les droits de l’auteur du dommage et de l’assureur de la victime; il peut alors notamment rechercher la responsabilité sans faute sur le fondement de la théorie du risque spécial créé par la sortie d’essai et les fautes commises par l’auteur du dommage peuvent lui G opposées CE 30/04/2003 212113 Compagnie préservatrice foncière assurances.
b) L’argumentation du ministre de nous paraît pas plus convaincante, s’agissant de l’association MONTJOIE
En effet, il convient de bien distinguer action récursoire et subrogatoire.
Vous savez que, comme le rappelait D E (l’action récursoire dans le droit administratif de la responsabilité AJDA 91 P.75) : « par l’action récursoire le débiteur primaire, ou solvens, exerce un droit propre : il cherche à obtenir du tiers responsable du dommage causé à la victime, la réparation du préjudice qu’il a subi du fait de l’indemnisation de la victime. En raison de ce droit propre, les conséquences défavorables à l’égard de la victime, du régime de responsabilité ne lui sont pas applicables. L’action récursoire a ses règles propres ».
Ainsi, il a été jugé dans Cie d’assurances WINTHERTUR 196759 26/02/2001 que si, en cas de dommage accidentel causé à un tiers par un ouvrage public, la victime peut en demander réparation même en l’absence de faute au maître de l’ouvrage ou au maître d’œuvre ou à l’entrepreneur, il ne s’ensuit pas que la personne condamnée puisse se prévaloir d’un régime de responsabilité sans faute à l’égard des autres personnes publiques ayant concouru à la réalisation de l’ouvrage.
Alors que « Dans l’action subrogatoire, le subrogé est substitué à la victime, le subrogeant, qui a obtenu réparation- mais le subrogé ne peut exercer que les mêmes droits et actions que ceux du subrogeant. Ainsi le subrogé ne peut avoir plus de droits que le subrogeant et il peut G amené à subir les exceptions applicables à la victime » par ex voir CE 30/04/2003 212113 compagnie préservatrice et foncière assurances (la faute du malade, subrogeant, qui a déclenché un incendie peut G opposée à son assureur).
En l’espèce, MONTJOIE ne peut avoir la qualité de subrogé dans les droits de la victime, ni, en vertu de l’article 1249 du Code civil, qui prévoit que « La subrogation dans les droits du créancier au profit d’une tierce personne qui le paie, est ou conventionnelle ou légale. », ni en vertu de l’article 1251.
|« La subrogation a lieu de plein droit : /3º Au profit de celui qui, étant tenu avec d’autres ou pour d’autres au paiement de la dette, avait | |intérêt de l’acquitter » |
En effet, comme l’indique le ministre, l’association MONTJOIE n’a pas été condamnée au lieu et place de l’Etat mais sur le fondement de sa responsabilité de gardien; l’Etat n’était pas gardien du mineur; il n’a pas non plus été condamné solidairement avec l’Etat ; sa situation est fondamentalement différente de celle de l’assureur qui bénéficie d’une subrogation légale sur le fondement de l’article L121-12 du code des assurances ;
Mais l’association MONTJOIE peut, selon nous bénéficier d’une action récursoire à l’encontre de l’Etat.
En effet, l’action récursoire peut résulter de la substitution d’un garant à l’auteur du dommage :
C’est ainsi que la personne publique est garante vis à vis de la victime en fonction du risque social que ses activités peuvent générer.
Elle a donc une obligation à la dette qui peut se voir corriger par une contribution à la dette; le cas typique est celui des rapports entre l’administration et ses agents; c’est une technique de substitution de responsabilité: la substitution d’un garant a pour objectif d’assurer l’indemnisation de la victime et l’action récursoire de l’administration permet de rétablir l’effectivité des responsabilités; mais elle a aussi pour objectif de limiter la responsabilité de l’agent afin de favoriser sa liberté d’action dans l’administration et d’en éviter la paralysie: c’est la fameuse distinction entre faute de service et faute personnelle (CF l’arrêt LARUELLE et DELVILLE CE 28/07/61); il n’y a pas dans ce mécanisme de responsabilité solidaire : chacun est responsable de ses fautes à proportion de celles ci.
En l’espèce, l’indemnisation des victimes d’agissements de mineurs délinquants est manifestement fondée sur la garantie par l’Etat du risque spécial occasionné pour les tiers par l’emploi de méthode éducatives fondées sur un régime de liberté surveillée ainsi qu’il résulte de CE Delannoy, déjà mentionné [« cons. qu’il résulte de l’ensemble des prescriptions de l’ordonnance du 2 février 1945, relative a l’enfance délinquante, modifiée par la loi du 24 mai 1951, que le législateur a entendu généraliser dans ce domaine des méthodes de rééducation fondées sur un régime de liberté surveillée ; que la généralisation de l’emploi de ces méthodes crée un risque spécial pour les tiers ; qu’il suit de la responsabilité du service public en raison des dommages causes aux tiers par les enfants confies aux établissements ou lesdites méthodes sont utilisées ne F G H a la preuve d’une faute, mais découle des conditions mêmes dans lesquelles le service fonctionne, sans qu’il y ait lieu de distinguer suivant que les établissements dont s’agit sont de institutions publiques ou des institutions privées habilitées a recevoir des mineurs délinquants, lorsque les mêmes méthodes de rééducation y sont pratiquées » (DELANNOY 19/12/69 74793);]
Dès lors, si la victime a choisi de poursuivre l’établissement qui a la garde du mineur devant les juridictions judiciaires sur le fondement de sa responsabilité de gardien en vertu de l’article 1384 al 1 du code civil, l’établissement est droit de demander à l’Etat de le garantir, en tant qu’il a été mandaté par l’administration qui l’a agréé et à qui il doit rendre des comptes, des conséquences du risque spécial engendré par les méthodes de l’ordonnance du 2/02/45 qui pour lui ont été l’indemnisation de la victime, [car, comme indiqué plus haut, le titulaire de l’action récursoire exerce un droit propre]; l’administration pouvant évidemment opposer, le cas échéant, à cet établissement, les fautes personnelles qu’il aurait commises, appréciées du point de vue de l’administration [et non pas naturellement sur le plan de l’article 1384 al 1 du code civil,] pour limiter l’indemnisation des conséquences du risque spécial.
Cette garantie s’impose, car elle est le corollaire de ce que le tiers peut poursuivre, soit l’établissement devant le juge judiciaire, soit l’Etat devant le juge administratif, comme c’est le cas généralement.
3) sur le préjudice
Une expertise a été ordonnée par les 1ers juges et le Tribunal administratif de Paris attend votre arrêt pour statuer définitivement. Vous devrez donc surseoir à statuer sur les conclusions aux fins d’indemnisation jusqu’à production par le ministre de la justice du rapport de l’expert désigné par le tribunal administratif de PARIS.
PCMNC: Rejet de la requête du Garde des Sceaux.
Condamnation de l’Etat à garantir l’association MONTJOIE et son assureur la MAIF des sommes mises à leur charge au titre de la réparation du préjudice subi par la Z et son assureur le GAN dans la limite des conséquences dommageables de l’incendie du 5 août 1989 non imputables aux fautes commises par la société Z.
Sursis à statuer sur les conclusions aux fins d’indemnisation jusqu’à production par le ministre de la justice du rapport de l’expert désigné par le tribunal administratif de PARIS.
Réserve de tout droits et moyens sur lesquels il n’est pas expressément statué par le présent arrêt jusqu’en fin d’instance.

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