Cour d'appel d'Agen, 26 mars 2013, n° 12/01193

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Agen, 26 mars 2013, n° 12/01193
Juridiction : Cour d'appel d'Agen
Numéro(s) : 12/01193
Décision précédente : Conseil de prud'hommes d'Agen, 13 juin 2012, N° 11/00236

Texte intégral

ARRÊT DU

26 MARS 2013

XXX


R.G. 12/01193


S.A.R.L. CHOCOLATERIE LA CIGALE

En la personne de son représentant légal

C/

Z A


ARRÊT n° 129

COUR D’APPEL D’AGEN

Chambre Sociale

Prononcé à l’audience publique du vingt-six mars deux mille treize par Benoît MORNET, Conseiller, faisant fonction de Président de Chambre, assisté de Nicole CUESTA, Greffière.

La COUR d’APPEL D’AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l’affaire

ENTRE :

S.A.R.L. CHOCOLATERIE LA CIGALE

En la personne de son représentant légal

XXX

XXX

Rep/assistant : Me Claire-Marie CASTELA-COCKENPOT loco Me Serge DAURIAC (avocat au barreau d’AGEN)

APPELANTE d’un jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’AGEN en date du 14 juin 2012 dans une affaire enregistrée au rôle sous le n° R.G. 11/00236

d’une part,

ET :

Z A

né le XXX à VILLENEUVE-SUR-LOT (47300)

XXX

XXX

Rep/assistant : M. D E F (Délégué syndical ouvrier) en vertu d’un pouvoir

INTIMÉ

d’autre part,

A rendu l’arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 19 février 2013 devant Benoît MORNET, Conseiller, faisant fonction de Président de Chambre et Aurélie PRACHE, Conseillère, assistés de Nicole CUESTA, Greffière, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l’arrêt serait rendu. Les magistrats rapporteurs en ont, dans leur délibéré, rendu compte à la Cour composée, outre d’eux-mêmes, de B C, Conseillère, en application des dispositions des articles 945-1 et 786 du Code de Procédure Civile et il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés.

* *

*

— EXPOSÉ DU LITIGE :

Z A a été engagé par la S.A.R.L. CHOCOLATERIE LA CIGALE en qualité d’ouvrier chocolatier saisonnier sur des périodes de 4 à 8 mois de 1989 à 2001 ; il a ensuite été engagé par contrat à durée indéterminée à compter 29 octobre 2001.

Les parties ont mis fin au contrat de travail qui les liait par une rupture conventionnelle du 8 juillet 2011.

Le 13 septembre 2011, Z A a saisi le Conseil de Prud’hommes afin d’obtenir le paiement de la prime d’ancienneté de juillet 2006 à juin 2011 et de dommages et intérêts en raison de non paiement de cette prime auparavant.

Par jugement rendu le 14 juin 2012, le Conseil de Prud’hommes d’AGEN a dit que la Société LA CIGALE doit appliquer l’accord national pluriprofessionnel de mensualisation complétant et modifiant les accords des 23 décembre 1970 et 3 décembre 1974 relatifs à la mensualisation dans diverses branches des industries agro-alimentaires, étendu par arrêté du 19 février 1980 (l’accord national pluriprofessionnel) et l’a condamné en conséquence à payer à Z A les sommes de 5.194,30 € au titre du rappel de prime d’ancienneté et 519,43 € au titre des congés payés afférents, et la somme de 1.200 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du non paiement de cette prime.

La Société LA CIGALE et Z A ont relevé appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délai qui n’apparaissent pas critiquables.

La Société LA CIGALE demande à la Cour d’infirmer le jugement et de débouter Z A de ses demandes.

Elle soutient que la convention collective applicable est la convention collective nationale des détaillants et détaillants fabricants de la confiserie, chocolaterie, biscuiterie du 1er janvier 1984, Y 1286, laquelle annule les précédents accords collectifs ; elle ajoute que l’article L.2252-1 du Code du Travail tel qu’il résulte de la loi du 4 mai 2004 apporte des dérogations au principe de faveur, de sorte que l’accord national pluriprofessionnel du 22 juin 1979 prévoyant le versement d’une prime d’ancienneté sous certaines conditions a été annulé par la convention collective du 1er janvier 1984 et n’est donc pas applicable en l’espèce.

Subsidiairement, elle demande à la Cour de confirmer le jugement en ce qu’il fait remonter l’ancienneté du salarié au 3 septembre 2001et en ce qu’il a limité la prime d’ancienneté à la somme de 5.194,30 €, outre 519,43 € au titre des congés payés afférents, et de l’infirmer en déboutant Z A de sa demande en dommages et intérêts.

Elle soutient que cette prime n’étant due qu’après 3 ans d’ancienneté, soit à partir de 2004, que Z A n’a subi aucun autre préjudice .

Elle sollicite enfin une indemnité de 2.000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

* *

*

Z A demande à la Cour de confirmer le jugement en ce qu’il a dit que la Société LA CIGALE doit appliquer l’accord national pluriprofessionnel, mais de l’infirmer pour le reste et de condamner l’employeur à lui payer les sommes de 9.449,25 € au titre du rappel de prime d’ancienneté de juillet 2006 à juin 2011 et

944,92 € au titre des congés payés afférents, 5.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du non paiement de la prime d’ancienneté depuis décembre 1998, ainsi qu’une indemnité de 1.000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Il soutient que l’accord national pluriprofessionnel prévoit le bénéfice de la prime d’ancienneté, que cet accord a une valeur hiérarchique supérieure à la convention collective IDCC 1286 dont l’employeur revendique l’application, laquelle précise qu’elle ne peut être l’occasion d’une réduction des avantages acquis, et que l’article 45 de la loi du 4 mai 2004 affirme que la valeur hiérarchique accordée aux conventions et accords conclus avant la loi reste opposable aux accord de niveaux inférieurs.

Il soutient ensuite que l’ancienneté doit être calculée en cumulant les contrats saisonniers conformément à l’article 1244-2 du Code du Travail.

— MOTIFS DE LA DÉCISION :

Les deux appels ayant été enrôlée sous deux numéros distincts, il convient d’ordonner la jonction de la procédure n° 12/1194 avec la procédure n° 12/1193.

I – Sur le principe de la prime d’ancienneté :

Aux termes de l’article 1134 du Code Civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Il résulte de l’article 1 du chapitre 1 de l’accord national pluriprofessionnel du 22 juin 1979 de mensualisation complétant et modifiant les accords des 23 décembre 1970 et 3 décembre 1974 relatifs à la mensualisation dans diverses branches des industries agro-alimentaires, étendu par arrêté du 19 février 1980, que cet accord s’applique aux ouvriers travaillant dans les établissements appartenant à des entreprises adhérentes des organisations patronales signataires et dont l’activité ressortit aux chapitres de la nomenclature des activités économiques de l’INSEE (code APE) figurant sur la liste annexé à l’accord.

L’annexe en question mentionne explicitement comme signataire « l’Union des chambres syndicales nationales de chocolatiers, confiseurs, fabricants détaillants de chocolaterie et de confiserie ».

La CHOCOLATERIE LA CIGALE précise elle-même dans ses conclusions, pour revendiquer l’application de la convention collective IDCC 1286, être dans la catégorie des « entreprises qui vendent au détail ou qui fabriquent et vendent une partie non négligeable des confiseries et/ou chocolats et/ou biscuits dans un ou plusieurs magasins ».

Il résulte de ces éléments que les dispositions de l’accord national pluriprofessinnel du 22 juin 1979 étaient applicables à la CHOCOLATERIE LA CIGALE.

L’article 13 de l’accord est rédigé en ces termes :

« Une prime d’ancienneté est attribuée aux salariés bénéficiaires du présent accord.

Sous réserve de la programmation qui lui est applicable et qui ressort du tableau figurant ci-après, cette prime est calculée en appliquant au salaire minimum garanti de la catégorie de l’intéressé, tel qu’il est défini au paragraphe b de l’article 6 du présent accord, un taux déterminé comme suit, en fonction de son ancienneté : 3 % après 3 ans d’ancienneté ; 6 % après 6 ans d’ancienneté ; 9 % après 9 ans d’ancienneté ; 12 % après 12 ans d’ancienneté ; 15 % après 15 ans d’ancienneté".

L’article 5 de la convention collective IDCC 1286 du 1er janvier 1984 revendiquée par l’employeur prévoit que ladite convention « annule et remplace les conventions antérieures » mais précise immédiatement qu’elle « ne peut être l’occasion d’une réduction des avantages acquis à titre individuel et collectif, avant la signature de la convention ».

L’accord national pluriprofessionnel du 22 juin 1979 concerne des domaines d’activité beaucoup plus importants (glaces, charcuterie, industrie alimentaire…) que la convention collective ID 1286 qui ne concerne que la confiserie, chocolaterie et biscuiterie.

Si l’article L.2252-1 dans sa rédaction issue de la loi du 4 mai 2004 prévoit qu’une « convention collective ou un accord professionnel ou interprofessionnel peut comporter des stipulations moins favorables aux salariés que celles qui leur sont applicables en vertu d’une convention ou d’un accord couvrant un champ territorial ou professionnel plus large, sauf si cette convention ou cet accord stipule expressément qu’on peut y déroger en tout ou en partie », l’article 45 de la loi du 4 mai 2004 précise cependant que « la valeur hiérarchique accordée par leur signataires aux conventions et accords conclus avant l’entrée en vigueur de la présente loi demeure opposables aux accords de niveau inférieurs ».

Il résulte de ces textes que la loi du 4 mai 2004 ne remet pas en cause la hiérarchie des normes entre l’accord national pluriprofessionnel du 22 juin 1979 et la convention collective ID 1286 du 1er janvier 1984.

Dès lors, l’article 5 de la convention collective ID 1286 qui prévoit l’annulation des conventions collectives antérieures, ne peut viser que les conventions collectives qui s’appliquaient dans le secteur professionnel des « détaillants et détaillant-fabricants de la confiserie, chocolaterie, biscuiterie » préalablement à la signature de ladite convention, et certainement pas l’accord national pluriprofessionnel des industries agro-alimentaires de 1979, dont le champ professionnel est beaucoup plus large.

Le « nouveau contrat de travail » signé en octobre 2005, quelques jours après la décision du Conseil de Prud’hommes du 29 septembre 2005condamnant l’employeur au paiement de la prime d’ancienneté au bénéfice d’autres salariés, mentionne l’application de "la convention collective n° 3224, confiserie, chocolaterie, biscuiterie (détaillants et détaillant-fabricants).

Ce contrat a été signé sans qu’aucun changement n’intervienne dans la situation de l’entreprise au regard des dispositions de l’article L.22-61 du Code du Travail.

Ce contrat ne comporte aucune renonciation expresse de Z A à la prime d’ancienneté.

Il résulte de ces éléments que ce « nouveau contrat » ne saurait valoir renonciation à la prime d’ancienneté.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que l’accord national pluriprofessionnel s’impose à la CHOCOLATERIE LA CIGALE, de sorte que Z A, qui n’a pas renoncé à la prime, peut prétendre au bénéfice de cette prime d’ancienneté.

II – Sur le calcul de l’ancienneté et de la prime :

Aux termes de l’article 1244-2 du Code du Travail, pour calculer l’ancienneté du salarié, les durées de contrats de travail à caractère saisonnier successifs dans une même entreprise sont cumulées.

La saison du chocolat se situe de l’automne au printemps, incluant les fêtes de X et de Pâques.

En l’espèce, Z A a été engagé par contrats saisonniers successifs selon le détail suivant :

— saison 1989-1990 : du 1er octobre au 31 décembre 1989,

— saison 1990-1991 : du 10 septembre au 13 décembre 1990,

— saison 1991-1992 : du 1er octobre au 31 décembre en 1991,

— saison 1992-1993 : du 1er octobre au 31 décembre 1992,

— saison 1993-1994 : du 8 septembre 1993 au 4 février 1994,

— saison 1994-1995 : du 3 octobre au 31 décembre 1994,

— saison 1995-1996 : du 8 septembre au 14 décembre 1995,

— saison 1996-1997 : du 6 janvier au 31 avril 1997,

— saison 1997-1998 : du 23 septembre 1997 au 10 mai 1998,

— saison 1998-1999 : du 21 septembre 1998 au 31 mai 1999,

— saison 1999-2000 : du 6 septembre 1999 au 31 mai 2000,

— saison 2000-2001 : du 11 octobre 2000 au 23 mai 2001.

Même en l’absence de clause de renouvellement, ces contrats saisonniers sont successifs dans la mesure où ils se sont renouvelés à chaque saison.

Il a ensuite été engagé par contrat à durée déterminée à compter du 3 septembre 2001, lequel s’est poursuivi par contrat à durée indéterminée à compter du 29 octobre 2001.

Conformément aux dispositions de l’article L.1244-2 du Code du Travail, il convient de cumuler ces contrats saisonniers successifs, puisqu’ils se sont renouvelés à chaque saison, ce qui représente une ancienneté de 4 ans, 10 mois et 12 jours puis de les additionner au dernier contrat qui s’est poursuivi en contrat à durée indéterminée pour calculer l’ancienneté de Z A.

Il résulte de ces éléments que Z A avait 3 ans d’ancienneté à compter du 23 novembre 1998, qu’il avait 6 ans d’ancienneté à compter du 20 octobre 2002, qu’il avait 9 ans d’ancienneté à compter du 20 octobre 2005 et qu’il avait 12 ans d’ancienneté à compter du 20 octobre 2008.

Il convient en conséquence de faire droit à la demande de Z A et de condamner l’employeur à lui payer la somme de 9.449,25 € à titre de rappel de prime d’ancienneté sur la période non prescrite de juillet 2006 à juin 2011, outre la somme de 944,92 € au titre des congés payés afférents.

III – Sur la demande en dommages et intérêts :

Le non paiement de la prime d’ancienneté entre novembre 1998 et juin 2006 a nécessairement causé un préjudice à Z A. Il a en effet été privé d’une partie de son pouvoir d’achat et en subit les conséquences au regard de sa pension de retraite nécessairement moindre.

Il convient de condamner l’employeur à réparer ce préjudice qu’il convient d’évaluer de 2.500 €.

IV – Sur les dépens et les demandes d’indemnités au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile :

La Société CHOCOLATERIE LA CIGALE succombant à l’instance, elle en supportera les dépens et sera condamnée à payer à Z A une indemnité de 1.000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Déclare recevables les appels formés contre le jugement rendu le 14 juin 2012 par le Conseil de Prud’hommes d’AGEN ;

Ordonne la jonction de la procédure n° 12/1194 avec la procédure n° 12/1193 ;

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a dit applicable aux relations contractuelles entre les parties l’accord national pluriprofessionnel du 22 juin 1979 ;

Infirme le jugement pour le surplus et statuant à nouveau :

Condamne la S.A.R.L. CHOCOLATERIE LA CIGALE à payer à Z A la somme de 9.449,25 € à titre de rappel de prime d’ancienneté et la somme de 944,92 € au titre des congés payés afférents, et la somme de 2.500 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice du fait du non paiement de la prime d’ancienneté avant juillet 2006 ;

Dit que la S.A.R.L. CHOCOLATERIE LA CIGALE devra remettre à Z A les bulletins de salaires rectifiés pour la période de juillet 2006 à juin 2011, et l’attestation Pole Emploi rectifiée ;

Condamne la S.A.R.L. CHOCOLATERIE LA CIGALE aux dépens de l’instance et à payer à Z A une indemnité de 1.000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Le présent arrêt a été signé par Benoît MORNET, Conseiller, faisant fonction de Président de Chambre, et par Nicole CUESTA, Greffière.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

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