Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 2ème chambre, 29 juin 2011, n° 10/12179

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 2e ch., 29 juin 2011, n° 10/12179
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 10/12179
Décision précédente : Tribunal de commerce de Nice, 9 juin 2010, N° 2009F00983

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

2e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 29 JUIN 2011

N° 2011/ 296

Rôle N° 10/12179

S.A.S. H2X Z ET SHIPS

C/

Société NIGHTINGALE YACHTING LIMITED

Société X Z

Grosse délivrée

le :

à : SIDER

COHEN

PRIMOUT

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de NICE en date du 10 juin 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 2009F00983

APPELANTE

S.A.S. H2X Z ET SHIPS, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice

dont le siège social est sis XXX – XXX

représentée par la SCP SIDER, avoués à la Cour,

plaidant par Me Bruno SOLLE substitué par Me Virginie HUG DE LARAUZE, avocats au barreau de PARIS

INTIMEES

Société NIGHTINGALE YACHTING LIMITED, prise en la personne de son représentant légal en exercice

dont le siège XXX

représentée par la SCP COHEN GUEDJ, avoués à la Cour,

plaidant par Me Bertrand COSTE, avocat au barreau de MARSEILLE

Société X Z, prise en la personne de son représentant légal en exercice

dont le siège social est sis XXX – XXX

représentée par la SCP PRIMOUT-FAIVRE, avoués à la Cour,

plaidant par Me Alain GOHAUD, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 30 mai 2011 en audience publique. Conformément à l’article 785 du Code de procédure civile, Monsieur Robert SIMON, Président, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Robert SIMON, Président

Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller

Monsieur André JACQUOT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Mireille MASTRANTUONO

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 juin 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 juin 2011,

Signé par Monsieur Robert SIMON, Président, et Madame Mireille MASTRANTUONO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * *

La société Nightingale Yachting Ltd, immatriculée dans l’Ile de Man a signé, le 15 juillet 2009, un compromis de vente avec la S.A.S. H2X Z & Ships, constructeur, portant sur un navire neuf le 'Bradley’ Z de type MCAT 88 moyennant le prix de 3.250.000 €, avec paiement d’un acompte de 325.000 € (10 % du prix) et sous la triple condition *d’une expertise si possible avant le 25 juillet 2009, *d’une certaine certification donnée par l’organisme MCA en catégorie 2 pour un Z commercial d’affrètement et *d’une garantie de deux années concernant la structure du navire.

La société X Z est intervenue au compromis de vente, en qualité de broker maritime (courtier) et a été désignée séquestre de la somme de 325.000 € versée par la société Nightingale Yachting Ltd. Celle-ci s’est rétractée, les 23 et 27 juillet 2009, en invoquant principalement, le 23 juillet 2009, suite au dépôt d’un rapport d’expertise une vitesse insuffisante.

Par jugement contradictoire en date du 10 juin 2010, le Tribunal de Commerce de NICE, prononçant la résiliation du compromis de vente aux torts de la S.A.S. H2X Z & Ships, l’a condamnée à payer à la société Nightingale Yachting Ltd la somme de 325.000 € versée à titre d’acompte et dit que la société X Z devra se libérer de cette somme entre les mains de la société Nightingale Yachting Ltd, outre celle de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La S.A.S. H2X Z & Ships a régulièrement fait appel de ce jugement dans les formes et délais légaux.

Vu les dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile dans leur rédaction issue du décret N 98-1231 en date du 28 décembre 1998.

Vu les conclusions d’appelante N 2 de la S.A.S. H2X Z & Ships en date du 1er février 2011 tendant à faire juger :

— que le Z Bradley est conforme aux spécifications contractuelles si bien que la résolution du compromis de vente ne pouvait être prononcée aux torts exclusifs du vendeur,

— que la société Nightingale Yachting Ltd n’avait pas fait de la vitesse du Z une condition de la vente, la vitesse n’ayant jamais été un critère de son choix et le rapport d’expertise n’étant pas fiable sur l’impossibilité d’atteindre la vitesse maximale de 25 n’uds,

— que la stipulation d’une expertise n’impliquait pas que tel ou tel résultat devait être atteint et que la vente résulte de la seule volonté de l’acquéreur,

— que les deux restrictions émises (non-navigation du Z pendant la nuit et pendant plus de 24 heures en mer) quant à l’obtention de la certification pouvaient être aisément levées,

— que la société Nightingale Yachting Ltd a entendu se défaire vente pour des motifs fallacieux et devra répondre de sa faute contractuelle qui a entraîné un préjudice constitué par la différence (1.250.000 €) entre le prix arrêté dans la vente considérée et le prix obtenu ultérieurement, soit 2.000.000 € ;

Vu les conclusions récapitulatives de la société Nightingale Yachting Ltd en date du 28 janvier 2011 tendant à faire juger :

— que la stipulation d’une expertise permet à l’acquéreur de se soustraire à ses obligations au cas où l’expertise révélerait objectivement des désordres, il ne s’agit pas d’une condition potestative,

— que l’expertise a révélé deux défauts majeurs : une vitesse maximale insuffisante (déficit de 20 % 21,1 n’uds au lieu de 25 comme figurant sur les spécifications techniques) et la non-obtention d’une certification sans réserves (bastingage d’une hauteur non réglementaire et restrictions importantes à la navigation (impossible de nuit et pour durée excédant 24 heures),

— que la résolution de la vente entraînant la restitution de l’acompte est encourue et que la société X Z, courtier est engagée pour avoir rédigé un contrat incomplet et déséquilibré en faveur du seul vendeur, outre d’avoir vendu à l’insu de la société Nightingale Yachting Ltd le Z à un autre acheteur ;

Vu les conclusions de la société X Z en date du 21 octobre 2010 tendant à faire juger :

— que la société Nightingale Yachting Ltd ne peut obtenir la résolution de la vente qui a été conclue de manière ferme et définitive, aucun vice rédhibitoire n’ayant été découvert par l’expert de l’acquéreur,

— que le critère de la vitesse du Z indifférent à l’acheteur ne peut être retenu comme un élément essentiel de la vente, le 'zèle’ de l’expert à pointer des défauts ou des non-conformités étant patent,

— que les restrictions contenues dans le certificat obtenu n’empêchent pas l’utilisation du Z comme 'charter’ qui est celle actuelle du Z acheté par une société qui l’exploitait de cette manière,

— que la société Nightingale Yachting Ltd doit au courtier le montant de la commission qu’il était en droit d’attendre d’une vente parfaite, soit 325.000 €,

— qu’en toute hypothèse, elle (la société X Z) n’a commis aucune faute lors de la présentation de la société Nightingale Yachting Ltd à la S.A.S. H2X Z & Ships et en trouvant un autre acquéreur après l’annulation intempestive de la vente par la société Nightingale Yachting Ltd ;

L’ordonnance de clôture de l’instruction de l’affaire a été rendue le 4 février 2011.

Attendu que le compromis de vente du 15 juillet 2009 a été conclu sous « conditions spéciales » *de l’exécution d’un expertise si possible avant le 25 juillet 2009 et *de l’enregistrement au Royaume Uni du navire « sous un statut de Z commercial d’affrètement », le vendeur s’engageant à organiser une inspection du navire pour l’obtention « aussitôt que possible » de ce statut et d’un certificat délivré par l’organisme « MCA » (Maritime & Coast Guard Agency) en catégorie 2 ; que la société Nightingale Yachting Ltd a fait procéder à ses frais, pendant deux journées, les 16 et 17 juillet 2009, à des essais en mer à l’issue desquels sur la foi du rapport de son expert, elle a exprimé, le 23 juillet 2009, puis le 27 juillet 2009, son intention de ne pas donner suite à la vente au motif invoqué initialement d’une vitesse maximale insuffisante, puis au motif d’une non-obtention possible de la certification MCA ou de son obtention avec des restrictions affectant de manière importante l’utilisation du Z ;

Attendu que les parties ont entendu conditionner l’efficacité de la vente à la condition, d’usage en matière de vente de navires, que le navire vendu soit soumis à une expertise ou à des essais en mer pour vérifier ses qualités annoncées ; qu’il ne s’agit pas d’une condition potestative permettant à l’acquéreur de se délier à sa discrétion d’un engagement ferme et définitif ; que l’expertise et les essais en mer lui permettaient d’apprécier les qualités et l’état annoncés du navire et, en cas de non-conformités avérées ou de découverte de vices importants, de rompre la vente ; que l’article 4 du compromis envisage expressément la condition spéciale de la vente (résolutoire) en stipulant que « dans le cas où la vente ne serait pas conclue en raison des conditions spéciales non satisfaites », l’acompte de 325.000 € serait restitué à l’acquéreur ; que la finalité de l’expertise qui ne se confond pas avec les autres essais pratiqués sans la présence d’un homme de l’art, les 25 juin et 6 juillet 2009, avant la signature du compromis, était bien de permettre à la société Nightingale Yachting Ltd de se délier de son engagement pour des motifs objectifs tenant à l’état du navire ; que la commune intention des parties était bien de permettre à l’acquéreur, la société Nightingale Yachting Ltd, de se soustraire pour des motifs objectifs aux engagement qu’elle avait souscrits ; que l’instauration de l’expertise après la vente ne s’explique par autrement ; que lui dénier cet effet serait priver le compromis de toute portée à cet égard ; que l’expert de la société Nightingale Yachting Ltd a mis en évidence deux défauts ; que, premièrement, il a constaté que le Z n’atteignait pas dans des conditions habituelles, requises (c’est-à-dire à mi-charge en fuel, eaux usées et propres et en passagers), la vitesse maximale indiquée de 25 n’uds ; que la S.A.S. H2X Z & Ships ne conteste pas qu’il est impossible au navire d’atteindre la vitesse maximale, seule la vitesse de 21,1 n’uds étant atteinte au cours des essais en mer ; qu’il était loisible à la S.A.S. H2X Z & Ships de rapporter la preuve par tous moyens que l’affirmation de l’expert était erronée, ce qu’elle n’a pas fait ; que la spécification technique du catamaran à moteur mentionnant une vitesse maximale de 25 n’uds est entrée dans le champ contractuel, dès lors que la présentation du navire était accompagnée de la remise d’un document décrivant toutes les performances du Z, dont celle-ci ; qu’il importe peu que le gérant de la société Nightingale Yachting Ltd ait exprimé au courtier, la société X Z, lorsqu’il cherchait à acquérir un navire que sa femme n’était pas intéressée par la vitesse du navire, mais plutôt par sa stabilité ; que la vitesse promise dans les spécifications techniques ne pouvait être atteinte ; que cette non-conformité ne peut être excusée par le fait que la vitesse maximale ne constituerait pas une préoccupation majeure de l’acquéreur et que celui-ci n’en aurait pas fait une condition essentielle de son acquisition ; que la société Nightingale Yachting Ltd n’a rien exprimé à ce propos dans le compromis ; que secondement et principalement, la S.A.S. H2X Z & Ships s’était engagée à vendre un Z répondant à certaines caractéristiques permettant à son propriétaire d’obtenir un certain niveau de certification et d’exploiter commercialement le navire comme « charter » ; que l’expert avait relevé que certains équipements, notamment la hauteur du bastingage (89 centimètres au lieu de 100 centimètres) empêcheraient la certification ; que, de fait, la S.A.S. H2X Z & Ships a fourni une certification délivrée, le 30 juillet 2009, par l’autorité de certification et valable une année, qui comportait deux importantes restrictions : navigation en mer exclusivement de jour et ne pouvant excéder plus de 24 heures ; que ces restrictions, quelle que soit leur cause (en l’espèce, elles tenaient à l’utilisation de vitres teintées nuisant à la visibilité pour la navigation) ne sont pas habituelles pour des navires de cette qualité et de cette taille et sont susceptibles de gêner l’exploitation commerciale alors que les spécifications techniques prévoient une autonomie (1.000 miles nautiques à une vitesse de 10 n’uds) bien supérieure à 24 heures et que surtout la certification devait être obtenue sans restrictions importantes et incompatibles à une exploitation commerciale ; que, de plus, la S.A.S. H2X Z & Ships ne conteste pas que l’exigence d’une certaine hauteur du bastingage pour obtenir la certification est exacte ; que même non relevé par l’organisme certificateur pour l’année considérée, ce défaut est susceptible d’entraîner un refus de la certification valable pendant une année, lors de son renouvellement ; que la S.A.S. H2X Z & Ships n’a pas satisfait à son engagement d’obtenir une certification sans restrictions pour une utilisation commerciale du Z en tant que « charter », comme elle s’y était engagée dans le compromis ; que la société Nightingale Yachting Ltd était donc fondée à invoquer la « condition spéciale » insérée au compromis fonctionnant comme une condition résolutoire de la vente et à réclamer la restitution de l’acompte versé conformément à l’article 4 du compromis ;

Attendu que la société X Z n’a commis aucune faute ou « déloyauté » à l’occasion de son activité de courtier ; qu’elle n’avait pas l’obligation d’utiliser un certain modèle de contrat qui serait en vigueur dans la profession ; qu’en outre le compromis signé comportait bien une clause résolutoire de la vente en cas d’expertise révélant l’existence de désordres ;

Attendu que le jugement mérite confirmation pour les motifs exposés ci-dessus et ceux non contraires des premiers juges ;

Attendu que l’équité commande de faire application de l’article 7OO du code de procédure civile ; que la S.A.S. H2X Z & Ships tenue aux dépens devra payer à la société Nightingale Yachting Ltd une somme de 4.000 € au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

La Cour, statuant suivant arrêt contradictoire par sa mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour d’Appel,

Déclare recevable l’appel interjeté par la S.A.S. H2X Z & Ships.

Au fond, confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Y ajoutant, condamne la S.A.S. H2X Z & Ships à porter et payer à la société Nightingale Yachting Ltd la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel.

Condamne la S.A.S. H2X Z & Ships aux dépens dont distraction au profit des avoués de la cause qui en ont fait la demande, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

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