Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre c, 15 décembre 2011, n° 09/15039

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 8e ch. c, 15 déc. 2011, n° 09/15039
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 09/15039
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Marseille, 1er juillet 2009, N° 07/03166
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 29 décembre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

8e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 15 DECEMBRE 2011

N° 2011/522

Rôle N° 09/15039

[O] [C]

C/

SA CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE PROVENCE ALPES CORSE

Grosse délivrée

le :

à :BOTTAI

SIDER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 02 Juillet 2009 enregistré au répertoire général sous le n° 07/03166.

APPELANT

Monsieur [O] [C]

né le [Date naissance 2] 1972 à [Localité 3], demeurant [Adresse 1]

représenté par la SCP BOTTAI GEREUX BOULAN, avoués à la Cour, assisté de Me GALLO Stéphane de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE PROVENCE ALPES CORSE, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, dont le siège est [Adresse 4]

représentée par la SCP SIDER, avoués à la Cour, assistée de Me Bernard JACQUIER, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 08 Novembre 2011 en audience publique. Conformément à l’article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président

Monsieur Jean-Noël ACQUAVIVA, Conseiller

Madame Marie-Claude CHIZAT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Décembre 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Décembre 2011,

Rédigé par Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président,

Signé par Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

LA COUR

La Caisse d’épargne et de prévoyance Provence Alpes Corse (la Caisse d’épargne) a consenti à M. [O] [C] :

— selon une offre acceptée le 9 février 2000, réitérée par acte notarié du 2 mars 2000, un prêt immobilier de 220 000F au taux effectif global (TEG) stipulé pour 6,64% ;

— selon une offre acceptée le 21 janvier 2002, réitérée par acte notarié du 26 février 2002, un prêt immobilier de type 'épargne logement’ d’un montant de 22 000 € au TEG stipulé pour 4,17%.

Après avoir fait vérifier l’exactitude du TEG par M. [J] [I], spécialisé en mathématiques financières, M. [C] a fait assigner la Caisse d’épargne, le 13 mars 2007, en nullité des stipulations de l’intérêt conventionnel.

Par jugement du 2 juillet 2009, le tribunal de grande instance de Marseille a :

— écarté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action en relevant que les énonciations des actes prêts n’étaient pas de nature à faire apparaître une erreur dans le calcul des TEG, en sorte que la prescription n’a couru qu’à compter de la révélation de cette erreur par l’effet de la remise, le 26 mars 2006, des analyses effectuées par M. [I] ;

— rejeté la demande en nullité en retenant que les frais d’actes et de garanties ne pouvaient être établis avec précision et que les frais d’assurance-incendie n’ont pas un lien direct et exclusif avec le crédit, s’agissant d’une obligation qui incombe à tout propriétaire d’immeuble ;

— condamné M. [C] aux dépens et au paiement de la somme de 1 200 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

M. [C] est appelant de ce jugement.

****

Vu les conclusions déposées le 1er septembre 2011par M. [C] ;

Vu les conclusions déposées le 3 octobre 2011 par la Caisse d’épargne ;

Vu l’ordonnance de clôture du 11 octobre 2011 ;

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes en nullité des stipulations d’intérêts

Il résulte de la combinaison des articles L 313-1 et L 313-2 du code de la consommation que le taux effectif global (TEG) doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt et que la détermination de ce taux doit prendre en compte les frais intervenus dans l’octroi du crédit.

S’agissant d’un crédit consenti à un non-professionnel, la prescription quinquennale de l’action en nullité de la stipulation de l’intérêt conventionnel engagée par l’emprunteur à raison d’une erreur affectant le TEG court, de même que l’exception de nullité d’une telle stipulation contenue dans un acte de prêt ayant reçu un commencement d’exécution, à compter du jour où l’emprunteur a connu ou aurait dû connaître cette erreur. Il en résulte que le point de départ de la prescription est la date de la convention lorsque l’examen de sa teneur permet de constater l’erreur, ou, lorsque tel n’est pas le cas, la date de la révélation de celle-ci à l’emprunteur.

La banque reconnaît que les frais d’assurance contre le risque d’incendie des immeubles financés et affectés en garantie n’ont pas été pris en compte dans le calcul des TEG mentionnés sur les offres de prêt et sur les actes notariés. Elle soutient que cette circonstance a été portée à la connaissance de l’emprunteur par l’article 9 des conditions générales des crédits, en sorte que la prescription des actions en nullité fondées sur cette irrégularité a couru à compter de la date des conventions. Au surplus, elle prétend que l’assurance contre l’incendie, qui incombe à tout propriétaire d’un bien immobilier, n’était pas une condition de l’octroi des crédits.

Mais il résulte de l’article 18 des conditions générales des prêts immobiliers consentis par la Caisse d’épargne que les emprunteurs doivent contracter 'dans les plus brefs délais possibles’ une assurance garantissant pendant la durée du prêt les risques incendie des immeubles donnés en garantie et qu’à défaut le prêteur pourra soit assurer lui-même les biens aux frais des emprunteurs, soit exiger le remboursement anticipé des sommes restant dues.

Cette clause des conventions de prêt ayant pour effet de mettre à la charge de l’emprunteur des frais d’assurance contre l’incendie, de caractère obligatoire, à peine de déchéance du terme, ces frais entraient dans le champ du TEG et il incombait à la banque de s’informer de leur coût avant de procéder à la détermination du taux.

M. [C], qui n’avait pas à suspecter le caractère erroné du TEG dont les modalités de calcul sont complexes, n’était pas en mesure de constater l’erreur par l’examen de la teneur des conventions, dès lors, d’un côté, que les mentions 'frais de garantie : 0,00" et 'frais de garantie indéterminées’ portées sur les offres de prêts étaient insuffisamment précises pour l’informer de l’absence de prise en compte des frais d’assurance – incendie et, d’un autre côté, que l’énumération portée à l’article 9 des conditions générales quant aux éléments pris en compte dans le calcul du TEG n’est pas limitative puisqu’il est spécifié que le taux prend en compte 'notamment des primes d’assurance décès-invalidité, des frais de dossiers et des frais de garantie'.

Il s’ensuit que la prescription quinquennale des demandes en nullité, qui n’a commencé à courir qu’à compter de la révélation de l’erreur intervenue en 2006 à la suite de la remise du rapport d’analyse établi par M. [I], n’était pas acquise lorsque ces demandes ont été formées le 13 mars 2007.

Les demandes en nullité des stipulations d’intérêt conventionnel sont, dès lors, recevables et elles doivent être accueillies, en sorte que la banque ne peut se prévaloir que d’intérêts calculés au taux légal.

Sur les demandes en déchéance du droit aux intérêts

Les demandes en déchéance du droit aux intérêts, formées pour la première fois en appel par conclusions du 9 novembre 2010, ne constituent pas des prétentions nouvelles au sens de l’article 564 du code de procédure civile dès lors qu’elles tendent, comme les demandes originaires en nullité des stipulations de l’intérêt conventionnel, à la répétition des intérêts payés.

L’action en déchéance du droit aux intérêts prévue à l’article L 312-33 du code de la consommation est soumise, qu’elle soit formée par voie d’action ou d’exception, à la prescription décennale édictée par l’article L 110-4 du code de commerce dans sa rédaction applicable en la cause, antérieure à l’entrée en vigueur de la loi N° 2008-561 du 17 juin 2008.

La déchéance ne sanctionnant pas une condition de formation du contrat, le point de départ de la prescription de l’action est fixé à la date de l’acceptation de l’offre, sans qu’il puisse être retardé à la date à laquelle l’irrégularité a été découverte.

Il s’ensuit que la prescription décennale n’est pas acquise.

Mais la cour, qui doit apprécier la mesure de la sanction, considère qu’il n’y a pas lieu, au cas particulier, de déchoir la banque des intérêts au taux légal.

****

Le jugement attaqué est infirmé, sauf en ce qu’il a écarté la fin de non recevoir tirée de la prescription des demandes en nullité des stipulations de l’intérêt conventionnel.

La Caisse d’épargne doit être condamnée à restituer à M. [C] la différence entre les intérêts perçus et ceux qui résultent de l’application aux conventions de prêt des intérêts calculés au taux légal.

Les dépens sont à la charge de la Caisse d’épargne.

L’équité ne commandant pas l’application de l’article 700 du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de condamner la Caisse d’épargne à rembourser les frais d’étude financière exposés par M. [C].

PAR CES MOTIFS

La Cour

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement attaqué, sauf en ce qu’il a écarté la fin de non recevoir tirée de la prescription des demandes en nullité des stipulations de l’intérêt conventionnel,

Statuant à nouveau

Prononce la nullité des stipulations de l’intérêt conventionnel des actes de prêt constatés par actes notariés des 2 mars 2000 et 26 février 2002,

Condamne la Caisse d’épargne et de prévoyance Provence Alpes Corse à restituer à M. [C] la différence entre les intérêts perçus et ceux qui résultent de l’application aux conventions de prêt des intérêts calculés au taux légal,

Déclare recevables les demandes en déchéance du droit aux intérêts,

Dit n’y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts au taux légal,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la Caisse d’épargne et de prévoyance Provence Alpes Corse aux dépens,

Vu l’article 699 du code de procédure civile,

Autorise, si elle en a fait l’avance sans avoir reçu provision, la SCP d’avoués Bottaï – Gereux – Boulan à recouvrer les dépens d’appel directement contre la Caisse d’épargne et de prévoyance Provence Alpes Corse.

Le Greffier Le Président

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