Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre, 1er avril 2016, n° 14/18986

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 18e ch., 1er avr. 2016, n° 14/18986
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 14/18986
Importance : Inédit
Sur renvoi de : Cour de cassation, 18 juin 2014
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 1 novembre 2022
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Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

18e Chambre

ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT AU FOND

DU 01 AVRIL 2016

N°2016/229

TC

Rôle N° 14/18986

URSSAF [Localité 1]

C/

SA AUTOGRILL COTE FRANCE

MNC – MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D’AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE

Grosse délivrée

le : 01/04/2016

à :

URSSAF [Localité 1]

Me Olivier RODOLPHE, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le : 01/04/2016

Décision déférée à la Cour :

Arrêt en date du 1er avril 2016 prononcé sur saisine de la Cour suite à l’arrêt rendu par la Cour de Cassation en date du 19 Juin 2014, qui a cassé l’arrêt rendu le 20 juin 2013 rendu par la Cour d’appel D’AIX-EN-PROVENCE (14è chambre)

APPELANTE

URSSAF [Localité 1], demeurant [Adresse 3]

représenté par Mme [F] [N] (Inspectrice du contentieux) en vertu d’un pouvoir général

INTIMEE

SA AUTOGRILL COTE FRANCE, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Olivier RODOLPHE, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE ([Adresse 1])

substitué par Me Tiphaine LE BIHAN, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

MNC – MISSION NATIONALE DE CONTRÔLE ET D’AUDIT DES ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE, demeurant [Adresse 4]

non comparant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 18 Février 2016 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Chantal BARON, Présidente de chambre

Monsieur Jean-Bruno MASSARD, Conseiller

Monsieur Thierry CABALE, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Caroline LOGIEST.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 Avril 2016

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 01 Avril 2016

Signé par Madame Chantal BARON, Présidente de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A la suite d’un contrôle effectué jusqu’au 07 juillet 2009, portant sur les années 2006 à 2008, l’ Urssaf [Localité 1] a notifié à la société Autogrill Côté France ( la société ) une lettre d’observation du 08 septembre 2009 aux termes de laquelle les salariés de l’établissement contrôlé travaillant en équipe en continu, soit le matin, de 7 heures à 15 heures, soit le soir, de 15 heures à 23 heures, et les bulletins de salaires mentionnant un avantage en nature pour le repas effectivement pris soit le midi, soit le soir, outre une indemnité compensatrice de nourriture non-attribuée sous la condition de présence du salarié dans l’établissement au moment du second repas, l’employeur ne pouvait pratiquer la réduction de cotisation prévue par les articles L 241-14 et D 241-14 du code de la sécurité sociale sur l’ensemble de ces indemnités.

Le 10 janvier 2010, la société a saisi la commission de recours amiable pour contester le redressement, portant sur une somme totale de 580.114 euros au titre des années 2006 à 2008, résultant de la réintégration, dans l’assiette des cotisations sociales, de sommes qui en avaient été exclues au titre des indemnités compensatrices de nourriture versées aux salariés,

Aux termes d’une décision du 21 juillet 2010, au motif que la société n’établissait pas l’usage dont elle se prévalait quant à l’obligation de nourriture, laquelle est subordonnée à la présence du salarié dans l’entreprise au moment du second repas, la commission de recours amiable a rejeté le recours de la société et a maintenu le redressement à concurrence de son montant précité et des majorations de retard.

Le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône, par jugement du 10 février 2012, a infirmé la décision de la commission de recours amiable et a annulé le chef de redressement pour un montant total de 634.879 euros, pénalités incluses, ainsi que les mises en demeure datées des 11,14 et 16 décembre 2009, motifs pris de ce qu’en l’absence de valeur normative de la circulaire Acoss du 03 novembre 1998 qui ajoute aux dispositions législatives et réglementaires et qui ne définit ni la nature ni les modalités de l’obligation de nourriture prévue par l’arrêté du 22 février 1946, la réduction des cotisations au titre de l’obligation de nourriture s’applique, conformément à l’usage dont la société justifie, pour les deux repas quotidiens sous la seule réserve que le salarié soit présent dans l''établissement au moins cinq heures continues.

Ce jugement a été confirmé par arrêt de la présente cour du 20 juin 2013 qui a été cassé et annulé en toutes ses dispositions par arrêt de la cour de cassation du 19 juin 2014, pour violation de l’article L 241-14 du code de la sécurité sociale, alors en vigueur, et de l’article 7 de l’arrêté du 22 février 1946 modifié, en ce que,'pour annuler le redressement, «'l’arrêt, après avoir constaté que les salariés travaillent en équipe soit de 7 à 15 heures, soit de 15 à 23 heures et que la société s’acquitte de son obligation de nourriture à leur égard en leur fournissant un repas et en leur versant une indemnité compensatrice de nourriture, retient qu’il existe un usage constant faisant obligation à celle-ci de fournir deux repas par jour aux salariés travaillant plus de 5 heures par jour, peu important qu’ils soient présents lors du second repas'».

La cause et les parties ont été renvoyées devant la présente cour, autrement composée.

Par des écritures reprises oralement à l’audience du 18 février 2016, l’Urssaf sollicite de la cour qu’elle’infirme le jugement entrepris, qu’elle confirme le redressement et la décision de la commission de recours amiable, et qu’elle condamne la société à lui payer la somme de 580.114 euros outre les majorations de retard, ainsi qu’une somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile/

Elle soutient':

d’une part,'que les demandes, nouvelles et non-soutenues in limine litis, aux fins d’annulation du contrôle, sont irrecevables, à défaut, qu’elle ne sont pas fondées, dès lors qu’ un avis de passage avant contrôle a bien été réceptionné par la société le 09 février 2009, et que la société ne soutient ni ne justifie que la lettre d’observation qui lui a été notifiée, qu’elle doit verser aux débats, comporterait la signature d’un seul des deux inspecteur ayant procédé au contrôle, alors que son propre duplicata, qui ne contient qu’une signature, n’est pas soumise à l’exigence des deux signatures,

d’autre part, que le redressement est fondé en ce que la société ne justifie pas du bénéfice de la réduction de cotisation, au regard des articles L 241-14, L 242-1 et D 241-14 du code de la sécurité sociale outre D 141-7 et D 141-8 du code du travail, et de l’arrêté du 22 février 1946 modifié, pour les indemnités compensatrices de nourriture versées à ses salariés au titre du second repas en cas d’impossibilité de leur fournir, dès lors qu’elle ne prouve leur présence effective dans l’établissement ni au moment des repas du personnel ou de la clientèle, ni à l’ouverture de l’entreprise à la clientèle à l’heure normale des repas, conditions rappelées, tant par la circulaire ministérielle du 09 mars 1990, qui fixe les heures de repas, sans distinction, de 12 à 14 heures et de 18 à 20 heures, que par la lettre du ministre des affaires sociales du 14 janvier 1988 et par la lettre-circulaire Acoss du 10 août 1989, peu important l’existence d’un usage contraire de la profession.

Aux termes de conclusions écrites reprises oralement à l’audience, la société sollicite de la cour la confirmation du jugement entrepris, l’annulation de la décision de la commission de recours amiable, du redressement et des mises en demeures des 11, 14 et 16 décembre 2009, le rejet des demandes de l’Urssaf et sa condamnation à lui payer la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Elle soutient':

que le contrôle et le redressement sont irréguliers, d’une part, en l’absence d’avis de passage conforme reçu par l’assujettie mentionnant la date et l’heure de la première visite et l’assistance facultative par un conseil de son choix, d’autre part, en raison de la présence d’une seule signature dans la lettre d’observations versée aux débats par l’Urssaf, alors que les signatures des deux inspecteurs ayant procédé au contrôle sont exigées par les dispositions de l’article R 243-59 du code de la sécurité sociale,

que le redressement n’est pas fondé puisqu’il ne s’appuie que sur des dispositions non-créatrices de droit ou qui ne lui sont pas opposables, alors qu’en l’absence de définition législative ou réglementaire de l’obligation de nourriture prévue par l’arrêté du 22 février 1946 modifié, l’usage de la profession, imposé par les accords et conventions collectives, veut que tout salarié travaillant plus de cinq heures par jour bénéficie de l’avantage cumulé de deux repas par jour, y compris sous la forme d’indemnités compensatrices, les conditions énoncées dans la circulaire Acoss du 03 novembre 1998 étant par ailleurs réunies, dès lors que le restaurant est ouvert suivant une amplitude horaire de 7 à 23 heures et que les salariés de l’établissement, travaillant de 7 à 15 heures ou de 15 à 23 heures, sont nécessairement présents au moment des repas de la clientèle qui peut se restaurer en continu de 7 à 23 heures, sans qu’il y ait lieu de se référer à la notion, non-exigée par les textes, surannée et inadaptée, d’heures de repas dites «'normales'».

La Mission Nationale de contrôle et d’audit des organismes de sécurité sociale est non-comparante.

MOTIFS':

Sur l’irrecevabilité tirée des demandes nouvelles :

Aucun texte n’exige que l’irrégularité formelle d’un redressement opéré au titre des cotisations dues à l’Urssaf soit invoquée avant que soit contesté sur le fond ce redressement, les dispositions de l’article 74 du nouveau code de procédure civile ne régissant que les exceptions de procédure.

Les demandes de nullités tirées de l’irrégularité du contrôle ne peuvent être déclarées irrecevables au motif qu’elles n’auraient pas été soulevées dans l’instance en appel ayant donné lieu à cassation intégrale, l’ affaire étant à nouveau jugée en fait et en droit par la juridiction de renvoi et la recevabilité des prétentions nouvelles étant soumise aux règles applicables devant la juridiction dont la décision a été cassée.

Il résulte de l’article 564 du code de procédure civile, qu’à peine d’irrecevabilité soulevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour d’appel de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait. Selon l’article 565 du même code, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges, même si leur fondement juridique est différent. Les demandes d’annulation du contrôle au motif de son irrégularité formelle, outre du redressement et des mises en demeure qui en ont découlé, ne sont pas nouvelles au sens des dispositions susvisées, dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que la demande soutenue en première instance d’annulation du redressement comme étant non-fondé.

Les demandes sont donc recevables.

Sur la régularité du contrôle':

— En application des dispositions de l’article R 243-59 alinéa 1, alors en vigueur, l’Urssaf doit justifier, à peine de nullité du contrôle et des redressements et mises en demeure dont il constitue le support nécessaire, s’agissant d’une formalité substantielle destinée à assurer le caractère contradictoire du contrôle et le respect des droits de la défense, de l’envoi, avant le contrôle, d’un avis adressé à la société par lettre recommandée avec avis de réception, mentionnant la date et de l’heure de la première visite, que lui sera remis, dès le début du contrôle, un document présentant la procédure de contrôle et les droits dont elle dispose pendant son déroulement et à son issue et précisant l’adresse électronique où ce document est consultable, enfin, que la société a le droit pendant le contrôle de se faire assister du conseil de son choix.

L’Urssaf démontre s’être acquittée de cette formalité par un avis de contrôle du 03 février 2009, adressé à la société par lettre recommandée, dont l’avis de réception comporte un tampon-dateur à son nom avec la date du 09 février 2009, qui annonce une première visite du 25 février 2009 à 9 heures et contenant toutes les mentions exigées.

— Par application de l’article R 243-59 alinéa 5, l’Urssaf est tenue de démontrer la communication à la société, à l’issue du contrôle, d’un document daté et signé par les inspecteurs comportant certaines mentions et l’informant qu’elle dispose d’un délai de trente jours pour répondre par lettre recommandée avec accusé de réception aux observations avec la faculté de se faire assister d’un conseil de son choix

Il appartient à l’organisme de prouver que ce document, daté et signé par le ou les inspecteurs qui ont procédé au contrôle, a bien été communiqué à la société, formalités substantielles destinées à assurer le caractère contradictoire du contrôle et le respect des droits de la défense, dont le non-respect entraîne la nullité du redressement et des mises en demeure consécutifs.

Aux termes de son courrier du 10 janvier 2010 pour saisine de la commission de recours amiable, la société a confirmé avoir reçu la lettre d’observations le 17 septembre 2009, à laquelle elle a répondu par lettre du 28 septembre 2009.

Toutefois, la lettre d’observations versée aux débats en copie par l’Urssaf, qui ne contient pas la mention 'duplicata’ et qui est présumée fidèle à l’original dès lors qu’elle même s’en prévaut pour démontrer l’existence des mentions obligatoires portées à la connaissance de la société, ne comporte qu’une signature, quand il est incontestable que le contrôle a été effectué par deux inspecteurs dont les identités et qualité y sont indiquées.

Cette méconnaissance d’une formalité substantielle doit entraîner l’annulation du redressement et des mises en demeure qui ont suivi la lettre d’observations irrégulière.

La demande reconventionnelle soutenue par l’Urssaf afin d’obtenir la condamnation de la société au paiement des sommes objets du redressement sera donc rejetée.

Sur les frais irrépétibles':

Il apparaît équitable de ne pas faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, sur renvoi de cassation, et par mise à disposition au greffe:

Vu son arrêt en date du 20 juin 2013,

Vu l’arrêt de la Cour de cassation en date du 19 juin 2014

Déclare recevables les demandes de la Sas Autogrill Côté France afin d’obtenir l’annulation, pour irrégularité formelle, du contrôle opéré par l’Urssaf, ainsi que du redressement et des mises en demeures qui l’ont suivi.

Dit nuls le contrôle opéré par l’Urssaf ainsi que les redressement et mises en demeures qui l’ont suivi.

Confirme, par substitution de motifs, le jugement entrepris, en ce qu’il a infirmé la décision de la commission de recours amiable et a annulé le redressement pour un montant total de 634.879 euros, pénalités incluses, ainsi que les mises en demeure datées des 11,14 et 16 décembre 2009.

Y ajoutant:

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Déboute les parties de leurs autres demandes.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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