Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-5, 23 janvier 2020, n° 17/17085

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 4-5, 23 janv. 2020, n° 17/17085
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 17/17085
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Nice, 24 juillet 2017, N° 15/1444
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-5

ARRÊT AU FOND

DU 23 JANVIER 2020

N° 2020/

MA

Rôle N°17/17085

N° Portalis DBVB-V-B7B-BBGKT

I H épouse X

C/

SAS CABINET D’ETUDES R MERLIN

Copie exécutoire délivrée

le : 23/01/2020

à :

— 

M. Q-R S

— 

Me Q-François JOURDAN, avocat au barreau d’AIX EN PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NICE en date du 25 Juillet 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 15/1444.

APPELANTE

Madame I H épouse X, demeurant […]

représentée par M. Q-R S, délégué syndical ouvrier

INTIMEE

SAS CABINET D’ETUDES R MERLIN, demeurant […]

représentée par Me Q-François JOURDAN, avocat au barreau d’AIX EN PROVENCE,

et par Me Christophe BIDAL, avocat au barreau de LYON substitué par Me Pierre CIAMPORCERO, avocat au barreau de LYON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 Octobre 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Mariane ALVARADE, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre

Madame Mariane ALVARADE, Conseiller

Madame Béatrice THEILLER, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Pascale ROCK.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Janvier 2020, prorogé au 23 janvier 2020.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Janvier 2020

Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Mme Pascale ROCK, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE

Mme I H, épouse X a été embauchée par la SAS CABINET D’ETUDES R MERLIN en qualité de secrétaire de gestion administrative, statut agent de maîtrise, suivant contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 10 janvier 2005, moyennant un salaire brut moyen mensuel qui était en dernier lieu de 1700 euros. Elle a été affectée à l’agence de Nice.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des bureaux techniques (SYNTEC).

La SAS CABINET D’ETUDES R MERLIN employait habituellement au moins onze salariés au moment de la rupture de la relation contractuelle.

A compter du 23 novembre 2015, Mme X a été placée en arrêt de travail sans discontinuité.

Le 9 décembre 2015, la salariée a saisi la juridiction prud’homale pour voir reconnaître le harcèlement moral dont elle s’estimait victime et aux fins de résiliation du contrat de travail aux torts exclusifs de l’employeur.

Aux termes de deux visites médicales de reprise, Mme X a été déclarée inapte définitivement à son poste de travail.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 13 juin 2017, Mme X a été convoquée à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement fixé au 26 juin 2017 et par lettre du 29 juin 2017, adressée sous la même forme, elle a été licenciée pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement.

Par jugement rendu le 25 juillet 2017, le conseil de prud’hommes de Nice l’a déboutée de toutes ses demandes, condamnée aux dépens et a dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

Mme X a interjeté appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas critiquées.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mme X, appelante, a comparu, représentée par Monsieur S Q-R, défenseur syndical, muni d’un pouvoir régulier.

Aux termes de ses dernières écritures déposées au greffe le 5 décembre 2017, elle a exposé qu’à compter de 2008, l’entreprise connaîtra une vague de licenciement, qu’elle a eu à assumer les fonctions exercées par la secrétaire d’agence, sans pour autant percevoir le supplément de salaire correspondant,

qu’en raison de la charge de travail, la relation contractuelle a été suspendue pour maladie,

qu’elle a par suite été reconnue travailleur handicapé en octobre 2014,

que dès 2013, elle a fait l’objet de multiples actions déstabilisantes, alors qu’aucun reproche n’avait été formulée à son encontre, les collègues et clients relevant son sérieux et son professionnalisme,

que le 1er décembre 2015, il lui était infligé un avertissement fondé sur des griefs infondés,

qu’en raison des agissements de son employeur, son état de santé s’en est trouvé dégradé, de telle sorte qu’elle a été placée en longue maladie par le médecin du travail et licenciée pour inaptitude,

que sa demande de résiliation judiciaire est fondée, l’employeur ayant par ailleurs manqué à son obligation de préserver la santé de ses salariés.

Elle demande à la cour de :

— dire et juger que le jugement rendu par le conseil de Prud’Hommes de NICE en date du 25 juillet 2017 doit être réformé dans son intégralité,

— dire et juger qu’elle est victime de harcèlement moral de la part de son employeur,

En conséquence,

— prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail avec toutes les conséquences de droit que cela implique,

— dire et juger que la résiliation judiciaire du contrat de travail emporte les conséquences d’un licenciement nul,

Par conséquent,

— condamner la société CABINET MERLIN prise en la personne de son représentant légal en exercice à lui payer la somme de 48840,04 euros au titre de la nullité du licenciement,

— dire et juger que l’usage du paiement de cette prime est constitué par le paiement de cette prime jusqu’à son ler arrêt maladie,

—  12210,00 euros au titre du harcèlement moral subi distinctement de celui résultant de la résiliation judiciaire du contrat de travail,

—  12210,00 euros au titre du manquement par l’employeur à son obligation de sécurité résultant des mêmes faits de harcèlement commis,

Par conséquent,

— condamner la société CABINET MERLIN à lui payer :

5360,00 euros à titre de rappel de primes au titre des années 2012, 2013, 2014 et 2015,

— condamner la société CABINET MERLIN au paiement des intérêts de droit,

— condamner également la société CABINET MERLIN aux entiers dépens et éventuels frais d’exécution du présent jugement,

— voir ordonner la remise des documents sociaux sous astreinte de 100 euros par jour et par document,

— voir ordonner l’exécution provisoire nonobstant appel sans caution ni garantie personnelle,

— dire qu’a défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la présente décision et qu’en cas d’exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l’huissier instrumentaire en application de l’article 11 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre1996, devront être supportées par la société défenderesse en sus de l’indemnité mise à sa charge sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— voir ordonner le remboursement des allocations à Pôle emploi au titre de l’article L.1235-4 du code du travail,

— condamner également la société au paiement de 2000.00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électronique le 9 janvier 2018, la SAS CABINET D’ETUDES R MERLIN, intimée, fait valoir :

que si le salarié considère que l’employeur a gravement manqué à ses obligations, il doit immédiatement solliciter la rupture de son contrat de travail aux torts de ce dernier,

que Mme X ne rapporte pas la preuve des faits qu’elle dénonce, les attestations produites étant dépourvues de valeur probante, le médecin du travail n’ayant en outre relevé aucune souffrance ou dégradation de ses conditions de travail.

Elle demande à la cour de :

— constater l’abandon de la demande de congés payés par Mme X en cause d’appel ;

— confirmer en tout état de cause le jugement rendu le 25 juillet 2017 par le conseil de prud’hommes de NICE ;

— débouter en conséquence Mme X de l’intégralité de ses demandes ;

— la condamner aux entiers dépens de l’instance ainsi qu’au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 26 septembre 2019.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties et au jugement déféré.

MOTIFS

Sur le harcèlement moral

Selon l’article L. 1152-1 du code du travail,« aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ». En application du même article et de l’article L.1154-1 du code du travail, en sa rédaction applicable à la cause, lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il revient à la présente cour de rechercher :

— si Mme X rapporte la preuve de faits qu’elle dénonce au soutien de son allégation d’un harcèlement moral,

— si les faits qu’elle considère comme établis, appréhendés dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral,

— enfin, si cette présomption est retenue, si l’employeur justifie que les agissements ne sont pas constitutifs d’un harcèlement et qu’ils sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Mme X allègue les faits suivants :

— avoir fait l’objet d’une multitude d’actions visant à la déstabiliser et qu’elle a ressenties comme étant du harcèlement. Ainsi en 2014, le responsable d’agence a prétendu qu’elle ne respectait plus les procédures, qu’elle n’avait plus d’énergie, ni d’ouverture d’esprit, l’employeur reconnaissant en page quatre de sa fiche d’entretien sous le titre « synthèse de l’entretien et objectif de progression » un effectif réduit de personnel, mais estimant que la charge de travail peut être assumée par un seul emploi à plein temps pour atteindre les objectifs qui eux ne doivent pas décroître,

— l’attitude du responsable d’agence lui faisant sentir qu’elle était quelqu’un de banal, d’inintéressant, voir extrêmement inférieur, ne lui disant pas bonjour, ni au revoir, ne la tenant jamais informée des affaires de l’agence, ne communiquant pas, lui donnant des directives par mail floues et imprécises,

— le fait de critiquer la présentation des dossiers en des termes vexatoires, l’employeur menant une

stratégie de découragement,

— le fait de lui avoir notifié une lettre d’avertissement le 1er décembre 2015, lui reprochant de ne pas avoir satisfait au besoin de l’agence dans le cadre de l’appel d’offre de la Commune Alpes azur, alors qu’elle avait déjà contesté ce reproche qui avait déjà été fait verbalement le 17 novembre 2015 et qu’elle indiquait dans un mail que le dossier était bien avancé et qu’il ne manquait que l’acte d’engagement, la note méthodologique et la décomposition des prix, ces deux derniers éléments devant être fournis par son responsable, que l’acte d’engagement avait été fait et remis à ce dernier le 3 novembre 2015, qui avait décidé de le porter lui même au lieu de l’envoyer,

— le fait pour le responsable d’agence d’établir des règles en vue la brimer

en lui demandant d’arriver à son poste de travail à 8 heures 30 maximum, alors qu’elle n’est jamais en retard,

en lui imposant de traiter les mails et l’ensemble des transmissions des appels d’offres et les mails de la plate-forme chaque matin de 8h30 à 9h45 maximum, lui faisant malgré tout un reproche pour un mail ouvert à 9h27,

en lui demandant de raccourcir les conversations téléphoniques alors qu’elle n’abuse pas du téléphone, ce qui vise à l’isoler,

en procédant à la suppression du téléphone personnel durant les horaires de bureau, alors qu’elle n’a jamais utilisé son téléphone personnel,

en exigeant qu’elle se présente tous les matins et tous les soirs à son responsable d’agence pour acter tous ce qu’elle a fait dans la journée et les objectifs pour le lendemain, à 17h00 minimum alors que la fin de service est justement à 17h00 précises, ceci, dans une intention manifeste de nuire,

— la suppression d’une prime résultant pourtant d’un usage, entre 2012 et 2015, alors qu’elle était précédemment versée de 2008 à 2011 et alors même qu’elle a été versée aux autres salariés et que par courrier du 23 décembre 2015, la direction générale indiquait que malgré les difficultés rencontrées durant l’année, une enveloppe de primes de fin d’année serait maintenue.

Aux fins de justifier ses allégations, elle produit :

— les fiches d’entretien de progrès établies les 14 janvier 2011, 14 mars 2013 et 4 juin 2014,

— les courriels adressés par son responsable d’agence contenant des ordres confus ou imprécis, à titre d’exemple le courriel daté du 29 septembre 2015, aux termes duquel le responsable d’agence lui donne la directive de fournir les éléments techniques en plus des éléments administratifs, sans préciser les éléments techniques nécessaires pour compléter le dossier, le courriel daté du 13 octobre 2015, lui demandant de préparer un dossier complet comprenant des documents graphiques qu’il ne lui communique pas, le courriel du 29 avril 2015, lui indiquant « peux-tu tout m’imprimer le truc » ou encore le courriel du 5 novembre 2015 lui demandant « Merci de préparer le courrier qui va bien et de l’envoyer à 9h30 maximum »,

— le courriel du responsable d’agence du 13 novembre 2015 avec en pièce jointe un document intitulé 'réunion de mise au point n°1 du 9 novembre 2015",

— la lettre d’avertissement du 1er décembre 2015 relevant que certaines tâches ne sont pas correctement remplies,

— les bulletins de salaire au titre des mois de décembre, 2008, 2009, 2010, mars 2011, décembre

2011, mars 2012 mentionnant le versement de prime de fin d’année ou de solde de prime,

— plusieurs bulletins de salaire sur les années 2013 à 2016 ne faisant plus état de cette prime,

— le courriel de M. Y du 23 décembre 2015 indiquant que la direction a décidé de maintenir une enveloppe de primes de fin d’année, versée avec le salaire de décembre,

— les attestations d’une cliente, Mme J K, responsable administrative de collectivité territoriale, et de plusieurs anciens salariés et collaborateurs qui déclarent notamment qu’elle était très appréciée dans l’entreprise et des clients, tels , Monsieur F L, ingénieur conseil, directeur de la région Sud Est pour le compte du Cabinet Merlin pour la période 2005 à 2009, responsable de l’agence de Nice, M. C M, ingénieur chargé d’étude, embauché en 2007 au CABINET MERLIN à Nice en qualité d’ingénieur chargé d’affaires, Mme G N , Mme D O, M. E P, ces trois salariés, licenciés ou ayant pris acte de la rupture du contrat de travail, faisant état de tensions au sein de l’entreprise, ou indiquant avoir été victime de vexations ou d’agissements fautifs de la part de l’employeur,

— l’attestation de M. Z; responsable de gestion administratif, qui indique avoir été témoin de nombreux actes de pression à l’origine de turn over dans l’entreprise, et notamment du fait que le responsable d’agence s’était permis « d’envoyer promener » Mme X alors que celle-ci demandait juste des renseignements pour pouvoir exécuter son travail.

— la fiche d’inaptitude établie le 11 mai 2017 par le médecin du travail au motif indiquant « l’état de santé du salarié fait obstacle à tous reclassement dans l’emploi»,

— le certificat établi le 10 mai 2017 par le médecin psychiatre qui atteste que l’état de l’appelante est dû au fait qu’elle a mal vécu les brimades et vexations et que le niveau élevé de stress qu’elle a dû supporter ces dernières années n’est probablement pas pour rien à la survenue de la pathologie,

— l’avis d’inaptitude définitive du 24 mai 2017.

Ainsi, Mme X rapporte la preuve des faits qu’elle dénonce au soutien de son allégation d’un harcèlement moral. Il revient à la présente cour de procéder à leur examen.

La cour observe que la salariée se plaint d’une surcharge de travail par l’ajout du travail qui était effectué par la secrétaire d’agence, alors que le secrétariat d’agence relève de ses fonctions et que l’employeur démontre que l’activité avait chuté de façon significative entre 2008 et 2015, alors même que ce point avait été expliqué au cours de l’entretien de progrès du 4 juin 2014 et que la salariée n’avait formulé aucune observation,

qu’en ce qui concerne les actions déstabilisantes se traduisant par des directives floues ou imprécises, ce grief est infondé à la lecture complète des courriels produits, tout au plus, peut-il être reproché au responsable d’agence, M. A, d’avoir mésestimé la capacité de la salariée à s’adapter,

que la salariée qualifie encore de brimades un simple rappel des consignes et des règles internes, alors même que le rapport d’entretien de progrès du 4 juin 2014, indiquait : 'doit améliorer son organisation personnelle et mettre à profit son expérience pour exécuter toutes les tâches du secrétariat d’agence et du secrétariat administratif… un effort particulier est demandé pour le respect des consignes et des procédures', le responsable d’agence, ajoutant avoir constaté que la salariée rencontrait des difficultés, s’être entretenu avec elle oralement avant de formaliser cet échange par écrit dans un compte-rendu de réunion de mise au point du 9 novembre 2015,

que l’employeur dénonce en revanche un comportement inadapté de la part de salariée constaté par plusieurs responsables hiérarchiques, relevé lors de ses entretiens du 14 janvier 2011 "attention à la pression et à la maîtrise de soi', du 14 mars 2013, ' discrétion à améliorer' et attesté par Mme B, responsable gestion administrative, qui a collaboré avec elle et déclare : ' elle avait du mal à supporter les demandes de son responsable d’agence et toujours prête à critiquer son supérieur (d’ailleurs quel qu’il soit) auprès des collègues et clients…', comportement qui avait précisément donné lieu à la mise au point du 9 novembre 2015,

que la teneur du courriel adressée en réponse par la salariée le 17 novembre 2015 ('En réponse au compte rendu de ta réunion de mise au point, le contenu n’a pas manqué de me sidérer'… C’est la première fois que l’on m’écrit ce genre d’abominations. J’aimerais savoir clairement ce que tu cherches'') laisse augurer des rapports qu’elle entretenait avec son responsable,

que la suppression de la prime de fin d’année n’est pas un élément pertinent, dès lors qu’elle est attribuée 'afin de promouvoir les efforts des collaborateurs les plus impliqués'.

L’examen des attestations sont pour la plupart insuffisamment circonstanciées (Mme J K, M. C…) ou font état de faits ou de situations qui concernent leurs auteurs (M. C, Mme D, M. E ) ou de faits qui ne visent pas la période considérée (M. F, Mme G). Celle rédigée par M. Z qui a travaillé au sein de l’entreprise en 2005 et 2006, doit être écartée, en ce qu’il ne saurait attester de faits qui s’y seraient déroulés en 2013.

Il résulte de l’ensemble de ces considérations que Mme X n’apporte pas aux débats d’éléments suffisants pour laisser présumer l’existence d’agissements répétés de harcèlement moral de la part de son employeur. L’altération avérée de son état de santé n’apparaît pas à elle seule suffisante pour en caractériser l’existence, alors que les arrêts de travail prescrits font état d’un syndrome anxio-dépressif réactionnel et que le médecin du travail n’a établi aucun lien entre ses avis d’inaptitude et les conditions de travail de la salariée, que ses arrêts de travail ont été établis au titre de la maladie de droit commun et que le médecin psychiatre ne fait que traduire les ressentis de sa patiente.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail :

En droit, lorsqu’un salarié a demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail et que son employeur le licencie ultérieurement, le juge doit d’abord rechercher si la demande de résiliation était justifiée par les agissements de l’employeur.

Seul un manquement de l’employeur suffisamment grave pour faire obstacle à la poursuite du contrat de travail peut justifier la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts.

En l’espèce, compte tenu des développements sus-visés, en l’absence de manquement de l’employeur à ses obligations, la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail n’est pas fondée. La salariée en sera déboutée par voie de confirmation du jugement déféré.

Sur le manquement à l’obligation de sécurité :

En vertu de l’article L 4121-1 du code du travail, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Aucun manquement de l’employeur à son obligation de sécurité n’est en conséquence caractérisé.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il déboute la salariée de ce chef de demande.

Sur les rappels de prime :

Mme X réclame le versement d’une prime qui ne lui a plus été versée de 2012 à 2015, qu’elle percevait jusqu’à 2011.

En l’absence de dispositions conventionnelles ou de clause du contrat de travail prévoyant le paiement de ladite prime, la salariée ne peut que se prévaloir d’un usage présentant les caractères de généralité, fixité et régularité, dont il lui incombe de rapporter la preuve.

Il n’est cependant pas établi que cette prime de fin d’année était versée à l’intégralité du personnel ou à l’ensemble des salariés de sa catégorie. Il résulte en outre du dossier qu’elle était destinée à récompenser 'les collaborateurs les plus impliqués'.

Mme X ne justifie pas qu’elle peut y prétendre sur les année concernées, de sorte que le jugement sera confirmé.

Sur le solde de congés :

Mme X indique que l’employeur a régularisé le paiement de son solde de congés à la rupture du contrat pour inaptitude alors qu’il avait soutenu devant la juridiction prud’homale qu’elle n’y avait pas droit, que le jugement du conseil de prud’hommes devra être réformé sur ce point, l’employeur reconnaissant qu’elle n’avait pas été remplie de ses droits.

La cour relève toutefois que du fait du paiement intervenu, la demande est sans objet.

Sur les autres demandes :

Eu égard à l’issue du litige, il n’y a pas lieu d’ordonner la remise à Mme X des documents de fin de contrat rectifiés, ni d’appliquer les dispositions de l’article L 1235-4 du code du travail.

Par ailleurs, la demande tendant à voir juger que les sommes retenues par l’huissier en application de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 seront supportées par tout succombant en plus des frais irrépétibles et des dépens, est sans objet. En tout état de cause, dès lors qu’il s’agit de créances nées de l’exécution du contrat de travail, le droit proportionnel de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 n’est pas dû.

Sur les dépens et les frais non-répétibles :

Mme H, épouse X qui succombe pour l’essentiel de ses prétentions, doit supporter les dépens.

Nonobstant l’issue de l’appel, l’équité ne commande pas l’application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de l’intimé.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, en matière prud’homale,

Confirme le jugement déféré,

Y ajoutant,

Condamne Mme H, épouse X aux dépens d’appel,

Déboute les parties de toutes autres demandes.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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