Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-1, 21 février 2020, n° 17/15308

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 4-1, 21 févr. 2020, n° 17/15308
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 17/15308
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Marseille, 12 juin 2017, N° F14/02527
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-1

ARRÊT AU FOND

DU 21 FÉVRIER 2020

N° 2020/68

Rôle N° RG 17/15308 – N° Portalis DBVB-V-B7B-BBBQJ

J X

C/

SAS K Z INTERNATIONAL (HBI)

Copie exécutoire délivrée le :

21 FEVRIER 2020

à :

Me AB MEJEAN, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Francis SAIMAN, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de MARSEILLE en date du 13 Juin 2017 enregistré au répertoire général sous le n° F14/02527.

APPELANT

Monsieur J X

né le […] à […]

de nationalité Française, demeurant 79 Ter Avenue de la Figone-Résidence Vert Beaumont – Bât. C1
- […]

représenté par Me AB MEJEAN, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SAS K Z INTERNATIONAL (HBI) prise en la personne de son représentant légal domiciliée au dit siège , demeurant […]

représentée par Me Francis SAIMAN, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 09 Décembre 2019 en audience publique. Conformément à l’article 785 du code de procédure civile, Madame AO AP, Conseiller faisant fonction de Président, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame AO AP, Conseiller faisant fonction de Président

Mme Nathalie FRENOY, Conseiller

Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur M BENKHIRA

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Février 2020.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Février 2020,

Signé par Madame AO AP, Conseiller faisant fonction de Président et Monsieur M BENKHIRA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Monsieur J X a été embauché en qualité de chef de bureau le 6 novembre 1995 par la société GSI2 devenue la société K Z INTERNATIONAL (HBI).

Il assurait le suivi des dossiers Import maritime depuis la prise de commande jusqu’à la préfacturation en coordination avec le service commercial (selon profil de poste du 31 octobre 1996).

Il est devenu responsable commercial et d’exploitation maritime import à compter du 28 novembre 2002, a obtenu le statut de cadre à compter du 1er janvier 2004 et a pris la supervision du service douane et courses à partir du 24 janvier 2006.

En janvier 2007, Monsieur J X a bénéficié d’un pacte d’actionnaires. Il a cédé ses parts en avril 2013 au profit de la société CONSULT, dont le gérant était K Z et qui détenait déjà la majorité des parts de la société HBI.

Il percevait en dernier lieu un salaire mensuel brut de base de 4800 euros.

Monsieur J X a été en arrêt de travail pour maladie à compter du 21 mars 2014 pour "état anxio dépressif réactionnel sévère" jusqu’au 15 juin 2014. Il a été déclaré apte à son poste lors de la visite médicale de reprise du 17 juin 2014.

Il a été en arrêt de travail pour maladie à compter du 8 juillet 2014.

Par requête du 19 septembre 2014, Monsieur J X a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur et de demandes en paiement d’heures supplémentaires et d’indemnités de rupture, invoquant subir un harcèlement moral.

Monsieur J X a été déclaré inapte à son poste le 20 avril 2017 par le médecin du travail. Il a été licencié pour inaptitude physique le 22 mai 2017.

Par jugement de départage du 13 juin 2017, le conseil de prud’hommes de Marseille a débouté Monsieur J X de l’ensemble de ses demandes et l’a condamné aux dépens.

Ayant relevé appel, Monsieur J X conclut, aux termes de ses conclusions responsives notifiées par voie électronique le 13 novembre 2019, à l’infirmation du jugement en date du 13 juin 2017 en ce qu’il a débouté Monsieur X de l’ensemble de ses demandes, et statuant à nouveau :

à ce que soit constatée la dégradation des relations de travail de Monsieur X et en conséquence, à ce que soit dit l’arrêt de travail de Monsieur X d’origine professionnelle du fait du harcèlement de l’employeur et à ce que soit dite l’inaptitude constatée de Monsieur X d’origine professionnelle du fait du harcèlement de l’employeur, à ce que soit prononcée la résiliation du contrat de travail de Monsieur X du fait de l’employeur, à la condamnation de la société HBI à verser à Monsieur X :

-14 400 euros au titre du préavis,

-1440 euros à titre d’incidence congés payés,

-4800 euros pour procédure irrégulière,

-36 480 euros au titre des indemnités de licenciement,

-120 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-4500 euros brut au titre des heures supplémentaires non rémunérées,

à la condamnation de la société HBI à fournir à Monsieur X l’ensemble des documents de fin de contrat dans un délai de huit jours à compter de la signification de la décision à intervenir faute de quoi une astreinte sera prononcée à hauteur de 200 euros par jour de retard et à la condamnation de la société HBI à verser à Monsieur X la somme de 4000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Monsieur J X fait valoir que la relation de travail s’est poursuivie relativement correctement jusqu’à ce que Monsieur K Z intègre au sein de l’effectif de l’entreprise ses enfants et notamment sa fille L au service import, qu’à compter de ces arrivées, le personnel en place était à éliminer compte tenu de la relève familiale, que c’est la raison pour laquelle tous les moyens de déstabilisation ont été mis en 'uvre pour décourager le salarié dans sa mission en procédant par brimades et humiliations quotidiennes, que cette pression anormale mise sur le salarié à entraîner pour lui une première phase de dépression en 2010, puis une aggravation de son état de santé à compter de 2013, date de l’arrivée dans son service de Madame L Z, que des changements de postes intempestifs ont été réalisés sans aucune concertation avec le salarié, que le concluant a été contraint le 23 avril 2013 de céder ses parts à la société HB CONSULT, qu’il a fait l’objet de dénigrements, brimades répétées devant l’ensemble du personnel, que les agissements de l’employeur ont entraîné une dégradation des conditions de travail de Monsieur X, qui elle-même a entraîné une dégradation de son état de santé, que la résiliation judiciaire du contrat

doit être prononcée aux torts exclusifs de l’employeur, qu’il a effectué des heures supplémentaires, ayant largement dépassé les horaires contractuels et qu’il doit être reçu en l’ensemble de ses réclamations.

La SAS K Z INTERNATIONAL (HBI) conclut, aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées le 13 novembre 2019, au rejet de toute pièce communiquée par Monsieur X, au rejet de l’appel de Monsieur X comme étant infondé, à ce qu’il soit jugé que Monsieur J X n’était pas dans une situation de harcèlement moral ni de stress causé par son emploi, à ce qu’il soit jugé que l’arrêt de travail de Monsieur X n’est pas d’origine professionnelle, à ce qu’il soit jugé que l’inaptitude constatée n’est pas d’origine professionnelle, à ce qu’il soit jugé que la rupture du contrat de travail de Monsieur X résulte de la lettre de licenciement pour motif réel et sérieux qui lui a été notifiée par la société HBI, à ce qu’il soit jugé que la société HBI a payé à Monsieur X les indemnités qui lui sont dues du fait du licenciement qui lui a été notifié, à ce qu’il soit jugé que Monsieur X a été rempli de ses droits au titre de la rupture de son contrat de travail, au débouté de Monsieur J X de toutes ses demandes, fins et conclusions, y compris concernant les sommes et remise de documents résultant de la rupture, subsidiairement, à ce que soit limitée l’indemnisation de Monsieur J X à l’indemnité légale de licenciement de 6 mois et à la condamnation de Monsieur J X à supporter les frais irrépétibles exposés par la société HBI à hauteur de 1500 euros et les entiers dépens dont les frais de signification du jugement par Maître ROLL huissier.

La SAS K Z INTERNATIONAL (HBI) sollicite en premier lieu le rejet de la communication des pièces au soutien de l’appel de Monsieur J X. Elle fait valoir que jusqu’en 2014, il n’y a eu aucun échange ou reproche dans un sens ou l’autre entre les parties, que ce n’est que le 16 juin 2014, avant la reprise du travail, que Monsieur J X a adressé un email à Monsieur K Z, invoquant pour la première fois un harcèlement, que l’appelant produit des emails adressés par lui-même et qui ne sont donc pas probants, que les griefs évoqués sont anciens, qu’aucun élément objectif ne corrobore les allégations de Monsieur J X, que celui-ci a été d’accord pour prendre la responsabilité de l’agence du Havre, qu’il n’y a pas eu de changement de poste intempestif, que la dispense de la responsabilité du service des douanes et courses, événement isolé, ne caractérise pas un grief de harcèlement, que la cession d’actions a été librement consentie par Monsieur J X, que les attestations versées par l’appelant sont irrecevables ou non probantes, étant imprécises et exprimant des jugements de valeur, que les attestations de cadres de l’entreprise versées par HBI démontrent l’absence de harcèlement de l’employeur, que les certificats médicaux versés par l’appelant n’ont pas de valeur probante, que Monsieur J X n’hésite pas à tromper la religion de la Cour en communiquant un courrier au contenu mensonger adressé au médecin du travail dont il soustrait la réponse qui lui a été faite, que Monsieur J X ne caractérise pas des heures supplémentaires qu’il aurait réalisées à partir de quelques courriels reçus en dehors des heures de travail, en raison du décalage horaire, que le jugement est parfaitement motivé, que l’appelant ne verse aucune pièce nouvelle de nature à modifier l’appréciation des faits en cause d’appel, que Monsieur J X ne démontre pas que son arrêt de travail soit d’origine professionnelle, ni que l’inaptitude constatée soit d’origine professionnelle et qu’il doit être débouté de l’ensemble de ses prétentions.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 14 novembre 2019.

SUR CE :

Sur la demande de rejet des pièces de l’appelant :

La SAS K Z INTERNATIONAL fait valoir que, en application de l’article 906 du code de procédure civile, les pièces doivent être communiquées simultanément avec les conclusions,

qu’au moment des présentes, l’appelant n’a pas communiqué ses pièces outre le caractère illisible du bordereau qui ne permet pas d’identifier de pièce et ne permet donc pas de répliquer sur les pièces soutenant l’appel, que toute pièce communiquée après la notification des présentes conclusions sera rejetée, qu’en effet, cette communication tardive entrave le principe du contradictoire au préjudice de l’intimée et que doit être rejetée toute pièce communiquée par Monsieur J X.

Monsieur J X ne réplique pas à l’intimée sur ce moyen de droit.

Il convient d’observer que la SAS K Z INTERNATIONAL a repris, dans ses dernières conclusions notifiées le 13 novembre 2019, le moyen ci-dessus exposé relatif au rejet des pièces de l’appelant, déjà exposé dans ses premières conclusions d’intimée en date du 28 décembre 2017, en réponse aux conclusions de l’appelant notifiées le 2 novembre 2017.

Aux conclusions de l’appelant en date du 2 novembre 2017 était joint un bordereau de communication de 28 pièces, en partie illisible en ce qui concerne les pièces citées 3, 4, 6, 7, 8 et de 9 à 28.

La société intimée a alors sollicité le rejet des pièces de l’appelant par ses conclusions notifiées le 28 décembre 2017.

L’appelant a communiqué à son adversaire, par bordereau rectificatif notifié le 25 janvier 2018, les pièces 1 à 234, ayant fait l’objet d’un premier envoi, ainsi que les pièces 235 à 239. Par borderau n° 2, l’appelant a communiqué en même temps que ses dernières conclusions le 13 novembre 2019 les pièces 240 à 248.

Depuis le bordereau n° 1 des pièces 1 à 239 communiqué le 25 janvier 2018, la SAS K Z INTERNATIONAL a été en mesure d’examiner ces pièces, de les discuter et d’y répondre, notamment dans ses conclusions notifiées le 13 novembre 2019. Il n’y a donc pas lieu d’écarter ces pièces du débat alors qu’elles ont été régulièrement communiquées en temps utile, dans le respect du principe du contradictoire, peu important qu’elles n’aient pas été communiquées simultanément au dépôt des premières conclusions de l’appelant en contradiction avec la règle posée par l’article 906 du code de procédure civile.

Il convient, en conséquence, de rejeter la demande de la SAS K Z INTERNATIONAL d’écarter les pièces de l’appelant communiquées le 25 janvier 2018 (pièces 1 à 239).

S’agissant des dernières pièces communiquées le 13 novembre 2019 par Monsieur Y, la SAS K Z INTERNATIONAL a pu, malgré leur communication tardive, les examiner et y répondre puisque, dans ses dernières conclusions en date du 13 novembre 2019, elle discute notamment de la recevabilité et de la crédibilité du témoignage de Monsieur Y (page 23 de ses conclusions).

Par conséquent, la Cour déclare ces pièces (n° 240 à 248) recevables.

Enfin, la Cour constate que Maître AB MEJEAN a joint, dans son dossier de plaidoirie, des pièces non numérotées, ne faisant pas partie des bordereaux de pièces communiquées, à savoir :

— une facture Bouygues du 2 janvier 2018 au nom de Monsieur J X,

— l’avis d’impôt 2017 de Monsieur J X,

— des relevés d’Allianz des prestations invalidité versées à Monsieur J X d’octobre à décembre 2017.

Ces pièces non communiquées à la partie adverse sont écartées des débats.

Sur les heures supplémentaires :

Monsieur J X soutient que ses horaires de travail ont toujours largement dépassé les horaires liés à l’application du contrat de travail, qu’il a pu établir un tableau des heures supplémentaires réalisées depuis 2009, qu’il communique des mails écrits dans une plage horaire allant de 6h55 (pièce 86) à 18h40 (pièce 125), sans pause particulière entre midi et 14 heures (pièces 49 à 234), et qu’il convient de lui accorder la somme de 4500 euros brut en contrepartie des heures supplémentaires effectuées non rémunérées.

La SAS K Z INTERNATIONAL réplique, outre le fait que l’on peut être surpris qu’un cadre conserve des emails qu’il a envoyés pendant plusieurs années, que la plupart des emails est envoyée par Monsieur J X entre 9h00 et 18h00, heures normales de travail, que quelques emails, en dehors de ces heures, sont des emails reçus par le salarié en raison du décalage horaire, qu’il ne les traite évidemment pas systématiquement sur l’instant, que l’addition d’heures à raison de tranches d’une demi-heure, une heure ou une heure et demie est artificielle et ne saurait caractériser des heures supplémentaires, que l’envoi d’un email qui occupe quelques secondes ou quelques minutes ne démontre pas la réalité des heures comptabilisées par le salarié auquel il n’a pas été demandé de répondre en dehors des heures de travail, que le salarié ne prouve pas que le travail qu’il a fait en dehors de ses heures lui a été demandé par l’employeur, que le jugement par une argumentation conforme aux pièces versées aux débats par les parties a motivé à juste titre le rejet de la demande d’heures supplémentaires, qu’aucune pièce nouvelle n’est versée aux débats en cause d’appel et que le jugement doit être confirmé de ce chef.

Il n’est pas discuté que la durée de travail de Monsieur J X était de 35 heures hebdomadaires, soit 151.67 heures mensuelles, durée mentionnée sur les bulletins de paie versés aux débats.

Aucune des parties ne précise quels étaient les horaires de travail de Monsieur J X. Ils s’inscrivaient dans le créneau 9 heures-18 heures.

Monsieur J X produit un tableau des heures supplémentaires dont il réclame le paiement de 2009 (au titre des journées des 23 mars et 7 avril 2009) à 2014 (jusqu’au 27 juin 2014) avec mention, pour chaque journée, du nombre d’heures réclamées (0,5, 1, 1,5, 2 ou 3 heures) ; par exemple :

— lundi 23 mars 2009 1 heure

— mardi 7 avril 2009 1 heure

— mardi 16 février 2010 1 heure, etc.,

soit un total de 166 heures, au titre desquelles l’appelant réclame une somme forfaitaire de 4500 euros brut (ne correspondant pas à la multiplication du taux horaire, soit 31,65 euros, par le nombre d’heures réclamées).

Monsieur J X produit également des courriels écrits par lui et envoyés dans une plage horaire allant de 6h55 (le 28 février 2012) à 18h40 (le 26 mars 2013).

Dans son tableau de décompte d’heures supplémentaires, Monsieur J X a comptabilisé des heures supplémentaires sur chaque journée pour laquelle il justifie de l’envoi de courriels soit avant 9 heures, soit après 18 heures, soit entre 12 et 14 heures.

Les éléments ainsi versés par l’appelant sont suffisants à étayer préalablement sa réclamation d’heures supplémentaires. Il appartient dès lors à l’employeur de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

La SAS K Z INTERNATIONAL (HBI) ne verse aucun élément probant et se contente de critiquer les pièces versées par Monsieur J X. Elle ne peut prétendre, alors que les courriels versés correspondent à des échanges professionnels qui ne pouvaient être ignorés de la société, que les heures supplémentaires auraient été accomplies par le salarié en dehors de toute acceptation de l’employeur.

En conséquence, il convient de réformer le jugement et de dire que l’existence d’heures supplémentaires accomplies par Monsieur J X est établie.

Selon l’appelant, les heures d’envoi de ses courriels traduisent l’absence de pause particulière entre midi et 14 heures. Toutefois, l’envoi de courriels par exemple à 13h11 (le 17 février 2010), à 13h26 (le 4 mai 2010), à 12h10 (le 14 mai 2010), à 12h19 (le 25 mai 2010), à 12h51 (le 1er juin 2010), etc., ne permet pas de conclure que le salarié n’a pas bénéficié de pause repas à des horaires décalés alors qu’il ne résulte pas des pièces versées que le salarié a travaillé sans interruption entre 12 et 14 heures.

Par ailleurs, le décompte des heures supplémentaires fourni par l’appelant est approximatif compte tenu, par exemple, qu’il réclame :

-1 heure supplémentaire le 16 février 2010 avec un courriel envoyé à 18h19, soit un dépassement de 20 minutes,

-1,5 heures supplémentaires le 1er juin 2010 au soir avec un courriel envoyé à 18h51, soit un dépassement de 1 heure maximum,

-1 heure supplémentaire le 29 novembre 2010 au soir avec un courriel envoyé à 18h08, soit un dépassement de 10 minutes,

etc.

Par conséquent, au vu des pièces produites, la Cour accorde à Monsieur J X la somme brute de 2200 euros au titre des heures supplémentaires accomplies.

Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail :

Monsieur J X, qui sollicite la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de son employeur, invoque les manquements suivants de ce dernier :

— des changements de postes intempestifs,

— des cessions d’actions imposées,

— un harcèlement moral subi au quotidien,

ces agissements de l’employeur ayant entraîné une dégradation de ses conditions de travail et de son état de santé.

I- Sur les changements de postes du salarié

Monsieur J X fait valoir qu’en juin 2010, en sus de ses activités au sein de l’agence de Marseille en qualité de responsable commercial et d’exploitation maritime, lui a été

confiée une fonction de supervision au sein de l’agence du Havre, effectuant des allers-retours au Havre quatre à cinq fois par an et restant une semaine à chaque fois, ce qui a augmenté sa charge de travail quotidienne, que cette responsabilité lui a été ôtée en mars 2014 sans explication, et que les changements de postes ont été réalisés sans aucune concertation avec lui, alors même que l’employeur ne lui a jamais notifié de manquement à son égard durant toutes ces années de collaboration.

La SAS K Z INTERNATIONAL réplique que Monsieur J X a toujours été responsable du service import de l’entreprise, que les tableaux d’évolution des dossiers traités et de la marge brute de l’entreprise démontrent de manière objective que le service import n’était pas suffisamment rentable, que le salarié s’est vu adjoindre la responsabilité de la supervision du service douane et courses le 24 janvier 2006, que cette supervision se justifie de par la nature du poste de responsable à l’import qui a toujours, dans le métier de transitaire, été associé à la douane, que courant 2007, à l’initiative de Monsieur Z est signé un pacte d’actionnaires, que Monsieur Z s’appuie sur quatre cadres, piliers sur lesquels il fonde sa confiance, dont Monsieur J X qui gère l’import avec les douanes, que le problème est que celui-ci n’a jamais véritablement développé ce service qui est resté à environ 10 % de l’activité de l’entreprise pour régresser fin 2013, qu’il est important de préciser que les trois autres piliers (DAF et RH, responsable exploitation, directeur commercial) n’ont eu aucun problème à trouver leur place aux côtés des enfants de Monsieur K Z, que Monsieur J X s’est vu adjoindre Monsieur M Y en 2007 pour l’aider dans sa tâche, qu’il a été proposé à Monsieur J X de prendre la responsabilité de l’agence du Havre, dont l’activité a été réduite et dont l’effectif est passé de 6 à 2 salariés puis à 1 salarié, la mission de l’agence du Havre étant exclusivement la gestion du passage portuaire, que le salaire de Monsieur J X a continué d’augmenter pour atteindre 4800 euros en 2014, que tout ce qui précède démontre qu’il n’y a pas eu de changement de poste intempestif, que Monsieur J X n’a jamais adressé à son employeur de reproche jusqu’en 2014, que ce n’est que le 16 juin 2014, lors de sa reprise du travail après un arrêt maladie, que Monsieur J X adresse un premier mail à Monsieur K Z, qualifiant de harcèlement le retrait de la responsabilité du service douane et courses effectué en raison de la surcharge de travail que le salarié avait invoquée, que le grief avancé qui repose sur des événements anciens non reprochés par le salarié en son temps ne caractérise donc par un harcèlement moral et que la dispense de la responsabilité du service douane et courses, événement isolé, ne caractérise pas non plus le grief de harcèlement.

***************

Monsieur J X, qui invoque une surcharge de travail par l’attribution en juin 2010, en sus de ses activités au sein de l’agence de Marseille, d’une mission de supervision de l’agence du Havre, verse aux débats un courriel qu’il a adressé le 11 février 2010 à N A, indiquant à cette dernière que Monsieur Z, suite à leur entretien du 8 février, lui avait indiqué qu’il souhaitait lui confier "2 missions concernant la douane et l’agence du HAVRE (déjà la pression le premier jour rentré), comme il me l’avait indiqué au téléphone en janvier quand j’étais en dépression (alors que soit disant il appelait seulement pour avoir de mes nouvelles et m’a parlé pendant 1/4 d’heure de mes fonctions et a remis en cause mes capacités!)'

J’ai l’étrange sentiment et ai bien peur que du fait de ma dépression et de ma fragilité occasionnelle, se séparer de moi (vu mon salaire + charge) ne lui déplairait pas et qu’il souhaite me confier des missions que je ne pourrais accomplir afin que n’atteignant pas mes objectifs, il ait un motif pour me licencier plus facilement et pour que cela lui revienne moins cher.

Depuis lundi, il ne me lâche pas et me met la pression, il veut que j’ai mis à jour tous les dossiers… Comment veux-tu qu’en une semaine avec un effectif réduit je puisse tout mettre à jour alors qu’habituellement il me faut au moins 3 semaines voire 1 mois pour tout faire!!

Tous les jours il m’agresse verbalement, comme ce matin devant vous et je ne le supporterai pas longtemps!!…

Je sens qu’il va essayer de me remplacer par l’un d’entre vous et que tout cela va mal finir!!

Voilà, j’avais besoin de me soulager et il n’y a qu’avec toi que je peux le faire".

La Cour observe que ce courriel du 11 février 2010 a été immédiatement transféré sur la messagerie personnelle de Monsieur J X, qu’il n’est pas démontré qu’il a été réellement envoyé à Madame N A, en l’absence de tout accusé de réception et de toute réponse produite. Comme relevé par le premier juge, ce courriel n’est corroboré par aucun autre élément de nature à démontrer que la décision de son employeur de lui adjoindre la responsabilité de l’agence du Havre correspondrait à une volonté d’alourdir la tâche du salarié dans la perspective de préparer son licenciement.

Monsieur J X, dans un courriel du 16 juin 2014 adressé à son employeur, n’a d’ailleurs pas prétendu que la mission de gestion de l’agence du Havre constituait une surcharge de travail, sauf sur une période de 5 semaines à partir du 17 février 2014 correspondant à l’absence de 2 personnes sur 4 de son équipe, affirmant que cette "cette charge de travail liée à une situation temporaire d’absence conjuguée de différentes personnes, n’était aucunement liée de (sa) part à une impossibilité d’assurer cette fonction sur du long terme…".

Il n’est donc pas établi qu’en juin 2010, la décision de la société HBI de confier à Monsieur J X la responsabilité de l’agence du Havre, en sus de ses missions habituelles, a été prise sans concertation, de manière "intempestive", et a accru inconsidérément la charge de travail du salarié, ni qu’il y ait eu une volonté de la société d’accroître la charge de travail de Monsieur X en vue de le mettre en difficulté et de préparer son licenciement.

Par ailleurs, il résulte des deux fiches "profil de poste" versées en pièces 2 et 3 par l’appelant que Monsieur J X, qui exerçait les fonctions de chef de groupe-responsable commercial et d’exploitation maritime import (depuis le 28 novembre 2002) et responsable du service douane et courses (depuis le 24 janvier 2006), n’a plus assuré la responsabilité du service douane et courses selon la fiche de poste révisée le 14 mars 2014.

La société K Z INTERNATIONAL reconnaît que Monsieur J X a été "dispensé« de la responsabilité du service douane et courses confié à Monsieur O P engagé à cet effet en 2014. Elle produit le contrat de travail à durée indéterminée conclu le 20 janvier 2014 avec Monsieur O P, engagé à compter du 20 janvier 2014 en qualité de responsable du service Douane et Services extérieurs pour l’ensemble de l’entreprise, étant précisé dans le cadre de la fiche de »profil de poste« signée le 30 janvier 2014 que Monsieur O P »est responsable du service extérieur douane-quai-courses aussi bien à Marseille/Fos qu’au Havre". Elle verse également le courriel du 12 mars 2014 adressé par K Z à J X et O P, en ces termes :

« J, compte tenu de nos différents entretiens, j’ai bien noté que vous prétendez avoir une surcharge de travail. Par conséquent, je vous dispense à l’avenir de la responsabilité du service douane et courses. Ce dernier sera placé sous l’autorité de O P. Les profils de poste seront modifiés à cet effet. Application immédiate. Cordialement ».

Il convient d’observer qu’il ressort de ce dernier courriel que, si le dirigeant de la SAS HBI a affirmé que la décision de retirer à Monsieur X la responsabilité du service douane et courses avait été prise en raison de la surcharge de travail invoquée par le salarié, cette décision annoncée par courriel du 12 mars 2014 était déjà prise du fait de l’engagement de Monsieur O P dès le 20 janvier 2014 en qualité de "responsable du service Douane et Services extérieurs« , chargé de la responsabilité » du service extérieur douane-quai-courses" (selon profil de poste signé le 30 janvier 2014).

Monsieur J X, en arrêt de travail à partir du 21 mars 2014 pour "état anxio dépressif réactionnel sévère« jusqu’au 15 juin 2014 et déclaré apte à son poste lors de la visite médicale de reprise du 17 juin 2014, a répondu à son employeur par courriel du 16 juin 2014 ayant pour objet »Re: douane" : « Monsieur,

1/ je réponds tardivement, n’ayant pas eu l’opportunité de le faire plus tôt suite à de graves problèmes de santé, à votre message ci-dessous, n’ayant pas hésité à me dispenser avec effet immédiat de la responsabilité du service Douane et Courses, du fait que je prétendais avoir une surcharge de travail dont je vous confirme à nouveau les raisons de celle-ci et ceci pour les motifs suivants :

-Mr Q R, unique membre du personnel de l’agence du Havre, partait en congé du 24/2 au 7/3 soit 2 semaines et ai récupéré comme à chaque fois tous les dossiers IMPORT (BAFS et autres clients) et CESSIONS de l’agence du Havre.

-Votre fille L qui fait partie intégrale du service Import, s’est principalement occupée à organiser entre le 17 et le 21/2 (Statistiques, contacts, mails, etc.) votre déplacement auprès de différents agents en Thaïlande.

-Vous êtes ensuite parti avec elle en Thaïlande la semaine du 24 au 28/2 inclus.

-Immédiatement dès votre retour, celle-ci s’est exclusivement consacrée, et cela durant près de 3 semaines, avec mon aide, à donner suite à ce voyage et répondre aux différentes demandes et tarifs des agents que vous avez rencontrés.

Cela représente tout de même 5 semaines durant lesquelles je ne l’ai plus eue à ma disposition.

Par conséquent, nous nous sommes retrouvés seulement 2 personnes sur quatre durant cette période, Mme A gérant seule tous les dossiers à l’Import et pour ma part non seulement mon travail quotidien, mais également les dossiers de l’agence du Havre que j’ai gérés, non sans mal, ainsi que répondre aux différents mails, messages et demande adressés à votre fille durant son absence.

De ce fait, cette charge de travail était liée à une situation temporaire d’absence conjuguée de différentes personnes, mais n’était aucunement liée de ma part à une impossibilité d’assurer cette fonction sur du long terme.

Je tenais à vous le signaler car j’estime que votre réaction n’est pas appropriée à la situation et en tout état de cause, ne résulte aucunement de ce que j’aurais pu émettre comme souhait et considère le retrait de ces responsabilités comme injustifié.

En effet, le dernier mail que j’ai reçu de votre part, en date du 12 mars dernier, a été pour moi le déclencheur d’une dépression sévère compte tenu des propos et du harcèlement qu’il contient.

2/ je reprends donc mes fonctions au sein de votre société suite à une très longue période de maladie de 3 mois et ce malgré le

désaccord de mon médecin et du psychiatre (dépression réactionnelle sévère avec suivi médical et psychiatrique avec prise

d’antidépresseurs, anxiolytiques, somnifères, 18 et demi de tension, perte de l’appétit et de poids 9 kgs en 1 mois, perte du sommeil,

repli sur moi-même avec pensées extrêmement négatives et dangereuses pour moi et l’ensemble de mon entourage liées à vos

récurrentes convocations dans votre bureau, interventions, remarques désobligeantes, réflexions et manque de respect quotidiennes et injustifiées à mon égard (et cela également parfois en présence du personnel de mon service), dont la dernière la veille de mon arrêt, à savoir :

-incompétence

-inaptitude

-inefficacité

-inutilité

-incapacité à se remettre en question

-inopérationnel

-incapacité à gérer les différents services'

-Que vous ne me lâcheriez pas, serez tous les jours derrière moi, me mettrez sans cesse la pression et me harcèleriez tant que je n’aurai pas atteint les nombreux objectifs, alors même que comme vous le savez, la crise économique touche également notre secteur d’activité.

-Qu’à salaire moindre (SMIC) vous pourriez embaucher une personne qui serait capable d’effectuer les mêmes tâches que les miennes,

que vous envisagiez même de me baisser le salaire, voire vous dispenser de moi et me licencier!'

Je vous rappelle qu’à force de me traquer sans cesse et face à de tels agissements dont j’ai été victime de votre part lors de situations précédentes et identiques, avaient déjà entraîné un arrêt pour dépression en 2010.

Par conséquent, agissant de la sorte et de plus m’ayant repris mes parts du capital en avril 2013, je ne connais pas les raisons qui vous motivent et dans quel but vous agissez de la sorte envers moi et souhaiterais que vous m’indiquiez très clairement et honnêtement où vous voulez en arriver, car vous comprendrez qu’il m’est extrêmement difficile de travailler dans de telles conditions, de telles contraintes et actes de déstabilisation, ayant quotidiennement une épée de Damoclès au-dessus de ma tête, quoi que je fasse cela ne vous satisfaisant jamais et n’ayant apparemment plus aucune confiance en moi, puisque m’ayant proposé en début d’année, si je le souhaitais, une solution avec un départ à l’amiable (Rupture Conventionnelle), ainsi qu’une proposition financière, indiquant même que je ne serais surtout pas lésé.

Aussi, je reprends ce jour mes fonctions après ce repos forcé et vous informe que je ne pourrai encore accepter et endurer plus longtemps un tel traitement, que je qualifie d’injustifié, intolérable et inadmissible, surtout dans une relation de travail qui devrait être la nôtre.

Par ailleurs, vos premiers mots ce matin à mon égard ont été,venez me voir, nous devons trouver une solution, que cela ne pouvait plus durer, vous m’avez parlé d’une éventuelle rupture conventionnelle et avez admis avoir été beaucoup trop loin dans votre comportement à mon égard, et reconnu que celui-ci ayant été le principal élément déclencheur m’ayant poussé à la dépression que j’ai vécue.

Par conséquent, je vous prie de m’indiquer par retour la position définitive que vous souhaitez adopter et me la communiquer rapidement, afin que nous prenions en fonction de celle-ci, toutes nos dispositions. Je reste entière disposition ».

La SAS K Z INTERNATIONAL (HBI) a répondu par courriel du 19 juin 2014 qu’il ne comprenait pas les différents messages du salarié et regrettait "la tournure que vous semblez vouloir donner à nos relations. Je vous confirme que vous avez toute votre place dans l’Entreprise, et comme toujours je reste à votre écoute. Cordialement".

Il résulte des différents éléments produits que la SAS HBI, tout en prétendant avoir décidé de retirer à Monsieur X la responsabilité du service douane et courses en raison de la surcharge temporaire de travail dont s’était plaint le salarié, auquel la décision d’ "application immédiate« a été annoncée par courriel du 12 mars 2014, avait d’ores et déjà procédé à l’embauche de Monsieur O P le 20 janvier 2014 sur le poste de »responsable du service Douane et Services extérieurs (douane-quai-courses)", en sorte que Monsieur X a été brutalement privé d’une partie de ses responsabilités, sans qu’il ne soit consulté par son employeur et sans motif valable.

II- Sur la cession d’actions imposée

Monsieur J X fait valoir qu’eu égard à ses résultats et son implication personnelle dans la société, il s’est vu proposer 40 actions de la société HBI, qu’il a signé un pacte d’actionnaires en date du 10 janvier 2007, qu’il a été contraint le 23 avril 2013, sans qu’il ait eu la possibilité de le refuser, de céder ses parts à la société HB CONSULT au prix fixé par cette dernière à savoir 5200 euros et qu’il s’est ainsi totalement fait évincer du jour au lendemain alors même qu’il n’avait aucunement démérité dans ses activités professionnelles.

La SAS K Z INTERNATIONAL réplique que le cadeau de 40 actions a été fait aux quatre piliers de l’entreprise à des époques différentes dans un même esprit : s’assurer une équipe d’encadrement motivée, fidélisée et concernée par la vie de l’ensemble de l’entreprise, que Monsieur J X en a bénéficié le 10 janvier 2007, qu’en 2013, Monsieur K Z est contraint de constater le manque d’implication de Monsieur J X pour tout autre chose que l’import, ce qui le conduit à lui proposer le rachat des actions accepté Monsieur J X pour un prix de 5200 euros, qu’il n’y a là ni contrainte, ni humiliation, ni dévalorisation, mais une plus-value fixée par Monsieur J X au regard des dividendes qu’il aurait dû percevoir cette année-là et qu’aucun élément objectif ne permet de caractériser un harcèlement à l’occasion de cette cession librement consentie.

Monsieur J X produit le pacte d’actionnaires en date du 10 janvier 2007, l’acte de cession des 40 actions en date du 23 avril 2013 signé par les deux parties, pour un montant de 5200 euros (le prix d’acquisition d’origine était de 40 euros le 10 janvier 2007), ainsi que les documents relatifs à l’ordre de mouvement et au dépôt du chèque de 5200 euros auprès de sa banque.

Il verse également un courriel du 2 février 2009 d’K Z adressé à S T concernant sa participation au capital : « […] Puisque vous ne serez plus en charge du développement et que votre apprentissage risque d’être plus long et coûteux que prévu, je considère que les termes de notre collaboration ont changé, et je vous propose donc de vous reprendre les 20 % du capital que nous vous avions offert et qui n’ont plus de réelle contrepartie' ».

Aucun des éléments ainsi produits ne démontre que Monsieur J X aurait été contraint le 23 avril 2013 de céder ses parts à la société HB CONSULT, associé majoritaire de la SAS K Z INTERNATIONAL, d’autant plus que le salarié a bénéficié d’une plus-value sur la cession de ses actions.

Le prix fixé correspond à la valeur nominale de l’action telle qu’inscrite dans les comptes de la société HBI de l’année 2013 (dans la rubrique "composition du capital social" : valeur nominale de 125 euros par action).

Le courriel adressé à S T, outre qu’il ne concerne pas J X, révèle le contexte d’insatisfaction de l’employeur dans lequel la proposition de rachat a été adressée à cette salariée, sans qu’il ne traduise pour autant une contrainte exercée à l’égard de cette dernière.

Aucun manquement ne peut donc être retenu à l’encontre de la SAS K Z INTERNATIONAL au titre de la vente des actions de Monsieur J X.

III- Sur le harcèlement moral

Monsieur J X soutient qu’il a été victime de brimades répétées devant l’ensemble du personnel pour tenter de le décrédibiliser dans sa fonction, que cette habitude de management a toujours existé au sein d’HBI, mais les dénigrements, les mots insultants en réunion devant des collègues de travail, se sont multipliés après l’arrivée des enfants de Monsieur K Z, que ses qualités et compétences professionnelles étaient remises en cause, qu’il disparaissait même du trombinoscope de l’entreprise qui prévoyait déjà sans doute depuis longtemps son éviction, que le concluant a connu une dégradation de ses conditions de travail et de son état de santé, qu’à l’issue d’une procédure médicale et psychiatrique, il a en effet été déclaré en invalidité de 2e catégorie en raison d’un état dépressif sévère.

Il verse, outre les pièces déjà examinées ci-dessus, les éléments suivants :

— l’attestation entièrement dactylographiée du 26 août 2014 de Monsieur U E, ancien directeur commercial de la société HB INTERNATIONAL de 1995 à 2005, qui relate : « atteste avoir été témoin du harcèlement de Mr Z à l’encontre de Mr X. Durant les réunions commerciales hebdomadaires Mr X faisait l’objet d’attaques verbales ciblées et humiliantes, déstabilisant ce dernier jusqu’à la limite du supportable. Alors que son travail était irréprochable, Monsieur Z a employé tous les moyens afin de faire douter Mr X de ses capacités, de lui faire perdre confiance en lui avec pour unique objectif de le déstabiliser et mieux le dominer. Totalitarisme dont il a d’ailleurs toujours fait preuve envers l’ensemble de l’encadrement et du personnel de l’entreprise. Par ce biais, Monsieur Z a tenté d’annihiler la personnalité de Monsieur X, dont il avait fait son bouc émissaire » ; l’attestation entièrement manuscrite du 7 décembre 2015 de Monsieur U E, reprenant les mêmes termes que la précédente attestation ;

— l’arrêt du 15 mars 2011 de la Cour de cassation cassant l’arrêt du 12 novembre 2009 de la cour d’appel d’Aix-en-Provence ayant condamné Monsieur U E à payer à la SAS K Z INTERNATIONAL des dommages intérêts pour violation de la clause de non-concurrence inscrite dans le pacte d’actionnaires du 13 février 2014 ;

— l’attestation entièrement dactylographiée du 2 avril 2014 de Monsieur AQ AR D, qui déclare : « avoir durant toute la durée de mon emploi dans l’entreprise HBI et cela de façon encore plus excessive lors de la délocalisation du service douane et courses dans le même bureau que le service import, qui a eu pour but une surveillance inutile, exagérée, étroite et accrue de notre service et de nos prestations, avoir subi de Mr Z ainsi que de sa fille, de nombreuses brimades, réflexions, harcèlement, remise en question de nos compétences, de la qualité de notre travail et surtout de nos horaires que nous avons toujours respectés.

Je déclare avoir assisté et cela pratiquement quotidiennement, aux diverses insultes, réflexions humiliantes et harcèlement dont a fait preuve Mr K Z à l’encontre de Mr X sur la gestion du service douane et courses dont il avait aussi la charge alors que j’avais été tout de même embauché pour cela, ainsi que sur la gestion de son service « import », mais aussi sur la gestion de l’agence du Havre dont il en avait également la gestion et l’entière responsabilité, cela en présence de Mr B et de moi-même ainsi que celle du personnel de son service, je cite entre autres, Madame A, Mr Y, Melle L Z et parfois de certaines autres personnes présentes dans le service, ce qui à mon avis a provoqué la dégradation des services ainsi que de nos conditions de travail » ; l’attestation manuscrite du 8 décembre 2015 de Monsieur AQ AR D qui témoigne : « Déclare avoir constaté et assisté, cela pratiquement quotidiennement, aux réflexions humiliantes et au harcèlement dont a fait preuve Monsieur K Z à l’encontre de Mr X, sur la gestion de son service et des résultats financiers du service douane et courses ainsi que de l’agence du Havre dont il lui en avait également les responsabilités et cela en présence de mon assistant Monsieur B V ainsi que celle du personnel de son service, Madame A N, Mr Y M et ensuite de sa fille L Z » ;

— l’attestation manuscrite du 21 avril 2014 de Monsieur W I, ayant travaillé au service import de la société HBI sous la responsabilité de Monsieur J X et qui atteste : « avoir durant la durée de mon emploi au sce exploitation import, soit du 01/06/2003 au 30 avril 2011 avoir assisté de la part de Mr Z et cela de façon récurrente, excessive et odieuse et parfois même humiliante : la remise en question de ses capacités à gérer les différents services dont il avait la charge, remettre en cause ses compétences et ses performances, la qualité de son travail, les résultats financiers, de n’être jamais à la hauteur des objectifs et tâches qui lui étaient fixées, lui reprochant de ne pas prendre (voir jamais) les bonnes décisions quelles qu’elles soient, d’être incapable d’évoluer et faire évoluer son service, de ne pas être au courant de ce qu’il s’y passait alors qu’il était toujours à notre écoute et à notre disposition et prenait le temps afin de nous apporter son aide, d’être dans l’incapacité de se remettre en question, de travailler dans son coin et faire ce qu’il voulait, de ne pas faire suffisamment de courriel et de suivre ses clients, alors que Mr Z ne s’est à nos souvenirs jamais déplacé avec Mr X pour rencontrer nos clients (Carrier/Toshiba/Cave de Gontero) et autres (Arba, terre d’oc, MPGA, C,WBA brasserie, Masquin etc.) de ne pas être l’homme de la situation, lui mettant constamment la pression, le rabaissant, le dévalorisant et l’invectivant sans cesse et autant de mépris.

Professionnellement, je n’ai jamais vu une personne se défouler verbalement de la sorte, ce comportement correspondait plus à du harcèlement, ce qui à mon sens était totalement injustifié car ayant eu à faire durant toutes ces nombreuses années à un homme d’expérience, responsable, réfléchi, épanoui, investi comme aucune autre, ne regardait jamais les horaires, toujours à notre écoute, toujours prêt à nous aider et doté de grandes qualités professionnelles, mais aussi humaines, ce que n’a jamais pu ni su faire Mr Z envers son personnel qu’il a toujours traité avec dédain » ;

— l’attestation manuscrite du 9 mai 2014 de Monsieur V B, ayant exercé la profession de déclarant sous la responsabilité de son chef de service, Monsieur AQ AR D, et précisant que leur bureau du service douane avait été déplacé dans le même bureau que celui du service import sous la responsabilité de Monsieur X, lequel témoin confirme : « avoir durant toute la durée de ma mission dans cette entreprise et cela de façon encore plus soutenue et excessive lors de l’arrivée de sa fille L Z au service import depuis le mois de mars 2013, avoir assisté quotidiennement de la part de Mr Z envers Mr X, cela de façon répétitive, inappropriée, inexplicable à de perpétuelles remontrances, reproches, remises en question sur ses capacités à la bonne gestion de tous les services dont il a la charge (import, douane, agence du Havre), de la mauvaise qualité de son travail, de n’avoir aucune organisation, n’étant jamais à la hauteur des objectifs qui lui étaient fixés, le traitant d’incompétent et de ne jamais être à l’écoute et au courant de ce qu’il se passe dans les différents services alors que Mr X a toujours été présent à notre disposition et de bons conseils, qu’ils soient professionnels, cela en fonction de ses compétences douanières dont ce n’était pourtant pas la profession, mais aussi personnelles.

Nous avons pour notre part toujours en face de nous une personne d’expérience, responsable, ne rechignant jamais à la tâche ni aux heures passées, toujours prête à nous aider, mais aussi à nous remettre en cause lorsque ceci s’avérait nécessaire, dotée de qualités certes professionnelles, mais aussi humaines et dont nous n’avons jamais eu à nous plaindre ni remettre en cause les compétences.

Il est inconcevable, inadmissible, impensable et inacceptable qu’un chef d’entreprise puisse se comporter d’une telle façon et avec autant d’acharnement, exercer une telle pression, dévaloriser, rabaisser, et s’en prendre verbalement à quelqu’un d’une façon aussi hautaine et autant de mépris, tout comme lui-même et sa fille l’ont fait et de la même façon avec Mr D et moi-même, avec au bout le résultat et l’issue recherchée » ;

— l’attestation du 29 janvier 2018 de Monsieur M Y, commercial : « ayant travaillé durant de nombreuses années sous les ordres de Mr X dont je tiens à souligner les compétences tant professionnelles qu’humaines et tiens à témoigner, n’ayant pu le faire avant, étant employé de la société HBI et ayant peur des représailles de la part de ma direction, du harcèlement subi par Mr X de la part de Monsieur Z et cela à de nombreuses reprises, plus particulièrement dans un premier temps, dès l’arrivée de son fils AA Z qui a pris la direction de l’agence de Miami-USA et ensuite de l’agence de Lyon après s’être « débarrassé » des deux responsables d’agence Mme S T et AB AC, et ensuite de manière beaucoup plus récurrente dès l’arrivée au Sce Import de sa fille L Z, dont il souhaitait apparemment au vu de son comportement, qu’elle prenne la direction de ce service et par la même occasion de se débarrasser de Mr X, de le traiter et cela devant l’ensemble du personnel du Sce Import et douane d’incompétent, d’inefficace, de rétrograde inutile et incapable de gérer les différents services dont il avait la charge : Import, Douane et Direction de l’agence du Havre. Qu’il ne le lâcherait pas, qu’il serait toujours derrière lui, qu’il lui mettrait la pression et le harcèlerait tant qu’il n’aurait pas obtenu ce qu’il attend de lui, que de toute façon il n’entrait plus dans ses plans et pourrait se dispenser de lui » ;

— un "historique et présentation" de la société HBI, avec présentation de l’équipe sur un site Internet (2014), Monsieur J X n’apparaissant plus sur le trombinoscope de l’entreprise ;

— différents courriels échangés entre Monsieur J X et Monsieur K Z entre le 16 juin et le 7 juillet 2015, le salarié se plaignant du comportement harcelant de son employeur (l’appelant toutes les 5 minutes pour lui mettre la pression, faisant preuve d’incessants changements d’attitude,) faisant état d’entretien informel concernant une rupture conventionnelle, et l’employeur répondant ne pas comprendre le comportement du salarié et ne pas être d’accord avec ce qu’il écrit "qui est contraire à la réalité", proposant de faire appel à un tiers extérieur à l’entreprise en vue d’une médiation (courriel du 25 juin 2014) ;

— un courriel du 10 octobre 2013 de AA Z adressé à J X à la suite de la transmission à ce dernier des nouveaux taux import depuis l’Asie (J X : "Bien joué les filles. Merci beaucoup, vous êtes deux anges") :

« J, ce sont des fournisseurs, elles te roulent dans la farine, punaise!

Si tu veux qu’on récupère des trafics on doit se montrer plus agressifs!!!

C’est la pression, et non la gentillesse qui nous fera obtenir des résultats. Bonne soirée. AA Z » ;

— des courriels échangés les 22 et 23 avril 2014 entre Monsieur J X et la médecine du travail aux fins d’obtenir la communication à son médecin traitant de son dossier

médical et indiquant que son médecin et son psychiatre souhaiteraient savoir si d’autres cas ont été signalés à la médecine du travail par le personnel de la société HBI ;

— le courriel du 7 août 2014 adressé par Monsieur J X au médecin du travail en ces termes : « Suite à ma visite médicale du 17 juin concernant la reprise d’activité dans l’entreprise H.B. International, je vous tiens informé comme convenu des suites de celle-ci qui n’aura malheureusement que très peu duré, le harcèlement, l’agressivité verbale ainsi que les reproches de tous ordres cherchant encore à me dévaloriser, me déstabiliser’ Vous m’aviez informé des risques que j’encourais au regard de la réputation de tortionnaire, autoritaire, hautaine, agressive et totalitaire de Mr Z, la reprise s’est exactement et malheureusement passée comme vous l’aviez prévu' » ;

— le dossier médical de la médecine du travail, dans lequel il est mentionné que le salarié signale un "conflit au travail « dès le 8 novembre 1995, un »stress et angoisse dont stress au travail« et »moins de soucis familiaux« lors de la visite médicale du 19 novembre 1997, un »stress professionnel important« lors de la visite médicale du 12 décembre 2007, un »stress professionnel, pression continuelle« lors de la visite médicale du 22 octobre 2009, une »dépression depuis décembre 2010
-traitement antidépresseur pendant 1 an et demi
" lors de la visite médicale du 23 novembre 2011, une plainte pour harcèlement lors d’une conversation téléphonique le 7 avril 2014 ;

— un courrier du 4 avril 2014 du Docteur AD AE, médecin généraliste, adressant Monsieur X à un confrère : "Je vous confie Mr X qui présente un état anxio-dépressif assez sévère avec beaucoup d’angoisse, secondaire à une sorte de harcèlement au travail. En attendant je l’ai mis sous lysanxia 10 + Noctamide 2mg + Deroxat" ;

— des avis d’arrêt de travail à partir du 21 mars 2014 jusqu’au 15 juin 2014 mentionnant un état anxio-dépressif réactionnel sévère ;

— des avis d’arrêt de travail à partir du 8 juillet 2014 mentionnant un état anxio-dépressif réactionnel sévère ;

— des ordonnances prescrivant un traitement médicamenteux entre le 7 mars 2014 et 1er juillet 2014 et entre le 28 avril 2017 et le 16 juillet 2018 ;

— un certificat du 12 septembre 2014 du Docteur AD AE, qui "certifie que la dégradation de l’état de santé de Monsieur J X semble en rapport avec les problèmes rencontrés dans l’exercice de son travail" ; un certificat du 20 avril 2018 du Docteur AD AE certifiant que Monsieur J X est, à ce jour "toujours suivi pour son état anxio-dépressif" ;

— la fiche d’aptitude médicale du médecin du travail en date du 17 juin 2014 déclarant Monsieur J X apte à la reprise ;

— un certificat médical du 5 novembre 2014 du Docteur AF AG, médecin psychiatre, qui "certifie suivre depuis le 09/04/2014 Mr J X, âgé de 56 ans, pour la prise en charge d’un état dépressif majeur survenu dans un contexte de graves difficultés rencontrées dans l’exercice de son activité professionnelle. Son état nécessite la prescription d’un arrêt maladie et d’un traitement antidépresseur et anxiolytique" ;

— le titre de pension d’invalidité catégorie 2 attribuée le 1er avril 2017 et la notification du montant annuel de la pension d’invalidité de 18 140,63 euros.

Monsieur J X établit ainsi des faits qui, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de

prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

La SAS K Z INTERNATIONAL (HBI) fait valoir que jusqu’en 2014, il n’y a eu aucun échange ou reproche dans un sens ou dans l’autre entre les parties, que les entretiens d’évaluation ne montrent aucune tension entre Monsieur J X et Monsieur K Z, que ce n’est que le 16 juin 2014 que Monsieur J X, lors de sa reprise du travail, a adressé un premier mail à Monsieur K Z, qualifiant de harcèlement le retrait de la responsabilité du service douane et courses effectué en raison de la surcharge de travail invoquée par le salarié, que le grief avancé repose sur des événements anciens non reprochés par le salarié en son temps, que la dispense de la responsabilité du service douane et courses, événement isolé, ne caractérise pas non plus le grief de harcèlement, que Monsieur J X, à la suite d’un premier arrêt de travail, évoque un ressenti de persécution dont il s’ouvre à une salariée N A en 2010 sans aucun fondement et sans rien évoquer auprès de son employeur, que les courriels adressés par Monsieur J X ne sont pas probants en ce que nul ne peut se constituer de preuve à soi-même, qu’aucun élément objectif ne corrobore les allégations du salarié, que les attestations versées aux débats par Monsieur X ne sont pas probantes ou sont irrecevables et partiales, émanant toutes de personnes qui ont quitté l’entreprise et qui avaient un lien direct avec Monsieur X, que les employés travaillent en open-space dans l’entreprise et aucun employé d’un autre service actuellement dans l’entreprise ne vient attester des prétendus excès verbaux d’K Z, que les attestations de l’appelant sont imprécises, faisant état de faits subjectifs insuffisamment précis, non circonstanciés et non datés, n’exprimant que des jugements de valeur, que Monsieur U E a été en conflit avec HBI ce qui le rend partial, que des cadres de l’entreprise produisent des témoignages contraires, que l’attestation de Monsieur W I ne comporte pas les mentions relatives aux sanctions pénales en cas de faux témoignage, qu’au surplus, Monsieur W I est le cousin de Monsieur E et est dès lors partial, que l’attestation de Monsieur V B est irrecevable car ne comportant pas les mentions relatives aux sanctions pénales en cas de faux témoignage, que l’attestation de Monsieur M Y est irrecevable car ne comportant pas les mentions relatives aux sanctions pénales en cas de faux témoignage, que cette dernière attestation produite pour la première fois en cause d’appel en 2019 est datée du 29 janvier 2018, que l’ancienneté des accusations portées dans cette attestation rédigée plus de 7 ans après, la prive de toute valeur probante, qu’au demeurant, elle ne relate aucun fait précis et daté mais se contente d’accusations, que la société concluante verse aux débats des témoignages qui à l’opposé des invectives proférées par les sachants de Monsieur X démontrent l’absence de harcèlement exercé vis-à-vis de Monsieur X, que contrairement à ce qui est prétendu par l’appelant, l’examen du registre du personnel permet de se convaincre qu’il n’y a pas eu un « turn-over » excessif ou anormal en 30 ans d’activité de l’entreprise, que les observations des médecins sur la cause de la maladie n’ont pas de valeur probante, que Monsieur J X a prêté au médecin du travail des propos que celui-ci n’a jamais tenus, tel que cela ressort d’une réponse du médecin du travail s’insurgeant contre les propos mensongers de Monsieur X, que Monsieur J X ne démontre donc pas que son arrêt de travail est d’origine professionnelle et qu’il doit être débouté de ses réclamations.

La SAS K Z INTERNATIONAL produit, outre ses pièces déjà examinées ci-dessus, les éléments suivants :

— différentes fiches individuelles d’évaluation de salariés, non signées par les intéressés ;

— un historique de la marge brute de la société HBI (de janvier à septembre 2013), des tableaux et graphiques du nombre de dossiers IMPORT (en diminution entre 2010 et 2013) et du nombre de dossiers IMPORT EXPORT (en augmentation entre 2010 et 2012 et en baisse en 2013) et de la marge brute IMPORT (en diminution entre 2010 et 2013) et de la marge brute IMPORT EXPORT

(en augmentation entre 2011 et 2012 et en diminution en 2013) ; la société intimée souligne que ces tableaux ainsi que les bilans produits sur les années 2010, 2012 et 2013, confirment la santé de l’entreprise en croissance depuis 2009 et les faibles résultats de Monsieur J X dans son service bien avant la crise de 2008 ;

— un tableau des formations internes et externes suivies par Monsieur J X entre 1996 et 2017 ;

— le registre des entrées et sorties du personnel de la SAS K Z INTERNATIONAL, laquelle relève que l’ancienneté moyenne du personnel cadre dirigeant (les piliers), incluant d’ailleurs Monsieur X, est de plus de 10 ans et qu’elle atteste que les gens se plaisent au sein de HBI, alors même que le milieu du maritime recrute en permanence ;

— l’arrêt 12 novembre 2009 de la 2e chambre de la cour d’appel d’Aix-en-Provence ayant condamné in solidum Monsieur U E et la SAS COQUELLE GOURDIN à payer à la société HBI 35 000 euros de dommages intérêts au titre de la violation de la clause de non-concurrence ;

— le courrier du 6 juin 2013 de démission de Monsieur AQ AR D ;

— l’attestation du 15 juin 2015 de Monsieur AH H, directeur administratif et financier de HBI, qui déclare, après avoir pris connaissance des témoignages produits par Monsieur J X : « Je travaille avec K Z depuis septembre 1990, soit depuis bientôt 25 ans. Je suis cadre depuis le 01 janvier 1995 et j’occupe depuis 2003 le poste de directeur administratif et financier. Monsieur Z a toujours été certes autoritaire et exigeant en terme de performance, mais en aucun cas un tortionnaire, de même qu’il n’a jamais fait preuve de harcèlement à mon égard, ni de quiconque d’ailleurs. Nos relations ont toujours été saines, claires et précises, sans animosité ni ranc’ur. Ce fonctionnement a été constructif et productif. Monsieur Z a su me conseiller et me confier au fil des années de plus en plus de responsabilités, ce qui m’a permis d’évoluer de manière conséquente dans la société. Monsieur Z a toujours su reconnaître la valeur de ses salariés, et être reconnaissant envers eux » ;

— l’attestation du 17 juin 2015 de Monsieur AI AJ, directeur commercial de HBI, qui relate : « Faisant partie de l’encadrement depuis une quinzaine d’années et participant aux réunions commerciales hebdomadaires, je n’ai jamais subi de harcèlement de la part de Mr Z mais simplement une pression relative à l’objectif de nos budgets commerciaux et du bon fonctionnement de l’entreprise » ;

— l’attestation du 19 juin 2015 de Madame AK AL, assistante de direction, qui déclare : « M. Z m’a fait prendre connaissance des documents portés à ce dossier. De ma propre expérience, je peux dire que M. Z est un Directeur exigeant, qui demande à ses collaborateurs d’être performants, et à hauteur des responsabilités que chacun occupe dans l’entreprise. Étant son assistante, il attend de moi un certain niveau de rigueur et de professionnalisme, mais pour autant, je ne me suis jamais sentie harcelée dans mon travail. En dehors de cette exigence, inhérente à sa fonction de chef d’entreprise, je n’ai personnellement jamais ressenti aucune autre pression d’aucune sorte ni attitude infondée à mon égard » ;

— un courriel du 12 juin 2015 de AM AN adressé à "Tout HBI" : « Et bien voilà, je vous écris pour vous indiquer que je termine l’aventure HBI America ce vendredi 12 juin après avoir passé près de 5 ans aux USA, une page se tourne.

J’ai partagé avec vous près de 11 années entre le département chimie et le pays de l’oncle Sam. Ces années auront été un parcours professionnel mais aussi humain.

Je garde un excellent souvenir de mon passage parmi vous. Mon chemin prend la direction de l’aventure et la découverte de pays, de rencontres, et je passerai vous voir avec plaisir à l’occasion de mon retour en France.

Portez-vous bien! Je suis sûr que nos routes se croiseront de nouveau. Amicalement! » ;

— la fiche d’aptitude médicale suite à la visite de reprise de Monsieur J X le 17 juin 2014 ;

— un courrier du 16 juin 2015 adressé par le Docteur G, médecin du travail, à Monsieur K Z, en ces termes : « J’ai bien reçu un courriel de M. J X : envoyé le 6 août 2014 où il y avait ce passage : « Vous m’aviez informé des risques que j’encourais au regard de la renommée autoritaire, agressive et totalitaire de Mr Z, la reprise s’est exactement et malheureusement passée comme vous l’aviez prévu et de plus celui-ci ayant souhaité et demandé de faire appel à un tiers extérieur (avocat) en vue d’une médiation ».

J’ai pris connaissance de ce courriel le jeudi 7 août 2014 et lui ai répondu aussitôt.

Je vous joins la copie du mail de retour.

Il est possible que M. X prenne ses désirs pour des réalités.

Soyez convaincu que je n’ai jamais tenu de tels propos et qu’ils n’effleurent pas mes pensées », avec copie du courriel adressé par le médecin du travail le 7 août 2014 à J X : « J’ai bien reçu votre mail d’hier. Vous me rapportez des propos que je n’ai pas tenus et que je ne pense pas' » ;

— les échanges de courriels entre J X et K Z entre le 16 juin 2014 et le 25 juin 2014, déjà produits par l’appelant.

Les attestations des cadres de l’entreprise et de l’assistante de direction versées par la société HBI décrivent des relations saines avec l’employeur, Monsieur K Z, même si ce dernier est décrit comme un dirigeant exigeant, même autoritaire, attendant de ses collaborateurs un haut niveau de performance, sans qu’il n’ait fait preuve de harcèlement à leur encontre.

Toutefois, ces témoins, à l’exception de Monsieur H (DAF) qui rapporte que Monsieur K Z "n’a jamais fait preuve de harcèlement à mon égard, ni de quiconque d’ailleurs", n’apporte aucune précision sur les agissements de harcèlement moral évoqués par des salariés ayant quitté l’entreprise, à l’encontre de Monsieur J X.

Si l’attestation de Monsieur U E, ancien directeur commercial de la société HB INTERNATIONAL, ne présente pas toutes les garanties de crédibilité en l’état du litige commercial ayant opposé cet ancien salarié à la société HBI, les témoignages concordants de Messieurs AQ AR D, W I, V B et M Y présentent des garanties suffisantes pour emporter la conviction de la Cour, même si elles ne sont pas entièrement conformes aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile (à l’exception de l’attestation manuscrite de M. D pleinement régulière).

Contrairement à ce qui a été relevé par le premier juge, les attestations de Messieurs W I et V B sont suffisamment précises, rapportant les propos de Monsieur K Z certes sous une forme indirecte mais sans aucune équivoque.

Ainsi, Monsieur W I relate que Monsieur Z reprochait à Monsieur X "de ne pas prendre les bonnes décisions…, d’être incapable d’évoluer et faire évoluer son service, de ne pas être au courant de ce qu’il s’y passait … d’être dans l’incapacité de se remettre en question, de travailler dans son coin et faire ce qu’il voulait, de ne pas faire suffisamment de courriel et de suivre ses clients, … de ne pas être l’homme de la situation", mettant en cause ses capacités professionnelles et le dévalorisant sans cesse.

Monsieur V B rapporte avoir assisté "à de perpétuelles remontrances de Mr Z envers M. X, reproches, remises en question sur ses capacités.. le traitant d’incompétent…".

De même, l’attestaion de Monsieur M Y, produite en appel, est suffisamment précise, ce témoin relatant que Monsieur Z traitait Monsieur X "d’incompétent, d’inefficace, de rétrograde inutile…".

Alors même que la société HBI n’a jamais engagé de procédure disciplinaire à l’encontre de Monsieur J X pour des manquements ou une insuffisance professionnelle et ne lui a jamais adressé de reproches écrits au sujet de ses résultats commerciaux, les termes utilisés par le dirigeant de la société, de manière répétitive sur plusieurs années (depuis 2003 selon M. I) jusqu’en 2014 et devant les autres employés y compris des subordonnés de Monsieur X, ne relèvent aucunement de l’exercice normal par l’employeur de son pouvoir de direction mais traduisent une volonté de dévaloriser et d’humilier le salarié, agissements qui se sont accentués après l’arrivée d’L Z dans le service, Monsieur Z ayant exprimé, selon le témoignage de Monsieur Y, la volonté de se débarrasser de Monsieur X en étant "toujours derrière lui, qu’il lui mettrait la pression… que de toute façon il n’entrait plus dans ses plans…".

Ces agissements de l’employeur, outre la décision brutale de retirer à Monsieur X la responsabilité du service douane et courses par courriel du 12 mars 2014 sans aucune consultation du salarié, caractérisent le harcèlement moral subi par ce dernier.

Au vu des agissements gravement fautifs de l’employeur, il convient de faire droit à la demande de Monsieur J X de résiliation judiciaire de son contrat de travail, produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il convient, en conséquence, d’accorder à Monsieur J X la somme brute de 14 400 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et la somme brute de 1440 euros au titre des congés payés sur préavis, dont le calcul des montants n’est pas discuté.

Monsieur J X réclame sans aucune explication la somme de 36 480 euros « au titre des indemnités de licenciement ». Il ne prétend pas ne pas avoir perçu les indemnités de rupture découlant de son licenciement pour inaptitude et ne verse aucun élément ni calcul à l’appui de sa réclamation.

Il convient donc de débouter l’appelant de sa demande en paiement de la somme de 36 480 euros à titre d’indemnités de licenciement.

Monsieur J X produit les justificatifs de la pension d’invalidité perçue depuis le 1er avril 2017. Il ne verse pas d’élément sur l’évolution de sa situation professionnelle postérieurement à son licenciement pour inaptitude en date du 22 mai 2017.

En considération des éléments versés sur son préjudice, de l’ancienneté du salarié supérieure à deux ans dans une entreprise occupant plus de 10 salariés et du montant de son salaire mensuel brut, la Cour accorde à Monsieur J X la somme de 70 000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il n’y a pas lieu d’accorder à Monsieur J X une indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement qui ne se cumule pas avec l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse dans le cadre de l’article

L.1235-3 du code du travail.

Sur la remise des documents sociaux :

Il convient d’ordonner la remise par la SAS K Z INTERNATIONAL d’un bulletin de paie mentionnant les sommes allouées de nature salariale et de l’attestation Pôle emploi rectifiée en conformité avec le présent arrêt, sans qu’il soit nécessaire d’assortir cette condamnation d’une astreinte.

Sur l’article 700 du code de procédure civile :

Il y a lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice du salarié, tel que précisé au dispositif.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile et en matière prud’homale,

Rejette la demande de la SAS K Z INTERNATIONAL (HBI) d’écarter les pièces 1 à 248 produites par l’appelant,

Infirme le jugement,

Ordonne la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur J X aux torts de l’employeur, produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date d’effet du licenciement prononcé le 22 mai 2017,

Condamne la SAS K Z INTERNATIONAL (HBI) à payer à Monsieur J X :

-2200 euros brut d’heures supplémentaires,

-14 400 euros brut d’indemnité compensatrice de préavis,

-1440 euros brut de congés payés sur préavis,

-70 000 euros brut d’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Ordonne la remise par la SAS K Z INTERNATIONAL (HBI) d’un bulletin de paie et de l’attestation Pôle emploi rectifiée en conformité avec le présent arrêt,

Condamne la SAS K Z INTERNATIONAL (HBI) à payer à Monsieur J X 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre prétention.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

AO AP faisant fonction

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code du travail
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Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-1, 21 février 2020, n° 17/15308