Cour d'appel d'Amiens, 11 mars 2009, n° 08/00972

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Amiens, 11 mars 2009, n° 08/00972
Juridiction : Cour d'appel d'Amiens
Numéro(s) : 08/00972
Sur renvoi de : Cour de cassation, 2 juin 2008

Sur les parties

Texte intégral

N° 261

DU 11 Mars 2009


K L, X, Y

M N, Z, G


C/

Ministère Public

O P

Q R

H S épouse A

Dossier n° 08/00972

SUR RENVOI

DE CASSATION

COUR D’APPEL D’AMIENS

CHAMBRE CORRECTIONNELLE

Arrêt rendu publiquement le onze mars deux mille neuf,

Pour entendre statuer après arrêt de la Cour de Cassation du 3 Juin 2008 qui casse et annule l’arrêt de la Cour d’Appel de DOUAI du 9 Novembre 2006 sur toutes ses dispositions et renvoie les parties devant la Cour d’Appel d’AMIENS.

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Président : Monsieur B,

Conseillers : Monsieur C,

Monsieur AJ-AK,

MINISTERE PUBLIC lors des débats : Monsieur BESSE,

GREFFIER lors des débats : Mademoiselle I,

PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

K L, X, Y

né le XXX à GRAVELINES

Fils d’D et de T U

Nationalité : Française

Situation Familiale : célibataire

Profession : marin de commerce

Déjà condamné

XXX

XXX

Prévenu, non appelant, libre, comparant, assisté de Maître DEHAME L, Avocat au Barreau de BOULOGNE-SUR-MER,

M N, Z, G

né le XXX à CALAIS

Fils de E et de V W

Nationalité : Française

Situation Familiale : concubin

Profession : marin de commerce

Déjà condamné

XXX

XXX

XXX

Prévenu, non appelant, libre, comparant, assisté de Maître DEHAME L, Avocat au Barreau de BOULOGNE-SUR-MER,

LE MINISTÈRE PUBLIC, appelant,

O P

XXX

XXX

Partie civile, appelante, comparante, assisté de Maître NARDON Anne-Sophie, Avocat au Barreau de PARIS,

Q R

XXX

— ECFDAM -

XXX

Partie civile, appelant, non comparant, représenté par Maître NARDON Anne-Sophie, Avocat au Barreau de PARIS,

H S épouse A

XXX

59140 F

Partie civile, appelante, non comparante, représentée par Maître NARDON Anne-Sophie, Avocat au Barreau de PARIS,

RAPPEL DE LA PROCÉDURE :

LE JUGEMENT :

Par jugement contradictoire en date du 10 Février 2006, le Tribunal Correctionnel de F saisi d’une convocation en justice notifiée aux intéressés par Officier de AD AE agissant sur instructions du Procureur de la République,

a relaxé K L, X, Y

POURSUIVI pour AA AB ET AVEC MENACE A LA LIBERTE DU TRAVAIL, le 02/12/2004, à F, infraction prévue par l’article 431-1 alinéa 1 du Code Pénal et réprimée par les articles 431-1 alinéa 1, 431-2 du Code Pénal,

POURSUIVI pourOUTRAGE A UNE PERSONNE CHARGEE D’UNE MISSION DE SERVICE PUBLIC, le 02/12/2004, à F, infraction prévue par l’article 433-5 alinéa 1 du Code Pénal et réprimée par les articles 433-5 alinéa 1, 433-22 du Code Pénal,

a relaxé M N, Z, G

POURSUIVI pour AA AB ET AVEC MENACE A LA LIBERTE DU TRAVAIL, le 02/12/2004, à F, infraction prévue par l’article 431-1 alinéa 1 du Code Pénal et réprimée par les articles 431-1 alinéa 1, 431-2 du Code Pénal,

POURSUIVI pour OUTRAGE A UNE PERSONNE CHARGEE D’UNE MISSION DE SERVICE PUBLIC, le 02/12/2004, à F, infraction prévue par l’article 433-5 alinéa 1 du Code Pénal et réprimée par les articles 433-5 alinéa 1, 433-22 du Code Pénal,

ET SUR L’ACTION CIVILE A :

— reçu Monsieur Q R en sa constitution de partie civile,

— débouté Monsieur Q R de sa demande, les prévenus étant relaxés,

— reçu Monsieur O P en sa constitution de partie civile,

— débouté Monsieur O P de sa demande, les prévenus étant relaxés,

— reçu Madame H épouse A S en sa constitution de partie civile,

— débouté Madame H épouse A S de sa demande, les prévenus étant relaxés,

LES APPELS :

* Appel a été interjeté par :

Monsieur le Procureur de la République, le 13 Février 2006 contre Monsieur K L, Monsieur M N,

Madame H S, le 14 Février 2006 des dispositions pénales et civiles,

Monsieur Q R, le 15 Février 2006 des dispositions pénales et civiles,

Monsieur O P, le 16 Février 2006 des dispositions pénales et civiles,

* La Cour de Cassation, par arrêt du 3 Juin 2008 a cassé et annulé l’arrêt de la Cour d’Appel de DOUAI du 9 Novembre 2006 en toutes ses dispositions et renvoyé les parties devant la Cour de céans,

DÉROULEMENT DES DÉBATS :

A l’appel de la cause, à l’audience publique en date du 28 Janvier 2009, Monsieur le Président a constaté l’identité des prévenus,

Ont été entendus,

Monsieur le Président B en son rapport,

Les prévenus en leur interrogatoire, successivement et séparément,

La partie civile, P O en ses observations,

Maître NARDON, Avocat au Barreau de PARIS, Conseil des parties civiles, en ses conclusions et plaidoirie, qui sollicite la requalification de l’infraction, ((cf les conclusions)

Monsieur BESSE, Substitut de Monsieur le Procureur Général, en ses réquisitions,

Maître DEHAME, Avocat au Barreau de BOULOGNE-SUR-MER, Conseil des prévenus, en sa plaidoirie,

Les prévenus ayant eu la parole en dernier,

Puis la Cour a mis l’affaire en délibéré et le Président a déclaré que l’arrêt serait rendu à l’audience publique du 11 Mars 2009.

Et ce jour, après en avoir délibéré conformément à la loi hors la présence du Ministère Public et du Greffier, Monsieur le Président, qui a signé la minute avec le greffier, a donné, en audience publique, lecture de l’arrêt dont la teneur suit, conformément aux dispositions des articles 485 et 512 du Code de Procédure Pénale, en présence du Ministère Public et du Greffier Mademoiselle I.

DÉCISION : PF/LB

L K et N AC sont prévenus, suivant convocation notifiée le 15 Septembre 2005, par Officier de AD AE , sur instructions du Procureur de la République de F, d’avoir :

En ce qui concerne les deux susnommés

1°) à F, le 2 Décembre 2004, de manière AB et à l’aide de menaces, AA l’exercice de la liberté du travail de R Q, P O, AF J et S H épouse A,

Délit prévu et réprimé par les articles 431-1 alinéa 1 et 431-2 du Code Pénal ;

En ce qui concerne N M

2° ) à F, le 2 Décembre 2004, outragé par paroles, gestes, menaces, de nature à porter atteinte à la dignité ou au respect dû à la fonction de R Q, personne chargée d’une mission de service public dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions, en l’espèce en l’insultant notamment de 'SS- tu n’as pas une gueule à sucer de la glace, connard à cravate',

Délit prévu et réprimé par les articles 433-5 alinéa 1 et 433-22 du Code Pénal ;

En ce qui concerne L K

3° ) à F, le 2 Décembre 2004, outragé par paroles, gestes, menaces, de nature à porter atteinte à la dignité ou au respect dû à la fonction de R Q, personne chargée d’une mission de service public dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions, en l’espèce en l’insultant notamment de 'salopard, saloperie, t’as pas de couille, crâne d''uf, tu n’es pas un être humain, je plains tes gosses d’avoir un père pareil ',

Délit prévu et réprimé par les articles 433-5 alinéa 1 et 433-22 du Code Pénal ;

Par jugement contradictoire en date du 10 Février 2006, le Tribunal Correctionnel de F, relaxait L K et N M, des délits d’AA à la liberté du travail et d’outrage à personne chargée d’une mission de service public dans l’exercice de leurs fonctions.

Saisi des constitutions de partie civile de R Q, P O, AF J et S H épouse A, le premier juge les déclarait recevables, mais déboutait ces derniers de leurs demandes, à raison de la relaxe intervenue.

Sur les appels interjeté, les 13, 14, 15 et 16 Février 2006, à titre principal, respectivement par le Procureur de la République de F , par S H épouse A, par R Q, enfin par P O, à l’encontre des dispositions pénales et civiles dudit jugement, la Chambre des Appels Correctionnels de la Cour d=Appel de DOUAI devait, par arrêt contradictoire à l’égard de l’ensemble des parties, en date du 9 Novembre 2006, infirmer le jugement entrepris sur la relaxe des deux prévenus et, déclarant ces derniers coupables des faits reprochés, les condamnait en répression, chacun, à une peine de 700 Euros d’amende.

Concernant les intérêts civils, le premier juge disait les deux prévenus, responsables des préjudices subis par les trois parties civiles et condamnait solidairement L K et N M à payer à titre de dommages et intérêts, la somme de 1 Euro au profit de R Q et de P O, et celle de 500 Euros au profit de S H épouse A.

Statuant sur les pourvois formés le 13 Novembre 2006 par L K et N M, la chambre criminelle de la cour de cassation cassait et annulait, au terme d’un arrêt rendu le 3 Juin 2008, celui de la Cour d=Appel de DOUAI prononcé le 9 Novembre 2006, en toutes ses dispositions pénales et civiles ; la Cour d=Appel d=AMIENS était désignée par renvoi pour connaître de l=affaire, afin qu’il y soit statué conformément à la loi. .

Régulièrement cités le 11 Décembre 2008, les deux prévenus ont comparu en personne devant la Chambre des Appels Correctionnels de la Cour d’Appel d’AMIENS à son audience du 28 Janvier 2009, de sorte qu’il sera statué à leur encontre par arrêt contradictoire.

Bien que non régulièrement cité, P O s’est présenté en personne devant la Cour, assisté de son conseil et a accepté sa comparution volontaire ; S H épouse A, laquelle a été régulièrement citée à sa personne le 10 Décembre 2008, et R Q, non valablement cité mais ayant, par l’intermédiaire de son Conseil, accepté de comparaître volontairement, se sont fait représenter par le même conseil, que celui qui les avait tous trois assistés devant le premier juge, de sorte qu’il sera statué, à leur sujet, par arrêt contradictoire, leur conseil ayant déposé en leur nom des conclusions tendant à l’infirmation de la décision du Tribunal Correctionnel de F, au prononcé de la culpabilité des deux prévenus pour les chefs de prévention retenus dans les poursuites et à leur condamnation au paiement de dommages et intérêts à leur profit, à hauteur de 1 Euro pour ce qui concerne R Q et P O ; S H épouse A sollicitait pour sa part, la somme de 500 Euros, en réparation de son préjudice.

Il ressort de l=examen de la procédure renvoyée devant la Cour, suite à l’arrêt de cassation rendu le 3 Juin 2008 par la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, que des débats s=étant déroulés devant elle, lors de son audience du 28 Janvier 2009, les éléments suivants :

Le 2 Décembre 2004, vers 10 heures du matin, un groupe de marins de commerce de la Société SEA FRANCE, soit entre quarante et soixante personnes, se réunissaient devant les locaux de la Direction départementale des Affaires Maritimes de F ; ils entendaient protester contre une décision d’inaptitude au travail dont venait d’être l’objet un marin de commerce, AG AH, victime d’un accident du travail, et ne bénéficiant plus que du R.M. I

Cette manifestation de soutien à ce marin avait été organisée par L K, secrétaire général du syndicat C.F.D.T. SEA FRANCE et par N M, son adjoint, afin d’obtenir le réexamen de la situation de leur collègue de travail.

Une vingtaine de manifestants investissaient alors les locaux de la Direction Départementale et se rendaient dans le bureau de R Q, directeur départemental des affaires maritimes, repoussant violemment sa secrétaire, S H épouse A, qui avait tenté en vain de les retenir et de s’opposer à leur entrée dans le bureau de son directeur.

L K et N M prenaient alors à partie R Q, lui interdisant de sortir de son bureau et lui demandant de prendre contact avec le chef du contrôle médical de l’ENIM, à PARIS, organisme de sécurité social des marins, en vue d’un réexamen de la situation de AG AH ; Cette demande était accompagnée de plusieurs propos outrageants, ainsi que de menaces, notamment de jeter le mobilier dans la rue, si satisfaction n’était pas donnée.

Alerté par le tumulte, P O, adjoint du directeur départemental, venait rejoindre son supérieur dans son bureau et était, lui aussi, pris à partie par les manifestants, qui le bousculaient et proféraient à son encontre des injures. L K s’emparait du courrier se trouvant sur le bureau de R Q, pendant que N M entreprenait de fouiller les tiroirs, puis de renverser les documents posés sur le bureau.

La discussion se poursuivait dans un climat de grande tension entre R Q et P O d’une part, les manifestants dirigés par L K et N M d’autre part ; dans le même temps, la manifestation se poursuivait à l’extérieur du bâtiment, accompagnée de pétards, de feux de pneus et d’inscriptions tracées sur le trottoir à la peinture noire et orange.

Vers 11 heures 30, AI J, médecin du travail, attaché à la direction départementale, qui rentrait d’une réunion à l’extérieur, était lui aussi conspué et pris à partie, puis conduit d’autorité dans le bureau du directeur par les manifestants.

Après avoir fait part de leurs doléances, les manifestants restaient dans le bureau du directeur, en présence de R Q , P O et AI J, la secrétaire étant quant à elle maintenue dans un bureau adjacent. Ils exigeaient l’envoi d’un télex par la direction départementale des affaires maritimes au médecin-conseil de l’ENIM, ce qui était finalement réalisé.

Dans l’attente de la réponse de ce dernier, les manifestants restaient sur place, plusieurs d’entre eux , dont L K, prenant un verre de beaujolais nouveau, et mangeant du pain et du pâté , amenés avec eux ; vers 12 heures 15, S H épouse A, en pleurs, quittait son bureau, ne supportant plus la situation.

Vers 12 heures 45, la réponse du médecin-conseil de l’ENIM parvenait à la direction départementale des affaires maritimes de F, confirmant que le dossier de AG AH serait réexaminé et que ses indemnités étaient maintenues.

Par lettre du 10 Décembre 2004, adressée au Procureur de la République de F, le directeur des affaires maritimes et des gens de mer, au Secrétariat d’Etat aux Transports et à la Mer ,entendait dénoncer les faits de séquestration , accompagnés de violences et outrages dont avaient été victimes le directeur départemental de F et ses collaborateurs le 2 Décembre précédent, l’action des salariés de SEA FRANCE ayant eu pour objet de contraindre par tous moyens de pression et au mépris de toutes règles de droit, le directeur départemental à réformer une décision administrative individuelle relative à un employé de la dite compagnie d’armement ; les injures et menaces alors proférés à l’encontre de personnels de l’Etat avaient, en tout état de cause, suscité parmi eux un très vif sentiment d’angoisse et de grandes craintes quant à leur sécurité à venir sur leur lieu de travail.

Les investigations menées dans le cadre de l’enquête préliminaire, alors prescrite le 17 Décembre 2004 aux services de AD de F confirmaient les violences et tensions qui avaient présidé au déroulement de la manifestation initiée par les responsables locaux du Syndicat Maritime Nord, affilé à la CFDT, à savoir les nommés L K et N M.

Dans leurs auditions recueillies entre les 5 et 17 Janvier 2005, tant R Q que P O, ou encore S H épouse A et AI J relataient, avec force détails, les menaces, les violences physiques et verbales ainsi que les outrages et injures auxquels ils avaient été soumis par les manifestants, depuis leur intrusion de force dans le bureau du directeur jusqu’à leur départ, après réception de la réponse du médecin chef du contrôle médical de l’ENIM.

R Q soulignait ne pas avoir sollicité l’évacuation par les forces de l’ordre des manifestants s’étant introduits dans son bureau, par crainte de faire dégénérer une situation par lui jugée comme explosive, et, ce d’autant que les manifestants lui étaient apparus particulièrement excités et selon lui, prêts à tout.

Dans une audition ultérieure en date du 25 Mai 2005, il indiquait que les manifestants avaient cherché à exercer une pression sur la direction des affaires maritimes pour contester une décision administrative d’un marin de SAE France afférente à sa situation médicale, à son inaptitude physique et à la fixation de son taux d’invalidité ; cette action avait été violente, l’occupation de son bureau, dont il lui avait été interdit de sortir, ayant été accompagnée d’agressions verbales, de menaces et d’insultes, outre le nombre des personnes s’y étant introduites ; L K et N M dirigeaient les opérations , les manifestants se montrant particulièrement virulents ; sous la contrainte exercée par L K , il avait finalement contacté le médecin du contrôle médical de l’ENIM, à PARIS, dans le souci d’éviter que la situation ne dégénère, et ne mette en péril le personnel de la direction, outre un saccage éventuel des locaux, compte tenu de l’état d’excitation des manifestants, L K et N M montrant pour leur part, une réelle détermination d’aller jusqu’au bout dans leurs menées.

Entendus, le 15 Septembre 2005, L K et N M convenaient seulement avoir été présents lors de la manifestation du 2 Décembre 2004, cette action syndicale ayant été opérée à l’initiative du syndicat CFDT SEA FRANCE, dont ils étaient les dirigeants, dans le but de défendre le cas d’un marin de cet armement ; à cet effet, ils avaient voulu rencontrer le directeur départemental des affaires maritimes , qui les avait reçus ; tous deux contestaient avoir proféré des propos injurieux, ni avoir exercé de violences.

Convoqués le 15 Septembre 2005 par Officier de AD AE, devant le Tribunal Correctionnel de F à son audience du 12 Janvier 2006, sous les préventions de AA AB et avec menace à la liberté du travail, et d’outrage à personne chargée d’une mission de service public, L K et N M étaient relaxés au terme d’un jugement rendu la 10 Février 2006.

Le premier juge relevait que le délit d’AA à la liberté du travail avait pour objet la protection, non du travail en soi, mais de la liberté des travailleurs de décider de se joindre ou non à une cessation AB du travail, ce qui ne correspondait aux faits reprochés aux deux prévenus, tandis que les investigations diligentées ne permettaient pas de leur imputer à l’un ou l’autre les propos injurieux incriminés.

Devant la Cour, à l’audience du 28 Janvier 2009, L K et N M indiqué avoir organisé la manifestation du 2 Décembre 2004, faute de pouvoir obtenir un dialogue plus ouvert avec le directeur départemental des affaires maritimes et son adjoint, alors en fonction en F ; ils convenaient que ladite manifestation s’était déroulée dans un contexte de tension certaine, et que des propos injurieux et menaçants avaient pu être proférés par les manifestants ; pour autant, ils n’avaient pas séquestré le directeur ni son adjoint, ceux-ci étant au surplus accoutumés aux échanges parfois vifs avec les marins de commerce.

A l=issue des débats, qui se sont tenus devant la Cour et à la faveur desquels les parties ont été invitées à faire part de leurs observations quant à une requalification éventuelle des faits reprochés en violences en réunion sans incapacité de travail, il apparaît constant que L K et N M ont bien participé activement et en personne à la manifestation du 2 Décembre 2004, pour en avoir été les initiateurs , pour l’avoir organisée, l’ayant annoncée par voie de tract, enfin pour l’avoir dirigée et animée sur place, y ayant mis fin, après avoir obtenu satisfaction.

Cette manifestation a été accompagnée, à la faveur de l’investissement de force du bureau du directeur, de propos injurieux, de violences et de menaces de dégradation, qui, par leur nature et le contexte où ils se sont inscrits, ont apporté un trouble réel à l’exercice par les parties civiles de leurs activités professionnelles, durant le temps de l’occupation non autorisée des locaux de la direction départementale des affaires maritimes.

Pour autant, ce trouble ainsi apporté à l’activité professionnelle, en ce que, par leurs agissements volontaires, les deux prévenus ont empêché délibérément les personnes présentes au sein de la direction départementale des affaires maritimes d’exercer librement leur travail, ne saurait cependant constituer une AA à la liberté du travail, au sens de l’article 431-1du Code Pénal, cet article visant à réprimer, en tant que telle, l’atteinte portée au libre choix du travailleur de se joindre ou non à un arrêt concerté du travail, au terme d’une jurisprudence constante.

Concernant les propos outrageants, si les prévenus ont maintenu ne pas les avoir personnellement proférés, ils n’excluaient pas qu’ils aient été tenus par les autres participants à la manifestation ; ces propos injurieux, tels que repris dans la prévention, s’avèrent avoir participé étroitement à la création d’un climat de tension extrême et d’agressivité injustifiée à l’encontre du personnel de la direction départemental des affaires maritimes et plus particulièrement à l’encontre de son directeur ainsi que de son adjoint, qui, pris nommément à partie, se sont sentis en situation de danger pour leur sûreté personnelle et pour celle de leurs collaborateurs.

Aussi les faits dénoncés s’analysent-ils plus exactement en des faits de violences volontaires commis en réunion, sans incapacité de travail, les deux prévenus y ayant participé en personne et activement.

Eu égard aux renseignements de personnalité concernant les prévenus, dont le casier AE porte mention, pour ce qui concerne L K d’une condamnation prononcée le 21 Juin 2001 par la Cour d’Appel de DOUAI pour acte d’intimidation envers une personne chargé de mission de service public pour qu’elle s’abstienne ou accomplisse un acte de sa fonction, faits commis en Octobre 1997 et pour ce qui concerne N M, de deux condamnations prononcées par le Tribunal Correctionnel de BOULOGNE-SUR-MER, l’une le 24 Janvier 2006 pour des faits de violence sur personne vulnérable suivie d’incapacité supérieure à 8 jours, l’autre le 12 Septembre 2007, pour refus de se soumettre aux vérifications tendant à établir l’état alcoolique, d’une part, de la nature des faits reprochés et des circonstances ayant présidé à leur commission, il sera prononcé à leur encontre une peine d’amende de 1.000 Euros.

Concernant les constitutions de partie civile de R Q , P O et de S H épouse A, la réalité du préjudice subi par les parties civiles n’apparaît pas contestable, et la Cour estime disposer des éléments d’appréciation suffisants pour fixer à la somme de 1 Euro le montant des dommages et intérêts sollicités en réparation par R Q et P O et à la somme de 500 Euros le montant des dommages et intérêts devant être alloués à S H épouse A.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement et par décision contradictoire à l’égard tant des

prévenus que des parties civiles,

SUR L’ACTION PUBLIQUE

Infirme le jugement du Tribunal Correctionnel de F en date du 10 Février 2006, en ce qu=il a relaxé L K et N M des faits d’AA AB et avec menace à la liberté du travail et d’outrage à personne chargée d’une mission de service public,

Requalifie les faits reprochés en violences volontaires commises en réunion sans incapacité totale de travail,

Déclare L K et N M coupables du délit de violences commises en réunion, sans incapacité de travail, dont ont été victimes, le 2 Décembre 2004, à F, R Q, P O et S H épouse A.

Condamne L K et N M, chacun, à une peine de 1.000 Euros d’amende,

SUR L’ACTION CIVILE

Confirme le jugement rendu le 10 Février 2006 par le Tribunal Correctionnel de F en ce qu’il a déclaré recevables les constitutions de partie civile de R Q, P O et S H épouse A,

Déclare L K et N M entièrement responsable du préjudice subi, à raison des dites violences, par R Q, P O et S H épouse A,

Condamne conjointement et solidairement L K et N M à payer à R Q et à P O, la somme de 1 Euro, à titre de dommages et intérêts, et à S H épouse A, la somme de 500 Euros, à titre de dommages et intérêts,

Condamne L K et N M à payer, en cause d’appel, sous le visa de l’article 475-1 du Code de Procédure Pénale, la somme de 750 Euros à chacune des parties civiles,

Condamne L K et N M au paiement du droit fixe de procédure liquidé envers l’Etat à la somme de 120 Euros chacun.

La Cour informe tout condamné qu’en l’absence de paiement volontaire de sa part des dommages intérêts auxquels il a été condamné, et ce, dans un délai de 2 mois à compter du jour où la présente décision sera devenue définitive (voies de recours expirés), le recouvrement pourra, si la victime le demande, être exercé par l’Etat et qu’il sera alors exposé à une majoration des dommages intérêts pour couvrir les frais engagés par l’Etat.

La Cour informe la partie civile qu’elle a la possibilité d’obtenir une indemnisation du préjudice causée par l’infraction dont elle a été victime, ou d’obtenir une aide au recouvrement des dommages intérêts qui lui ont été allouées, en saisissant, selon les cas, la Commission d’indemnisation des victimes d’infraction (CIVI) ou le Service d’aide au recouvrement des victimes d’infraction (SARVI) dans un délai de 1 an ; que pour les conditions de ces aides, la partie civile peut demander conseil à son avocat ou se renseigner auprès du Bureau d’exécution des peines de la Cour d’appel (Cour d’appel 2e étage porte 229 ouvert les lundi, mercredi et vendredi de 14h à 17h).

Le Greffier, Le Président,

.

.

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