Cour d'appel d'Amiens, 5ème chambre cabinet b, 1er décembre 2010, n° 10/01833

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Amiens, 5e ch. cab. b, 1er déc. 2010, n° 10/01833
Juridiction : Cour d'appel d'Amiens
Numéro(s) : 10/01833
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Compiègne, 1er avril 2010
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

ARRET

SA GURDEBEKE

C/

A

@

FD/RJ

COUR D’APPEL D’AMIENS

5e chambre sociale cabinet B

PRUD’HOMMES

ARRET DU 01 DECEMBRE 2010

*************************************************************

RG : 10/01833

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD’HOMMES de COMPIEGNE en date du 02 avril 2010

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

SA GURDEBEKE

XXX

XXX

Représentée, concluant et plaidant par Me DECOCQ substituant la SELARL DECOCQ BERTOLOTTI TROUILLER VOISIN RAYMOND JAMET SALLE, avocats au barreau de COMPIEGNE

ET :

INTIME

Monsieur E A

XXX

XXX

XXX

Représenté par M. C D délégué syndical ouvrier dûment mandaté.

DEBATS :

A l’audience publique du 06 Octobre 2010, devant M. B, Président de chambre, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile et sans opposition des parties, ont été entendus :

— M. B, en son rapport,

— l’avocat en ses conclusions et plaidoirie et le délégué syndical en ses conclusions et observations .

M. B indique que l’arrêt sera prononcé le 01 Décembre 2010 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ,

GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme X

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

M. B en a rendu compte à la formation de la 5e chambre sociale, cabinet B de la Cour composée en outre de :

M. Z et Mme Y, Conseillers

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 01 Décembre 2010, l’arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par M. B, Président de Chambre, désigné par ordonnance de M. le Premier Président en date du 28 juin 2010 et Mme X , Greffier.

*

* *

DECISION :

M. E A, engagé le 22 octobre 2007 suivant contrat de travail à durée indéterminée par la SA GURDEBEKE, en qualité de gardien de déchetterie, au statut employé, niveau II, position I, coefficient 104 de Convention Collective Nationale des activités du déchet, a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable fixé au 14 avril 2009 puis licencié pour faute grave par lettre en date du 18 avril 2009 ainsi motivée :

« Les raisons de cette décision sont les suivantes :

— Nous avons eu connaissance le 6 avril 2009 que :

*vous refusiez de prendre les dépôts de certains clients, alors que les bennes de la déchetterie ne sont pas vides ;

*vous n’enregistriez pas les badges des clients.

— Nous avons pu remarquer au cours du mois de mars 2009 un laisser-aller concernant la propreté du site. Aucun rangement n’est établi, que ce soit à l’intérieur du local comme à l’extérieur.

Un tel comportement au préjudice de notre société est constitutif d’une faute grave, s’agissant de manquement grave à vos obligations professionnelles contractuelles… » ;

Contestant la légitimité de son licenciement et estimant ne pas avoir été rempli de ses droits au titre de l’exécution et de la rupture de son contrat de travail, le salarié a saisi la juridiction prud’homale le 18 juin 2009 ;

Par jugement du 2 avril 2010, le Conseil des Prud’hommes de Compiègne a dit que le licenciement de M. A était sans cause réelle et sérieuse, condamné la SA GURDEBEKE à lui payer les sommes de 1.575,84 € à titre d’indemnité pour défaut de procédure, 652,71 € en paiement de la mise à pied conservatoire, 65,27 € au titre des congés payés afférents, 1.575,84 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis, 157,58 € au titre des congés payés afférents, 9.455,04 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,1.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, 283,59 € au titre de l’indemnité de panier (casse-croûte), 400 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, débouté le salarié du surplus de ses demandes, débouté la SA GURDEBEKE de sa demande reconventionnelle ;

La SA GURDEBEKE a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 19 avril 2010 ;

Vu les conclusions enregistrées au greffe le 24 août 2010, soutenues oralement à l’audience du 6 octobre 2010, par lesquelles l’appelante, faisant valoir notamment que les fautes reprochées sont bien établies, demande à la Cour d’infirmer le jugement déféré, dire le licenciement fondé sur une faute grave et en tout état de cause sur une cause réelle et sérieuse, débouter M. A de sa demande fondée sur l’article L.1235-5 du code du travail, dire qu’il ne peut bénéficier d’une indemnité pour irrégularité de procédure, débouter M. A de ses autres demandes, notamment celle portant sur le prorata de 13e mois et sur la prime de panier, condamner M. A à lui payer la somme de 2.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions en date du 6 septembre 2010, reprises oralement à l’audience, aux termes desquelles M. A intimé, contestant avoir commis une quelconque faute, conclut au mal fondé de l’appel et la confirmation quasi intégrale du jugement, abandonnant sa demande au titre du 13e mois, mais sollicitant en plus une somme de 28,36 € au titre des congés payés sur la prime de panier, ainsi que la condamnation de la SA GURDEBEKE à lui payer les sommes de 4.727,52 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif et 1.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile ;

SUR CE, LA COUR

Sur la rupture du contrat travail

Attendu qu’il convient d’examiner la légitimité du licenciement et la qualification de faute grave au regard des motifs énoncés dans la lettre de notification de la rupture qui fixe les limites du litige et lie les parties et le juge ;

Attendu que la faute grave s’entend d’une faute d’une particulière gravité ayant pour conséquence d’interdire le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée limitée du préavis ;

Attendu que la preuve des faits constitutifs de faute grave incombe à l’employeur et il appartient au juge du contrat de travail d’apprécier au vu des éléments de preuve figurant au dossier si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont objectivement établis, imputables au salarié à titre personnel et à raison des fonctions qui lui sont confiées par son contrat individuel de travail, et s’ils ont revêtu un caractère de gravité suffisant pour justifier l’éviction immédiate du salarié de l’entreprise ;

Attendu que le premier grief concerne le refus par M. A de recevoir des dépôts de déchets aux motifs que 'les bennes n’étaient pas vides’ ; que plus précisément, l’employeur explique dans ses écritures qu’il reproche au salarié de ne pas avoir contacté en temps voulu la société pour faire procéder au vidage/remplacement des bennes pleines ; que le grief véritable n’est donc pas exposé clairement dans la lettre de licenciement laquelle fixe les limites du litige et que le salarié qui conteste au demeurant sa responsabilité, fait valoir justement que ce grief ne peut être invoqué utile pour justifier un licenciement disciplinaire ;

Attendu que la lettre de licenciement indique ensuite que l’employeur a eu connaissance le 6 avril 2009 que le salarié n’enregistrait pas les badges des clients ;

Que cependant, la SA GURDEBEKE verse au dossier un courrier en date du 26 janvier 2009, par lequel la communauté de communes du canton d’Attichy, son principal client, l’informait à nouveau que le responsable du site refusait de scanner les codes-barres des véhicules ;

Attendu que la faute grave ayant pour conséquence d’interdire le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée limitée du préavis, les faits invoqués comme constitutifs de faute grave doivent par conséquent être sanctionnés dans un bref délai or, en l’espèce, l’employeur ne justifie pas avoir fait une quelconque observation au salarié pendant plus de deux mois, avant d’entreprendre la procédure de licenciement ; que ce travail ne figure pas dans la liste des tâches, pourtant détaillée, constituant l’article trois du contrat travail ; que le salarié rappelle justement qu’il était seul sur le site et que son explication selon laquelle il ne lui semblait pas nécessaire de scanner les véhicules qu’il connaissait, apparaît plausible ;

Que le deuxième grief ne paraît donc pas sérieux ;

Attendu qu’il est enfin reproché à M. A un défaut d’entretien du site, constaté au cours de mars 2009 ;

Mais attendu qu’il résulte d’un courrier de la communauté de communes que la SA GURDEBEKE avait été informée de ce problème depuis le 15 octobre 2008 et que, comme pour le grief précédent, elle ne justifie pas avoir fait une quelconque remarque au salarié avant le mois d’avril 2009 ; qu’encore une fois, M. A réplique avec pertinence qu’il était seul pour assumer l’ensemble des tâches et aurait dû effectuer des heures supplémentaires pour nettoyer le site, ce que refusait l’employeur, puisque les dépôts étaient admis jusqu’à l’heure de fermeture ;

Que le troisième grief n’apparaît pas plus sérieux ;

Attendu que les faits reprochés au salarié apparaissent comme la conséquence directe du manque de moyens nécessaires à l’exécution du travail, mis à la disposition du salarié par l’employeur, de sorte qu’ils ne peuvent être utilement invoqués à l’appui d’une mesure de licenciement ; qu’il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qui concerne l’imputabilité de la rupture ;

Attendu que les dispositions du jugement relatives aux droits du salarié au titre du rappel de salaire pendant la période de mise à pied conservatoire, de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, non contestées s’agissant du quantum, seront confirmées ;

Attendu que justifiant d’une ancienneté inférieure à deux ans dans l’entreprise, M. A peut prétendre à l’indemnisation de l’illégitimité de son licenciement sur le fondement de l’article L 1235-5 du code du travail ;

Qu’en considération de sa situation particulière et eu égard notamment à son âge (38 ans), à l’ancienneté de ses services (18 mois), au montant de son salaire moyen (1.575 €), au fait qu’il est demeuré un an sans emploi, la cour dispose des éléments nécessaires pour évaluer la réparation qui lui est due à la somme de 7.000 € ; que le jugement sera réformé de ce chef ;

Attendu que M. A ne justifie pas d’un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi et qui ne soit déjà réparé par la somme susvisée ; qu’il doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts complémentaires, le jugement étant également réformé de ce chef ;

Attendu que la lettre de convocation à l’entretien préalable datée du 6 avril comporte en objet la mention suivante : 'convocation à un entretien préalable. Licenciement immédiat pour faute grave’ ; qu’elle est ensuite libellée comme suit :' Nous vous informons que nous sommes amenés à envisager à votre égard une mesure de licenciement immédiat pour fautes graves et, en conséquence, nous vous convoquons à un entretien préalable qui aura pour objet de recueillir vos observations sur les motifs qui vous seront exposés…' ;

Attendu que cette lettre comporte l’indication non équivoque qu’un licenciement est envisagé, conformément aux prescriptions de l’article L. 1232 – 2 du code du travail, et que la mention visée en objet précisant que licenciement envisagé est un licenciement immédiat pour faute grave ne signifie nullement que la décision de l’employeur est déjà prise et ne saurait avoir pour effet de vicier la procédure ; que le salarié doit être débouté de sa demande d’indemnité pour non respect de la procédure, le jugement étant encore réformé de ce chef ;

Sur la prime de panier

Attendu que les premiers juges ont fait une juste application des dispositions de l’article 3-9 de la convention collective relatif à l’indemnité de panier, ledit article ne subordonnant pas l’octroi de l’indemnité à la condition que le salarié effectue chaque jour au moins 5 heures de travail en une seule séance ; que le salarié peut prétendre au règlement de cette indemnité pour le travail effectué le samedi après-midi ; que le jugement sera confirmé de ce chef et complété par l’allocation des 10% de congés payés afférents, soit la somme de 28,36 € ;

Sur le 13e mois

Attendu que M. A ne remet plus en cause les dispositions du jugement qui l’ont débouté de sa demande au titre du 13e mois ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Attendu qu’il y a lieu de confirmer le jugement en ce qui concerne l’application de l’article 700 du code de procédure civile au profit du salarié ; qu’en revanche il ne paraît pas inéquitable de laisser à chaque partie la charge des frais exposés en cause d’appel, non compris dans les dépens ;

Que la SA GURDEBEKE aux torts de laquelle la rupture est prononcée, supportera les entiers dépens ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, par dispositions tant confirmatives qu’infirmatives et complétives,

Dit le licenciement de M. A dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la SA GURDEBEKE à payer à M. A les sommes de :

—  652,71 € bruts à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire,

—  65,25 € bruts au titre des congés payés y afférents,

—  1.575,84 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

—  157,58 € au titre des congés payés y afférents,

—  7.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  283,59 € à titre d’indemnité de panier,

—  28,35 € au titre des congés payés y afférents,

—  400 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Rappelle que les créances salariales (rappel de salaires, congés payés, indemnité compensatrice de préavis, indemnité de panier) portent intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et que les dommages et intérêts portent intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties,

Condamne la SA GURDEBEKE aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT.

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