Cour d'appel de Basse-Terre, 14 décembre 2015, n° 13/01718

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Basse-Terre, 14 déc. 2015, n° 13/01718
Juridiction : Cour d'appel de Basse-Terre
Numéro(s) : 13/01718
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Basse-Terre, 30 septembre 2013, N° 13/00109

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BASSE-TERRE

1re CHAMBRE CIVILE

ARRÊT N° 881 DU 14 DECEMBRE 2015

R.G : 13/01718-CP/MP

Décision déférée à la Cour : ordonnance de référé du tribunal de grande instance de BASSE-TERRE, décision attaquée en date du 01 octobre 2013, enregistrée sous le n° 13/00109

APPELANT :

Monsieur Z Y

XXX

97116 POINTE-NOIRE GUADELOUPE

représenté par Me Daniel DEMOCRITE, (TOQUE 46) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMEE :

Madame F X

XXX

XXX

représentée par Me Hugues JOACHIM de la SELARL JFM, (TOQUE 34) avocat au barreau de GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 19 Octobre 2015, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Catherine DUPOUY, présidente de chambre, présidente

Mme D E, Conseillère, rédactrice

Mme H I, Conseillère.

qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 14 décembre 2015.

GREFFIER :

Lors des débats : Mme B C greffière

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile. Signé par Madame D E, pour le président empêché, et par Mme B C greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte d’huissier du 7 mai 2013, Mme F X a fait assigner, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Basse-Terre, M. Z Y pour voir ordonner son expulsion de la parcelle cadastrée AY 249 sise sur le territoire de la commune de Pointe Noire.

Par ordonnance du 1er octobre 2013, le juge des référés du tribunal de grande instance de Basse-Terre a constaté le caractère non équivoque de la qualité de propriétaire de Mme X de la parcelle cadastrée AY 249 sise sur le territoire de la commune de Pointe Noire, constaté l’occupation de bonne foi de la remise agricole transformée à usage d’habitation sur la parcelle, ordonné l’expulsion de M. Y et de tous occupants de son chef passé un délai de neuf mois de la décision, au besoin avec l’aide et l’assistance de la force publique, sous astreinte à compter de cette date de 20 € par jour de retard, condamné M. Y aux dépens.

Le 1er octobre 2013, M. Z Y a interjeté appel de la décision.

Mme F X a constitué avocat et a conclu.

Par arrêt du 23 mars 2015, la cour constatant le lien de cette affaire avec le dossier (13/566), dans lequel la cour venait de rendre un arrêt, a révoqué l’ordonnance de clôture du 11 juillet 2014, rouvert les débats, laissé à Mme F X jusqu’au 15 juin 2015 pour conclure, laissé à M. Z Y jusqu’au 14 septembre 2015 pour répliquer, ordonné la clôture des débats au 28 septembre 2015, fixé le dossier à l’audience de plaidoirie du 19 octobre 2015, réservé la cause et les dépens.

*

Par dernières conclusions du 8 septembre 2015, M. Z Y demande à la cour de constater qu’il est un constructeur de bonne foi, de juger que cette qualité lui donne droit à indemnité et à droit de rétention, en conséquence, d’infirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a ordonné son expulsion et de condamner l’intimée à lui payer la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions du 12 juin 2015, Mme F X demande à la cour de confirmer l’ordonnance déférée en ce qu’elle a constaté son droit de propriété sur la parcelle AY 249, retenu que M. Y était occupant sans droit ni titre et a ordonné son expulsion, de l’infirmer sur le montant de l’astreinte qui sera portée à la somme de 200 € par jour de retard à compter de l’arrêt, et de l’infirmer en ce que l’ordonnance reconnaît que M. Y est occupant de bonne foi de la remise agricole transformée à usage d’habitation.

MOTIFS DE L’ARRÊT

M. Y soutient qu’il a travaillé à compter du début de l’année 1992 jusqu’au mois de mars 2013 pour Mme X en qualité de jardinier et d’homme à tout faire, moyennant « un salaire de misère versé sporadiquement ». Ce travail était selon les périodes déclaré ou dissimulé. En 2008, pour le remercier de ses services son employeur lui avait fait donation d’une portion de 700 m2 de terre à détacher de sa propriété l’Habitation caféière Beauséjour. Une fois les bornes posées par un géomètre, Mme X a indiqué qu’elle conservait le titre de propriété, afin d’effectuer les démarches pour obtenir un permis de construire pour l’édification d’une maison à usage d’habitation. Il expose que, c’est dans ces conditions, qu’il a entamé les travaux de construction d’une maison sur le terrain et qu’il a construit une petite maison de type créole de 70m2, dans laquelle il s’est installé avec son épouse et son fils.

En droit, pour s’opposer à la demande d’expulsion, il fait valoir que l’urgence n’est pas démontrée et qu’il existe des contestations sérieuses, en ce qu’à défaut de reconnaissance de sa qualité de propriétaire, il y a lieu de reconnaître sa qualité de constructeur de bonne foi en application de l’article 555 du code civil, en vertu duquel lequel il a droit à une indemnité et à un droit de rétention.

Mme X réplique que M. Y occupait une remise agricole située sur sa propriété gratuitement à titre de 'logement de fonction’ pour ses activités de jardinier et qu’il se maintient dans les lieux sans contrepartie financière alors qu’il n’occupe plus les fonctions de jardinier. Il est donc occupant sans droit ni titre et son maintien abusif dans les lieux lui cause un dommage imminent et un trouble manifestement illicite.

Elle précise qu’elle n’a jamais fait don de la parcelle AY 249 de 741 M2.

Mme X ne produit pas, en appel, son titre de propriété aux débats, mais, il n’est pas contesté par l’appelant qu’elle est propriétaire de la parcelle AY 249 et qu’aucun acte authentique portant donation de la parcelle au profit de M. Y n’est intervenu.

En vertu de l’article 909 du code de procédure civile :"Le président peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire."

Il résulte de ces dispositions que la condition de l’urgence n’est, en cas de trouble manifestement illicite, pas requise.

De même en est-il de l’absence de contestation sérieuse, cette condition ne s’imposant qu’en cas de demande de provision.

Il ressort de la description du bâtiment par la cour dans son arrêt du 23 février 2015 que celui-ci est une petite case en bois avec porte et fenêtres, mais sans eau et électricité.

Les pièces produites par M. Y révèlent qu’il a construit cette maison et qu’il l’occupait avec sa famille, selon Mme X, au titre « d’un logement de fonction », tel que cela résulte de ses écritures tant devant le juge des référés, que devant la cour.

Il est constant que M. Y n’est plus employé par Mme X, qu’elle a mis fin à la tolérance consistant en l’occupation de sa parcelle et que l’appelant l’occupe, donc, désormais sans droit ni titre.

Le trouble manifestement illicite désigne toute perturbation résultant d’un fait matériel ou juridique, qui directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit.

L’occupation sans droit ni titre d’une parcelle constitue un trouble manifestement illicite du droit de propriété auquel il convient de mettre fin.

Il ne peut être jugé que M. Y est constructeur de bonne foi au sens de l’article 555 du code civile, puisque: «le terme bonne foi employé par l’article 555 du code civil s’entend par référence à l’article 550 de ce code et ne vise que celui qui possède comme propriétaire, en vertu d’un titre translatif de propriété dont il ignore les vices.» (Cass. Civ. 3e, 29 mars 2000 n° 98-15734 ;15 juin 2010, n° 09-67178).

Tel n’est pas le cas en l’espèce de M. Y, qui ne dispose d’aucun titre translatif.

L’exigence d’un acte translatif de propriété est tempérée par la reconnaissance dans certaines hypothèses d’un titre putatif.

Les faits tels qu’ils les relatent auraient peut-être pu entrer dans ce cadre. En effet, il invoque sa croyance en l’existence d’un titre qui lui donnait un droit suffisant sur le terrain pour être légitime à y construire.

Quoiqu’il en soit, l’application de l’article 555 du code civil ouvre à certaines conditions droit à indemnisation (en présence ou ne l’absence de bonne foi) et n’ouvre nullement un droit à rétention.

Et, en tout état de cause, les factures produites aux débats ne permettent pas de prouver que M. Y a construit la case à ses frais, alors même que Mme X le conteste.

Ainsi, les factures non établie au nom de Y et/ou tardives (certaines de 2013) ne sont pas propres à prouver l’achat des matériaux par celui-ci et le décompte au nom de N-O Y de 2010 émanant de la quincaillerie Saint-Jean (pièce 15) d’un montant de 3.273 euros n’explicite pas les produits achetés.

Aucun droit à indemnité n’est, donc, incontestablement prouvé.

Dès lors, les demandes de M. Y visant à faire constater qu’il est un constructeur de bonne foi, et à faire juger que cette qualité lui donne droit à indemnité et à droit de rétention seront rejetées.

Il résulte de ce qui précède que la demande d’expulsion doit être accueillie.

C’est avec pertinence eu égard aux moyens limités de M. Y que l’astreinte a été fixée par le premier juge à la somme déjà conséquente de 20 € par jour de retard.

Succombant principalement à l’instance, M. Y en supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant, publiquement, contradictoirement et, en dernier ressort,

Confirme l’ordonnance frappée d’appel, sauf en ce qu’elle a constaté l’occupation de bonne foi d’une remise agricole transformée à usage d’habitation sur la parcelle.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Rejette la demande de M. Z Y visant à faire constater qu’il est un constructeur de bonne foi de la maison construire sur la parcelle cadastrée AY 249 sise sur le territoire de la commune de Pointe Noire et à faire juger que cette qualité lui donne droit à indemnité et à droit de rétention.

Rejette la demande de Mme F X en augmentation de l’astreinte.

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne M. Z Y aux dépens, qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile au profit de la Selarl JFM.

Et ont signé le présent arrêt

La greffière le président

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Textes cités dans la décision

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