Cour d'appel de Bordeaux, Cinquième chambre civile, 11 mai 2011, n° 10/03179

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, cinquième ch. civ., 11 mai 2011, n° 10/03179
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 10/03179
Décision précédente : Tribunal de commerce de Bordeaux, juge des référés, 12 avril 2010, N° 2010R00265

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE


PP

ARRÊT DU : 11 MAI 2011

(Rédacteur : Madame Béatrice SALLABERRY, Conseiller,)

N° de rôle : 10/3179

Monsieur C Z

Monsieur A-L Y

c/

Monsieur E X

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avoués

Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 13 avril 2010 par le juge des référés du Tribunal de Commerce de BORDEAUX (RG 2010R00265) suivant déclaration d’appel du 19 mai 2010,

APPELANTS :

1°) Monsieur C Z, demeurant XXX – XXX

2°) Monsieur A-L Y, demeurant XXX

représentés par la SCP Michel PUYBARAUD, avoués à la Cour, et assistés de Maître FLEURY de la SCP FRAIKIN & PETIT & FLEURY, avocat au barreau de BORDEAUX,

INTIMÉ :

Monsieur E X, né le XXX à XXX, demeurant XXX – XXX

représenté par la SCP CASTEJA CLERMONTEL ET JAUBERT, avoués à la Cour, et assisté de Maître A-jacques DAHAN, avocat au barreau de BORDEAUX,

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 16 mars 2011 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Robert MIORI, Président,

Monsieur Bernard ORS, Conseiller,

Madame Béatrice SALLABERRY, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Véronique SAIGE

ARRÊT :

— contradictoire,

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

OBJET DU LITIGE ET PROCÉDURE

Par contrat du 30 mai 2008 Messieurs E X C Z et A-L Y ont constitué la Sarl Eparc Assurances en vue de l’exercice de l’activité d’agent général d’assurances MMA.

Par acte du 18 X 2009 Monsieur X décidant de quitter la société, a cèdé la totalité de ses parts sociales à Messieurs Z et Y pour le montant de 127.842 €, payable en deux parties inégales la première d’un montant de 97.842 € dès la cession, la deuxième partie représentant le solde soit 30.000 € ne devant être réglée qu’après visa de la compagnie MMA, par Messieurs Z et Y 15.000 € chacun.

La compagnie d’assurance a donné son accord, Messieurs Z et Y se sont abstenus de verser les sommes dues et ce malgré mise en demeure.

C’est dans ces conditions que dans un premier temps Monsieur X a assigné Messieurs Z et Y devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Bordeaux aux fins d’obtenir le règlement du solde des sommes dues dans le cadre de la cession de ses parts à ces derniers.

Faisant droit à l’exception d’incompétence soulevée par Messieurs Z et Y, le juge des référés du tribunal de grande instance de Bordeaux, par ordonnance en date du 21 décembre 2009 s’est déclaré incompétent pour connaître de ce litige au profit du président du tribunal de commerce de Bordeaux, auquel le dossier a été transmis.

Par ordonnance de référé en date du 13 avril 2010, le président du tribunal de commerce de Bordeaux a :

Condamné Monsieur Z à payer à Monsieur X la somme de 15.000 € avec intérêts de droit à compter du 30 août 2009,

— Condamné Monsieur Y à payer à Monsieur X la somme de 15.000 € avec intérêts de droit à compter du 30 août 2009,

— Condamné Monsieur Z et Monsieur Y à payer chacun à Monsieur X la somme de 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— Débouté toutes parties du surplus de leurs demandes,

— Condamné Monsieur Z et Monsieur Y à supporter les dépens >>.

Par déclaration du 19 mai 2010 Messieurs Z et Y ont relevé appel de la décision.

Dans leurs dernières conclusions déposées le 17 septembre 2010, ils demandent à la cour de :

Réformer l’ordonnance entreprise,

Vu l’article 873 alinéa 2 du code de procédure civile,

Vu les contestations sérieuses,

— Débouter Monsieur X de ses demandes,

— Condamner Monsieur X à leur restituer la somme totale de 31.685,48 €,

— Condamner Monsieur X à leur payer à chacun la somme de 20.000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamner Monsieur X à supporter les dépens de première instance et d’appel dont distraction pour ces derniers au profit de leur avoué conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile >>.

Dans ses dernières conclusions déposées le 24 janvier 2011, Monsieur X demande à la cour de :

Confirmer partiellement l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a condamné Monsieur Z et Monsieur Y à payer chacun à Monsieur X la somme de 15.000 € avec intérêts de droit à compter du 30 août 2009,

— Condamner conjointement et solidairement Monsieur Z et Monsieur Y à lui payer :

* la somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts,

* la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamner Monsieur Z et Monsieur Y à supporter les dépens de première instance et d’appel dont distraction pour ces derniers au profit de son avoué conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile >>.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 2 mars 2011.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Messieurs Z et Y soutiennent que :

— Monsieur X a violé la clause de non concurrence à laquelle il est tenu en se faisant embaucher dès le 1er juillet 2009 par la société OCSO,

— qu’ils ont constaté dès le mois de X 2009 que plusieurs de leurs clients avaient été démarchés par Monsieur X et Monsieur B qui a été salarié de la Sarl Epac du temps où Monsieur X y travaillait et qui a refusé un contrat qu’ils lui ont proposé pour se faire embaucher lui aussi chez OCSO,

— ils précisent que l’enquête réalisée à leur demande par le cabinet Aquitaine Consultants a démontré que Monsieur X, travaille pour une entreprise exerçant une activité concurrente sur une zone définie à la clause de non concurrence qu’il a signée,

— ils estiment qu’en raison de ces circonstances l’obligation dont se prévaut Monsieur X à leur égard fait l’objet d’une contestation sérieuse qui ne peut pas être tranchée par le juge des référés, ils expliquent que Monsieur X n’a pas respecté ses obligations de sorte qu’ils contestent lui devoir le solde du prix de cession, puisque celui qui n’a pas respecté ses obligations ne peut pas prétendre exiger l’exécution des obligations de l’autre partie,

— ils estiment de ce fait posséder eux mêmes une créance à l’encontre de Monsieur X dont ils sont fondés à demander la compensation avec celle de ce dernier,

— ils ajoutent avoir saisi le tribunal de grande instance au fond pour obtenir la condamnation de Monsieur X à des dommages et intérêts pour violation de la clause de non concurrence.

Monsieur X fait valoir en réplique et dans le cadre de son appel incident :

— qu’il a été effectivement employé par la société OCSO dont le siège social est à Mérignac mais a des agences en Aquitaine et notamment à Bayonne et à Agen et que son contrat spécifiait qu’il exercerait ses missions sur le secteur Aquitaine hors le département de la Gironde, il n’a commis aucune violation de sa clause de non concurrence qui comporte une délimitation géographique,

— il précise que s’il s’est rendu au siège social de Mérignac comme l’a constaté le détective privé engagé par Messieurs Z et Y c’est pour participer à des formations et rendre compte, au siège social de son employeur, de ses missions exercées sur son secteur hors gironde,

— il précise qu’il ne travaille plus chez OCSO son contrat n’ayant pas été renouvelé à l’issue de sa période d’essai de 4 mois,

— il ajoute que les considérations faites concernant Monsieur B ne le concernent pas, celui-ci stagiaire dans le cadre d’une formation en alternance ayant été embauché par OCSO à l’issue de sa formation, ce qui est sans aucun lien avec lui, étant précisé que Monsieur B travaille toujours chez OCSO alors que lui même est au chômage,

— il estime que Messieurs Z et Y sont d’une particulière mauvaise foi et font tout pour échapper à leurs obligations et que leurs agissements lui ont causé un préjudice dont il demande réparation par l’octroi de dommages et intérêts, en effet alors qu’il était au cours de sa période d’essai chez OCSO ils ont délivré à son employeur une mise en demeure relative à la clause de non concurrence prétendument violée et qu’il remarque qu’alors tout se passait bien avec son nouvel employeur celui-ci n’a pas renouvelé son contrat à l’issue de la période d’essai, voulant éviter de se trouver pris dans un litige avec les appelants.

Il n’est pas contesté que le prix de la cession totale des parts de Monsieur X au profit de Messieurs Z et Y a été fixé au montant global de 127.842 €, soit 63.921 € à la charge de chaque cessionnaire, payable en deux parties inégales. La première d’un montant de 97.842 €, soit 48.921 € à la charge de chaque cessionnaire a été réglée lors de la cession, le cédant en donnant quittance aux cessionnaires. La deuxième partie représentant le solde soit 30.000 € ne devait être réglée par Messieurs Z et Y 15.000€ chacun, qu’après visa de la compagnie MMA avant le 31 juillet 2009 à défaut de quoi les parties ont prévu de se réunir pour définir un autre échéancier.

La compagnie MMA a donné son accord formalisé par écrit le 16 juillet 2009.

Messieurs Z et Y reconnaissent avoir refusé d’acquitter le solde du prix, malgré la mise en demeure reçue de Monsieur X, estimant que leur ancien associé a commis une violation de sa clause de non concurrence.

Celle-ci figurant à l’article 23 des statuts de la Sarl Epac est rédigée ainsi :

Lors de la cessation de ses fonctions au sein de la société de quelque manière que ce soit aucun gérant ne peut :

a) acquérir, posséder, exploiter,diriger ou administrer une quelconque entreprise ayant une activité similaire à celle qu’exploite la société et susceptible de lui faire concurrence ni s’y intéresser directement ou indirectement

b) présenter ou réaliser soit directement soit indirectement aucune opération d’assurances et plus généralement aucune activité identique ou similaire à celle exercée par la société pendant un délai de trois ans, et ce dans la zone d’activité de l’ensemble des points de vente de la société et en toute hypothèse dans un rayon de 50 km des points de vente de la société ni faire souscrire directement ou indirectement des contrats d’assurance auprès de la clientèle de la société, ceci à peine de dommages et intérêts au profit de la société sans préjudice du droit pour celle-ci de faire cesser la contravention.

En outre la violation de cette interdiction par un gérant associé est sanctionnée par une pénalité équivalente à la valeur ses droits sociaux cédés >>.

Cet article a été repris intégralement dans l’acte de cession de parts intervenu le 18 X 2009, entre Monsieur X d’une part et Messieurs Z et Y d’autre part.

Il est constant que Monsieur X a signé le 1er juillet 2009 un contrat de travail avec le Centre de Gestion et Conseil exerçant sous l’enseigne OCSO Assurances, dont le siège social est à Mérignac et qui possède deux

établissements secondaires un à Bayonne l’autre à Agen. Il ressort de son contrat qu’il a été engagé en qualité de conseiller de clientèle avec le statut de cadre pour exercer sa mission sur le secteur de l’Aquitaine hors Gironde, il est domicilié dans ce contrat à Saint A de Luz où il possède un appartement. A l’issue de la première période d’essai de quatre mois son contrat n’a pas été renouvelé.

Le contrat tel qu’il a été établi avec la mention du secteur d’activité excluant le département de la Gironde, respecte la clause de non concurrence retranscrite ci-dessus.

Pour établir que Monsieur X a malgré ces apparences violé la clause de non concurrence,ils versent aux débats un rapport d’enquête privé dont il ressort que Monsieur X a été vu au siège social d’OCSO les jeudi 17 et vendredi 18 septembre2009 ainsi que les lundi 21, mardi 22 et mercredi 23 septembre 2009.

Monsieur X réplique sans être valablement contredit que sa présence au siège social de son employeur s’explique par des sessions de formation et des comptes rendus de mission et réunions institutionnelles qui se déroulent normalement au siège de la société.

Les constations de l’enquêteur relatives à la visite de Monsieur X chez un client d’Epac la société Audavi n’apportent pas davantage la preuve d’une tentative de détournement de clientèle puisqu’il ressort de l’attestation produite par la gérante de cette société que Monsieur X s’est rendu chez elle en tant que client pour régler un problème de menuiserie sur une maison dont il a fait l’acquisition auprès d’Audavi.

Monsieur X verse aux débats les justificatifs de ses frais pour les mois de juillet,août septembre et octobre 2009, qui démontrent que ses déplacements professionnels ont eu lieu en dehors du département de la Gironde, ceci résultant de la production des tickets de péage d’autoroute et fiches d’hôtel et de restaurant.

Les appelants qui se plaignent d’une baisse de leur chiffre d’affaires et de la défection de leur clientèle dès le mois de X 2009, alors que l’acte de cession est daté du 18 X 2009 et l’embauche de Monsieur X chez OCSO du 1er juillet 2009, ne démontrent en aucune façon la réalité de cette baisse d’activité et encore moins qu’elle ne soit imputable à des agissements de Monsieur X contraires à ses engagements contractuels.

Ainsi aucune contestation sérieuse ne s’oppose à la légitime demande de Monsieur X de voir Messieurs Z et Y s’acquitter du reliquat des sommes dues dans le cadre de la cession.

Le fait que les appelants aient saisi le juge du fond ne fait nullement obstacle à ce que soit alloué à Monsieur X une provision sur la créance certaine qu’il possède à leur encontre. Ils ne peuvent se prévaloir d’une quelconque compensation avec une éventuelle créance de dommages et intérêts qu’ils seraient susceptibles d’obtenir contre Monsieur X dans le cadre de cette procédure toujours en cours.

La détermination de l’existence d’une faute commise par les appelants, consistant à porter à tort à la connaissance du nouvel employeur de Monsieur X une clause de non concurrence qui ne lui serait pas applicable, information qui lui aurait porté préjudice, relève de l’appréciation du juge du fond. Ainsi la demande de dommages et intérêts présentée par Monsieur X de ce chef se heurte à une contestation sérieuse.

L’ordonnance entreprise sera confirmée dans toutes ses dispositions.

Il sera en outre fait application au profit de Monsieur X des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Les appelants qui succombent seront condamnés aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

Y ajoutant

Déboute Messieurs Z et Y de toutes leurs demandes,

Dit n’y avoir lieu à référé en ce qui concerne la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur X,

Condamne Messieurs Z et Y à payer chacun à Monsieur X la somme de 1.250 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Messieurs Z et Y à supporter les dépens d’appel qui seront distraits conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Robert Miori, Président, et par Véronique Saige, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président

V. Saige R. Miori

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Textes cités dans la décision

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