Cour d'appel de Bordeaux, Deuxième chambre civile, 3 mai 2011, n° 10/04055

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, deuxième ch. civ., 3 mai 2011, n° 10/04055
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 10/04055
Décision précédente : Tribunal de commerce de Bordeaux, 10 mai 2010, N° 2009F1666

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE


ARRÊT DU : 03 MAI 2011

(Rédacteur : Madame Caroline Faure, Vice-président placé,)

IT

N° de rôle : 10/04055

XXX

c/

Monsieur C Y

Nature de la décision : AU FOND

XXX

Grosse délivrée le :

aux avoués

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 mai 2010 (R.G. 2009F1666) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d’appel du 29 juin 2010

APPELANTE :

XXX agissant en la personne de son représentant légal

domicilié en cette qualité au siège social 94 rue Notre Dame 33000 BORDEAUX

représentée par la SCP CASTEJA CLERMONTEL ET JAUBERT, avoués à la Cour assistée de Maître Michel GADRAT, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉ :

Monsieur C Y né le XXX à XXX

représenté par la SCP RIVEL-COMBEAUD, avoués à la Cour assisté de Maître Thomas RIVIERE de la AARPI RIVIERE-MORLON avocats au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 15 mars 2011 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-François BOUGON, Président,

Monsieur Philippe LEGRAS, Conseiller,

Madame Caroline FAURE, Vice Président,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé Goudot

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur C Y est associé de la SARL Webfutur. Celle-ci a connu des difficultés financières en 2001 et 2002.

Monsieur Y prétendant au remboursement des avances faites en compte courant a assigné la société Webfutur devant le tribunal de commerce de Bordeaux avec deux demandes distinctes l’une par acte du 22 novembre 2008 de 189.286 € et l’autre par acte du 15 octobre 2009 de 50.296,34 €.

Le tribunal de commerce de Bordeaux, par jugements des 16/06/2009 et 11/05/2010, a condamné la société Webfutur à payer à monsieur C Y respectivement les sommes de 138.989.56 €, avec intérêts calculés au taux légal à compter du 28/04/2008 et de 50.299.44 € avec intérêts calculés au taux légal à compter du 15/10/2009. Et il a alloué au demandeur pour chaque instance une somme de 1.500€ pour frais irrépétibles.

Pour statuer ainsi, le tribunal va retenir que monsieur C Y rapporte la preuve de ses abandons de créances par la production du rapport de gestion du 31/12/2001, du contrat signé le 30/12/2002 et du procès-verbal de l’assemblée générale du 30/12/2002. Il a calculé la somme à rembourser conformément aux dispositions contractuelles.

*

La Sarl Webfutur a relevé appel de ces décisions dont elle poursuit la réformation en toutes leurs dispositions. Elle conclut au débouté des prétentions de l’intimé à qui elle réclame deux sommes de 5.000 € pour frais irrépétibles.

Au soutien de ses recours, elle fait valoir que :

— l’intimé ne justifie pas avoir jamais versé en compte courant au profit de la société Webfutur les sommes dont il demande aujourd’hui le remboursement ;

— si les abandons de créances étaient justifiés il faudrait encore à l’intimé, qui réclamerait restitution des sommes abandonnées, prouver l’accord de l’assemblée générale pour la condition du retour à meilleure fortune dont il se prévaut ;

— sont des faux la convention d’abandon de compte courant du 30/12/2002 et le procès-verbal du 30/12/2002 qui n’est pas signé et qui rend compte d’une assemblée à laquelle nul n’a jamais été convoqué ;

— les attestations, irrégulières en la forme, produites aux débats par l’intimé sont des faux témoignages.

Monsieur C Y, intimé, conclut à la confirmation des décisions entreprises et sollicite deux sommes de 4.000 € pour frais irrépétibles. Il fait valoir que:

— son apport en compte courant n’est pas sérieusement discutable puisqu’il s’agissait d’une des conditions mises à son entrée dans la société,

— la production des extraits bancaires démontre que les sommes ont bien été versées à la société Webfutur,

— la preuve de la convention d’abandon avec clause de retour à meilleure fortune est rapportée par l’ensemble des documents versés aux débats (pv du 30/12/2002 en original, convention d’abandon de créances en original, convention d’abandon avec clause de retour à meilleure fortune de monsieur Y, en original),

— la nullité de la clause de retour à meilleure fortune emporterait nullité de l’abandon,

— il est en droit d’obtenir la capitalisation des intérêts.

Subsidiairement, il sollicite que la société Webfutur soit condamnée à produire l’intégralité de ses grands livres et comptes bancaires sur les périodes d’apport en compte courant et d’abandon et qu’il soit ordonné à l’expert comptable de la société et aux conseils rédacteurs des actes pour la société appelante en 2003 de produire les documents en leur possession et de faire connaître s’ils ont eu connaissance à cette date de la convention et des termes s’y rapportant.

SUR CE :

Attendu qu’en raison de la connexité des affaires, il convient d’ordonner la jonction de la procédure enrôlée sous le n°10/04055 à la procédure enregistrée sous le n°0904706 ;

Attendu qu’il convient de relever au préalable que monsieur C Y a bien effectué des apports en compte courant tel que cela ressort des relevés bancaires de la Banque Populaire pour des opérations par lettres de change, le 10 janvier 2001 pour un montant de 400.000 F, le 2 avril 2001 pour 200.000 F, le 30 avril 2001 pour 200.000 F, le 1er juillet 2001 pour 200.000 F et le 30 septembre 2001 pour 400.000 F et ce, en application d’une convention, portant sur la promesse de cession de parts sociales et de divers engagements, signée le 22 décembre 2000 entre monsieur C Y, la société Webfutur représentée par ses gérants, monsieur E X et monsieur E B, et monsieur E X agissant également en qualité de gérant de la société Best Gourmet Catalog ; que la réalité de ces apports est ainsi rapportée ;

Attendu qu’un rapport spécial de la gérance sur les opérations visées par l’article L 223-19 du code de commerce, à savoir les conventions passées entre la société et l’un de ses gérants ou associés, a été signé en annexe de l’exercice clos du 31 décembre 2001 par les deux gérants, messieurs X et B ; que dans ce document, au paragraphe relatif à monsieur Y, il est précisé que son compte courant s’élève à 1.144.043 F et qu’il l’a abandonné à hauteur de 100.000 € avec 'clause de retour à meilleure fortune’ ; que ce rapport a été visé dans le procès-verbal d’assemblée générale du 21 juin 2002 ; que l’annexe au bilan et au compte de résultat de l’exercice 2001 fait figurer sous la rubrique 'faits caractéristiques de l’exercice’ : 'abandon de compte courant pour 100.000 €' ;

Attendu qu’un procès-verbal d’assemblée générale ordinaire en date du 30 décembre 2002 relate la tenue de cette assemblée qui pour objet de délibérer, sous la présidence de monsieur B, gérant associé, sur des projets d’abandon de créance avec clause de retour à meilleure fortune ;

Attendu que la société Webfutur argue de faux ce procès-verbal ; que cependant il n’a été diligenté aucune procédure pénale à cet égard ; que le procès-verbal produit par monsieur Z comporte huit signatures pour cette assemblée sans qu’il soit possible à la cour d’attribuer chacune des signatures à tel ou tel associé ; que tout au plus il peut être constaté que la société avait sept associés et que monsieur X était présent non seulement à titre personnel mais également comme gérant de la société Best Gourmet Catalog ; que le fait que le registre des assemblées générales comporte le même procès-verbal, non signé en ses pages 23 et 24 ne permet pas de suspecter l’existence d’un faux dès lors que les procès-verbaux des assemblées générales du 1er juin 2001 jusqu’au 1er septembre 2003 cotés dans le registre ne comportent aucune signature ;

Attendu que la contestation de la date effective de l’assemblée générale est sans incidence sur le fond du litige dès lors qu’elle révèle la volonté des associés de l’époque, dont celle de monsieur A, gérant de la société depuis 2004, et donc la volonté de la société, d’embellir les comptes de l’exercice 2002, sans risque pour la société; que les mails produits par la société Webfutur de 2003 tendant à démontrer que le procès-verbal est antidaté ne sont pas suffisamment probants s’agissant de pages uniques sans moyen de contrôler leur provenance, leur destination leur date et leur contenu même si les mentions habituelles d’expédition et de réception du mail y sont inscrites ;

Attendu que le procès-verbal d’assemblée générale du 30 décembre 2002 est suffisamment explicite sur l’engagement de la société concernant l’abandon de créance de monsieur Y et sur la réalité de la clause de retour à meilleure fortune; qu’en effet ce procès-verbal rappelle en préalable que monsieur Y a déjà consenti au profit de la société un abandon de créance sous condition de retour à meilleure fortune pour la somme de 100.000 € ; que la première résolution est ensuite ainsi rédigée ' l’assemblée générale autorise la conclusion par la société d’une convention d’abandon de créance sous condition de retour à meilleure fortune, aux termes de laquelle, monsieur Y décide d’abandonner la créance qu’il détient sur la société à hauteur de 89.286 €, sous condition de retour à meilleure fortune, savoir constatation par les capitaux propres de la société pour un montant égal à 50.000€. Toute somme qui sera par conséquent enregistrée dans les capitaux propres au-delà de 50.000 € sera à nouveau inscrite dans les livres de la société comme une dette au profit de monsieur C Y et ce, dans la proportion de 96,13 % de cette somme, plafonnée au montant de son abandon total ressortant à 189.286 €'.

Attendu que ce procès-verbal d’assemblée générale a donc consacré la clause de retour à meilleure fortune au profit de monsieur Y ; que ce procès-verbal est confirmé par la convention signée le même jour entre la société Webfutur, représentée par monsieur B, et monsieur Y selon laquelle il est rappelé que le compte courant de monsieur Y s’élève à la somme de 156.523,91€; qu’il a déjà consenti le 30 décembre 2001 à un abandon de créance à hauteur de 100.000 €, sous condition de retour à meilleure fortune, et qu’il décide d’abandonner à nouveau une créance, cette fois de 89.286 €,sous condition de retour à meilleure fortune ;

Attendu, enfin, que l’annexe au bilan et au compte de résultat de l’exercice clos le 31 décembre 2003 ne mentionne aucun fait caractéristique de l’exercice mais rappelle sous la rubrique 'abandons de comptes courants ' que monsieur Y a abandonné 100.000 € en 2001, 89.286 € en 2002 soit une somme totale de 189.286€ avec une clause de retour à meilleure fortune ;

Attendu que la violation des dispositions des articles L 223-27 du code de commerce relatives aux convocations des assemblées générales et des dispositions des articles R 221-3 et R 223-24 du code de commerce relatives à la signature des assemblées générales n’est pas imputable à monsieur Y, associé minoritaire, mais à la société Webfutur qui ne peut donc se prévaloir de ses propres carences ;

Attendu que le tribunal était donc fondé à la lecture de ces documents à juger que monsieur Y avait fait, au profit de la société dans laquelle il était associé abandon de créance avec clause de retour à meilleure fortune à hauteur de la somme de 189.286€;

Attendu que le retour à meilleure fortune de la société Webfutur n’est pas contesté par les parties et ne fait pas l’objet de discussion en cause d’appel pas plus que le calcul du remboursement à hauteur de 96,13% au-delà de la somme de 50.000€ ; que les décisions déférées seront donc confirmées dans toutes leurs dispositions ;

Attendu qu’il sera alloué à monsieur Y une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

Vu les ordonnances de clôture du 15/02/2011,

Déclare les appels recevables,

Ordonne, pour connexité, la jonction de la procédure enrôlée sous le n° 10/04055 à la procédure enregistrée sous le n° 09/04706,

Confirme les jugements déférés en toutes leurs dispositions,

y ajoutant :

Condamne la société Webfutur à payer à monsieur C Y la somme de

4.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Webfutur aux dépens dont distraction en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Jean-François Bougon et par Hervé Goudot, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

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Cour d'appel de Bordeaux, Deuxième chambre civile, 3 mai 2011, n° 10/04055